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Éditorial
Notre ami, Marcel Dieudonné, s’interroge sur
le meilleur moyen de réaliser le plus rapidement possible une
transformation radicale des structures économiques et nous demande
à tous de donner notre opinion à ce sujet. Je réponds
: si nous voulons accélérer cette évolution qui
rencontre tant d’obstacles, c’est en l’insérant dans une contestation
globale de la civilisation actuelle que nous aurons le plus de chances
d’y réussir.
II ne faut pas isoler le facteur économique, ni exagérer
l’influence qu’il exerce sur les autres rouages de la société
: elle est énorme, mais non exclusive. Certes le système
actuel semble conditionner presque toute la politique, et par l’intermédiaire
d’une certaine presse, il agit même sur la mentalité du
public, sa philosophie, sa morale. Mais il existe des forces d’une autre
nature, qui ont en nous des racines profondes. Ce sont elles qui provoquent
les grands sursauts d’indignation et la volonté de combattre
l’injustice. Le système fondé sur le profit est une entrave
au développement de ces forces, mais il ne peut les étouffer.
Aussi bien, notre philosophie concerne à la fois, souvent indiscernables,
des questions d’ordre éthique et des problèmes économiques.
La société est un milieu complexe où tout agit sur tout. On peut y observer de nombreux phénomènes de causalité réciproque. Méfions-nous des théories qui admettent un facteur dominant. Les vaines controverses relatives à un prétendu ordre de priorité font trop souvent obstacle à la coopération des mouvements d’avant-garde, et par là nuisent beaucoup à leur efficacité.
Les recherches théoriques ne peuvent aboutir
à des réalisations que si elles sont soutenues par un
élan pur moteur suffisamment puissant. Les mouvements révolutionnaires
qui ont sombré dans le fanatisme ne créent que violence
et confusion. Mais il est des périodes historiques où
les foules se mobilisent dans la paix, où l’enthousiasme n’exclut
pas la raison.
Elles recèlent des possibilités particulièrement
remarquables quand ces remous ont une dimension internationale. Même
si l’action est d’abord limitée à un seul domaine, il
semble que ces périodes soient très favorables à
des transformations de caractère global et susceptibles en même
temps d’être exceptionnellement rapides.
Après les grandes manifestationspacifistes qui eurent lieu, notamment
en Allemagne et en Hollande, en Octobre 1983, j’ai souhaité -
en insistant, une fois de plus, sur la complémentarité
des doctrines - que cette contestation pacifiste s’élargisse
en un mouvement d’ensemble visant à transformer la société
toute entière (1). Aujourd’hui, les événements
qui ont surgi à l’Est ont créé une situation riche
de développements imprévisibles : la lutte pour la démocratie
a été le point de départ, mais il n’est pas impossible
qu’elle donne lieu à un grand renouveau de la pensée.
Et il me semble, c’est là une intuition à laquelle je
ne saurais donner une forme bien précise -, que ces bouleversements
pourraient bien avoir des conséquences importantes dans l’Europe
entière.
Imagine-t-on l’ampleur des changements qui pourraient résulter
d’une conjonction entre les esprits novateurs de l’Est et de l’Ouest
? L’enthousiasme communicatif et le courage des peuples de l’Est seraient
pour nous tous un stimulant précieux. II appartiendrait d’autre
part aux "nouvelles gauches" de l’Ouest, et plus particulièrement
aux distributistes, de les mettre en garde contre la tentation de se
rallier inconsidérément à l’économie de
marché. C’est pourquoi le plus urgent pour nos amis me parait
être de contribuer à organiser, sous une forme ou une autre,
de telles rencontres.
Ne laissons pas échapper la chance que nous offre, sur le plan
européen, une de ces périodes de grande effervescence
collective où se manifeste, avec une force inhabituelle, l’accélération
de l’histoire. Telle est la réponse que je ferai, pour ma part,
à Marcel Dieudonné.
1. G.R. n°’ 822, avril 1984.
Dans une série d’articles édifiants publiés par le Figaro, Maurice Allais pose claire-, ment les conditions que nos économistes mettent à "notre aide" aux pays de l’Est. Voici par exemple des extraits de l’article publié le 22 Décembre :
"Tant que la Russie soviétique maintiendra
le principe du parti unique, il n’y a pas lieu de lui apporter une aide
ou de lui consentir des crédits .... II faut encore et surtout
subordonner notre aide à un retour progressif à l’économie
de marché, ...et au retour à la propriété
privée... Elle doit en deuxième lieu consister dans l’ouverture
de crédits remboursables, car tout ce qui est gratuit est gaspillé.
Elle doit enfin consister dans le développement des échanges
commerciaux, il faut acheter et non donner...
Ce qui n’empêche pas notre Prix Nobel de conclure :
Nous devons nous réformer
C’est pour une très grande part la prospérité
de l’Occident qui explique l’effondrement des systèmes collectivistes
totalitaires. Mais nous devons bien réaliser que notre exemple
ne pourra être réellement convaincant pour les millions
d’hommes libérés de leurs chaines à l’Est que si
nous pouvons valablement répondre aux aspirations éthiques
qui ont été à l’origine des sociétés
collectivistes.
Tel n’est pas actuellement le cas d’une part, en effet, l’Europe Occidentale
connait un chômage massif tout à fait insupportable et
éthiquement inadmissible à tous égards, et d’autre
part l’économie occidentale tout entière, qui repose sur
de gigantesques pyramides de dettes est potentiellement instable, et
elle parait s’être abandonnée à une sorte de délire
financier et spéculatif où apparaissent des revenus énormes
sans fondement réel, dont les effets démoralisants sont
réellement tout à fait sous estimés (’").
Qu’il me suffise de rappeler ici, une fois encore, que les flux financiers
entre les pays du groupe des Sept s’élèvent à plus
de 400 milliards de dollars par jour, alors que les flux correspondant
à des échanges commerciaux ne sont que de l’ordre de 12
milliards de dollars.
Les débats politiques ne sont que trop souvent falsifiés
et fondamentalement intolérants. Pour ne prendre qu’un exemple,
on ne voit que trop fréquemment certains commentateurs de la
radio et de la télévision se livrer sur des questions
fondamentales à une sorte de désinformation et d’endoctrinement
idéologique. Face aux problèmes pressants d’aujourd’hui,
nous aurions le plus grand tort de nous contenter de nous réjouir
de l’effondrement des systèmes collectivistes totalitaires de
l’Est, sans chercher à remédier réellement aux
perversions que peut entrainer le libre jeu des marchés, lorsque
le cadre institutionnel dans lequel ils fonctionnent est fondamentalement
inapproprié.
Toute économie de marché soulève deux questions
essentielles : l’efficacité et l’éthique. Pour l’essentiel,
nous avons réussi à répondre à la première.
Mais nous avons sans aucun doute largement échoué quant
à la seconde.
En répondant de manière inappropriée à la
question éthique, les sociétés de l’Est n’ont réussi
ni l’efficacité, compromise par des organisations bureaucratiques
et centralisatrices, ni l’éthique, bafouée notamment par
les privilèges indus des nomenklaturas et par des violations
permanentes des droits de l’homme à une échelle sans précédent.
Gardons nous bien d’essayer de remédier aux insuffisances d’ordre
éthique de nos sociétés en nous engageant dans
la voie qui, inévitablement, a mené les sociétés
de l’Est à des situations désastreuses.
En somme, d’après Maurice Allais, l’éthique
était bafouée à la fois à l’Est et à
l’Ouest. Mais à l’Est, c’était inévitable alors
qu’à l’Ouest il y aurait des remèdes.
Or la structure des échanges et la nature de la monnaie étaient
et restent fondamentalement identiques en capitalisme d’Etat ou en capitalisme
privé. S’il y a des solutions respectant la morale dans le système
occidental, pourquoi n’ont-elles jamais été mises en oeuvre
par les innombrables gouvernements qui se sont succédés
depuis deux siècles ?
La Suisse n’est évidemment pas une référence :
les scandales financiers ne l’épargnent pas, le dernier exemple
ayant touché jusqu’au Ministre de la Justice, Madame Kopp. Enfin,
c’est le "coffre-fort"des puissants de ce monde y compris
des Marcos et des Ceaucescu...
La réponse de "La Suisse"
D’ailleurs voici une réponse qui vient à
point nommé ; il s’agit d’un éditorial du journal "La
Suisse" à propos des événements qui viennent
de se produire à l’Est :
"...Cependant l’Occident aurait tort d’interpréter cette
évolution, avec notamment l’afflux de réfugiés
estallemands en République Fédérale d’Allemagne,
comme un signe de la supériorité du système capitaliste.
S’il est vrai que nos démocraties Occidentales sont assurément
les moins mauvais des systèmes, il est tout aussi certain que
l’évolution actuelle de l’économie pourrait nourrir, à
terme, des révoltes populaires analogues à celle que vivent
aujourd’hui les pays de l’Est.
Poussée à l’extrême, l’économie de marché
engendre en effet inévitablement des dérèglements
: gaspillage, pollution, injustices sociales... Honnêtement, on
se demande vraiment comment l’Europe unie, par exemple, va pouvoir donner
du travail à ses 14 millions de chômeurs ?"
(Extrait d’un article de Michel Baeting publié par le journal "La Suisse" et cité par Claude Citon dans U.N. Spécial de décembre 1989).
(*)(contrairement à une opinion trop commune, ces maux ne sont pas des conséquences inévitables d’une économie de marché. La Suisse, pays développé, compte moins de 1 de chômeurs, et les excès actuels de la spéculation dérivent simplement d’un cadre institutionnel inapproprié).
Ils y viennent !
"Surprenant scandale pour l’idéologie matérialiste
actuelle : depuis trente ans, la progression considérable de
la richesse des Français s’est accompagnée d’un déclin
alarmant de leur état psychique, physique et moral. Insidieusement
se développe une nouvelle forme de misère la régression
de l’homme...
On pollue l’air et l’eau parce qu’il couterait plus cher d’épurer
les rejets des usines et des foyers domestiques. On bétonne les
espaces verts parce que dans les villes et les zones très touristiques
ils valent souvent cent fois moins cher que les terrains à bâtir...
Les objectifs d’un développement écologique seront une
industrie non polluante, une agriculture biologique et non plus chimique,
un urbanisme vert, un aménagement du territoire qui réduise
les mégalopoles au profit des villes petites ou moyennes, un
essor de la vie associative et un renouveau des communautés naturelles...
"
(Philippe Saint Marc, Le Monde,
Décembre 1989)
L’auteur de ces lignes, Conseiller-Maitre à
la Cour des Comptes, n’explique pas comment en arriver là. Mais
il n’a plus qu’à se mettre au courant de nos thèses pour
trouver , la citation suivante vient d’ailleurs à point pour
l’y encourager
"Surplus et déficits de toute nature, chômage et endettement
en constante progression, instabilité monétaire endémique,
trafics transformant les marchés financiers en vulgaires salles
de jeux, protectionnismes en tout genre portant sur des centaines de
milliards de dollars dans les économies développées,
énormes inégalités entre classes et entre régions,
et, maintenant, concentration sans frein d’un pouvoir colossal : telles
sont les principales caractéristiques de la guerre économique
mondiale, des crises inhérentes au fonctionnement du capitalisme
financier"
(Fréderic F. Clairemonte,Le Monde Diplomatique, Décembre 1989)
***
Calvet : le prix de l’entêtement
Jacques Calvet, qui s’était littéralement caché
lors de la longue grève de Peugeot, a tenu en décembre
une conférence de Presse pour annoncer - et se plaindre - que
la grève avait coûté à son groupe la perte
de 50.000 véhicules et compromis l’apurement de ses dettes à
fin 1989. Pas un mot d’autocritique de ce patron socialement archaïque
!
***
Tiers-Monde et libéralisme
Houphouët-Boigny, dans une interview au Monde du 26 décembre,
déclare :
"C’est vous seul qui décidez du prix que vous imposez pour
nos matières premières... Prenons le café et le
cacao. Que demandons-nous ? Minimum 1000 F. CFA le kilo (1 franc CFA
vaut 2 centimes). Jusqu’en 1986, vous nous payiez 1200 F CFA le café
et 1100 F CFA le cacao. Brutalement, vous faites chuter jusqu’à
300 F. CFA sans que pour autant le prix à la consommation ait
baissé, au contraire. Un kilo de café vous permet de servir
50 tasses au prix moyen de 600 F. CFA" . La valeur ajoutée
- 100 fois le prix d’achat pour transport, torréfaction, conditionnement,
vente n’est pas mince. Au nom du libéralisme
Qui d’entre nous a constaté une baisse du prix du chocolat ?
Houphouët-Boigny poursuit : "Depuis trois ans, le cacao et
le café ivoiriens sont tombés de 1000 à 300 milliards
de francs CFA. 700 milliards en moins par an. Où sont nos dettes
?"
***
Flot de réfugiés en RFA
En dehors du fait qu’il manque 600.00 logements, avec 700.000 nouveaux
arrivants depuis le début de 1989 en provenance de l’Est, le
chômage atteint 120.000 personnes parmi ces réfugiés
on compte30 °/ chez les arrivants de RDA, 50 % chez les autres qui
ne parlent pas l’allemand.
(selon le Monde du 27 décembre 1989)
***
Les voeux de Mikhail Gorbatchev
`Des vagues de rénovation socialiste ont déferlé
sur l’Europe de l’Est. Les événements dramatiques à
Berlin, Sofia, Prague et Bucarest ont de nouveau prouvé avec
une grande force l’absolue nécessité d’unir socialisme
et démocratie. Nous souhaitons à nos amis succès
dans cette voie, ils peuvent toujours compter sur notre solidarité
.
... Pour la première fois, nous avons vécu d’importants
débrayages dans l’industrie et des perturbations économiques
majeures.
II ya eu un manque d’ordre et de discipline. L’exacerbation des relations
inter-ethniques a aussi été une source d’inquiétudes
majeures, mais nous avons beaucoup appris et nous voyons clairement
l’objectif à atteindre : un socialisme démocratique et
humain, une société de liberté et de justice sociale".
(Le Monde du 2 janvier 1990)
***
Les marchés financiers en 1989
"Jamais les pays industriels n’ont traversé une phase
d’expansion aussi longue. Les marchés financiers sont les reflets
fidèles de cette époque. Leur prospérité
a été sans égale et le demeure. Presque toutes
les places culminent à des niveaux historiques".
(Le Monde 2 janvier1990)
Que pensent les précaires, les chômeurs, les pauvres, les affamés du Tiers-Monde. Le Casino fait la loi !
***
Dette : les Suisses donnent l’exemple !
Pas banale l’action entreprise par nos amis de la Déclaration
de Berne (DB), l’équivalent helvétique d Agir Ici (créé
dès 1968 !). Sur le thème :`l’annulation de la dette, faisons-la
nousmêmes", la DB vient de lancer une action originale.
Le 20 novembre dernier, 50 personnalités suisses (députés
sociaux-démocrates et écologistes, responsables d’Églises...)
ont emprunté chacune 1000 francs suisses à leurs banques
et ont immédiatement formé un cartel des débiteurs.
Ils ont placé ces emprunts dans un fonds commun pour appuyer
des initiatives dans le tiers monde qui ont pour objectif de diminuer
les effets négatifs pour les populations de la crise de l’endettement
Le premier bénéficiaire de cette solidarité d’un
nouveau genre a été l’organisation philippine "Coalition
pour la libération de la dette" qui regroupe de nombreuses
associations de ce pays.
Dernier détail et non des moindres : les 50 emprunteurs ont déclaré
qu’ils ne rembourseraient ni les intérêts, ni le capital
de cette dette à leurs banques. On estime en effet que les banques
suisses abritent près de 150 milliards de dollars provenant de
la fuite des capitaux organisée par des dirigeants des pays du
Sud avec le consentement des banquiers des "paradis fiscaux".
Les emprunteurs suisses estiment que la dette que ces banques continuent
de réclamer a déjà été payée.
(Communiqué par `Agir Ici’)
***
"La mémoire courte" juge le gouvernement
socialiste
L’association "la Mémoire Courte", proche du PS, émet
dans l’éditorial de son bulletin de décembre, - ainsi
que nous l’apprend le Monde du 10 décembre 1989, qui en publie
quelques extraits, - un jugement sévère sur le gouvernement
actuel.
Parce que "rien n’a changé dans la vie quotidienne",
lit-on dans ce texte, "le malaise est grand dans l’électorat
socialiste" : Attachée aux "valeurs inaliénables"
que représente pour elle le socialisme - défense des droits
de l’homme, des liber tés individuelles et collectives, de la
laïcité", - La Mémoire courte espérait
"des idées et des actions révolutionnaires".
"Au lieu de cela, dit l’éditorial, nous avons un gouvernement
piégé par l’économie et les pesanteurs héritées
de la droite (...) Le socialisme, ce n’est pas cela (...) Qu’on vienne
nous expliquer clairement, simplement, ce qui ne va pas, pourquoi et
comment nous allons y remédier et à quel rythme (...)
On attend des socialistes d’autres attitudes dans les relations humaines.(
...)".
(Communiqué par Pierre Herdner)
Les distributistes, et singulièrement les lecteurs
de la Grande Relève, ont un dénominateur commun : l’économie
distributive telle qu’elle a été conçue par Jacques
Duboin ; et encore, toutes sortes de nuances peuvent s’exprimer, par
exemple, sur les modes de transition, sur les disparités ou non
du revenu social, etc...
En dehors de ce dénominateur commun, chaque homme de progrès
distributiste est libre de ses opinions : nos lecteurs comptent des
socialistes, militants ou non, des catholiques, probablement des communistes
ou sympathisants, des "anars", etc... Or il arrive - rarement,
heureusement, - que des lecteurs résilient ou menacent de résilier
leur abonnement parce que la Grande Relève a publié un
ou des articles qui "penchent vers l’Est", ou, au contraire,
des articles critiquant l’extrême gauche.
Si nous n’avons pas - surtout dans un monde complexe qui évolue
rapidement - un minimum de tolérance, on frémit d’imaginer
ce que seraient les luttes, les fractions, les factions qui se manifesteraient
si demain, par miracle, les Distributistes prenaient le pouvoir, avec
un esprit d’intolérance. Enrichissons-nous plutôt de nos
mutuelles différences, comme l’écrivait Valéry.
Cela dit, je tente une formule qui pourrait se développer dans
la Grande Relève et qui se situerait entre "Lu-vu-entendu"
et le "Courrier des lecteurs" : "Libres propos",
sur des sujets ciblés. Chaque "propos pourrait s’exprimer
en une cinquantaine de lignes - ou moins - de la Grande Relève.
Les sujets économiques, sociaux, politiques, culturels ne manquent
pas.
1. Révolutions à l’Est et chômage
Bronislas Geremek, Président du groupe parlementaire
de Solidarité, a déclaré, le 17 décembre,
au grand jury RTL-Le Monde : "Personne ne connait le nombre des
chômeurs potentiels que créeront les nouvelles mesures...
Ce chiffre peut se situer entre 300.000 et trois millions pour la première
moitié de l’année prochaine. Les Polonais sont conscients
qu’ils vont payer le prix des réformes. Ils rêvent de la
société du Coca-Cola et de la société des
Droits de l’homme... L’avenir des Droits de l’Homme en Pologne dépend
de notre réussite dans le domaine économique".
Nous renvoyons également au "Lu-vuentendu" de la Grande
Relève de Décembre : dans une usine polonaise privatisée
depuis quelques mois, 25% de licenciements, pas d’augmentation des salaires
`pour rester compétitifs".
II ne faut pas se faire d’illusions : faute d’avoir su trouver une troisième
voie, un "socialisme à visage humain", les pays de
l’Est font des "révolutions" où s’exprime le
ras le bol du communisme stalino-brejnévien (on les comprend
!), et l’on a pu voir des personnes interrogées rejetant même
un "socialisme à visage humain".
Demain donc, il y a fort à parier hélas, que, dans les
pays de l’Est libérés du communisme, régnera le
capitalisme. En effet :
1) L’Ouest n’aidera l’Est qu’à la condition, nous l’avons montré
en Janvier, que soit instituée l’économie marchande et
que des élections libres aient lieu.
2) Dans la conjoncture actuelle, les communistes (même s’ils ont
modifié le nom du parti) ne recueilleront que 15 % des voix.
Le capitalisme fera donc son entrée "légale"
avec, très rapidement, son cortège de chômeurs,
de films de violence et de sexe, de drogue, etc... La Pologne, qui fut
la pierre angulaire des révolutions à l’Est, montre clairement
ce qui attend tous les pays qui auront suivi son exemple.
2 - Gross Deutschland
A l’heure où nous écrivons - 29 décembre
1989 - il ne fait plus de doute pour personne que la réunification
allemande n’est plus qu’une question de temps. Tout le monde ou presque
- dirigeants et populations l’acceptent, voire l’espèrent.
Lorsque Kohl a lancé son plan début décembre, il
a violé les réticences. Mitterrand, interrogé par
quatre journalistes vers la midécembre, a avoué que Kohl
ne l’avait pas tenu au courant. Un comble
Vraiment Européen, Kohl ?
Si tout le monde est d’accord sur l’inéluctabilité de
la réunification à terme, nombreux sont ceux qui expriment
leurs craintes. Sur le plan économique d’abord
- Un graphique publié par le Monde du 21 décembre, comparant
les échanges commerciaux respectifs de la France et de la RFA
avec les pays de l’Est est éloquent
rapport 1 à 4 pour les exportations.
- L’Allemagne possède, en dehors de cette avance initiale, une
force de frappe majeure : sa réserve de marks, sans compter son,
pragmatisme, son esprit d’organisation méthodique.
- Le dollar baisse, le mark est en hausse c’est que la RFA jugée
la mieux placée pour "investir l’Est" attire les investisseurs
étrangers (voir le Monde du 29 décembre).
Crainte également, mais plus floue, sur l’avenir politique de
l’Europe : à Strasbourg, Kohl a refusé de s’engager sur
la ligne Oder-Neisse. C’est grave. Veut-il ménager pour le futur
des revendications territoriales ? Les craintes que nous exprimions
le mois dernier se font jour dans certains esprits : une Allemagne réunifiée
qui ne ferait l’Europe que pour respecter ses engagements, mais du bout
des lèvres, tandis qu’elle travaillerait d’arrache pied, mais
sans bruit, à constituer une énorme entité commerciale
"Gross Deutschland - expays de l’Est", excepté peutêtre
la Pologne. Entité qui pourrait bien se teinter d’accords militaires.
Aurons-nous joué les naïfs ou les apprentis-sorciers ? L’Europe,
l’Europe !!! Quelle Europe ? L’Europe pour qui ? (1)
3 - Le XXIe siècle sera religieux
"Le XXIe siècle sera religieux ou il ne sera pas" a écrit l’agnostique Malraux. Longtemps j’ai pris cette affirmation pour une phrase de belle envolée, "à la Malraux".
Depuis quelques mois, je pense que c’était peut-être
une forte pensée visionnaire.
1 ! y a une dizaine d’années, je n’osais dire qu’à des
amis très proches de mes idées que la nomination en 1978
d’un pape polonais n’était pas innocente : un tel jugement paraissait
saugrenu. II y a deux ou trois ans, je me suis risqué à
l’écrire dans la Grande Relève. Ces derniers temps, j’ai
entendu, vu, lu cinq ou six fois cette idée exprimée par
des journalistes ou hommes politiques.
"Le Pape, combien de divisions ?" ironisait Staline. On imagine
ce que serait, en cette fin d’année1989, le sourire narquois
de Jean-Paul II face à Staline. Lorsque Gorbatchev a rencontré
le Pape, les entretiens ont pu se dérouler en tête-à-tête,
ce dernier parlant le russe. Ont-ils évoqué ou avaient-ils
à l’esprit la boutade de Staline ? Toujours est-il que Jean-Paul
II a pu exprimer sa gratitude à Gorbatchev, d’autant plus, qu’en
ce qui concerne l’URSS, il a obtenu la liberté du Culte pour
les millions d’Uniates d’Ukraine (2).
En tout cas, quelle victoire ! Le Tigre de papier n’était pas
celui que désignait Mao Tsé Tung (le capitalisme). Le
communisme, dans six pays de l’Est, s’est effondré en quelques
mois comme un château de cartes.
Avec combien de divisions ? Un Général
Walesa, les troupes : Solidarité, un aumônier général
: Monseigneur Glemp. Patiemment, pendant une décennie, JeanPaul
II , demeuré quelque part Karol Wojtyla, Archevêque de
Cracovie, a enfoncé un coin en Pologne, le pays le plus vulnérable
par son passé (haine de la Russie) et son fervent catholicisme
: voyage triomphal dès 1979, bientôt suivi de grandes grèves
dont celle de Gdansk, qui fit quelques morts devenus rapidement des
martyrs, fit connaitre Walesa et donna naissance à Solidarité.
La Pologne "tombée" est devenue exemplaire" :
la pérestroïka aidant, les autres pays se sont enhardis
et ont imité la Pologne. Sans la pérestroïka, les
événements qui se sont déroulés auraient
demandé quelques années de plus et fait couler un peu
plus de sang sans doute ; comme en Roumanie. C’est tout.
On le voit clairement : partout l’Eglise - les Eglises - ont joué
un rôle essentiel ; en Pologne, bien sûr, en RDA (église
protestante), en Tchécoslovaquie (3), et même en Roumanie ;
alors que l’opposition a du mal à trouver ses marques, déjà
deux partis chrétiens sont nés : le "parti chrétien
et paysan" qui réclame l’enseignement religieux dans les
écoles et le parti de la "démocratie chrétienne".
Le 25 décembre, dans toutes les églises de l’Est, les
cloches pouvaient carillonner, les lumières briller, les chants
religieux remercier Dieu et son serviteur sur la terre. Ce que les divisions
sauvages de Hitler, que ne désavouait pas Pie XII, n’avaient
pas réussi à faire, vaincre le communisme, Jean-Paul II
l’a fait sans effusion de sang (Roumanie exceptée) sans soldats,
mais non sans armées, les armées de l’ombre ... celles
probablement que sentait monter Malraux.
Et si les peuples qui ont secoué le joug communiste se retrouvent
sous celui du libéralisme, avec son cortège de malheurs
chômage, drogue, violence - ils pourront toujours espérer
que, faute d’être heureux icibas, ils le seront dans l’au-delà,
où les attendra Jean-Paul II.
1. C’est sans nul doute la raison pour laquelle Mitterrand
qui sent le danger mais ne peut le déclarer publiquement a, dans
ses voeux de Noël, dit sa crainte d’une Europe émiettée,
insisté sur l’urgence de renforcer les structures de l’Europe
des Douze et souhaité dans les années 90 une confédération
européenne de tous les Etats de notre continent".
2. "Des peuples de nombreuses confessions vivent en URSS : tous
doivent pouvoir satisfaire leurs besoins spirituels". Signataire
? Gorbatchev. "La religion opium du peuple", comme c’est loin !
3. Au "téléphone sonné" le 26 décembre,
quelqu’un a rappelé qu’il y a déjà plusieurs mois,
un homme éminent de l’Eglise avait confié à un
Chef d’Etat (Mitterrand, sauf erreur ) : "l’Eglise est là
pour catalyser toutes les énergies en vue de la révolution".
Nous avons reçu les commentaires suivants relatifs au texte "Propositions économiques, monétaires et institutionnelles" publié dans notre n° 884
de Jean Prédine, Paris :
Le rapport ... m’a largement convaincu, notamment
a) sur le principe de progressivité dans la voie d’une économie
distributive. Bien sûr, la machine économique `Poussera"
au cours de cette évolution, chaque réforme ne réglant
pas à elle seule les effets des vices profonds de notre système
actuel. A l’épreuve, on verra aussi que chaque réforme
peut être dévorée plus ou moins par le système
financier en vigueur, ou bien encore avoir des effets pervers imprévus.
Mais comment éviterait-on tout cela, sauf à créer
seulement dans notre imagination une société idéale,
éblouissante dès le premier instant, telle Vénus
sortant de l’écume de la mer ?
b) sur le principe fédéraliste dont je déplore
qu’il soit trop peu exploité partout et qu’il soit à peu
près inconnu en France.
Je vous indique cependant que j’aspire à un fédéralisme
plus complexifié que celui qui repose seulement sur les États
(dont les frontières sont toujours plus ou moins contestables).
Les langues, religions et cultures, les pôles économiques,
etc... pourraient justifier dans la société de demain
- ou d aprèsdemain - des structures fédérales "à
plusieurs dimensions" celle des Etats n’étant que l’une
d’entre elles.
Bien entendu, ce document d’Europe 93 pourra appeler dans l’avenir de
nombreux compléments.
Dans `7a Grande Relève’ ; Marie-Louise Duboin évoque la
question de la création monétaire dont l’extrême
importance ne peut être niée par Europe 93, et dont l’existence
est devenue, peutêtre, légèrement plus perceptible
au public depuis le mini krach financier de 1987.
Je voudrais aussi redire l’importance du développement du Tiers-Monde,
même vu seulement sous l’angle de l’égoïsme occidental
: comment l’Europe va-t-elle endiguer la vague irrépressible
d’immigration, si elle ne fait pas en sorte que les gens des pays pauvres
retrouvent chez eux un espoir de développement adapté
à leurs besoins ? C’est alors qu’il faudrait parler, je crois
....
a) du système monétaire international, du "primon"
projeté par Charles Warin au début des années 80
pour réguler les cours des produits de base (ceci n’est pas contradictoire
avec l’adoption de l’écu pour l’Europe).
b) imaginer, pour le Tiers-Monde, une économie plus distributive,
non plus au niveau de la distribution du pouvoir d’achat aux individus,
mais au niveau de petites collectivités auxquelles on donnerait
les moyens (équipements, fournitures) d’assurer un développement
local défini par elles-mêmes. Au delà d’un certain
développement de ce type d’expérience, il faudrait, bien
sûr, des plans régionaux de coordination".
* **
de Henri Muller, Guérande :
"On ne distingue guère l’émergence
d’une économie distributive" ; le "plus" ajouté
au titre, créant l’ambiguité.
Du réformisme. Le pire. Dans la tradition Delors, un homme dévoué
à ses hauts mandants des milieux patronaux et de la Banque, syndicaliste
"défroqué" parvenu au faîte des honneurs
pour prix de sa collaboration.
- accuse la sourde lutte entre le capital et l’abondance, mais assimile
la vraie richesse (volume et qualité des produits et services)
à son expression monétaire associée aux prix, ce
qui en fausse l’étendue. La rareté est chère alors
que l’abondance ne vaut rien.
Économie au service de l’homme (socialisme intégral) ou
au service des banques et des nantis ? Delors a choisi.
Les auteurs n’ont fait que grapiller un peu partout dans les catalogues
des idées, y compris celles des distributistes, bien pour leur
faire plaisir mais en se bornant à y papillonner sans autrement
insister.
En prenant grand soin de ne pas toucher au caractère transférable
des moyens de paiements, ils se condamnent à tourner en rond
dans une cage d’écureuil, ne risquant pas de découvrir
la sortie.
Le distributisme ne postule pas le centralisme. Au contraire, l’initiative
s’exerce au niveau local pour la plupart des décisions.
Inciter les actifs à réduire leur taux d’activité
? C’est parler comme Jacques Marseille (cf son livre : la France travaille
trop).
Libre emploi du temps et organisation de son temps libre sont deux concepts
différents.
Le crédit, les manipulations monétaires ne sont qu’un
moyen, pour les banques, de prélever leur dîme sur le flux
monétaire.
En conclusion : un texte assez alambiqué, de lecture peu facile,
mélangeant les genres, où l’on note surtout quelques concessions
mineures, de convenance à quelques unes des vues distributives.
Les Américains du Nord sont extrêmement perturbés par les Nippons. Leur belle assurance s’effondre lorsqu’ils font le point de l’offensive financière menée tous azimuts par les Asiatiques. La peur de l’avenir a gagné l’Europe. Ce ne sont plus seulement les appareils photographiques et les récepteurs radio portatifs japonais qui monopolisent les marchés, mais toute l’électronique grand public qui est menacée. Les industriels de l’automobile sont effrayés par la menace et, comble de tout, les composants électroniques, sources de tout l’avenir des technosciences de la communication et de la connaissance, sont en train de passer sous la domination exclusive des sociétés nippones.
Un bilan rapide
Tous les indicateurs concordent : le Japon est en tête
de toutes les nations pour :
- la balance des paiements courants : 95 Md de dollars d’excédents
en 1987,
- le taux de chômage : 2,3 % en 1988 et aussi probablement en
1989, le plus bas des pays industrialisés,
- l’accroissement du pouvoir d’achat du salaire brut moyen : 3,5 % en
1988, 3,4 en 1989,
- l’indice de la production industrielle 136 en 1988 (base 100 en 1980),
- l’augmentation des prix à la consommation : 0,6 % seulement
en 1988, 1,7 environ en 1989,
- la croissance de 5,7 % en 1988, estimée 5 % en 1989,
- la diffusion de la presse : l’Asahi Shimbun tire chaque jour à
8 M d’exemplaires, - le record de la capitalisation boursière
2800 Millions de dollars en 1988, etc...
Quelques résultats spectaculaires ont frappé l’opinion
aux Etats-Unis et dans la Communauté Européenne :
- rachats de Columbia par Sony et du Rockfeller Center par Mitsubishi,
- classement de dix banques nippones sur les dix premières mondiales
(six d’entre elles viennent d’entrer à la Bourse de Paris)
- production de véhicules automobiles de 12,7 M en 1988, devant
les Etats-Unis depuis 1981,
- dépôt de 300.000 brevets d’invention en 1988 ; trois fois
plus que les Américains et dix sept fois plus que les Français,
- financement des grandes universités américaines par
les géants japonais et parmi elles, le célèbre
MIT (Massachusetts Institute of Technology) etc.
Une accusation
Devant le danger, les réactions sont vives.
En France, on a observé que la négociation "Peugeot"
s’est déroulée sur fond de concurrence Honda, Nissan et
Toyota. Mais celui qui s’estime le plus en péril est sûrement
Alain Gomez, Président Directeur général de Thomson.
Devenue l’une des pièces maitresses de l’Occident en matière
d’électronique grand public, sa société est exposée
en première ligne. A. Gomez s’affole et déclare à
TF1, le 24 novembre 1989
"Le marché japonais est totalement fermé. II est
organisé par les grands groupes japonais entre eux..." avec
pour conséquence que " les prix intérieurs japonais
sont nettement supérieurs aux prix mondiaux... Un Japonais n’achète
pas un poste de télévision ou un disque compact au même
prix qu’un Français en France ou un Américain aux Etats-Unis..."
.II achèterait 20 à 30 % plus cher qu’à l’extérieur.
A. Gomez poursuit : "Cet argent supplémentaire qui est offert
par le consommateur japonais aux industriels de son pays est tout entier
consacré à la recherche et au développement.. Le
consommateur japonais finance ainsi la guerre à l’extérieur
par l’industrie japonaise... dans la mesure où son système
social et ses conditions de travail sont bien moins acceptables que
chez nous... " Et il conclut : "Le problème est de savoir
si nous allons accepter que, du fait de cette tricherie, notre propre
système social et notre propre système de vie soient balayés...".
Le PDG de Thomson qui vient d’ailleurs de passer un accord avec Toshiba
pour la fabrication commune de magnétoscopes et qui n’est donc
pas à une contradiction près, insiste dans "le Point"
du 18 décembre 1989 (1). II réitère ses accusations
de tricherie et demande une barrière douanière européenne
afin qu’en la matière, l’Europe conserve son autonomie de production
et de technologie que les Etats-Unis ont perdue. Voulant ignorer que
la CEE est dominée par le "libre échangisme"
de Kohl et Thatcher, il demande une protection pour ceux qui "ont
déjà la corde au cou - les industriels de l’électronique
- et ceux qui vont l’avoir - les industriels de l’automobile".
II craint que "l’indépendance de nos pays" soit, à
terme, en cause.
A. Gomez n’aurait-il pas dû, avant de réagir aussi inconsidérément,
réfléchir aux causes de cette situation et à leurs
conséquences inéluctables ?
Une motivation
Pour ceux qui croient encore que les guerres modernes
peuvent être gagnées ou perdues, le réveil est brutal
: les deux nations qui auraient été "vaincues"
en 1945, l’Allemagne et le Japon, sont économiquement parmi les
plus puissantes.
Les Japonais ont été humiliés en 1945. Leur ultra-nationalisme
a été brutalement choqué par les explosions nucléaires
d’Hiroshima et de Nagasaki sans que leurs armes aient pu véritablement
être mises en oeuvre sur le terrain. Le proconsul Mac-Arthur s’est
substitué à la famille impériale pour conduire
le pays. Sacrilège !
L’histoire des relations entre le Japon et les Occidentaux fut d’ailleurs
mouvementée. Une suite d’échecs et de revanches la caractérise.
Les Orientaux en ont conçu une grande détermination qui,
faute de s’exercer dans le domaine militaire, se reporte dans l’économie
financière.
Le manque "d’espace vital" avait entrainé le pays à
se joindre à l’axe "Rome-Berlin". Le peu de ressources
en matières premières le contraint aujourd’hui à
se spécialiser dans la "valeur ajoutée" industrielle.
Les Japonais ont donc décidé d’égaler puis de dépasser
les Américains sur leur terrain. Avec une volonté, une
ténacité, une abnégation que certains trouveront
admirables et une discipline que d’autres qualifieront d’excessive (2),
ils se sont voués en grande majorité à cette tâche
et ont, d’ores et déjà, atteint une grande partie de leurs
objectifs.
Aujourd’hui, ils souscrivent, en moyenne, 30 % des bons du Trésor
américains permettant ainsi d’amortir l’immense dette des Etats-Unis,
mais détenant en même temps un gage qui leur permettra
d’exercer, lorsqu’ils le désireront, une pression économico-politique
décisive sur leurs débiteurs.
Un miraclie ?
Comment en sont-ils arrivés là ?
D’abord, c’est bien connu, en copiant les modèles occidentaux.
Mais ensuite en les améliorant, puis en innovant. Le dénigrement
n’est plus de mise. Ces Japonais qui étaient, parait-il, des
alcooliques du travail (workalcoholic en anglo-américain) incapables
de penser en binaire (langage des ordinateurs) et vivant dans des clapiers
à lapin, d’après une mission de parlementaires occidentaux,
donnent en fait des leçons.
Ils ont commencé par mettre en place un système d’enseignement
remarquable entièrement adapté au but à atteindre.
Etant donné l’orientation du monde vers la technoscience, ils
ont dirigé leurs facultés en ce sens. Aujourd’hui les
universités techniques sont les plus prestigieuses. 35.000 diplômés
de haut niveau sortent chaque année des facultés scientifiques.
C’est le plus fort taux par habitant du inonde.
Suivant en cela les enseignements du Boudha, ils vénèrent
les anciens. Ne voulant pas perdre la plus faible partie de l’expérience
des vieux médecins , ils leur font enregistrer leur savoir sur
ordinateur joignant ainsi, dans un raccourci saisissant et combien révélateur,
la tradition la plus ancienne avec la science la plus en pointe.
La voiture à quatre roues directrices, la caméra auto-focus,
la vidéo mobile parlante, la télévision miniature
portable, l’escalator courbe, le caddy-robot, ce sont eux. Les Américains
envisagent sérieusement d’adopter leur système de télévision
haute définition de préférence au procédé
européen D2 Mac. Ils dominent dans le domaine des ordinateurs
de cinquième génération, ceux qui parleront, traduiront
et commenceront à penser.
Les tensions engendrées, parmi les adolescents, par un enseignement
ultra sélectif, se seraient apaisées et le nombre des
suicides d’adolescents serait retombé à la moyenne mondiale.
Les jeunes Japonais bénéficient d’une organisation unique
au monde d’apprentissage de la musique et les virtuoses collectionnent
les récompenses, dans les concours internationaux, pour la plupart
des instruments.
Un avenir
Certains Japonais débordent de fierté !
Akio Morita, PDG de Sony, et Shintaro Ishihara, romancier à succès,
viennent d’écrire un livre à scandale "Le Japon peut
dire non !" Les auteurs célèbrent la dépendance
des Etats-Unis vis-à-vis de leur pays. Malgré l’avertissement
faussement candide de l’éditeur Kobunsha suivant lequel cet ouvrage
ne serait pas destiné aux étrangers, l’arrogance américaine
est ébranlée. Même si les auteurs sont accusés
d’extrémisme, leurs thèses font du bruit...
D’autres habitants du pays du "Soleil Levant" reconnaissent
que la société "d’abondance" n’est pas encore
satisfaisante chez eux. La population vieillit, la contestation s’extériorise
de plus en plus, en même temps que la pollution s’accroit. Le
système de couverture sociale est très imparfait. Le logement
devra être amélioré. Ne doutons pas toutefois qu’après
avoir bénéficié de transferts de techniques industrielles,
les Nippons sauront apprendre aussi dans ce domaine. Leur nouvelle richesse
leur facilitera la répartition. La croissance risque d’être
attisée par l’augmentation du budget militaire (139 % sur 15
ans de 1971 à 1986). Malgré la renonciation aux forces
armées inscrite dans la Constitution dictée par Mac-Arthur,
le Japon a dorénavant le troisième budget des armées
au monde, devant la France. La force "d’autodéfense"
prend des allures menaçantes étant donné son haut
potentiel technique.
L’habileté et l’obséquiosité bien connues des Japonais
font merveille. Ils ont su s’introduire en Europe avant 1993, ils y
contrôlent 506 usines pour un investissement de 10 M de dollars
et leurs trois grandes marques y produiront plus d’un million de voitures
avant 1995. Enfin ils ont déjà investi 9 M.de F dans l’immobilier
de la région parisienne et les géants de l’assurance commencent
à s’installer en France.
La concurrence s’annonce sévère dans tous les domaines...
Au-delà de la récrimination
A. Gomez découvre qu’il y aurait des lois dans
la jungle capitaliste ! N’est-il pas en contradiction avec lui-même
?
Comment comparer les prix intérieurs du Japon avec ceux des pays
occidentaux alors que tout le monde sait que les taux des changes sont
purement spéculatifs et qu’il n’existe aucune parité entre
le pouvoir d’achat réel des différentes monnaies ? Du
reste, les prix, même dans un seul pays, sont très divers
suivant les points de vente, tous les consommateurs le savent.
Les Japonais sont souples, ils se sont imposé une auto-limitation
des exportations de voitures aux Etats-Unis contre le maintien du bouclier
armé américain. Comment, dans ce sytème, le leur
reprocher ?
Les adversaires de Thomson se battent, ils savent tourner les principes
capitalistes à leur avantage. Ce sont des gagneurs, des battants,
des innovateurs. Ils réussissent. N’est-ce pas là l’idéologie
que les patrons veulent enseigner aux jeunes Français ?
Et même si les Nippons paient vraiment plus pour un même
produit, où est le mal ? La mode, la publicité et, quelquefois,
le snobisme ont bien réussi à convaincre un nombre important
de clients d’acheter cinq ou six fois (500 à 600 %) le prix normal
des chemisettes de même qualité sous prétexte qu’elles
portent un crocodile, des robes ou des bagages qui sont signés
par certains stylistes. Les bénéfices qui en résultent
n’ont, en France, jamais servi à la recherche ni au développement.
Les financiers français sont trop avides et ils laissent de notoriété
publique l’Etat procéder à ces dépenses qu’ils
considèrent improductives...
Si les travailleurs de l’archipel acceptent quelquefois des salaires
et des conditions de travail inférieurs aux habitudes occidentales
en ce domaine, c’est aussi par dévouement à leur entreprise,
à leur patrie et par consensus syndical (3). Estce que, par hasard,
A. Gomez serait partisan d’employer du personnel contestataire qui adhérerait
à des syndicats oppositionnels par principe ? Est-ce qu’il embaucherait
pour ses fabrications d’armement hautement sophistiquées et donc
ultra-secrètes (4), des étrangers ou des Français
soupçonnés de convictions internationalistes ?
Les Japonais, c’est vrai, bloquent au maximum leur marché : normes,
réglementation, subtilités de langage ou de législation
sont prévues pour décourager les importateurs. Dans la
"guerre" économique que se livrent les puissances industrialisées,
tout le monde en fait autant sans l’avouer. Si nous avions le coeur
de plaisanter sur ces sujets, nous rappellerions ces paroles de César
: "Si on ne peut plus tricher avec ses amis, ce n’est plus la peine
de jouer aux cartes". (5) Les Occidentaux utilisent entre eux ces
mêmes pratiques. C’est la loi du plus fort. Malheur aux perdants
La réaction d’ A. Gomez : "Pouce ! je ne joue plus"
est infantile.
En résumé, les Japonais dominent le soidisant libéralisme.
D’autres les suivent dans cette voie : Coréens, Malaisiens, Chinois
des différentes obédiences, etc... Les ennuis des patrons
occidentaux ne font que commencer.
Conclusion : détrompons d’abord le lecteur qui penserait que
cette chronique chante la gloire du Japon et de ses habitants. Bien
au contraire, nous avons tenté de montrer que dans un système
pervers par lui-même, ils se sont montrés mieux adaptés,
c’est-à-dire plus pervers que leurs concurrents. Mais tricheurs
? non ! Pour tricher. i ! faudrait qu’il existe des règles claires
qui s’imposent à tous, ce qui n’est pas le cas.
Nous sommes évidemment conscients ici que les chefs d’entreprise
ne sont pas les seuls en cause. Leur personnel, depuis les directeurs
jusqu’aux simples employés ou ouvriers, surtout ces derniers,
subira avant eux les méfaits du système.
II serait temps que nous le comprenions tous : ce jeu guerrier est dépassé,
comme la guerre elle-même. Les Japonais eux-mêmes commencent
à l’entrevoir. La technoscience permet et permettra encore davantage
de satisfaire les besoins essentiels, ainsi que les aspirations artistiques,
intellectuelles, ludiques, sportives et autres, de tous. Cherchons ensemble
les voies vers une économie enfin adaptée à la
mutation en cours . Au-delà de la récrimination, c’est
la seule démarche raisonnable.
1. D’où nous avons tiré certains renseignements
et statistiques pour cette chronique.
2 Le réseau NHK de télévision publique fonctionne
grâce à une redevance non obligatoire, mais payée
à 97 % par les téléspectateurs.
3. Voir la célèbre histoire du "gréviste"
qui porte un brassard signalant sa protestation, mais ... continue à
travailler.
4. Dans le sens du secret de Polichinelle.
5. Marcel Pagnol "Marius". acte III , premier tableau.
A tous ceux qui se lamentent à la pensée que nos thèses d’un revenu social versé à tous, égalitairement et sans relation avec un travail ou un emploi, ne sont pas convaincantes, la lecture des analyses que publie l’association européenne BIEN (*) offre amplement de quoi être réconfortés. Des ouvrages sont publiés partout dans le monde occidental sur le sujet. Notons en particulier :
Aux Pays-Bas : l’Union des travailleurs de l’alimentation,
qui fait partie de la Confédération Générale
hollandaise du travail, publie un nouveau pamphlet qui propose l’instauration
d’un revenu garanti à tous au plan européen, et conclut
qu’il est grand temps que les syndicats abandonnent leur position purement
défensive.
Bill Jordan, de l’Université d’Exeter, publie un nouvel ouvrage
dont le titre peut se traduire par "le Bien Commun. Citoyenneté,
moralité et intérêt personnel" dans lequel
il place l’allocation universelle comme la base d’un projet beaucoup
plus vaste : la construction d’une société basée
sur "l’intérêt commun des citoyens pour une bonne
qualité de vie". II souligne que le trait le plus caractéristique
de la "nouvelle orthodoxie" est le fait qu’elle exclut une
minorité grandissante de la population de tout partage de ce
qui est l’un des biens les plus précieux du capitalisme moderne
: un travail régulier à plein temps. II conclut que seul
un revenu de base pourrait, sans perte d’efficacité, réintégrer
les exclus. Mais sa signification serait limitée s’il n’était
pas aussi une façon de promouvoir une nouvelle moralité
sociale basée sur l’association volontaire et une active coopération
en vue du bien commun. La Commission de Justice de la Conférence
des Supérieurs religieux, réunie à Dublin l’an
dernier, note également que "les développements économiques
actuels en Irlande produisent une importante sous-classe permanente
qui ne cesse de croitre" et que la distribution "d’un revenu
de base garanti à tous est la façon la plus efficace de
sortir de l’impasse actuelle. Une telle mesure rendrait les gens non
plus mais moins dépendants, elle ne créerait pas l’injustice,
mais au contraire la justice... Le seul problème que pose un
revenu non gagné par un travail est que trop peu en ont’. Leur
conclusion se rapproche encore d’une autre de nos thèses : "Bien
qu’impossible dans le passé, c’est possible maintenant, au moins
si les possibilités de production de la robotique et des microprocesseurs
ne sont qu’une fraction de ce qu’on prétend qu’elles sont"...
"Le besoin essentiel maintenant, conclut le pamphlet, est d’une
action en faveur d’un revenu de base garanti à tout le monde".
Pour J. Mathews, en Australie, repensant les objectifs des mouvements
des travailleurs pour les années 90, un revenu minimum garanti
à tout le monde, conçu comme un droit en tant que citoyen,
et non comme une forme d’assistance est le seul moyen pour éviter
que les sociétés industrielles ne glissent, dans les dix
ans qui viennent, dans un état dual entre travailleurs et sans
emploi.
A suivre
(*) Basic Income European Network, dont nous avons beaucoup parlé déjà, surtout lors de sa création en septembre 86 et de sa seconde conférence en septembre 1988.
La dérive du socialisme
Fermeture des entreprises non rentables, chômage,
concurrence, vérité des prix, monopoles démantelés,
vente de biens publics et généralisation de celle des
terres et des immeubles, autogestion, actionnariat pour les travailleurs
achetant leurs entreprises, système bancaire ouvert sur le monde
extérieur avec accueil des capitaux étrangers, voilà
pour la Pologne où l’on fait "appel à la population
pour de nouveaux sacrifices". Déjà 900 % de hausse
sur les prix restés à peu près stables depuis une
trentaine d’années. De quoi dégoûter les Polonais
de l’économie de marché, providence de leurs seuls commerçants.
Au fil de 16 dévaluations successives, les épargnants
ont perdu leur laine. La veille de chaque nouvelle hausse, les accapareurs
vident les boutiques, créant des pénuries commodément
imputées à l’ancienne gestion socialiste. Du moins l’Etat
apuret-il ainsi peu à peu sa dette intérieure.
Economie de marché, de profits privatisés, de libre concurrence
? ’On croit rêver. Jetés par dessus bord les fonds de consommation,
un système de prix qui assurait leur stabilité, leur bas
niveau pour les produits et services courants. Jetés pareillement
aux orties le Plan, la globalisation des profits, leur centralisation
par un unique investisseur rendu capable des plus étonnantes
et gigantesques réalisations, en matière d’urbanisme,
recherche, combinats, spatial, mise en valeur, irrigations , enseignement,
sport, culture, défense. Révolues la sécurité
de l’emploi et du revenu pour chacun, la gratuité des soins,
de l’enseignement, bref tout ce qui faisait l’originalité des
sociétés de l’Est aventurées aujourd’hui sur la
voie périlleuse d’un ultralibéralisme.
Chine, 400 millions de tonnes de céréales
Presque un record "en attendant les 500 millions". Pourtant, un article de foi place les pays socialistes au trentesixième dessous en matière de production agricole. Qui croire ?
Week-end à Berlin
Un intéressant spectacle pour les Allemands de la RDA. De belles vitrines à regarder. Ils ont défilé devant les boutiques aussi inaccessibles à leurs désirs qu’elles le sont, partout ailleurs, aux familles des chômeurs, à la multitude des sans-le-sou. Du moins, l’énorme processsion des "Trabant" a-t-elle témoigné que la RDA ne comptait pas que des va-nu-pieds. Des carrosseries en platique, des moteurs deux-temps ? Disons du léger, de l’économique. N’avons-nous pas, sans complexe, roulé des années durant dans nos deuxchevaux presque aussi simplettes ?
Trop, c’est trop
La RFA veut bien accueillir un nombre limité
de réfugiés bon teint arborant le label du dissident dûment
catalogué, juste de quoi alimenter la propagande antisocialiste,
à condition que leur présence ne menace ni le confort,
ni le revenu des nantis du crû. Mais, trop, c’est trop. Le libéralisme
n’a jamais été une institution d’entraide et les fonds
de la Croix Rouge ont leurs limites. Les Etats-Unis n’ont-ils pas été
les premiers à tirer la sonnette d’alarme en fermant leur territoire
à l’accès des dissidents soviétiques. ?
Un certain désenchantement se manifeste déjà parmi
les flots des réfugiés et s’esquisse l’amorce d’un reflux.
On va leur promettre une part de cette once de liberté qu’ils
revendiquent, améliorer leur ravitaillement et ils finiront par
réintégrer leur lieu d’origine après une escapade
qui leur aura fait découvrir que la vie pouvait être à
l’Ouest plus difficile, plus âpre pour les malchanceux.
Berlin, choc en retour
Marché noir, contrebande, trocs, trafics en
tous genres, arnaque, la joie pour le commerce, la fête pour les
antiquaires. Chassés de la RFA pour faire place aux réfugiés,
les Turcs filent sur Strasbourg et Paris.
La perspective d’une réunification ? S’agissant d’une même
ethnie, un acte politique peut toujours l’imposer au nom de la démocratie,
de sa règle majoritaire. Ce ne serait jamais qu’une entorse de
plus aux accords de Postdam déjà violés à
maintes reprises par les alliés occidentaux (création
de la RFA, réarmement allemand, non démantèlemet
de l’industrie de la Ruhr, alliance atlantique et pacte de l’OTAN dirigés
contre l’Union soviétique, ingérences multiples, politiques
et audiovisuelles en matière de propagnade, réforme monétaire,
etc..). Restent à régler le problème des écarts
de prix, celui posé par les régimes sociaux. Mais les
14 millions d’Allemands concernés, embrigadés de gré
ou de force au sein d’un Etat unifié fort de 80 millions des
leurs, ne tarderont pas à s’adapter, bon gré mal gré,
à leurs nouvelles conditions de vie, à l’instar de toutes
les minorités tenues de se plier à la loi d’une majorité.
Et l’Europe ?
Celle de 1993 a déjà du plomb dans l’aile.
Une grande Allemagne n’a que faire de la poussière de ses concurrents
ouest-européens cherchant à lui tailler des plumes, et
que l’on voit se déchirer à belles dents, sous le masque
hypocrite d’une fausse solidarité. Son expansion économique
est à l’Est et le basculement dans l’économie de marché,
de l’Union soviétique et des démocraties populaires, lui
en ouvre la voie royale et pacifique.
Plus de menace militaire, plus d’ennemi à l’Est ? L’anti-soviétisme,
ciment de l’Europe des Douze, passé à la trappe ? L’Otan,
la "force de dissuasion" reléguées aux vieilles
lunes ? De telles perspectives, on le conçoit, n’emballent guère
la nuée des affairistes orbitant autour des budgets de la Défense,
ni les personnels employés dans ses industries ou siégeant
dans ses innombrables bureaucraties.
Les lobbies s’activent. La propagande change de registre. II faudrait
temporiser, préparer un point de chute pour cette Europe en voie
de désagrégation, prête à tomber en quenouille,
quasi-abandonnée par son principal partenaire. Mais tout va trop
vite. A l’Est, tout le monde est pressé. On a brûlé
les idoles, décapité le Pouvoir. Sur tous les fronts à
la fois, l’incendie déferle et il est trop tard désormais
pour allumer des contrefeux, pour enrayer une pareille chienlit. Les
responsables ? Un chef d’orchestre ? Is fecit cui prodest.
Aujourd’hui, les Allemands ont un tiersmonde à leur porte ; d’immenses
besoins à alimenter. Des débouchés pour un siècle.
Reste à les solvabiliser, ce dont les systèmes monétaires
et financiers englués dans les exigences du profit se sont toujours
avéré incapables. Une lueur d’espoir en faveur d’un socialisme
à monnaie de consommation.
La tolérance, c’est l’acceptation des différences
pour lesquelles on discriminait, à tort, des gens qui n’y pouvaient
rien : malades, handicapés, jeunes, vieux, femmes, noirs, arabes,
pauvres, marginaux ; ou bien dont les opinions diffèrent des nôtres
mais n’entrainent aucune perturbation sociale ou familiale.
Aujourd’hui, ces concepts de différence et de tolérance
sont détournés de leur origine et nous ne cessons, tous,
de tricher avec nous-mêmes, puisque quotidiennement contraints
de tolérer des millions d’horreurs, d’ignominies, de menaces
qui peuvent à tout instant nous frapper personnellement, et qui
ne sont le fait que de l’incompétence, de la corruption, de l’avidité
égocentrique des hommes de pouvoir.
Si nous ne disons rien, nous sommes partie prenante de cette lâcheté,
nous sommes partie intégrante des massacres qui, perpétrés
ailleurs, rapportent à l’Etat français 35 milliards de
francs par an ; nous sommes bénéficiaires indirects, dans
tous nos acquis, technologiques et culturels, de l’exploitation du tiersmonde
là-bas et ici... de celle même de notre propre prolétariat
dès le siècle dit "des lumières" (36
chandelles !!) et de l’institutionnalisation d’un quart-monde aujourd’hui.
Si bien que notre idée de la tolérance est totalement
pervertie, ressortie à mauvais escient, tout comme celle d’une
liberté qui s’exerce peu. Devant ce peu de choix, nous faisons
semblant d’avoir résolu nos problèmes. Nous ne cessons,
en fait, de fonctionner sur des leurres :
- celui des Droits de l’Homme, bafoués partout,
- celui de la liberté d’expression, censurée dès qu’elle dérange,
- celui de la laïcité, dans lequel, l’histoire ayant dérivé, on met tout ce qu’on veut,
- celui de la tolérance, qui fait que dès que quelqu’un n’est pas conforme à ce que les pouvoirs en place ont décrété, il se retrouve expulsé, en prison, à l’asile, dans des camps, privé de ressources...
Et chaque Français tolère très bien tout çà, tout en se faisant croire qu’il l’a choisi, qu’il a le choix, mais cependant, n’est ni responsable, ni coupable, et que tout-va-très-bien-merci... jusqu’à ce qu’il lui arrive une tuile. Alors, on crie "Au loup", et on se met à réfléchir...