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Éditorial
PREMIER TOUR
Je pense qu’on peut - une fois tous les sept ans n’est pas coutume -
parler politique dans les colonnes de la Grande Relève. En fait,
ces réflexions, nous le verrons, rejoignent in fine nos préoccupations
socio-économiques. Je précise que les conclusions de cette
analyse risquent en partie d’être mises à mal si la droite
devait l’emporter. Les jeux seront faits lorsque vous lirez cet article :
tant pis, je prends le risque.
Sans être grand clerc, j’avais prévu Mitterrand 34 %, Barre
16 %, Lajoinie 7%, Juquin 2%... Mais comme la plupart, je me suis planté
sur Chirac et Le Pen : respectivement 23 au lieu de 19,9 et 11 au lieu
de 14,4. Si le score de Le Pen doit nous inquiéter, celui de
Chirac doit nous réjouir : la claque est magistrale et l’Etat
RPR est à peine mois "facho" et dangereux que l’extrême-droite ;
d’autant que le RPR avait - et garde encore - des chances d’exercer
le pouvoir, un pouvoir absolu ; Le Pen, non, ou moins dans l’immédiat.
Le RPR, "ruisselant de fric" (dixit un lieutenant de Barre),
avec un candidat "battant" qui rassemble, écoute, représente
le courage, l’ardeur... bref, le plus capable et le plus beau, sinon
le plus intelligent !) voit son caquet sérieusement rabattu et
les chances de la droite la plus dure de l’emporter au second tour fortement
compromises. C’est déjà un point (Lire dans le Monde Diplomatique
d’Avril l’article sur "l’offensive contre le droit du travail"
notamment au pays de Madame Thatcher, modèle de Chirac). Il est
bon que ce soit un Chirac dévalué plutôt qu’un Barre
triomphant qui représente la droite au second tour, car ce dernier
avait de bonnes chances de battre Mitterrand ; Chirac n’en a guère.
Et le "ménage à trois" de la droite nouvelle,
à peu près partagée entre trois frères ennemis
- frères, mais ennemis tout de même : ne tombons pas dans
le simplisme ou PC - donne un peu de répit aux vraies forces
de progrès à travers une gestion socialo-centriste.
LE JEU DE BARRE
Barre devait connaître - tout comme Chirac savait que le score
de Le Pen serait de 14 % - les vrais sondages, en dehors des sondages
médiatiques, truqués, payés. C’est sans doute là
qu’il faut chercher le sens de son apostrophe : "Rira bien qui rira
le dernier". L’humiliation de Chirac le réjouit profondément.
Il pense que, sauf si ce dernier gagnait les élections, son propre
avenir reste ouvert.
Pendant la campagne, il avait dit qu’il serait loyal s’il perdait la
primaire et ne ferait pas comme ceux -suivez mon regard- qui en 1981
ont trahi leur camp au second tour. D’où ce numéro de
duettistes, une demi-heure après les résultats. Mais ne
nous y trompons pas : en fait Barre trahit Chirac, mais avec beaucoup
plus de finesse que ce grand balourd de Chirac avait trahi Giscard.
Il lui impose "une société... qui refuse la xénophobie,
le racisme". Autrement dit, comme Chirac devra peu ou prou faire
des mamours aux Lepénistes, sinon à Le Pen directement,
ce qui serait dangereux, pour avoir quelque chance d’être élu,
Barre lance un clin d’oeil à ses électeurs les plus subtils :
J’appelle à voter Chirac parce que je ne peux pas faire autrement,
mais en me démarquant nettement ou FN, j’espère que nombre
d’entre vous ne voteront pas Chirac". Et de fait, les premiers
sondages donnent 12% des électeurs Barristes prêts à
voter Mitterrand. Plus 30 % de Lepénistes, souvent ex-électeurs
communistes égarés, qui doivent voter Mitterrand. Exit
Chirac, surtout si l’écart est important.
Barre, 64 ans, garde alors toutes ses chances d’être élu
dans 5 ans (mandat présidentiel raccourci) ; et Mitterrand, 72
ans, peut casser sa pipe...
En attendant, Barre essaierait de prendre la tête d’un grand parti
conservateur libéral, à la manière dont Balladur
et Chirac avaient lancé une O.P.A. sur un parti RPRUDF, sous-entendu
bien sûr, à dominante RPR. "Tous derrière et
lui devant", comme le Monde le dit avec humour en rappelant la
chanson de Brassens.
Restent deux inconnues :
-La première, mineure, mais non négligeable : le retour
de Giscard qui frétillant déjà dans les coulisses,
indique le "bon choix". Certes, il vise avant tout d’être
le Premier Président Européen. Mais en attendant... Il
aime tant le pouvoir !
- La seconde, plus sérieuse : si Mitterrand est élu, le
Parlement majoritaire à droite, rendra la France ingouvernable :
Chirac a prévenu. Dans ce cas, il y aura dissolution. Mais au
scrutin majoritaire, après le charcutage des circonscriptions
par Pasqua, la Chambre risque d’être à nouveau de droite.
Car si la France peut se trouver majoritaire pour élire un homme
au charisme rassembleur, elle reste majoritairement de droite dans ses
profondeurs : à preuve, si Rocard, pourtant populaire, avait représenté
le PS et la gauche, la France élisait un Président de
droite dans tous les cas de figure.
Donc, si la Chambre renouvelée est à droite, la France
est à nouveau ingouvernable : un bras de fer insoluble. Et la
droite extrême - Le Pen - serait encore renforcée par ce
duel et mise sur une orbite de 20% des voix.
Supposons une chambre de gauche, même avec une très courte
majorité, à la rigueur obtenue avec les élus communistes,
que se passe-t-il ? Mitterrand constitue un gouvernement socialo-centriste
qui ne toucherait pas à l’économie de marché et
aurait pour consigne - "une France unie" oblige- de ne pas
faire de vagues.
En tête. l’ENTREPRISE et l’EUROPE (1), deux objectifs, comme on
voit, exaltants pour un chômeur déprimé !
Puis une double mesure spectaculaire : le rétablissement de l’impôt
sur les grandes fortunes (5 à 6 milliards) pour financer un minimum
social (estimé par Rocard à 10 milliards) de 2.000 F/mois.
Soulignons que Mitterrand aurait peu de mérite à créer
ce minimum : 78% des patrons sont pour, d’après une enquête
récente ; mais çà, le bon peuple l’ignore.
Pour le reste, statu quo. Pas de vagues, disions-nous. On ne reviendra
pas sur l’école privée, ni sur les privatisations, même
j’en fais le pari, de TF1. On n’osera même pas "casser les
noyaux durs", pourtant violemment vilipendés par le PS il
y a peu.
On ne résorbera pas un chômeur, sauf par artifice. Une
diminution significative des heures de travail - 36,5 heures comme en
RFA - est exclue, surtout sans baisse des salaires : 91 % des patrons
sont contre et les socialistes, j’ai eu maintes fois l’occasion de m’en
rendre compte en discutant aussi bien avec des militants de base que
des responsables, sont imperméables à cette idée.
Seule, la couverture sociale - et c’est déjà beaucoup
par les temps qui courent - sera sans doute protégée,
du moins pour l’essentiel, car il ne faut pas oublier que c’est un gouvernement
socialiste, et singulièrement Bérégovoy, qui a
commencé à l’écorner en faisant payer une part
des journées d’hôpital, en créant les "médicaments
de confort", et surtout en aggravant la situation des chômeurs
en fin de droit : tout cela pour faire des économies et apparaître,
aux yeux des capitalistes, comme de bons gestionnaires de leur système
économique (2).
Il y a deux points sur lesquels nous attendons un gouvernement socialo-centriste :
1. Osera-t-il revenir sur l’autorisation de licenciements ? ce sera
un test : si, de peur de faire des vagues, il maintient cet état
de choses iniques qui n’a rien "donné" pour l’emploi
(nous, nous le savions, mais Gattaz avait promis l’embauche de 383.000
personnes), c’est qu’une droite type Barre et une "gauche"
type 1988 seront devenues bonnet blanc et blanc bonnet. Disons, pour
nous consoler, que c’est un moindre mal comparé à une
droite Chiraco-Lepéniste.
2. Le vote des émigrés, fut-ce pour
commencer au niveau municipal.
Alors, face à un tel gouvernement, que pouvons-nous faire, que
pouvons-nous espérer ? Car même si la Chambre redevenait,
après des élections législatives, majoritairement
de gauche, Mitterrand ferait la même politique, ou peu s’en faut :
seul avantage pour lui : ne pas craindre que les gouvernements soient
censurés.
Il nous faudrait parler fort, plus fort et, par exemple, rééditer
une plaquette courte (10-15 pages), claire, avec des illustrations parlant
d’ellesmêmes (type couverture de la Grande Relève d’Avril),
faisant le point de nos idées et solutions de façon crédible,
réaliste, face à la situation sociale et économique
actuelle. Plaquette à envoyer à tous les élus de
gauche, syndicalistes, partis, personnalités, journalistes sélectionnés ;
bref, en mieux, ce que nous avions fait en 1983 avec la plaquette "Sortir
le socialisme de la crise". Mais en 1983, l’euphorie majoritaire
socialiste n’était pas encore suffisamment atteinte, ce qui fit
sans doute que nous n’eûmes qu’une audience insignifiante, même
si certaines idées ont pu cheminer, transformées en cours
de route, comme un revenu social garanti. Vingt fois sur le métier,
remettons notre ouvrage. Pour nous, la période est plutôt
faste - l’Économie distributive s’imposera, peu ou prou, sans
doute par "touches" successives, dans les 10 à 15 ans
qui viennent.
(1) "II faut rompre avec le mythe du "grand
marché européen", redoutable piège s’il n’est
pas précédé d’un espace social anti-chômage
européen" (Alain Lipietz - Partage Mars-Avril).
(2) "La Gauche a mis beaucoup d’eau gestionnaire dans son vin social".
(Le Monde Diplomatique d’Avril 88).
La grande mutation, dont le plan s’esquisse dans notre
esprit, satisfait à une double exigence : la rationalité
économique et la justice sociale. La première implique
la direction de l’économie par les consommateurs, qui entraîne
une refonte totale de nos structures ; la seconde dépend en grande
partie de la première, mais elle nécessite en outre une
réorganisation interne des entreprises, favorisant le libre épanouissement
des individus.
Sur la base de ces principes généraux, des réalisations
assez variées peuvent se concevoir. C’est en réfléchissant
aux causes possibles d’échec que l’on découvrira toute
la valeur de cette diversité.
Parmi ces causes figure d’abord l’opposition, non seulement des forces
conservatrices, mais aussi de tous ceux qu’effraie la perspective d’une
transformation trop brutale et trop contraignante, dont ils mesurent
mal les conséquences. Puis les erreurs que l’on peut commettre
au cours d’une réorganisation d’une si grande envergure : le fonctionnement
d’une économie où les consommateurs décident entièrement
de la production, comporte le risque d’une concentration excessive,
entraînant une bureaucratie paralysante et le manque de motivation
d’une grande partie des cadres responsables ; une organisation démocratique
des entreprises, capable en principe d’assurer la motivation des travailleurs,
présente aussi des écueils, tels que l’incompétence
et les relations conflictuelles entre les individus ; on notera que ces
difficultés concernent pour une large part le mode de répartition
des pouvoirs entre les agents économiques.
Or nous trouverons dans le fédéralisme une réponse
adéquate à nos interrogations et à nos inquiétudes.
Il réalise une répartition harmonieuse et équilibrée
des pouvoirs de décision : au partage des revenus et des tâches,
schéma classique de notre doctrine, il conviendra d’ajouter,
comme le suggère Gaston Puel (1), le partage des pouvoirs. En
même temps, il introduit dans les structures diversité
et souplesse : il nous évitera donc d’instaurer un système
uniforme et de faire d’emblée des choix définitifs ; quand
une erreur sera commise, elle sera plus facile à réparer
et les conséquences en seront moins graves si elle ne concerne
qu’une zone d’étendue restreinte. Pour toutes ces raisons, les
solutions fédéralistes donnent à l’économie
distributive un aspect rassurant, propre à apaiser les appréhensions
d’un public encore peu convaincu de sa nécessité et de
ses bienfaits.
Les applications du fédéralisme au nouveau système
économique se conçoivent sur deux plans différents.
En premier lieu, sur le plan territorial, il répartit les pouvoirs
entre des zones incluses les unes dans les autres, par exemple entre
la nation, les régions et les communes. Le risque des lourdeurs
bureaucratiques se trouve ainsi éliminé. Une question
se pose, en particulier, dans tout système distributif : à
quel niveau se situe la prise en mains, par un organisme représentant
les consommateurs, des produits qui lui sont fournis ? On pourrait sans
doute imaginer que ce contact entre production et consommation ait lieu
au niveau national ; mais ce mécanisme trop rigide risque de
mal fonctionner. Il me paraît préférable que cette
prise en mains, qui précède la distribution, se situe
d’abord au niveau inférieur, les excédents des productions
locales, puis régionales, étant répartis successivement
d’échelon en échelon ; cette organisation, de style fédéraliste,
est plus complexe, mais la multiplication des centres de décision
est plus stimulante pour les habitants des différentes zones
(2).
En second lieu, le fédéralisme est susceptible d’applications
d’ordre fonctionnel. Sur le plan politique, la fédération
et ses membres se partagent différents domaines. En économie,
selon le même schéma fédératif, la collectivité
des consommateurs et les unités de production qui y sont incluses
se répartiront des fonctions différentes : à la
première la direction générale, aux secondes le
pouvoir de gérer l’entreprise de façon autonome et de
régler l’organisation du travail. Mais là encore une grande
diversité est possible : aussi bien. le degré de cette
autonomie que les modalités de cette organisation interne seront
variables.
Cette diversité permet de comparer les différents systèmes,
au point de vue économique et au point de vue social, et aussi
l’efficacité des différentes mesures de transition. Une
certaine émulation pourra naître, à tous les niveaux,
entre groupements similaires, et l’économie y gagnera en dynamisme.
En outre, la souplesse inhérente au fédéralisme
est si grande qu’elle permet d’adapter le processus évolutif
au degré de maturité des diverses régions. Cette
remarque prend toute sa valeur dans le cas où le gouvernement
n’avancerait que timidement sur la voie du distributisme. On peut imaginer
que des expériences locales, qui s’inscrivant à l’avance
dans le schéma de l’organistion fédérative, soient
tentées en premier lieu dans des régions où les
circonstances sont favorables et la population d’esprit ouvert, ce qui
suppose, assurément, que le gouvernement soit disposé,
sinon à aider, du moins à tolérer de telles initiatives.
Même si elles ne pouvaient guère dépasser, tout
d’abord, le stade des mesures transitoires ou de réalisations
incomplètes, ces expériences constitueraient une amorce
de la mutation distributiste ; elles aideraient le public à comprendre
ce qu’est une économie des besoins ; enfin, puisque le progrès
des institutions se règle sur celui des mentalités, le
recours à la contrainte pourrait être réduit au
minimum.
Je n’ignore pas que certains de nos amis, pour qui la rapidité
est la condition du succès (3), jugeront cette méthode
à la fois trop lente et trop complexe. Je souhaite qu’on ne se
hâte pas trop de la rejeter, car elle me parait présenter
plus d’avantages que d’inconvénient.
Ma pensée s’écarte sur plusieurs points des idées
que René Marlin a exprimées dans son article du n°
866.
Je n’ai pas à revenir sur le fédéralisme, si ce
n’est pour noter qu’il n’a nullement- tel que je le conçois,
car il y a fédéralisme et fédéralisme -
la prétention de résoudre à la fois tous les problèmes.
Plus modestement, il se borne à donner une forme déterminée
à un contenu que son rôle n’est pas de définir.
Il importe de bien distinguer certaines réformes d’ordre social,
destinées à améliorer les conditions de vie à
l’intérieur d’une entreprise, des mesures transitoires préparant
une mutation qui est avant tout d’ordre économique.
intéressantes au point de vue social, les coopératives
de production ont effectivement subi de nombreux échecs, et,
bien entendu, elles restent plongées dans le milieu capitaliste
où règnent la concurrence et le profit. Mais les coopératives
de consommation sont aptes à réaliser, quand elles sont
assez développées pour créer ou intégrer
les unités de production qui . les approvisionnent, une véritable
économie des besoins. C’est pourquoi elles pourraient constituer
une transition vers cette forme plus parfaite qu’est l’économie
distributive. Elles ont obtenu des succès remarquables (4), et
si elles connaissent quelques échecs en France, il conviendrait
d’en déceler les causes exactes ; l’une d’elles est probablement
l’indifférence du public, qui comprend mal le but ultime poursuivi
par les coopérateurs.
(1) Gaston Puel, L’heure du partage (1978). Cet ouvrage
a été analysé dans le n° 763 de la G.R.
(2) Ce système me paraît assez voisin des structures décrites
par M.-L. Duboin dans Les affranchis de l’an 2000 (p. 119, 158, 202,
290).
(3) Cf. Maurice Laudrain, L’Incapacité au pouvoir (1984), p.
114.
(4) Notamment dans certains pays, dont la Suède, la Suisse, l’Islande.
Consulter à ce sujet Ch. Gide, Les sociétés coopératives
de consommation (4° ed., 1924), et Georges Lasserre, La coopération
(1967) (Que sais-je ? n° 821). p. 35 - Quel mouvement, s’écrit
Ch. Gide (p. XIV), offrirait "des statistiques plus impressionnantes"
?
Lectures
Même dans une revue scientifique telle que "Science
et Vie" il est possible de découvrir des journalistes que
ne renierait pas la Grande Relève.
Témoin cet article de Gérald Messadié paru dans
cette revue de mars 1988 et dont nous extrayons quelques paragraphes
significatifs.
"Ce ne sont jamais les livres dont on parle
qu’il faut lire. Ainsi la grande presse n’a pas rendu l’hommage qu’il
faudrait à l’ouvrage de premier plan et de brûlante actualité,
l’Ecrivain public et l’Ordinateur.
Ecrit par MM. Jacques Salomon, Professeur au Conservatoire National
des Arts et Métiers et André Lebeau, Directeur de notre
Météo et docteur es-Sciences... ".
"Le thème en est le suivant : en gros cessons donc de réciter
la ritournelle de la Science et de la Technique au service du développement..."
et plus loin... "L’injection de technologie de pointe dans les
mieux dotés en matière grise d’entre ces pays (pays à
technologie avancée) comme le Brésil, aboutit à
la création d’industries de niveau international, comme l’industrie
aéronautique brésilienne. Hélas les bienfaits économiques
de ces injections ne bénéficient qu’à un petit
nombre d’individus...".
"Le Brésil compte 80 % de laissés pour compte. Les
bénéfices de ses industries ne vont qu’à l’Etat...
et cet Etat ne semble guère s’en porter mieux, car il a amassé
ces dernières années, comme chacun sait, une dette internationale
supérieure à 100 milliards de dollars... Les schémas
(lesquels) des pays développés ne sont pas valables pour
ceux qui sont en voie de développement. Pourquoi ?...
"Voilà près d’un siècle, en effet, que l’on
entretient l’illusion que la science et la technique doivent forcément
mener à un avenir meilleur pour un nombre toujours croissant
de gens... A l’heure actuelle, 41 % de la population américaine
répondent à la définition officielle de la pauvreté
et 9 % de ces 41 % sont des gens qui ne mangent pas à leur faim,
cependant que le taux de mortalité infantile en Amérique
est au niveau des moins développés parmi les sousdéveloppés".
"L’automatisation, puis la robotisation qui sont indéniablement
des progrès techniques, entraînent un chômage croissant".
Et encore mieux : "Est-ce bien d’ailleurs au mieux-être
des nations que
s’attache la recherche ? Ce n’est pas sûr, ce serait même
le contraire : aux USA et en Grande-Bretagne, la moitié des fonds
publics sont consacrés à la défense et les proportions
des budgets militaires sont à peine inférieurs en France
et en Suède. Or on a vu ce qu’un tel déséquilibre
a coûté aux USA qui ont contracté la plus grosse
dette publique du monde, 2.500 milliards de dollars, qu’ils n’auront
fini de rembourser qu’à la fin du 21e siècle... ".
"On ne sait à qui il faut conseiller la lecture (de cet ouvrage). Si c’est aux Enarques... C’est un ouvrage qui. en effet, dérange les bavards et les catéchistes de l’économiste...".
***
Dommage que ce Messadié n’ait pas encore compris pourquoi les États utilisent tant d’énergie pour fabriquer des engins de mort, leur seule voie pour maintenir le capitalisme.
"Se plaindre de posséder des produits
"excédentaires" quand il est, à la fois des
gens dans la misère et d’autres obligés de se croiser
les bras, n’est-ce pas une contradiction si énorme qu’elle condamne
sans appel notre organisation social ?" (p. 8).
"C’est la multiplication des besoins qui créé la
civilisation, car chaque besoin nouveau constitue un lien de plus entre
les hommes, puisqu’on ne peut le satisfaire qu’avec l’aide du prochain"
(p. 10). "C’est au développement des techniques que les
esclaves sont en partie redevables de leur libération".
(p. 12).
*
"Seule richesse ayant la propriété de répondre, non à un besoin défini mais à tous les besoins possibles, l’argent ne cesserait d’être désiré qu’au moment où tous les désirs seraient satisfaits, ce qui en recule la limite presque jusqu’à l’infini". (p. 14).
*
"Produire des biens n’est plus une fin en soi mais le moyen de gagner l’argent dont on a besoin pour vivre". (p. 14).
*
"Le mécanisme de notre système économique tient en peu de mots : tout producteur qui se propose de procurer au public des biens de consommation ou des services les créé dans la seule intention de les vendre plus cher qu’ils ne lui ont coûté, car s’il n’y réussit pas il disparaît". (p. 15).
*
"La production donne à la fois naissance à l’offre et à la demande : à l’offre par les produits qu’elle apporte sur le marché, à la demande par le pouvoir d’achat qu’elle distribue". (p. 16).
*
"ON NE GAGNE DE L’ARGENT QU’A LA CONDITION QUE
LES CONSOMMATEURS MANQUENT LE PLUS
POSSIBLE DE CE QU’ON PEUT FOURNIR". (p. 16).
* * *
"Pour que notre économie soit en équilibre, il faut qu’elle soit statique, ce qui exclut le progrès". (p. 17).
*
"Du point de vue mécanique, les Pharaons et Louis XIV sont contemporains : pour se déplacer rapidement, Sémiramis et Napoléon font atteler des chevaux à leur char ou à leur calèche". (p. 20).
*
"Toute organisation sociale doit fatalement tendre à la satisfaction maximale des besoins de tous les membres qui la composent". (p. 24).
*
"Tout perfectionnement dans les procédés de production ruine de fond en comble les producteurs dont l’existence, sinon la fortune, dépendent des anciens procédés". (p. 25).
*
"QUI NE PEUT ACHETER RUINE QUI VOUDRAIT VENDRE !" (p. 33).
* * *
"Les richesses augmentent, tandis que le nombre des travailleurs diminue : c’est le plus gros événement de tous les temps". (p. 34).
*
"Les courbes de la production industrielle et de l’emploi ne restent parallèles que jusqu’en 1919". P.34).
*
"D’après le sénateur américain Bryan Mc Mahon, la seconde guerre mondiale a coûté autant d’argent qu’il en aurait fallu pour construire une villa de cinq pièces pour toutes les familles des cinq continents du monde, avec un hôpital pour chaque village". (p. 42).
*
"Le consommateur paie deux fois : une fois pour "assainir le marché", la seconde pour consommer. Au lieu de profiter de l’abondance, il fait les frais de sa destruction". (p. 44).
*
"Avant la dernière guerre, la Banque d’Angleterre favorisa la constitution de la "Shipbuilder’s Security Association Ltd." dont l’objet était d’acheter des chantiers navals, de les fermer et d’en briser l’outillage". (p. 45).
*
"L’on cherche à exporter, même à perte (et gratuitement dans le cas du matériel de guerre) tout ce que les nationaux n’ont plus les moyens d’acheter". (p. 47).
*
"La part de chacun est d’autant plus grande que la masse produire est plus abondante, ce qui n’est vrai que si on la distribue selon les besoins". (p. 47).
*
"Seuls les secteurs primaire et secondaire distribuent réellement le pouvoir d’achat". (p. 50).
* * *
"Le "revenu national" ne correspond à aucune réalité : celui qui engage une cuisinière l’augmente, mais le diminue s’il l’épouse". (p. 52-53).
*
"Si l’on tient compte de l’accroissement de la population, le revenu national par habitant est au même niveau en 1954 qu’en 1929 : il n’y a aucun progrès. Et si l’on tient compte de l’accroissement relatif de la consommation militaire, économiquement stérile, les richesses disponibles des Français ont diminué". (Alfred Sauvy, Journal Officiel du 7 avril 1954, p. 387, cité p. 53).
*
"Pourquoi remplir les trains non pas d’après le nombre de voyageurs mais d’après le nombre de billets ? Ce ne serait logique que si l’insuffisance des billets refléterait l’insuffisance des places". (p. 59). "CURIEUX SYSTÈME FINANCIER QUE CELUI QUI EMPÊCHE LES HOMMES DE CONSOMMER CE QU’ILS ONT PRODUIT : CURIEUSE MONNAIE QUE CELLE QUI EMPÊCHE A LA FOIS DE CONSOMMER ET DE PRODUIRE ! : (P. 60).
* * *
"Les Américains ont fait la guerre aux Anglais pour conquérir le droit souverain de battre monnaie et se libérer des exigences de la Cité de Londres. C’est pour conquérir le pouvoir monétaire que Philippe le Bel persécuta les Templiers" (p. 65).
*
"Première rallonge : la monnaie-or enfanta le billet de banque, qui enfanta la monnaie-papier". (p. 67).
*
"Charles II d’Angleterre abandonna son droit régalien
de battre monnaie et poussa la condescendance jusqu’à emprunter
des billets de banque pour payer ses dépenses. La preuve que
ce moyen de paiement se généralisa très vite, c’est
que, dès 1672, on rapporta plus de reçus à rembourser
qu’il n’avait été déposé de pièces
d’or, d’où le premier krach ! ". (p. 69).
"En 1964, un groupe de riches citoyens créent la Banque
d’Angleterre pour prêter au roi Guillaume 11112000000 livres (papier)
pour leur propre compte : les fondateurs avaient acquis le privilège
de fabriquer de la monnaie légale". (p. 69).
"Créée en 1694, la Banque d’Angleterre fut nationalisée
en 1946" (p. 70)
"En 1800 quelques banquiers parisiens fondent une banque, devenue
en 1803 la Banque de France, avec concession d’émettre des billets".
(p. 70).
"Napoléon, partisan de la séparation de la monnaie
et de l’Etat, ne voulut jamais entendre parler de cours forcé"
(p. 70).
*
"Contrairement à une opinion bien ancrée, la Banque de France n’a jamais été tenue de conserver un rapport entre le montant de son encaisse métallique et le montant de ses billets en circulation". (p. 71).
*
"Entre le 15 mars 1848 et le 6 août 1850, ainsi qu’à partir du 5 août 1914, l’Etat décréta le moratoire : le billet de banque cessait d’être remboursable en espèces et devenait un effet moratorié" (cours forcé) (p. 71).
*
"A partir du moment où le billet de banque a perdu son gage métallique, il cesse d’être une monnaie-marchandisepour devenir une monnaie-papier, c’est-à-dire un simple titre de créance sur les marchandises et services à vendrele gage de la monnaie-papier est constitué par les marchandises et services qu’elle permet d’acquérir". (p. 71).
*
"La Banque de France a été nationalisée en 1945 avec quatre de nos grandes banques de dépôts. Le 20 septembre 1931, le gouvernement anglais obtenait la suspension de la convertibilité de la livre en or. Roosevelt abandonna l’étalon-or dans le Farm Relief Act du 12 mai 1933 ; et, par le Gold Reserve Act du 30 janvier 1934, l’or est devenu monopole de l’Etat". (p. 73).
*
"DEUXIÈME RALLONGE : "LE BANQUIER,
du néant, sort moyens de paiement". (p. 75).
"De même que la monnaie-or a enfanté la monnaie-papier,
celle-ci a enfanté la monnaie bancaire". (p. 76).
"Il convient de ne jamais confondre les espèces d’une banque
avec ses dépôts : l’argent qu’elle prête sans le
posséder, c’est précisément la monnaie bancaire".
(p. 77).
"Créer de toutes pièces des ressources financières,
pour les prêter à intérêt, n’est-ce-pas le
rêve ?" (p. 78).
*
"M. McKenna, président de la Midland Bank, reconnut : "Les banques créent des dépôts, mais je crains que l’homme de la rue ne soit pas enchanté d’apprendre que les banques créent et détruisent de la monnaie : c’est sûrement la vérité". (p. 79).
*
"Si les banques de dépôts sont à court de trésorerie, elles peuvent toujours se procurer des billets en réescomptant leur portefeuille d’effets à la Banque de France". (p. 80).
*
"Tous les moyens de paiement rendent les mêmes services et le billet tend à devenir la petite monnaie du crédit bancaire". (p. 81).
*
"On affirme que la Banque de France ne serait plus une institution privée depuis sa nationalisation en 1945. Mais alors, pourquoi l’Etat lui emprunterait-il, et à intérêts ?" (p. 82).
*
"La monnaie bancaire est une deuxième rallonge du franc, consistant en crédits qui ne coûtent que de simples écritures à passer". (p. 82).
*
"Les pièces métalliques (bronze-aluminium et cupronickel), ou monnaie divisionnaire, sont la seule monnaie que frappe l’Etat. Les billets sont émis par la Banque de France et la monnaie bancaire (ou scripturale) est émise par les banques privées". (p.83).
*
"En 1955, il y avait 2.500 milliards en billets et 2.500 milliards en monnaie bancaire, de sorte que nos moyens depaiement sortent moitié d’une imprimerie et moitié d’un encrier" (ou d’un terminal d’ordinateur aujourd’hui). En1980, le total des billets en circulation s’élevait à 144 milliards de francs, contre 668 milliards en monnaie bancaire(les billets ne représentaient plus que 21,55 % de la masse Ml). (p. 84). Ce rapport est le "coefficient de liquidité".
*
"L’argent déposé appartient à la banque et figure à son actif".
* * *
"Plus l’emploi du chèque se généralise, plus les banques peuvent prêter ce qu’elles ne possèdent pas". (p. 89). Le chèque prend actuellement la forme de la carte de crédit magnétique (EC, Visa, Eurocard,...).
*
"Nos moyens de paiement ne varient pas proportionnellement aux biens et aux services mais selon l’action des établissements financiers, qui ne créent la monnaie que pour la prêter à intérêt, ce dernier n’étant jamais créé. En conséquence, ils ne peuvent connaître que les entreprises rentables, c’est-à-dire qui profitent et entretiennent la rareté des produits". (p.90).
*
"La monnaie se dématérialise constamment et tend à se rapprocher de l’unité de compte. S’évaporant du moule dans lequel elle était emprisonnée, elle se sublimise : elle n’est plus qu’un nombre suivi du mythe qu’elle multiplie". (p.90).
*
"La monnaie a perdu la qualité qui en faisait l’instrument des échanges mais elle est apte à devenir celui de la distribution, à condition d’être elle-même bien répartie". (p. 90).
* * *
"Einstein a écrit : "Les moyens de production, ayant été mécanisés dans une économie désorganisée, ont eu pour résultat qu’une partie de la population n’est plus utile à la production des richesses et se trouve exclue de la consommation. Il en est résulté un affaiblissement du pouvoir d’achat". (Out of my later Years, p.461) (p.91). "La surproduction n’est apparente car ce n’est pas le besoin qui n’existe pas chez les consommateurs, mais le pouvoir d’achat". (Einstein) (p. 92).
*
"Si un pays se borne à exporter, il se vide de sa substance" (p.93).
*
"Puisque le travail est un facteur décroissant de la production, ne voit-on pas que le plein emploi devient irréalisable, à moins de faire effectuer aux hommes un travail inutile ?" (p.94).
*
"A LA VÉRITÉ, IL SERAIT PLUS FACILE
DE FAIRE CONSOMMER LE SURPLUS DE LA PRODUCTION AUX CHÔMEURS QUE
DE FAIRE ABSORBER LES CHÔMEURS PAR UNE PRODUCTION QUI N’A PLUS
BESOIN D’EUX". (p.94).
"Les économistes s’hynoptisent sur le seul accroissement
de la circulation des billets, sans observer que le volume de la monnaie
bancaire grandit aussi de son côté". (p. 96).
*
"Monnaie et crédit ne sont créés que pour augmenter la production, jamais la consommation". (p. 97).
*
Le rôle d’un système monétaire étant de distribuer la production pour qu’elle soit consommée, le nôtre ne le remplit qu’accidentellement puisque la monnaie est émise dans un dessein bien différent : être prêtée à intérêt ! » (p. 97).
*
"LE PROBLÈME DE LA PRODUCTION EST RÉSOLU ; C’EST CELUI DE LA CONSOMMATION QU’IL FAUT RÉSOUDRE". (p.97).
* * *
"Les débouchés que nous cherchons désespérément au dehors, c’est à l’intérieur qu’ils se trouvent ; il suffit de solvabiliser des besoins criants !".
*
"Il faut que tout le monde possède de l’argent pour vivre, comme tout le monde a de l’air pour respirer". (p. 103).
*
"Les droits politiques du citoyen doivent se compléter des droits économiques du consommateur, concrétisés par un "revenu social" auquel Il aura droit du berceau au tombeau. La femme y a droit aussi car aucune loi naturelle ne la condamne à dépendre économiquement de l’homme". (p. 103).
*
"Pourquoi les moyens énormes de l’économie de guerre ne pourraient-ils pas produire, en temps de paix, une seconde avalanche de biens ? Parce qu’on ne pourrait pas les vendre, l’assainissement du marché des armements étant réalisé, par leur distribution gratuite chez les voisins". (p. 105).
*
"On voit qu’il s’agit, en définitive, d’assimiler la nation à une immense entreprise, dont les activités horizontales et verticales seraient gérées par un Conseil National de l’Economie qui, conservant les biens d’équipement collectif, mettrait les biens de consommation à la disposition du public". (p. 107).
*
"Le Conseil National de l’Economie déciderait que la monnaie n’est valable que pendant l’exercice en cours", afin de la détruire une fois sa fonction de catalyseur des transferts accomplie, pour éviter la spéculation sur ses propriétés de sublimisation (p. 107).
* * *
"La machine est essentiellement sociale, tout au moins quand elle produit". (p. 108).
*
"La meilleure des réformes fiscales sera celle qui supprimera le fisc. L’économie des besoins les rend inutiles puisque l’Etat, recouvrant son droit régalien de battre monnaie, crée les moyens de paiement nécessaires pour faire passer la production à la consommation". (p. 109).
*
"La monnaie, simple titre de créance provisoire, devient une véritable monnaie de consommation, dont l’inventeur n’est autre que Saint Thomas d’Aquin : "L’argent est fait pour être dépensé". En effet, la monnaie de consommation ne peut être ni thésaurisée ni capitalisée. Si elle n’est pas dépensée au cours de l’exercice pour lequel elle a été émise, elle est annulée ipso facto". (p. 112).
*
"Dans l’Economie Distributive de l’abondance, les revenus des consommateurs sont distribués en fonction, non du travail fourni, mais de la production consommable". (p.113).
*
"Le principe du service social" donne une grande souplesse à la production. Par exemple, en cas de catastrophe nationale, comme un tremblement de terre, il suffirait de prolonger exceptionnellement la durée du service social pour réparer les dégâts". (p. 114).
*
"Le commerce international est Indépendant de la structure économique des nations : il n’a en effet jamais revêtu que la forme du troc". (p. 116).
* * *
"L’AUTORITÉ SANS LIBERTÉ, C’EST LA TYRANNIE ; LA LIBERTÉ SANS AUTORITÉ, C’EST LE DÉSORDRE". (p.119).
*
"Les producteurs cherchent à individualiser les profits et à étatiser les pertes (p. 120).
*
"Dans le monde moderne, c’est l’argent qui mesure la liberté". (p. 122).
*
"Avoir des loisirs consiste non pas à ne rien faire, mais à faire ce qui plaît. Dans le monde moderne, les loisirs ont fait leur entrée par la porte basse du chômage". (p. 123).
*
"Si le service social assume la charge du travail nécessaire, le revenu social apporte le loisir payé". (p. 123).
*
"Jamais un dictateur ne règnera sur des hommes instruits, jouissant du bien-être et vivant sans aucun souci du lendemain". (p. 124).
*
"En 1954, 11 % seulement des jeunes Français faisaient des études secondaires". (p. 125).
*
"PUISQUE DE TOUT TEMPS LES PRIVILÉGIÉS ONT VÉCU DU TRAVAIL DES "AUTRES", POURQUOI LES "AUTRES" NE POURRAIENT-ILS PAS VIVRE DU TRAVAIL DES MACHINES ?" (p.127). "Sinon, faut-il détruire les produits créés par les machines, ou accorder des loisirs à ces dernières ?" (p. 127).
*
"Notre temps est une époque de transition, dont l’un montre déjà ses ruines lugubres, tandis que l’autre offre à l’imagination réfléchie ses grandes et riantes perspectives". (p. 129).
* * *
Le livre "Les Yeux Ouverts", de Jacques Duboin, édition 1982, peut être commandé auprès de la "Grande Relève", boite postale 108 - F78110 LE VÉSINET, au prix de 65FF franco.
Dans son savant ouvrage "Théorie monétaire" (1) Pierre Pascallon, Professeur agrégé à la Faculté des Sciences économiques et sociales de Clermont-Ferrand aborde les différents aspects des problèmes posés par la nature, l’émission et la circulation de la monnaie. Le professeur se réfère à tous les brillants économistes officiels qui se sont succédés, depuis les débuts du système capitaliste, avec l’efficacité et le succès que l’on sait... Nous avons déjà abordé ce sujet, trop rapidement et trop sommairement, à propos des livres écrits par un économiste non-universitaire Jacques Riboud (2). La matière étant inépuisable, revenons aujourd’hui à ces questions, en analysant particulièrement la fin de l’étude de P. Pascallon, surtout pour dénoncer les procédés employés.
Une monnaie "a-temporelle"
Les cinq dernières pages de la "Théorie monétaire" sont consacrées à l’Examen des réformes préconisées pour faire "indirectement" de la monnaie une monnaie "a-temporelle". P. Pascallon se réfère aux écrits de Silvio Gesell et notamment à 1-Ordre économique naturel fondé sur l’affranchissement du sol et de la monnaie" écrit en allemand en 1911 et traduit en américain en 1934. Le système de Gesell, ajoute notre auteur, a été analysé dans de nombreux articles et études et notamment dans "The American Economic Review" de Juin 1942 ; il en fait lui-même l’exposé.
Les Geselliens
Et d’abord le Professeur de ClermontFerrand nous range
sans hésiter dans la catégorie des Geselliens : avec "l.
Fisher (Stamp Money 1933), par certains aspects, on va le voir J.M.
Keynes (Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt
et la monnaie, 1936), M. Allais (Economie et intérêt, 1947)
les théoriciens de l’économie distributive préconisant
une monnaie de consommation ne pouvant être thésaurisée
(J. Duboin, la Grande Révolution qui vient, 1934) avec leur ancêtre
E. Bellamy (1980)" etc...
Poursuivons la citation : "Il est sûr que les Geselliens
ont été particulièrement nombreux dans la période
de l’entre-deux guerres. On a assisté en effet à une floraison
d’articles et d’ouvrages sur le thème de la monnaie fondante
durant cette crise (cf. Baudin, Bourdet, Bachi, Delannes, Von Maralt,
De Man, Meulen, Vergnolle, Vregille, Weismar et Parrish). Cette inspiration
est fortement reprise avec la crise actuelle cf. par ex. M. Laudrain
"Sortir de la pagaille" (Les Publications Universitaires,
1979)". Ainsi P. Pascallon met dans le même sac : Fisher
et Claude Bourdet, Keynes et Jacques Duboin, Allais et notre ami Maurice
Laudrain ! Curieux cocktail.
La thèse
D’après l’auteur, Gesell et ses partisans estimeraient
que les crises proviennent de la "supériorité"
de la monnaie sur les autres biens et en déduiraient qu’il faut
la rendre aussi "mauvaise", c’est-à-dire fondante.
Il reconnaît que les marchandises sont destructibles, périssables
et chères à stocker. Leurs détenteurs sont donc
pressés de s’en débarrasser, alors que la monnaie est
indestructible ( !) et son coût de conservation est nul ( !!).
Donc, soutient Gesell, d’après Pascallon, la monnaie-liquidité
profite de cette supériorité pour se faire payer un intérêt.
Tout ceci favorise la monnaie "inactive" ou "oisive"
et en ralentit la circulation. La vieille loi de Jean-Baptiste Say,
selon laquelle l’offre de marchandises trouve toujours en face une demande
monétaire, est ainsi mise en échec, d’où surproduction
et chômage. Afin d’y remédier, la monnaie doit être
replacée au niveau des biens et devenir précaire. Les
solutions proposées par les Geselliens seraient de lui faire
perdre une partie de sa valeur à date fixe, au moyen de taxes,
par exemple sous forme de timbres à apposer sur les billets.
De là, l’incitation à faire circuler les titres de paiement,
au lieu de les thésauriser.
Les conséquences
Chacun désirant se défaire de la monnaie au plus vite, il en résulte que le prêt se généralisera, même sans intérêt, mettant ainsi fin à la crise. L’auteur rappelle les expériences de monnaie fondante qui ont été menées entre les deux guerres en Autriche (Worgl), aux Etats-Unis et en France (Lignières-en-Berry) et insiste sur leur échec dû, écrit-il, à la difficulté d’étendre le système à des communautés plus vastes que celles de son origine. Il oublie de signaler que les tout-puissants banquiers et leurs séides intéressés au capitalisme, sentant leurs privilèges menacés n’ont pas été innocents de cette fin malencontreuse. Il note que Keynes avait repris à son compte la proposition de Gesell dans sa célèbre "Théorie générale" de 1936.
La critique
P. Pascalion se lance ensuite dans l’énumération
des difficultés soulevées par l’application de la thèse
de Gesell : problèmes posés par la période de transition,
risque inflationniste, vérification que l’intérêt
des prêts serait bien supprimé.
Il concentre ses objections autour de deux questions :
"1) Le système capitaliste que ces économistes veulent
amender, mais conserver, peut-il se passer des banques de dépôt
et de monnaie de banque... ?... (En effet chez Gesell, ...la monnaie
consisterait uniquement en billets émis par l’Etat. Ii n’y aurait
plus... de dépôts à vue... mais seulement des banques
d’épargne. Or (il est facile de montrer)... la "consubstancialité"
qui existe entre la monnaie scripturale bancaire et i économie
capitaliste...
"2) Peut-on, en système capitaliste, parvenir vraiment à
supprimer la dimension temporelle de la monnaie avec une "monnaie
estampillée" ?
P. Pascallon conteste alors l’objectif de Gesell qui,
pensant que la monnaie est un instrument d’échange et rien d’autre,
élimine sa fonction "réservoir de valeur". L’auteur
croit que la dimension temporelle de la vie économique et sociale
est une réalité qu’on ne peut pas supprimer dans notre
système. "..La preuve ?"écrit-il, "à
partir du moment où la "prime de liquidité"
des billets serait annulée par une taxe, on verrait inéluctablement
que d’autres biens seraient utilisés comme monnaie et/ou thésaurisés...
".
Enfin, nous citerons in-extenso la conclusion du livre : "On voit
bien, au terme de cette réflexion, le caractère puéril
de la plupart de ces projets de réforme monétaire qui,
soucieux de supprimer le chômage, l inflation, la crise, pensent
pouvoir y parvenir en "démonétisant" la monnaie...
tout en conservant le système capitaliste auquel pourtant cette
monnaie est intimement associée. Ces utopies monétaires
traduisent le désarroi des économistes qui ne parviennent
pas à trouver des stratégies de sortie de crise convaincantes
sans sortir du système. Mais elles nous signifient peut-être
aussi que de telles stratégies n’existent pas dans un capitalisme
qui a perdu une partie de sa légitimité" (3).
Notre avis
Après avoir remarqué l’ambiguïté
de cette dernière phrase, il faudrait répondre longuement
à P. Pascallon. Nous nous limiterons aujourd’hui à quelques
observations, peut-être puériles, mais non dépourvues
d’acidité, laissant le lecteur se référer à
nos ouvrages de base (4) pour plus de détails.
1) Même si certains d’entre nous ont fait référence
aux expériences de monnaie fondante et ont pu aller jusqu’à
envisager de telles propositions comme des mesures de transition (5),
il est bien entendu que la monnaie que nous préconisons n’est
pas fondante mais, bien plus, qu’elle s’éteint au premier achat,
seul moyen d’assurer l’adéquation de l’offre et de la demande.
2) Il est exact qu’une telle monnaie aura perdu complètement
le caractère précieux qu’elle est censée avoir
dans le système actuel. Ce ne serait d’ailleurs qu’entériner
l’évolution de la plupart des monnaies capitalistes qui, de dévaluations
en dévaluations, ont perdu, au mieux, 99 % de leur valeur initiale
et ne sont même plus remboursables en or. Elles sont devenues
de simples titres de créance qui n’ont de contre-partie que celle
que les citoyens veulent bien leur accorder. De toutes façons,
la monnaie est appelée à se transformer encore plus radicalement
dans l’avenir immédiat avec le développement des cartes
informatisées, ce sera la fin de la monnaie précieuse
mais aussi sa dématérialisation complète. Sur ce
point particulier, sans faire de propositions révolutionnaires,
nous constatons seulement une transformation en cours, en période
d’accélération.
3) P. Pascallon ne fait pas intervenir dans son raisonnement le phénomène
capital de l’automatisation de la production et de la mutation que ce
phénomène entraîne dans la société.
Après des millénaires d’une économie de rareté,
voici une nouvelle ère pour l’humanité. Il veut l’ignorer.
4) L’auteur se désole que la monnaie gésellienne perde
son caractère de réservoir de valeur et mette fin à
la possibilité de choisir le moment d’un achat ainsi que d’épargner.
Il ne veut donc pas savoir que les acheteurs vivent actuellement à
crédit ; que la plupart, par le moyen des cartes d’achat, sont
à découvert et privés d’acheter plutôt que
libres de leur choix. Il ne sait peut-être pas que nous proposons
un large secteur de gratuité des produits abondants et l’affectation
automatique des biens d’usage tels qu’habitations, automobiles, mobilier
sans qu’il soit nécessaire d’épargner pour cela. La fonction
"réservoir de valeur" n’était utile que dans
une économie de rareté.
Enfin, si le lecteur s’est demandé pour quelle raison P. Pascallon
nous a classés parmi les Geselliens, il doit maintenant, comme
nous, avoir compris que, afin de faciliter sa démonstration,
il utilise la technique de l’amalgame. Cars’ ! lest vrai que beaucoup
d’économistes et de commentateurs cités ne proposent pas
de sortir du système capitaliste, il ne faut pas avoir lu beaucoup
de nos ouvrages pour s’apercevoir que nos thèses en diffèrent
radicalement. Peut-être P. Pascallon se satisfait-il du chômage,
de la sousconsommation et de leur suite inévitable la guerre
maintenant nucléaire, jusqu’à ce qu’il en soit luimême
victime. Sinon, il rechercherait peut-être, avec nous, et plus
activement, les moyens de s’en éloigner. En attendant, il est
indispensable qu’il s’informe un peu mieux sur nos propositions. II
y va de ses responsabilités d’enseignant. Heureusement que certains
autres Professeurs, pas encore assez nombreux, ne nous ignorent plus.
Enfin, nous nous demanderons si, nous passer sous silence comme par
le passé, ne valait après tout pas mieux, que donner à
des milliers d’étudiants, volontairement ou involontairement,
une idée erronée de l’économie distributive bloquant
ainsi la curiosité dont ils auraient éventuellement pu
faire preuve à son propos à l’avenir ?
(1) Edition de l’Epargne (1985).
(2) Voir "Sur la monnaie" GR n° 865.
(3) Derniers mots relevés par l’auteur dans le livre de P. Fabra
"La nationalisation des banques, pour quoi faire ?" (Sofedir
1982).
(4) Voir particulièrement la brochure de M.L. Duboin "L’économie
libérée", son roman "Les affranchis de l’an
2000" et le livre de J. Duboin "Les yeux ouverts" (en
vente à la Grande Relève).
(5) Voir "Autogestion distributive" n° 67.
Tribune libre
Nos lecteurs connaissent peut-être déjà la proposition originale de G. Oostenbroek d’une monnaie basée sur l’énergie. Voici pour eux, en lui répondant dans ces colonnes, l’occasion d’en débattre.
Il faut voir dans mon projet la volonté de
parvenir à des techniques économiques, monétaires,
salariales et commerciales totalement différentes de celles existantes
de nos jours.
Distributiste de longue date, je propose une dimension nouvelle de la
monnaie, ayant pour base des données scientifiques. Cette monnaie
prendrait en compte les COUTS RÉELS de la fabrication de tous
produits ou services et par là même, les coûts réels
de la vie de tous les hommes. Evolutive et non révolutionnaire,
cette monnaie serait à la consommation des biens ce que la plus
haute technologie est à la fabrication des biens. Ce parallélisme
infiniment plus précis que les méthodes traditionnelles
d’évaluation des coûts, des allocations, des subventions,
des intérêts etc... s’inscrirait dans une optique à
la fois rationnelle et humaniste.
Rationnelle, car il n’est plus admissible que la monnaie subisse sans
raison les turpitudes spéculatives et qu’elle ne revienne pas
à son unique destination : Faire passer toute la production vers
toute la consommation.
Humaniste car il n’est plus admissible que par le seul fait monétaire
une partie de l’humanité soit privée de biens essentiels
ou secondaires en face d’une pléthore de biens invendus ne permettant
pas aux producteurs d’en vivre.
Sans mettre en cause les théories de l’économie distributive,
il nous apparaît nécessaire de les compléter par
une véritable mesure de la valeur des biens et services. Avant
de formuler ce qui pourrait être une monnaie "capable"
de sa destinée, il est indispensable, pour mieux l’imaginer,
d’énumérer d’abord quelques erreurs dans ce domaine qui
ont pris valeur de référence dans l’esprit et le raisonnement
de nombreux contemporains. Ainsi l’on confond trop souvent économie
et finance. En effet, l’économie est une science qui traite de
la production, de la distribution et de la consommation des biens, alors
que la finance est l’ensemble des activités lucratives qui ont
pour objet les monnaies sous quelque forme que ce soit. Dans notre procédé
actuel d’achat et de vente, le passage production/consommation se fait
par le truchement monétaire. C’est à cause du manque de
pouvoir d’achat, des variations des valeurs des monnaies et des désordres
qui en découlent que la production est à la fois freinée
et stockée. Employer le terme ECONOMIE pour parler de la FINANCE
est tentant. Cela provient uniquement du cheminement monétaire.
S’il y a CRISE, elle est financière, mais le terme est impropre
car la crise est un changement brusque d’un état alors que le
dérèglement financier est permanent et de moins en moins
supportable. Pas plus que la biologie ou la géologie, l’économie
ne saurait être en crise. Elle permet arbitrairement d’analyser
des phénomènes selon les sensibilités idéologiques
des économistes. En ce sens, elle ne saurait être scientifique.
On assure que la valeur d’un produit fini dépend des richesses
naturelles, des coûts des manipulations humaines successives et
des charges diverses. Mais la possession des richesses naturelles n’est-elle
pas identique de nos jours à celles qui existaient à l’origine
? Quelle différence y-a-t-il entre l’acte de pêche du premier
homme et celui d’un marin-pêcheur contemporain ? L’acte commercial
et juridique représenté par une facture et qui prouve
à la fois la valeur d’un bien et sa propriété,
n’existe pas. Le poisson est donc gratuit, non payé ; il en est
de même pour toutes les richesses naturelles, seule la main d’oeuvre
sous toutes ses formes valorise tous les produits finis.
Puisque nous avons abordé le problème de la propriété,
examinons son déroulement par un exemple. Un industriel souhaite
développer son entreprise et emprunte pour cela à une
banque de dépôts. Pour rembourser le principal et le loyer
de la somme prêtée, il prélèvera sur le prix
de vente de ses produits un certain pourcentage qui lui permettra de
verser sur son compte bancaire des sommes variables pour amortir et
éteindre sa dette initiale. L’origine de ce remboursement est
le fait de paiements individuels et multiples des consommateurs. On
peut donc affirmer que cette nouvelle unité de production est
la propriété collective des consommateurs et non celle
de l’industriel. Dans le cas où celui-ci aurait assuré
la réalisation de son projet par auto-financement, l’origine
des fonds serait toujours la même, les fonds ayant été
constitués avant, lors de ventes précédant l’opération.
Dans un ordre d’idées analogue, le salaire de chacun d’entre
nous provient du salaire de tous les autres, chaque consommateur "rétribue"
le coût de la vie des autres. Ainsi ce que l’on appelle le capitalisme
est la forme la plus collectiviste qu’il soit, financièrement
parlant. Il ne faudra donc pas s’étonner si les théories
distributives remettent en question non pas des faits réels mais
des appellations ou théories erronées. Il en sera de même
lorsque nous proposerons une monnaie à base strictement scientifique
qui n’aura pour objet que la seule possibilité de faire passer
la production vers la consommation. "Les postulats de la science
économique sont eux-mêmes à revoir à la lumière
des faits économiques, sociaux et politiques nouveaux"(1).
Pour résumer, afin de mieux appréhender notre nouvelle
conception monétaire, voici rappelés quelques points essentiels
réels, mais cachés :
A - La finance actuelle ne peut faire circuler suffisamment de monnaie
pour absorber la production.
B - La production actuelle est considérable et pourrait s’écouler
totalement si le "profit global" moteur du libéralisme
ne diminuait pas en même temps que la production augmente.
C - Toutes les richesses naturelles sont gratuites, sur, sous et audessous
de la terre et elles sont le patrimoine et l’héritage de toute
l’humanité.
D - La propriété dite privée est MATHEMATIQUEMENT
la propriété COLLECTIVE de tous par le simple fait que
le cheminement monétaire passe par tous NOS REVENUS, tous nos
IMPÔTS COLLECTES, et cela à l’échelon mondial.
LA NOUVELLE MONNAIE
Depuis la crise pétrolière tous les
pays industrialisés, gros consommateurs d’énergie, ont
prôné de l’économiser... Moins consommer d’énergie
devait diminuer les dépenses nationales et les coûts, permettant
à nouveau d’exporter. C’est dire que subitement nos experts s’étaient
aperçus de la valeur de l’énergie.
Lorsqu’un homme travaille, il dépense une certaine énergie
chiffrée en calories par les biologistes. Chaque jour de sa vie,
l’homme doit récupérer ses calories perdues, (de 2500
à 5000) il le fait grâce à son salaire qui lui permet,
par l’achat de sa nourriture de reconstituer son organisme. Il en est
de même de tous ses autres besoins. Habillement, logement, éducation,
loisirs etc... Tous ces services réalisés par d’autres
hommes ont fait l’objet d’une perte de calories récupérée
de la même façon. C’est tout cet ensemble qui fait la valeur
globale du coût de la vie, tel qu’il est répertorié
par l’INSEE, incomplètement d’ailleurs par seulement 295 postes.
Supposons un salarié qui aurait dépensé dans une
journée 3540 calories, il les retrouverait par exemple dans un
kilo de pâtes (100 g - 354 cal.).
Pourquoi passer par une monnaie tierce (Franc, Yen, Dollar, Mark) alors
que l’on a un dénominateur commun "LA CALORIE" qui
mesure à la fois la dépense énergétique
des hommes et son équivalence dans l’aliment récupérateur.
Je propose donc comme système mondial de règlement la
MONNAIE CALORIE qui trouve son origine dans le "prix de revient"
qui est le reflet exact de la valeur des choses.
Dans tous les secteurs de l’activité humaine l’application de
ce principe servira à former une partie du revenu de chacun.
A ce coût strictement humain il faudra ajouter l’énergie
dépensée pour la production énergétique
(centrales) et celle consommée à chaque point d’utilisation
et lieux de fabrication. Le coût énergétique final
d’un produit sera la somme des calories dépensées depuis
l’extraction jusqu’à la distribution unitaire au détail
et par le travail humain. Toute cette comptabilité aidée
grandement par les ordinateurs, dont certains ; paramètres existent
déjà dans la technique économique actuelle, ne
sera pas plus complexe que la décomposition des temps de travail
du système Taylor, dont on pourra s’inspirer. Un homme recevra
alors un salaire en fonction de ses besoins réels. Qu’en est-il
aujourd’hui ? La calorie mesure tous les coûts des différents
biens. (Qui peut aujourd’hui justifier avec exactitude le prix d’une
paire de chaussures ? ou d’un pavilIon F3 ?) Là calorie est invariable
par définition, elle garantit dans le temps les remboursements
éventuels et précis des achats importants. (L’exemple
du Tiers monde dont les dettes montrent le côté négatif
de notre technique financière actuelle est le meilleur).
Sans aller plus en avant dans les détails de cette monnaie-calorie, en demeurant pour le reste dans l’optique de l’économie distributive, j’ajouterai que les bases scientifiques de la calorie, température, poids et pression, la rende insensible à la spéculation. Cette nouvelle monnaie répond aux désirs anciens et présents exprimés par nos grands argentiers : la stabilité ; elle s’inscrit dans l’esprit d’une nouvelle économie mondiale.
(1) Citation tirée du livre de l’UNESCO en 1976 : Le monde en devenir.
Tribune libre
J’ai été contactée, il y a quelques mois, par le promoteur d’un mouvement anglais qui s’intitule "Resource Economics", ce qu’on peut traduire par l’économie des ressources et qui est basé sur une taxation unique, celle de l’énergie. Pour eux "toutes les ressources économiques et toutes les consommations économiques doivent être évaluées en énergie" (dont l’unité n’est pas la calorie mais le Joule, quelle que soit sa forme, y compris !a chaleur. Mon correspondant, Farel BRADBURY, résume son point de vue par un slogan lapidaire : "toute la création de richesse est fonction de toute la consommation d’énergie". De plus, son propos se déclare égalitariste "chacun partage, sans sélection, la prospérité nationale et chacun paie, sans exception, sa part" (de travail). F. Bradbury ajoute : "La relation entre énergie et monnaie est facile à établir parce que, de toute façon, la monnaie est une commodité arbitraire...
Tout ce que nous proposons est d’appliquer une évaluation
sociale à l’énergie". Et il précise que sa
proposition d’une économie des ressources commence en Europe
et (ou) au Royaume-Uni par le simple remplacement de la T.V.A. par la
taxe unique de 1,15 £ (livre anglaise) par gigajoule (un milliard
de Joules) d’énergie fondamentale.
Ce mouvement, bien qu’il ait entrepris d’ajouter l’allocation universelle
à ses propositions, diffère fondamentalement de nos aspirations,
en ce sens que son objectif est... de donner du travail aux hommes :
faire travailler les hommes afin d’économiser les ressources
énergétiques de la nature ! Remonter l’histoire en quelque
sorte. Dans une lettre récente, F. Bradbury me démontrait
que la fabrication d’un meuble à la main coûtait beaucoup
moins d’énergie qu’un meuble fabriqué en série,
que ce dernier était forcément moins beau et moins solide,
donc qu’il fallait plus vite le remplacer, d’où gâchis
écologique.
Il y a déjà beaucoup à répondre à
cela. Et ne pas oublier que l’économie à laquelle on pense
n’est pas pour hier, mais pour l’ère qui s’ouvre celle où
l’informatique est au service de l’homme pour trouver le moyen de fabrication
le plus économique, tant en matière qu’en énergie,
et où le travail humain sera presque essentiellement celui de
son cerveau. Comment calculer le prix, en joules par exemple, d’un logiciel,
d’un système expert ou d’un moteur d’inférence ?