Recherche
Plan du site
   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles > N° 846 - juin 1986

 

Le site est passé à sa troisième version.

N'hésitez-pas à nous transmettre vos commentaires !
Merci de mettre à jour vos liens.

Si vous n'êtes pas transferé automatiquement dans 7 secondes, svp cliquez ici

 

 

< N° Précédent | | N° Suivant >

N° 846 - juin 1986

Un monde de fous... dangereux   (Afficher article seul)

Sombre printemps   (Afficher article seul)

L’autre terrorisme   (Afficher article seul)

Agriculture et profit   (Afficher article seul)

Comment l’industrie pharmaceutique vend ses produits   (Afficher article seul)

Et si les plombages dentaires étaient dangereux ?   (Afficher article seul)

Sur la C.E.E.   (Afficher article seul)

Sur le distributisme et le mondialisme   (Afficher article seul)

Lu, vu, entendu   (Afficher article seul)

^


Un monde de fous... dangereux

par M.-L. DUBOIN
juin 1986

La catastrophe de Tchernobyl est lourde d’enseignements et fera, pour le moins, couler beaucoup d’encre. Loin de moi, par conséquent, l’idée de faire ici le tour d’une aussi grave question !
Mais tout de même, est-ce que la première réflexion que suscite l’annonce que le coeur d’une centrale nucléaire est en fusion, et qu’un nuage chargé de matières radioactives se ballade au gré des vents, n’est pas de se dire que les craintes exprimées par les écologistes n’étaient pas sans fondements et qu’il importe de tenir compte des risques que fait courir aux populations la prolifération de telles centrales, ou, pire encore, des usines de retraitement du type de celle de la Hague ?
Eh bien NON. Le mot d’ordre officiel est d’affirmer qu’en France, toutes les précautions ont été prises, qu’il n’y a aucun souci à se faire puisque de hauts responsables veillent sur notre sécurité. L’opinion publique est suffisamment conditionnée pour admettre que les écologistes sont des marginaux, donc des incompétents dont les objections ne peuvent faire le poids en regard des certitudes affirmées en haut lieu.
Les raisons de ce conditionnement de l’opinion, que nous dénonçons si souvent (*) sont ellesmêmes, évidemment, passées sous silence par les grands médias. Au point qu’il faut signaler comme un évènement remarquable le fait que le «  Nouvel Observateur » a eu récemment (**) le courage de rendre la parole à celui qui fut naguère un de ses meilleurs journalistes, Michel Bosquet, et qui dénonce le rôle que joue la centralisation de l’Etat au niveau des décisions sur les choix énergétiques « En France, souligne Michel Bosquet, il y a un accord tacite entre l’industrie, l’Etat et les créateurs de technologie pour exclure toute forme de débat sur ces choix, y compris au Parlement. Ce verrouillage s’explique de façon assez curieuse : un même corps d’Etat, celui des Mines (***) impose sa loi dans l’industrie privée, dans les secteurs nationalisés et dans les cabinets ministériels ! Vous avez les mêmes gens comme décideurs là où s’élabore la technologie, là où elle s’applique et là où se prennent les décisions politiques... Il parait difficile de faire bouger quoi que ce soit... »
Donc, on ne remet pas en cause la politique nucléaire. Mais, par contre une mesure d’une très grande fermeté a été décidée : celle d’interdire l’importation de toute production agricole d’où qu’elle vienne, si c’est d’un pays de l’Est. Sans nuance. Pas question, par exemple, de mesurer le taux de radioactivité de ces productions pour savoir si elles ont été contaminées ou non.
Quelle aubaine, en effet, qu’une pareille occasion ! C’est d’abord des milliers de camions chargés de vivres qui sont ainsi immobilisés jusqu’à ce que leurs chargements soient devenus impropres à la consommation. Et puis un embargo général ! De mémoire de producteur agricole européen, se lamentant depuis des années et des années, de ne pas pouvoir vendre avec assez de profit toute sa production, dite par conséquent « surabondante  », on n’avait pas osé rêver un moyen aussi radical de MAINTENIR LA RARETE, donc de soutenir les cours ! Un nuage radioactif apparait ainsi presque aussi rentable qu’une guerre ! Les Américains ne sont d’ailleurs pas en reste : dès l’annonce de la montée possible de la radioactivité en Ukraine, région grosse productrice de blé, de grosses demandes de grains ont fait grimper le prix du blé à la Bourse des Céréales  !
Ce monde, qui a les moyens d’être merveilleux, est aussi fou que dangereux. Et il le restera aussi longtemps que la RENTABILITE, dans toute entreprise économique, prévaudra sur son ASPECT HUMAIN.

* voir par exemple dans « les affranchis de l’an 2000 » le passage reproduit ci-dessous.
** dans son numéro 1122 du 9 Mai
*** ajoutons ici : ce même corps des Mines qui crut naguère aux « avions renifleurs... »

^


Sombre printemps

par A. PRIME
juin 1986

En France, la bataille des législatives, qui durait... depuis 5 ans, est enfin terminée : la droite est revenue au pouvoir, avec, dans ses bagages, une extrême droite non négligeable. Les mesures sociales vont en prendre un sacré coup ; les mesures socialisantes - nationalisations, autorisation de licenciements etc... - vont disparaître. La privatisation des chaînes publiques de Télé (alors que nous avons déjà reçu notre redevance à payer pour l’année à venir, un comble !) est pour bientôt.
Bref, la France rentre - enfin - dans la mouvance libéraloaméricaine comme le Japon et les autres grands pays européens Allemagne, Angleterre, Italie. Le reaganisme triomphe.
Triomphe ? Voire.
Depuis la réunion des « cinq » à New York le 22 septembre 1985, le dollar a baissé d’un tiers. Dans le même temps le prix du baril de pétrole a été divisé par trois. Nombreux sont les chantres capitalistes qui proclament que les conditions sont réunies pour une reprise mondiale. Je viens de lire - une fois de plus - sous une plume« experte  » que « la crise » était finie, même si la « MUTATION » doit encore se poursuivre jusqu’aux années 1990 (du reste de plus en plus nombreux sont les économistes et les politiques qui réfutent la notion de crise pour parler d’une « longue mutation de 15 à 20 ans » due aux prodigieuses découvertes technologiques etc...). La crise est finie ?
" Les bourses prospèrent, enregistrant toujours de nouveaux records : en 1985, + 107 à Milan,
+ 93 à Zurich, + 74 à Francfort, + 46à Paris. Le "Matin" du 27 avril publie des courbes édifiantes sous le titre : « Les bénéfices des entreprises en hausse partout ».
" L’Allemagne prévoit pour 1986 une inflation zéro, voire négative et une croissance de 4% : presque un chiffre des 30 glorieuses.
" Le Japon, par contre, s’affole, car 30 % de ses exportations se font vers les USA. Sur les 46 milliards de dollars d’excédent commercial, 39 proviennent des seuls USA. La baisse d’un tiers
du dollar, qui rend plus compétitifs à l’exportation les produits américains, risque d’avoir une conséquence grave sur la production japonaise. Et lorsque le dollar baisse trop par rapport au yen, c’est la panique : le Japon tente de soutenir le dollar à tour de bras. Sans grand succès.
" La France de CHIRAC va sortir de la « situation catastrophique  » dans laquelle les socialistes l’avaient mise. Songez moins de 5 % d’inflation, des entreprises nationalisées qui ont presque toutes retrouvé leur équilibre, une police augmentée et modernisée ; mais 3 millions de chômeurs (chiffre de... l’ancienne opposition). Ce sujet a même « paru » la préoccupation essentielle du Premier Ministre dans l’émission « l’Heure de Vérité » du 23 avril les patrons pourront licencier aisément, donc ils embaucheront ; et, comme ils récolteront un tas d’avantages - exonération de charges sociales, diminution des impôts sur les bénéfices industriels et commerciaux (45 % au lieu de 50 %), rentrées sans pénalités des capitaux planqués à l’étranger, suppression de l’IGF -, ce sera l’EUPHORIE, LA CROISSANCE, L’EMPLOI... On se bouscule au portillon pour racheter les assurances, ces vaches à lait...
Il n’y a que la foi qui sauve attendons !
" Et le Tiers Monde ? Son endettement dépasse 1 000 milliards de dollars (380 pour la seule Amérique Latine). Le Mexique est en faillite virtuelle. Dito le Nigéria. Le Guatemala, qui vient de sortir d’une dictature militaire de 30 années soutenue par les USA, compte 65 % d’analphabètes, 40 à 50 % de sans travail. De l’aveu de son nouveau président, 95 des 7 500 000 habitants manquent du nécessaire. Tout comme les habitants de la Barbade, généreusement « libérés  » par les USA de leurs « tyrans marxistes », qui ne comptent que 40 % de chômeurs ! Pour alléger la dette des pays du Tiers Monde, il faudrait au moins réduire les taux d’intérêts (actuellement 9,5 %). Conférence en janvier 1986 à Londres sur ce sujet : échec total. Et ceux à qui le FMI prête des fonds, avec des conditions drastiques, peuvent à peine, la plupart du temps, avec les bénéfices de leurs exportations, payer les intérêts de leur dette. Pauvre Tiers Monde. Même pour les pays producteurs de pétrole, la belle vie est terminée.
" Les USA. Nous les avons gardés pour la bonne bouche. Comme nous l’avons déjà signalé dans la G.R., pour faire face à ses énormes déficits budgétaires cumulés depuis plusieurs années, le gouvernement doit avoir recours aux capitaux étrangers (1) l’épargne intérieure étant insuffisante. C’est ce qui explique et justifie le niveau élevé des taux d’intérêt. La baisse de ces derniers devra être d’autant moins rapide et moins forte que le dollar, en chutant, a perdu de son attrait de nombreux capitaux se réorientent vers le Mark, le Yen ou le Franc Suisse. Au cours des dernières années, la dette US s’est accrue plus vite que celle du Tiers Monde. Les craintes d’un effondrement du dollar sont présentes à l’esprit de tous les dirigeants du monde « libre ». Même Reagan admet - enfin - la nécessité d’une refonte du système monétaire international. Cependant la primauté indécente du dollar, acquise à Bretton Woods, est le meilleur atout des USA : la FED, en cas de risque d’insolvabilité, a le pouvoir de créer autant de dollars que nécessaire. Et quant au colossal déficit commercial (aux colossaux déficits, devrions-nous dire, car cela dure depuis des années), il suffit de faire fonctionner la planche à dollars pour l’éponger ; ce qui est un scandaleux privilège pour le pays de plus riche et le plus puissant du monde. Car les USA restent le plus puissant, hélas ! Ils l’ont montré, il y a deux ans, en envahissant la Barbade et, tout récemment, en bombardant la Lybie. Ce qui est grave dans cet acte de « gendarme du monde » que s’est octroyée l’Amérique de Reagan, sans même tenir compte des avis de ses partenaires, c’est le précédent créé pour le prétexte - justifié ou non - de base du terrorisme. Reagan, en effet, quelques jours après le raid, dévoilait cyniquement ses intentions : « J’espère que tous les membres du Congrès réfléchiront au fait que les sandinistes ont entraîné, soutenu, dirigé et pourvu en refuges les terroristes. lis sont, en ce sens, en train d’essayer de construire une Lybie à notre porte et ce sont les « contras » les combattants de la liberté qui les en empêchent ». Combien de gens ont entendu ou lu et mesuré la gravité de ce propos, l’hypocrisie et la menace qu’il contient.
Le monde est mal parti. Il continue à s’enfoncer dans la misère : la société duale - miséreux et chômeurs d’un côté, riches, toujours plus riches de l’autre - est en train de s’installer au niveau planétaire sans que l’économie périclite comme dans les années 30 ; la guerre, les guerres sont de plus en plus nombreuses et meurtrières. Bien sûr, cela n’empêche pas la vie de continuer, les oiseaux en ce printemps de nous réveiller par leurs cris de joie exubérante. Pour quand un embryon d’Economie Distributive ? Il semble brusquement. en ce printemps 1986, que la cupidité et la folie des principaux dirigeants aient fait reculer cet espoir. A moins qu’un jour tous ces déshérités, tous ces chômeurs...
Mais sans doute faut-il être distributiste pour optimisme garder, quand on constate que, d’après une enquête RMC-Libération faite le 16 mars auprès de 4229 électeurs venant de voter, 47 % des chômeurs ont voté à droite (14 % pour Le Pen) contre 46 % pour le PC-PS ; tout comme les chômeurs Anglais avaient voté à plus de 50 % pour madame Tatcher au lendemain de la guerre des Malouines.

(1) Les intérêts payés à l’étranger ont fini par dépasser les entrées. de capitaux frais. La dette US atteint 50 % du PIB et les intérêts représentent 5 % de ce PIB.

^


L’autre terrorisme

par F. LECHAT
juin 1986

Si un étranger commande en France 20 mètres d’une marchandise ou 50 kilos d’une autre, il recevra, que ce soit quelques jours ou quelques semaines plus tard, l’équivalent exact, en mesures en usage chez lui, du nombre de mètres (étalon de longueur) ou de kilos (étalon de poids) attendus. Mais il ne réglera pas dans sa monnaie nationale l’équivalent exact du prix fixé en francs. Le Français, lui, quel que soit le jour du règlement, bénéficiera du prix affiché. Le Franc est en effet, n’en déplaise à maints économistes, l’étalon de valeur des marchandises et des services, et les prix ne varient qu’en fonction d’une baisse ou d’une hausse intérieure des dits prix.
Si les étrangers ne paient jamais, d’un jour à l’autre, le même prix en francs, dans leurs monnaies respectives, c’est parce que leurs compatriotes, boursiers et spéculateurs, font chaque jour varier, par leurs ventes et achats, la valeur du franc, cet étalon ainsi devenu marchandise... et variable. La réciproque est vraie.
Personne, jamais, n’a trouvé à redire à cette aberration. Chacun suit anxieusement le cours de sa monnaie, qui fut longtemps basée sur l’or. Mais même dans les pays où ce n’est plus le cas, le cours de l’or est suivi attentivement (la télévision ne nous en prive pas) puisque cette référence, ancienne ou actuelle, cet étalon, est aussi coté, et donc variable. Quant au mythe de ce métal dit précieux, mais utile aux seuls bijoutiers et à quelques laboratoires...
Chacun trouve donc normal que dévaluations et réévaluations se succèdent, que le marché soit aussi variable que l’humeur des « spécialistes », qu’une monnaie, le dollar (devenu inconvertible en or, et dont la valeur varie chaque jour - la télévision nous renseigne aussi là-dessus), remplace l’or comme référence-étalon, que le monde soit à la merci de cette folie quotidienne et permanente.
Concernant notre pays, dont la sécurité est le souci de tous et l’indépendance le cheval de bataille des successifs gouvernements, nous regrettons de dire que l’une et l’autre sont, à chaque heure de chaque jour ouvrable, à la merci de ces spéculations  : si un geste quelconque d’un gouvernement « avancé » heurtait les principes immuables de la finance internationale (cf le Chili), le franc, dans l’heure suivant le geste, ne vaudrait plus rien. Voilà sur quoi repose l’indépendance de la France.
Nous croyons devoir signaler que, pour éviter une éventuelle catastrophe, il suffit de décider que le franc est retiré des cotations et qu’il est réservé à la consommation intérieure. Ceci n’a rien de révolutionnaire car trois pays d’Afrique du Nord et tous les pays de l’Est ont une monnaie dite inconvertible, c’est-à-dire non cotée sur les places étrangères. Grâce au système dit de la compensation, ils assurent leurs échanges avec l’extérieur... et leur crédibilité. Et aucune manoeuvre spéculative extérieure ne peut porter atteinte à leur sécurité.
L’Ecu aurait pu être le recours à la raison... s’il n’était lui aussi variable puisque sa valeur est calculée à partir d’un « panier » de devises variables. Alors, quitte à revenir sur des engagements divers et imprudents, quel gouvernement aura assez de lucidité et de courage pour proposer enfin au Parlement cette déclaration d’indépendance - et de sécurité financière - de la France, dont la stabilité est plus exposée à ce type de terrorisme qu’à l’autre ?

^


L’étude de l’opposition entre la méthode « mécaniste » et la méthode « holistique », publiée le mois dernier dans ces dossiers, à partir du livre de Fritjof CAPRA intitulé « LE TEMPS DU CHANGEMENT », a intéressé de nombreux lecteurs. Nous la poursuivons ici par les conséquences de cette opposition dans deux domaines vitaux : la médecine et l’agriculture et par un passage sur les industries pharmaceutiques aux Etats-Unis

Agriculture et profit

par M.-L. DUBOIN
juin 1986

L’opposition entre l’approche mécaniste et l’approche holistique se manifeste parallèlement dans la médecine et dans l’agriculture. Un fermier, comme un médecin, s’occupe d’organismes vivants, puisqu’un sol fertile est vivant, il est un écosystème composé de milliards d’organismes par centimètre cube, dans lequel les substances essentielles à la vie évoluent par cycles (plantes - animaux - bactéries du sol - plantes) et qui réagissent entre eux. Comme pour la santé d’un être humain, le souci doit être de maintenir un équilibre entre les parties, équilibre qui inclut la complexité du tout, des relations entre les éléments et l’ensemble, et qui est destiné à éviter un développement pathologique d’un des éléments : à la pratique holistique de la médecine correspond donc ce que nous appelons l’agriculture biologique. Tandis qu’à l’opposé, le traitement mécaniste du sol par les agriculteurs correspond au même développement capitaliste de l’industrie pétrochimique que le traitement mécaniste des malades par les médecins, pour l’industrie pharmaceutique.
Tandis que ces industries se développaient, les banques, avec l’appui de la publicité, faisaient pression sur les agriculteurs pour les convaincre qu’il gagneraient beaucoup plus d’argent en traitant la terre par utilisation massive de fertilisants et de pesticides chimiques, et en plantant sur de grands espaces une seule culture RENTABLE. Ce nouveau style te culture a favorisé les grandes coopératives agricoles possédant de gros capitaux. Ceci a poussé les agriculteurs à s’endetter, ce qui les condamnait à continuer dans le même sens ou à abandonner... et a obligé les fermiers qui travaillaient en famille en s’en tenant aux méthodes traditionnelles à abandonner la terre. Et c’est ainsi, souligne Capra que « trois millions de fermes ont disparu, depuis 1945, aux Etats-Unis, obligeant les familles à augmenter, dans les villes, les masses de chômeurs victimes de la « Révolution Verte ».
La culture dans son ensemble a été « transformée en une immense industrie dans laquelle les agriculteurs ont perdu leur liberté : ils ne cultivent plus ce que le sol leur indique ou ce dont les gens ont besoin ». Ils cultivent concluons-nous ce que commandent la RENTABILITE CAPITALISTE de leurs entreprises et les banques qui les soutiennent : « Les corporations géantes ont transformé l’Amérique rurale en une colonie ».

Des chiffres :
Depuis 1945, l’emploi des fertilisants chimiques a été multiplié par 6 dans les fermes américaines, celui des pesticides par 12, et 60 % des coûts alimentaires servent à l’achat de pétrole. De plus, à chaque développement de cette « industrie agricole », l’endettement des fermiers ne cesse d’augmenter. Ajoutons que certains produits chimiques, trop dangereux, ayant été interdits aux Etats-Unis, les compagnies pétrolières les vendent au Tiers-Monde (... nous les consommons donc dans les fruits et légumes importés de ces pays), tout comme les compagnies pharmaceutiques y vendent les médicaments jugés dangereux dans les pays « développés  ».

Là encore, l’analyse de Capra rejoint donc parfaitement la nôtre, confirmant en particulier ce qu’a écrit Franz Foulon dans « Survivre ou périr ensemble ». Capra fait référence à une étude détaillée, rapportée par F.M. Lappé et J. Collins, fondateurs de l’« Institute for Food and Development Policy » qui conclut : « La pénurie de nourriture est un mythe et le commerce agricole à grande échelle ne résout pas le problème » (de la faim) « au contraire, il ne fait que le perpétuer et l’aggraver. Le problème n’est pas de savoir comment accroitre la production, mais plutôt de savoir ce qui est cultivé et qui en bénéficie... SE CONTENTER D’INTRODUIRE DE NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS UN SYSTEME POURRI PAR LES INEGALITES SOCIALES NE RESOUDRA JAMAIS LE PROBLÈME DE LA FAIM ». Une recherche dirigée par ces mêmes auteurs a révélé qu’il n’existe aucun pays au monte où la population ne pourrait se nourrir de ses propres ressources et que la masse de nourriture produite actuellement dans le monte est suffisante pour alimenter correctement HUIT milliards d’individus.

Des exemples, des chiffres :
- En Amérique Centrale, plus de la moitié de la terre cultivable, - la partie la plus fertile - est utilisée pour faire pousser des noix te cajou pour l’exportation alors que 70 % des enfants y sont sous-alimentés.
- Au Sénégal, les légumes destinés à être exportés vers l’Europe sont cultivés sur les terres de qualité supérieure alors que la majorité de la population rurale du pays a faim.
- Les terres riches et fertiles du Mexique, qui produisaient une douzaine d’aliments locaux différents, sont aujourd’hui consacrées à la culture des asperges pour les gourmets européens. D’autres propriétaires terriens s’y tournent vers la culture du raisin pour faire du Brandy !
- En Colombie, on abandonne le blé pour cultiver des oeillets exportés aux Etats-Unis.
Il faut, concluent ces auteurs, que les cultures industrielles ne soient plantées pour l’exportation que lorsque les habitants auront satisfait leurs besoins primaires de nourriture. L’exportation ne doit être considérée que comme une extension des besoins domestiques.
Il importe, conclut à son tour F. Capra, que nous réalisions que ce n’est pas par les masses affamées du Tiers-Monte que notre sécurité alimentaire est menacée, mais bien par les grands trusts agro-alimentaires qui perpétuent cette famine massive.
C’est-à-dire, concluons-nous enfin, par le système du profit, grâce auquel affamer le Tiers-Monde, tout en détruisant l’environnement, est financièrement RENTABLE.

^


Aux États-Unis

Comment l’industrie pharmaceutique vend ses produits

(d’après F. CAPRA)
juin 1986

Cette industrie est contrôlée par la PHARMACEUTICAL MANUFACTURERS ASSOCIATION (PMA), étroitement liée à l’AMERICAN MEDICAL ASSOCIATION (AMA) dont une bonne partie des revenus provient de la publicité réalisée dans les revues médicales. Le plus important de ces périodiques est le Journal of the American Medical Association (JAMA) dont le but est, en principe, de tenir les médecins informés des nouveautés, mais qui, en fait, est largement dominé par les intérêts de l’industrie pharmaceutique : La plupart des revues médicales tirent la moitié de leurs revenus des publicités provenant des compagnies pharmaceutiques.
Cette dépendance financière affecte évidemment la politique éditoriale de ces revues, et engendre des conflits d’intérêts dont F. Capra cite un exemple : une certaine hormone, la Norlutine s’est avérée avoir des effets nocifs et, selon un rapport paru en 1960 dans le JAMA, ses effets secondaires nocifs se produisaient « avec une fréquence suffisante pour déconseiller son utilisation et s’opposer à ce qu’elle soit présentée comme une hormone sans danger durant une grossesse ». Pourtant, dans le même numéro paraissait une publicité pleine page pour la Norlutine, et il en alla de même durant les trois mois suivants. A aucun moment cette annonce ne fit allusion à des effets secondaires. Finalement, le médicament fut retiré de la circulation. F. Capra ajoute : « Ceci n’est pas un cas isolé. l’A MA a systématiquement négligé d’informer les médecins quant aux effets secondaires des antibiotiques, qui sont les médicaments les plus fréquemment prescrits par les médecins ainsi que les plus dangereux pour les patients. Les prescriptions inutiles ou injustifiées d’antibiotiques sont causes de milliers de décès, et pourtant, l’AMA fournit un espace publicitaire illimité à leur promotion, sans jamais chercher à décourager cette pratique. Cette attitude irresponsable n’est certes pas sans rapport avec le fait que les antibiotiques - après les sédatifs et les tranquillisants - fournissent à l’American Medical Association les plus importantes recettes publicitaires.
La publicité pharmaceutique est conçue pour pousser les médecins à prescrire toujours plus de médicaments. Naturellement, ils sont toujours décrits comme étant la solution idéale pour toute une série de problèmes quotidiens. Des situations stressantes ayant des origines physiques, psychologiques ou sociales seront apaisées grâce à un traitement médicamenteux ; c’est du moins ce qu’affirme la publicité. Ainsi, les tranquillisants sont présentés comme des remèdes à la « dépression réactionnelle  » ou à une « mauvaise intégration » et d’autres médicaments conviennent merveilleusement bien pour détendre des personnes âgées ou calmer des écoliers turbulents. Le ton de certaines publicités, s’adressant aux médecins, est tout simplement horrifiant pour le profane, surtout lorsqu’elles prônent des traitements destinés aux femmes. Elle sont les plus grandes victimes des traitements médicamenteux : elles consomment plus de 60 % de tous les médicaments psychotoniques et plus de 70 % de tous les antidépresseurs. Les publicités conseillent souvent aux médecins, en termes carrément sexistes, de se débarrasser de leurs patientes en leur prescrivant des tranquillisants pour des maux vagues.
L’influence des fabricants de médicaments sur les soins médicaux s’étend bien au-delà des annonces publicitaires. Aux EtatsUnis, le Physician’s Desk Reference est l’ouvrage de référence le plus populaire consacré aux médicaments et plus de 75 % des médecins le consultent régulièrement. Il recense tous les médicaments disponibles sur le marché, définit leur utilisation, recommande leur dosage et signale leurs effets secondaires. Toutefois, cet ouvrage courant n’est rien moins qu’un ramassis de publicités directes, puisque tout son contenu est préparé et payé par les compagnies pharmaceutiques et qu’il est distribué gratuitement à tous les médecins du pays. La plupart des médecins ne reçoivent aucune information sur les médicaments de pharmacologues indépendants et objectifs, mais bien celle de producteurs passés maîtres dans la manipulation des médias. Nous pouvons estimer cette influence en remarquant combien il est rare que les médecins utilisent les termes adéquats lorsqu’ils parlent de médicaments  ; généralement, ils emploient et donc promotionnent les noms de marque créés par les compagnies pharmaceutiques.

Mais la force de vente de l’industrie pharmaceutique est encore beaucoup plus influente que sa publicité dans les manuels ou les revues. Pour vendre leur marchandise, ces représenants saturent les médecins de propos mielleux, d’échantillons et de toute sorte de gadgets promotionnels. De nombreuses compagnies leur offrent des prix, des cadeaux et des primes, en fonction de la masse de médicaments qu’ils ont prescrits - enregistreurs, calculatrice de poche, lave-vaisselle, réfrigérateurs et téléviseurs portables. D’autres offrent des « séminaires éducatifs  » sous forme de weekends prolongés aux Bahamas, tous frais payés. On estime que les compagnies pharmaceutiques consacrent dans l’ensemble une moyenne de 20 000 F par an et par médecin à de tels gadgets, ce qui représente 65 % de plus que ce qu’ils consacrent à la recherche et au développement.
Chiffres éloquents. Et en France ?

^


Et si les plombages dentaires étaient dangereux ?

juin 1986

Les procédés employés par les industries pharmaceutiques aux Etats-Unis et rapportés par F. Capra sont édifiants. Comment espérer que nous soyons mieux informés que les Américains sur les risques que comportent certains soins ?
Cette question nous incite à publier, bien que ce ne soit pas dans le domaine spécifique de la Grande Relève, un questionnaire proposé par un de nos lecteurs, Georges Petit, décidé a mener sa propre enquête sur un sujet qui a attiré son attention : le danger que peut entrainer pour l’organisme la ,pose de plombages dentaires, à base d’amalgame, donc de mercure. Les dentistes connaissant pour eux-mêmes, les dangers qu’ils courent en faisant ces amalgames, ont-ils observé des effets nocifs sur leurs patients ?
1° Qui a des exemples précis de cette nocivité à signaler ?
2° Qui, en tant que dentiste, a observé cette nocivité sur un client ?
3° Qui, en tant que dentiste, a une expérience concernant des produits remplaçant ces « plombages » ?
4° Qui connait des laboratoires, français ou étrangers, pratiquant la trichanalyse (analyse des cheveux pour y détecter le pourcentage en métaux toxiques) ?
5° Qui connait d’autres moyens de détecter la présence de métaux toxiques ?
6° Qui est au courant d’essais sérieux permettant de conclure si les amalgames ou autres métaux mis en bouche sont ou non «  iatrogènes »

Toute réponse concernant cette enquête est à adresser directement à Georges Petit, Ingénieurconseil, 10 avenue de Salonique, 75017 Paris (téléphone 45.74.38.33)
Pour plus d’information sur ce sujet des amalgames d’obturation dentaire, voir une étude d’un autre de nos lecteurs, Denis Bloud, publiée dans le « Document-Santé n° 18, en Suisse, Avenue de la Vogeaz 15, CH 1110 Morges (téléphone 021.71.26.79)

^


Sur la C.E.E.

par R. JALLIFIER-VERNE
juin 1986

Le déclin des impérialismes ouesteuropéen est général. « L’Europe industrielle est-elle encore compétitive ? « demande une publication spécialisée  : Actualité industrielle, économique et sociale, qui répondait ainsi : « Si la communauté n’avait pas enregistré d’aussi bons résultats dans les exportations agroindustrielles et celles des matières premières, sa performance globale aurait été beaucoup plus mauvaise. Pour l’ensemble des produits manufacturés, son industrie a perdu du terrain par rapport au Japon et aux Etats-Unis. La communauté ne s’affirme comme leader dynamique dans aucun secteur. »
Pourquoi ?
Parce qu’un système monétaire est à l’image du système économique. Il ne peut y avoir intégration monétaire là où il n’y a pas intégration économique. La seule forme « d’unification » proposée par la C.E.E. est celle qui se réalise sous le talon de fer des U.S.A., écrasant non seulement la classe ouvrière et la paysannerie mais aussi accentuant le fossé entre C.E.E. et U.S.A., entre R.F.A. et le reste de la C.E.E... Voilà pourquoi c’est directement dans le cadre des relations monétaires internationales que se règle le cours de chaque monnaie et que, par exemple, la crise de la lire italienne, l’été dernier, loin d’être contenue par la S.M.E. (système monétaire européen), a constitué un facteur de crise pour ce dernier.
Nous sommes à présent placés face à une réalité en apparence contradictoire. D’un côté, l’Europe ne peut se construire dans le cadre de la C.E.E., qui consomme la division de l’Europe en deux et qui vit toutes les convulsions du système impérialiste dans sa période de déclin, et dans ses épicentres de déclin impérialiste. D’un autre côté, et précisément en rapport avec cette situation, il est incontestable que le rôle de la C.E.E., rôle dans lequel la présidence politique d’un Delors prend toute sa signification, ne fait que se renforcer. Bruxelles (qui n’en peut rien) est devenue le « quartier général » d’où s’ordonnent, dans leurs grandes lignes, mais aussi dans leurs détails, tous les plans meurtriers contre la classe ouvrière et la paysannerie de chacun des pays de la C.E.E.
Il est significatif, que, chaque jour davantage, la C.E.E. s’immisce dans le détail de la définition des politiques à mettre en oeuvre dans chaque pays. Ainsi, cette recommandation typiquement corporatiste, enjoignant aux gouvernements, pour lutter contre le chômage, que gouvernements, travailleurs et patrons « travaillent ensemble de manière permanente ». Ainsi le programme d’action de 60 millions de dollars adopté l’été dernier dans le but d’organiser la coopération université-industrie dans l’ensemble de la C.E.E. Ainsi, encore, ce rapport économique annuel de la commission européenne, examinant la situation de chaque pays, dans lequel on relève que le gouvernement français doit « persévérer dans la rigueur », laquelle « n’implique pas seulement une évolution appropriée des salaires, mais aussi des ajustements d’effectifs parfois importants  »...
Naturellement, les conséquences de cette offensive d’ensemble se manifestent de façon différenciée, en relation avec la puissance relative de chaque bourgeoisie. Ainsi, il est évident que, de tous les pays qui composent la C.E.E., la R.F.A. est celui qui préserve le mieux sa position dominante (relative, car dans le cadre de la domination du capital U.S. sur l’Europe et la R.F.A.).
Nous ne sommes donc pas près de voir la « sortie du tunnel  ».
De l’extrême droite à l’extrême gauche, comment allons-nous résorber l’inquiétant chômage, moderne fléau de l’économie actuelle ?
Et si on changeait ?
Partager le travail entre tous ? Certainement. Mais partager aussi entre tous, les richesses produites, que ce soit par les hommes ou par les robots.
Par l’économie distributive !

^


Sur le distributisme et le mondialisme

par P. MOCH
juin 1986

L’état actuel de la conjoncture mondiale m’incite, en tant que vieux militant distributiste et Citoyen du Monde, à expliquer pourquoi je crois le moment propice pour unifier vos efforts.
Vous servez, chacun à votre manière... un même idéal, celui de l’amélioration des rapports humains pour obtenir une société plus belle et plus juste. Nous avons compris, depuis longtemps, que la destruction menace l’humanité, avant qu’elle ait réalisé cet idéal. Les slogans, que ce soit « UN OU ZERO » de G. Marchand ou « l’économie distributive ou l’anéantissement de l’humanité », montrent bien le parallélisme de vos ambitions.
Pacifiste depuis la guerre de 1914, j’ai connu bien des déboires dans ma quête pour un monde meilleur. Il est temps de faire le point.
Les buts du « mondialisme » et de ce qu’on appelle maintenant « l’économie libérée » me semblent tellement proches qu’il faut examiner les possibilités de chaque organisation.
Les mondialistes, à part quelques enragés dans mon genre, travaillent pour un futur lointain. Il leur faut, pour arriver à changer les mentalités, un long et profond travail. La création par eux du « Congrès des peuples », a été, après la création du « Registre International des Citoyens du Monde » le peau finement de ce que l’on peut appeler l’infrastructure du monde dont ils rêvent... Mais je n’accepte pas facilement de travailler pour le long terme quand la catastrophe peut être proche.
L’Economie Libérée est aidée inconsciemment mais puissamment par ce que j’appellerais « le sens de l’histoire ». Elle n’a peut-être pas, comme les mondialistes, des structures de base, encore bien fragiles, il est vrai ; mais elle a pour elle des atouts qui me semblent bien plus réels, comme l’accélération de l’économie. Elle a, certes, ses propagandistes et ses écrivains souvent talentueux, mais elle a surtout la démonstration éclatante de l’évolution des rapports économiques et de la mutation qui en résultera pour la société humaine, et qui semble se rapprocher. Dans la « Grande Relève », j’ai souvent lu des commentaires sur le livre « La Crise Finale  » d’Ervin Lazlo ; celui-ci emploie le langage scientifique pour expliquer que la mutation économique est inévitable dans un délai qui ne dépassera pas de beaucoup le début du prochain siècle.
Amis mondialistes et amis distributitifs, c’est le moment d’unir vos efforts pour que cette mutation qui me semble inéluctable débouche vers l’idéal qui nous anime. Réfléchissez ensemble sur le travail à accomplir. Le vieil homme que je suis devenu vous regarde avec une certaine appréhension : saurez-vous unir vos efforts et, surtout, être efficaces ?

^


Lu, vu, entendu

juin 1986

TESTAMENT
Aucun homme politique, aucun dirigeant syndical n’ose dire la vérité concernant le chômage. Ou peut-être ne veut-il pas la voir. De la part des politiciens cela n’a rien d’étonnant, mais les chefs syndicalistes qui, en principe, baignent dans les réalités du monde du travail, doivent bien se rendre compte de la situation, qui est évidente : le chômage, non seulement ne pourra pas être résorbé, mais continuera d’augmenter sans arrêt
Pour une raison très simple l’homme n’est plus indispensable pour faire ce qui doit être fait. Non seulement il n’est plus indispensable, non seulement il est devenu inutile, mais il est à écarter, à bannir du lieu de travail. Ce qu’il faisait, les machines, maintenant, le font mieux que lui, plus vite, sans fatigue, sans arrêt,
L’« enchanteur » qui nous a quittés le 24 novembre 1985 n’a donc pas eu le temps de terminer la phrase qu’il a laissée sur une virgule... à coté du manuscrit, se trouvaient deux notes superbes que l’on peut considérer à la fois comme son testament, et son dernier souhait :
Tout s’accélère. Tout va aller très vite. Un nouveau monde va naître, sans doute dans les douleurs. Nous arrivons à la fin des temps barbares. Le monde nouveau sera le vôtre (celui des jeunes). Faites le bien.
Peut-être, familiarisé avec l’idée de mourir, l’homme choisira son temps de vie et s’en ira à sa volonté.

Extrait de « demain le paradis » de René Barjavel, et transmis par S.S., d’Agen

***

LE SURPLUS AMERICAIN
Le problème est tel, que le total des surfaces de bureaux disponibles (ou en construction) dans les 22 plus grandes villes des Etats-Unis, représente l’équivalent de 150 fois la surface de l’Empire State building de New York, « Nous avons trop construit et ceci dans des proportions sans précédent » avouait récemment J. Mc Donald Williams, l’un des plus grands promoteurs immobiliers.
Le marché de l’immobilier du bureau s’aggrave de jour en jour : en cinq ans, le taux d’inoccupation a augmenté de 12,5 % (16  % en 1985 contre 3,5 % en 1980). La mévente a pris des proportions alarmantes dans certains états de la Sunbelt : 28,3 de bureaux vides à Fort Lauderdale (Floride), 24 % à Phoenix (Arizona), 22,7 % à New Orléans (Louisianne). Comparativement, le nord de la côte Est résiste mieux à la tendance avec seulement 14,3 % de surfaces libres à Boston (Massachusetts), 13,7 % à Chicago (Michigan) et seulement 7,4 % à Manhattan qui reste l’endroit où la demande est la plus forte.
Cette mauvaise conjoncture n’a pas épargné les secteurs résidentiel et hôtelier. Le marché du condominium, qui était en pleine expansion jusqu’à l’année dernière (2,5 millions d’unités livrées en 10 ans) commence aussi à s’effriter. Du côté de l’industrie hôtelière, les patrons de chaîne regrettent le boom hôtelier qu’ils ont encouragé jusqu’à maintenant. A Houston (Texas) par exemple, où les ressources hôtelières ont pratiquement doublé en cinq ans, portant le nombre de chambres à 34 000, le taux de remplissage n’arrive pas à dépasser les 50 % (65 % dans le reste des USA).

Extrait de « ArchitectesArchitecture », n° 163 de décembre 1985

***

PAS TOUJOURS LES MÊMES
Nous avons 10 % de chômeurs en France. Les 10 au chômage sont payés par les 90 qui travaillent. De sorte qu’une entreprise de 90 ouvriers verse en réalité 90 salaires, plus 90 cotisations, pour indemniser 10 chômeurs. Si cette entreprise disait aux 10 chômeurs : « Venez travailler avec nous, et nous vous verserons directement nos cotisations. Nous allons établir un roulement de telle sorte que, à tour de rôle, chaque ouvrier travaillera 9 semaines et partira une semaine en « chômage » (..) Il faut que nous changions notre façon de concevoir le chômage. Le chômage est normal. Plus nous moderniserons et plus nous aurons de temps libre, c’est-à-dire, avec notre système actuel, du chômage avec son cortège de misère et de découragement.
Le temps libre dégagé par la machine devrait être source de joie et d’épanouissement de la personne humaine. D’un côté, nous nous émerveillons de voir bientôt des robots aller tout seuls cueillir les pêches. En même temps, nous pleurons parce que l’horticulteur n’aura plus de travail. Il faudrait savoir ce que l’on veut. Le chômage ne devrait pas être considéré comme une catastrophe à combattre, mais comme un bienfait à organiser. Que ce ne soit pas toujours les mêmes qui le subissent, mais que tout le monde en profite.

Extrait de « La Vie », n° 2110 et transmis par Mme Escudier, de Narbonne

UN MONDE FOU, FOU, FOU !
Chômage, violences, meurtres, un certain refus de notre société par beaucoup de jeunes. Que nous arrive- t-il ? Le monde serait-il devenu fou ?
Je crois qu’il est en train de le devenir. La faute en incombe à la crise structurelle du système économique mondial, capitaliste libéral à l’ouest et capitaliste d’Etat à l’est. Le système basé sur l’économie de marché qui était un stimulant bénéfique lors des premiers balbutiements de l’industrie, est devenu maintenant un instrument de régression sociale, condamné à s’autodétruire puisque étant complètement inadapté à l’époque de l’informatique et de la robotique.
Il fait de la machine, la rivale de l’homme au lieu d’en faire sa servante et cela au nom de la compétitivité.
Effectivement, que se passe-t-il actuellement ? Les sociétés industrielles et commerciales du monde entier se livrent une véritable guerre économique, par le biais de la concurrence. Pour rester compétitives, elles remplacent de plus en plus les hommes par des machines auxquelles aucun salaire n’est nécessaire, alors qu’il aurait dû être possible de garder le personnel en réduisant le nombre d’heures de travail, pour un salaire identique. Hélas ! quelques petits malins ont trouvé dans la machine, une complice à leurs bas calculs pour couler la concurrence et ils préfèrent licencier du personnel, afin de réduire les frais de gestion, pour parvenir à leurs fins, tout en faisant d’énormes profits.
Cette pratique s’est généralisée et le nombre de chômeurs a atteint un seuil difficilement supportable. Or, ces chômeurs n’étant plus des clients, puisque de moins en moins assistés, vu leur nombre croissant, les entreprises subissent en retour de leurs mauvaises actions, une mévente les obligeant à limiter leur production, ce qui se traduit pas de nouveaux licenciements.
Cette économie de marché est donc engagée dans un cycle infernal et dans moins d’une décennie, nous arriverons à cette aberration :
Dans le monde entier, peu de gens travailleront sur des ordinateurs couplés à des robots et seront capables de produire une énorme quantité de biens de consommation. Or, ces richesses ne trouveront pas d’acquéreurs puisque la majorité des humains sera au chômage, donc, sans ressource. Nous mourrons de misère au milieu d’une abondance inaccessible.
Il serait donc temps de penser à une autre’ manière de vivre, si nous voulons éviter une véritable catastrophe.

Extrait du « Progrès de Lyon » lettre de R. Rondel (Corbas)

^

e-mail