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ICI même, le mois dernier, je m’efforçais de montrer combien les bruits alarmants tendant à faire craindre une guerre généralisée étaient en fait orchestrés par de solides et sordides intérêts. Deux informations sont venues depuis conforter ce point de vue : « Le Monde » du 29 janvier dernier faisait état de premières évaluations qui montrent qu’en 1979 les commandes de matériels militaires avaient fléchi par rapport à l’année précédente, tant en France qu’aux Etats-Unis. Il fallait bien rattraper ça ! C’est chose faite : on annonce maintenant une remontée des actions des principaux fabricants d’armes. Allons, on va pouvoir, même aux frais des contribuables, vendre encore quelques bonnes armes à des roitelets africains et à leurs généraux. Mais qu’on ne s’étonne pas s’ils s’en servent !
Les bruits de bottes, dont tout le monde parle, présentent un nouvel intérêt pour certains : des promoteurs (« immobiliers » ?) lancent la mode du « 2 pièces-cuisine anti-atomique ». Vous allez devoir ajouter à vos résidences secondaires un « bunker anti-atomique » pour avoir l’assurance d’être en mesure d’assister au réveil d’un monde désintégré.
Mais une bombe comme celle d’Hiroshima est aujourd’hui à la portée de tout le monde. Alors la France envisage de faire mieux : la bombe aux neutrons. Sur le plan humain on imagine difficilement pire. Sur le plan économique, par contre, elle présente des inconvénients : pas de destructions autres que celle des êtres vivants, c’est-à-dire rien à reconstruire. Cela risque donc de ne pas ouvris de nouveaux marchés. Alors on va y réfléchir encore.
Par contre, nous avons un besoin urgent d’un nouveau sous-marin atomique - Non de neuf sous- marins renchérit Chirac. Quel que soit le nombre de milliards nécessaires pour cela, la France trouvera l’argent. Comment se fait-il qu’on n’en ait jamais assez pour le budget social mais qu’on en trouve toujours pour ce type de dépenses ? Allons. malgré la « crise du pétrole » l’économie française a de l’avenir.
***
Par contre, ce qui ne va pas, mais pas du tout, c’est l’agriculture. Une vraie catastrophe s’abat sur la Communauté Européenne : elle produit trop. On ne sait plus que faire, par exemple, du lait. Et la radio d’Etat a beau nous répéter : « Si vous n’en buvez pas, mangez-en », il y en a encore trop.
Alors que l’O.N.U. nous apprend qu’en 1979, 50 millions d’individus, dont 17 millions d’enfants sont morts de faim, l’Europe n’a pour souci que le maintien du prix du lait et se lamente à l’idée que la production, cette même année, a augmenté de 1,8%. Alors on réduit le cheptel bovin. En 1977, il a baissé ainsi de 8 % au Danemark où chaque jour deux exploitants sont amenés à liquider leur élevage de vaches laitières, et où huit à dix demandes sont faites au Ministère de l’Agriculture pour d’autres éleveurs pour en faire autant. En 1978 et 1979, on a abattu 85 000 vaches laitières, ce qui a permis à leurs propriétaires de toucher quelque 140 millions de francs lourds. Voilà comment on lutte contre la « surproduction » du lait tandis qu’un enfant sur trois en Afrique ou en Asie meurt avant l’âge de 5 ans.
Quand comprendra-t-on qu’il faut balayer le système économique qui engendre de pareilles énormités ?
Les plus anciens de nos lecteurs seront heureux d’apprendre la sortie du nouveau livre de Marcel Dieudonné : La production croit. L’emploi décroit, c’est la « crise »... QUE FAIRE ? Notre ami, qui écrivit tant de bons articles pour « La Grande Relève », où il assura longtemps la rubrique « Au fil des jours », a réuni en un livre dédié à la mémoire de J. Duboin, l’essentiel des raisonnements de base de ses théories. Cet ouvrage est l’oeuvre d’un croyant qui met toute sa foi dans son appel au bon sens de ses contemporains, dont il attend un sursaut salutaire. Pour mieux convaincre, l’auteur a voulu une progression lente, patiente, appliquée, mais au style simple et familier. « Nous sommes tous des intoxiqués, envoûtés par l’argent » constate-t-il. Et pour introduire la solution, il cite cette requête toute simple écrite par un enfant de onze ans du fond de l’Arizona, au Président des EtatsUnis : « Mon père est très vieux, il a quarante quatre ans. Il a fumé toute sa vie, mais il souffre de l’emphysème et il essaie de cesser. Ne pourriez- vous pas donner de l’argent aux fabricants de cigarettes pour qu’on ne cultive plus de tabac ? ».
Marcel Dieudonné, s’il veut faire réfléchir, ne prétend pas pour autant imposer son modèle de l’économie distributive. Son but « est uniquement de montrer que l’économie nouvelle est facilement réalisable », et il précise : « toute réalisation collective est un compromis entre diverses tendances et conceptions. L’économie distributive sera ce que ses réalisateurs la feront dans les circonstances où ils se trouveront placés. L’essentiel est d’être convaincu de la nécessité impérieuse, vitale, du changement, avec comme principe le revenu social et l’activité professionnelle non rémunérée ».
Souhaitons que ses lecteurs soient nombreux à comprendre cette nécessité avant qu’il ne soit trop tard...
MI-DECEMBRE : vents de force 10, mer déchaînée. En quelques heures c’est l’arrachement. Finis les longs vols planés des feuilles dentelées dans la lumière dorée des après-midis ensoleillés de novembre. FORET, ma belle amie dénudée, tu vas devoir, dans quelques semaines, t’assoupir pour l’accomplissement en profondeur des futures gestations. Je te retrouverai pourtant dans l’odeur de mon petit chien broussailleux, et dans la senteur de la bûche de chêne, dont la flamme éclairant la pénombre, accompagne si bien le silence du soir, haché par l’éclatement des pignes. Et pour mieux te connaître, j’ai consacré devant ma cheminée quelques veillées à te regarder avec d’autres yeux que ceux de tous tes amoureux : utopistes, poètes, simples rêveurs muets d’admiration quand se lève la brume matinale sur les bruyères des hautes futaies...
J’ai donc emprunté le regard d’un forestier, homme des bois certes, mais aussi ingénieur en chef des Eaux et Forêts : M. Georges PLAISANCE, auteur d’un ouvrage paru aux Editions DENOEL sous le titre « La forêt française ».
UN POINT DE VUE SCIENTIFIQUE
Avec toute la rigueur d’un technicien et d’un homme de sciences, M. Plaisance brosse une étude complète de la forêt, de son histoire, de son avenir. Les problèmes fonciers, juridiques et économiques sont abordés tour à tour pour faire le point sur la situation actuelle et pour tenter de dégager des solutions. Car, dans bien des domaines, c’est d’un véritable sauvetage qu’il s’agit, sauvetage dont l’urgence est d’autant plus grande qu’en matière de sylviculture il est bon de se rappeler qu’il faut 80 ans pour faire un pin maritime, 110 ans pour un pin sylvestre, 130 ans pour un hêtre et 180 ans pour un chêne !!
Sans entrer ici dans le détail de cette étude, je voudrais surtout résumer pour nos lecteurs les multiples utilités de la forêt, trop souvent implacablement sacrifiée à des soucis de rentabilité financière :
- la forêt captatrice gratuite d’énergie solaire, mise en réserve dans le bois,
- la forêt créatrice de sols, par le jeu des racines qui fragmentent les sols durs tout en les structurant par son humus,
- la Forêt véritable banque de sols humifiés pour l’avenir,
- la forêt protectrice des sols en pentes fortes, et des zones littorales en danger d’envahissement par les sables dunaires,
- la forêt régulatrice du climat :
" augmentation de la pluviosité
" régularisation du régime des eaux superficielles. Etalement des crues
" épuration des eaux usées des villes
" action modératrice sur les vents
" équilibre électrique et ionique de l’atmosphère.
- la forêt purificatrice des atmosphères polluées :
" tamisage des poussières
" absorption des gaz toxiques : fluor, soufre, plomb, oxyde d’azote
" dispersion des polluants
" attaque des microbes par les émanations résineuses et les phytoncides des feuillus.
- la forêt conservatrice d’espèces animales.
A ces considérations strictement techniques, on peut tout de même ajouter l’énorme apport de la forêt sur le plan esthétique et moral. A l’être humain de notre siècle, agressé par les bruits, la mécanisation, l’urbanisation dégradante, la forêt offre son silence, son équilibre, ses réserves de beauté et de loisirs.
UN AVENIR INCERTAIN
Et pourtant, en dépit des efforts accomplis depuis 160 ans, en dépit d’une législation pleine de bonne volonté mais mal appliquée, l’avenir de nos forêts apparaît des plus incertains.
L’auteur estime qu’il faudrait à la France de l’an 2000 quelque 18 à 20 millions d’hectares de forêts contre 14 millions actuellement. Pour reboiser dans de bonnes conditions, pour améliorer les peuplements, les méthodes d’exploitation, les méthodes de défense contre l’incendie, les modes de gestion, etc., il faudrait doubler et peut-être même tripler le personnel actuel, ainsi que les crédits affectés à la recherche forestière !
Or on bute actuellement, comme dans tous les domaines, sur les faux obstacles nés de l’économie de marché : manque de crédits, valeur-argent insuffisante des produits de la forêt, surtout à court terme. Je ne sais pas si M. Plaisance a quelquefois entendu parler de l’économie des Besoins, mais à la page 292 de son livre il énonce cette phrase-clé :
« Si l’on persiste dans l’adoption d’un système économique fondé sur l’argent, on se désintéressera de la forêt ».
Il explicite sa pensée aux pages 299 et 300, en écrivant :
« II est clair que l’intérêt de la forêt est sacrifié à d’autres : industriels, commerciaux, etc. ; ceci tout simplement parce que son produit mesurable en francs est insuffisant par rapport aux autres, parce que les investissements sont d’un rapport éloigné, parce qu’on sait que beaucoup d’erreurs ne se constatent et ne se paient qu’à la longue, parce qu’ainsi la forêt n’a pas de poids électoral à un moment où même le pouvoir, sous prétexte de démocratie, se place à chaque instant dans la balance électorale au lieu de garder sagesse, indépendance et sens de l’avenir éloigné... Ce n’est pas le libre jeu de la concurrence qui peut assurer cet état souhaitable de l’ensemble des forêts de France... »
ALERTER LES ECOLOGISTES
Tout ceci est peut-être évident pour nous, mais a besoin d’être impérativement répété à ceux qui, en toute bonne foi, lancent leurs jeunes forces dans la lutte pour la protection de la Nature et la survie de l’humanité, sans avoir conscience de l’absolue nécessité d’une Economie des Besoins pour assurer l’efficacité de leurs efforts. Nous avons déjà traité cette question à l’occasion de la création du groupe Paul-Emile VICTOR, et nous y reviendrons inlassablement dans de prochains articles, en faisant nôtre la conclusion donnée par M. Georges Plaisance à son beau livre :
« Il devient chaque jour plus évident :
- que la dépersonnalisation est un des maux du siècle,
- que notre économie productiviste conduit à un nouvel esclavage,
- qu’à la recherche croissante de l’avoir dans la Société de consommation, il faut substituer celle de l’épanouissement de l’être ».
Actuellement, la guérison se limite aux méthodes médicales officielles. De nombreux médecins. soit par orgueil. par prestige ou par profit, ne veulent admettre aucune autre méthode.
Ils devraient pourtant savoir que la science médicale est encore embryonnaire, que les techniques actuelles et les prouesses chirurgicales qui éblouissent les masses lie sont qu’un, partiront cachant les déficiences intellectuelles et 1a pauvreté de raisonnaient.
Si nous pouvions décrire la science médicale complète, des milliers de volumes devraient être lus et assimilés, ce qui mentalement n’est pas possible car la science est vaste comme l’univers. Il faut donc apprendre la médecine toute sa vie. Par conséquent, le médecin ne connait qu’une petite partie de la science médicale. Cependant avec cette partie, il lui faut acquérir l’art d’arranger tous les éléments : c’est ce qu’on appelle la puissance de synthèse ou l’art de guérir. Peu de médecins sont aptes à ce genre de travail.
En plus, le vrai médecin doit toucher le patient bien au-delà du plan physique, car la guérison doit s’opérer sur tous les plans. Par exemple, le vrai médecin doit réapprendre la valeur de la percussion et de la palpation, ces examens alliés à la pensée et à la conscience ont plus de valeur que les examens des dossiers, des analyses de laboratoires et des radiographies. Il faut savoir que les yeux et les mains doivent être les instruments primordiaux, ils sont irremplaçables et il faut que la pensée soit tendue vers l’essentiel et non distraite par les techniques abusives et commerciales.
Voilà pourquoi le vrai médecin s’attache à devenir un homme qui comprend, un homme qui veut guérir et non à devenir un « grand » médecin.
Il y a deux sortes de médecins : le premier est le mandarin qui vous reçoit et qui vous parle avec emphase et paternalisme avant de donner sa sentence.
Le second, le bon médecin vous écoute et cherche à comprendre. Il cerne le subjectif en même temps que l’objectif.
Pour l’un, la vie est simplement professionnelle et prestige.
Pour l’autre, la vie est devoir, amour et service.
Les premiers sont légions, les seconds sont rares.
C’est pourquoi on voit très peu de véritables guérisons.
Savez-vous que l’U.R.S.S. est le premier client de l’Argentine et Cuba le second, que c’est l’U.R.S.S. qui fournira les turbines destinées à équiper l’énorme barrage que l’Argentine construit sur le fleuve Parana ? Savez-vous encore que les missions militaires argentines et soviétiques ne cessent de se rendre visite et qu’il est fortement question que l’Argentine achète des armes à l’U.R.S.S. ?
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !
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Armons-nous et partez ! (refrain connu). Le président Carter déclarait le 29 janvier dernier : « La paix peut être maintenue dans le monde à la seule condition que les Etats-Unis soient prêts à être forts à l’intérieur et à l’extérieur... Nous n’avons pas assez de force pour défendre unilatéralement cette partie du monde (le Golfe Persique). Certains auront besoin d’une aide économique et militaire... ».
Sous-entendu : nous serons là pour la leur offrir. Ça fera travailler notre industrie.
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La commission de douze membres que Carter avait désignée le 11 avril 1979 pour enquêter sur l’accident de la centrale nucléaire de Three Mile Island a déclaré notamment : « La croyance en une sécurité suffisante des centrales nucléaires est devenue une conviction. Cette attitude doit être modifiée. Il faut savoir que la puissance nucléaire est potentiellement dangereuse de par sa nature même et qu’il faut continuellement se demander si les sauvegardes déjà en place suffiront à prévenir des accidents graves. »
Voilà qui nous change des affirmations péremptoires de notre ministre de l’Industrie et des responsables E.D.F. qui prennent les Français pour des débiles.
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Les conclusions de ladite commission ne sont pas restées lettres mortes comme c’est souvent le cas en France : dans le budget 1981 des Etats-Unis, on trouve une augmentation de 2,4 milliards de dollars pour les programmes de recherche sur l’énergie et... une baisse de 200 millions de dollars des crédits consacrés à la fission nucléaire. Le gouvernement estime en effet que « les réacteurs surrégénérateurs ne seront pas rentables avant l’année 202’ et même peut-être plus tard. »
Le gouvernement a aussi coupé les fonds pour la construction de l’usine de Clinch River. Par contre, les crédits destinés aux recherches sur la sécurité des réacteurs ont été portés de 25 à 40 millions de dollars.
Ces Américains sont vraiment des timorés... Nous, en France, on fonce sur les surrégénérateurs. On est les meilleurs (avec les brevets américains...) et on ne risque rien puisqu’on vous le dit ! »
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Toujours aux Etats-Unis, le déficit du budget sera de 15 milliards de dollars, en principe... En fait, les experts pensent que ce déficit pourrait être annulé grâce au coup de fouet attendu dans les industries d’armement (voir plus haut).
Si les prévisions des experts se’ réalisent, le gouvernement procèdera à des réductions d’impôts.
Ils en ont de la chance, ces Américains. Nous, on va accroître notre potentiel militaire, mais ca nous coûtera plus cher !
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Tout le monde sait que l’Italie est mal gouvernée, voire pas gouvernée du tout : les crises gouvernementales se succèdent, la plus grande anarchie règne, etc... Pourtant, malgré une inflation croissante et un chômage qu’on ne parvient pas à résorber, le produit national brut a augmenté en 1979 de 5 %, la productivité aussi et les exportations aussi. La balance des paiements courants présente un excédent de près de 25 millions de francs et les coffres-forts de la Banque d’Italie sont pleins à craquer. Les réserves représentent 38 milliards de dollars dont 25 milliards en or. Quant aux salariés, ils bénéficient toujours de l’échelle mobile.
Dites-moi, ça sert à quoi d’avoir pour Premier ministre le premier économiste de France ?
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Je ne vous ai pas encore parlé de pétrole ce mois-ci. Eh bien, sachez que l’excédent de l’offre sur la demande atteint sans doute près d’un million de barils par jour. Plusieurs gros spéculateurs qui avaient acheté du pétrole brut au Moyen-Orient avant Noël ont dû revendre à perte leur cargaison.
Selon « le Monde du 31 janvier dernier, plus d’un million de tonnes de brut approcheraient des ports européens ou américains sans avoir trouvé d’acquéreur...
Le chômage des navires pétroliers recommence à croître, particulièrement dans le Golfe Persique et les tarifs d’affrètement ont diminué de près de moitié depuis l’été dernier.
ALORS que le monde s’interroge sur l’avenir de la paix et que des nouvelles alarmistes circulent un peu partout, relançant l’inquiétude et la spéculation sur le napoléon, les usines d’armement tournent à plein et le président Carter demande au Congrès d’augmenter considérablement les crédits militaires. Bonnes nouvelles pour les marchands de canons. Nous acheminerions-nous vers une nouvelle Der des Der ? Faut-il donc encore une fois désespérer des hommes ?
Au milieu de ces bruits de bottes et de tiroirs- caisses qu’on ouvre et qu’on referme, quelques glouglous plus sympathiques nous parviennent des rivages de l’Atlantique et d’ailleurs. Ils sont produits par les millions de bulles qui viennent crever à la surface des eaux où on élève maintenant des poissons et autres créatures marines comestibles.
Le 2 juin 1976 s’est tenue à Kyoto (Japon) , sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, une Conférence technique sur l’aquaculture. Ses conclusions étaient qu’elle constituait un procédé particulièrement efficace d’accroître la couverture des besoins en protéines des hommes et qu’il fallait la favoriser de toutes les façons possibles. Où en sommes-nous quelques années plus tard ?
Comme nous l’explique le responsable des études marines à l’Université de Havaiï, le monde se trouve actuellement dans une situation comparable à celle où il se trouvait au 12e siècle. A cette époque, les protéines fournies par la viande faisaient cruellement défaut puisqu’elles provenaient essentiellement du produit de la chasse. Aujourd’hui nous sommes presque à court de protéines d’origine marine, comme le montrent les « guerres » que se livrent les pêcheurs, guerre de la morue, du hareng, du homard, etc. Globalement, le monde a faim et les ressources que lui offre la mer déclinent rapidement à la suite de l’exploitation brutale et irréfléchie qui en est faite.
Heureusement, l’aquaculture semble tenir ses promesses et de nombreux pays y ont recours plus ou moins largement. On souhaiterait tout naturellement que les nations les moins favorisées pour l’agriculture ou l’élevage soient celles qui en profitent le plus. Comme toujours, cependant, ce sont celles qui possèdent le plus de moyens en hommes et en matériel qui progressent le plus rapidement. Rien d’étonnant, donc, à ce que nous nous tournions d’abord vers les Etats-Unis d’où nous viennent des nouvelles intéressantes.
Pour « cultiver » le poisson, il n’est pas nécessaire pour un pays d’avoir des côtes. il faut, bien sûr, avoir de l’eau, et les fleuves, les lacs, les étangs et les réservoirs peuvent très bien faire l’affaire. C’est ainsi que des pays comme la Chine, la Tchécoslovaquie, la Pologne, l’URSS et le Japon se sont lancés dans l’entreprise couvrant ainsi près de 40 % de leurs besoins, et se situant devant les Etats-Unis.
La « révolution bleue », ainsi que certains l’appellent, un peu prématurément, peut-être, est en passe de sauver de la famine des régions entières du globe. Les protéines qu’elle va fournir sont même de meilleure qualité que celles que nous fournissent veaux, vaches, cochons et couvées car elles sont moins grasses, donc meilleures pour la santé, et mieux assimilées par l’organisme.
Un autre avantage est la préservation des espèces qu’un dépeuplement systématique des océans au moyen de chaluts travaillant à grande profondeur risque fort d’entraîner. Selon l’Organisation des Nations Unies, les effets de la pêche ont déjà pratiquement atteint le seuil tolérable.
Pour prouver l’utilité de cette nouvelle industrie, les chercheurs avancent plusieurs arguments. Par exemple, les économies d’énergie. Les bateaux de pêche consomment des tonnes de mazout pour un résultat de plus en plus aléatoire. L’aquaculture n’impose aucun déplacement et ne brûle pas de carburant. Deuxièmement, les rendements peuvent être très élevés puisque, sur une même surface, on produit, en poids, mille fois plus de moules que de boeuf. D’où un prix de revient moindre. L’aquaculture peut également permettre d’utiliser les eaux tièdes rejetées par les centrales nucléaires pour élever, dans des conditions de température idéale, des homards, par exemple, qui vont atteindre ainsi en dix-huit mois le poids qu’ils n’auraient atteint qu’en cinq à sept ans dans un océan froid.
A cet endroit, hélas, on voit poindre l’oreille du profit. A quand les poissons élevés en espace restreint privés de mouvement et gavés à heures fixes à la farine... de boeuf ou de porc ? Bientôt, peut-être, le brochet n’aura pas plus de goût que le poulet. Mais on n’en est pas encore vraiment là. Réjouissons-nous de voir des hommes travailler à nourrir leurs compatriotes et ne crachons pas dans notre soupe... de poissons.
INITIATIVE AU CANADA
Dans un journal de Montréal, Yves Leclerc a publié une série d’articles documentés sur la révolution informatique. Il concluait « un débat général et public est urgent ». Colette Buguet-Mélançon a magistralement répondu dans ce même journal, « La Presse », par un article remarquable, que nous reproduisons ici presque entièrement ; nous n’avons omis que la présentation de J. Duboin aux Canadiens, car nos lecteurs le connaissent...
MON métier d’enseignante me rend sans doute particulièrement sensible à l’avenir des jeunes et à la préparation que nous devons leur offrir pour vivre et s’épanouir dans la société de demain.
Disons d’abord qu’il semblerait aussi absurde qu’inutile de vouloir revenir à l’état d’esclavage où se trouvaient les hommes, contraints « à gagner leur pain à la sueur de leur front ». La révolution informatique, progrès sans précédent dans la marche de l’humanité, nous conduit à reconnaître que de plus en plus la société ne requerra, pour assurer son bien-être, que peu de gens, très qualifiés, pouvant concevoir, programmer et améliorer des machines. Ainsi, de façon croissante, les travailleurs actuels seront libérés des tâches ingrates, mécaniques ou déshumanisantes. Cette situation aura pour effet d’accroître le potentiel humain pouvant se consacrer aux occupations spécifiquement humaines (soigner, instruire, s’adonner à la recherche ou à la création artistique, etc.).
Ceux qui déplorent au contraire que la machine asservisse l’homme ont tendance à ne considérer que ses mauvais effets secondaires : l’utilisation dévoyée des machines qu’entraîne le présent système économique basé sur la rétribution par salaire d’un emploi, qu’il soit utile, inutile ou même nuisible. En effet, pour que les citoyens aient du pouvoir d’achat, il faut qu’ils aient la chance de détenir un emploi, quel qu’il soit. Il faut « créer des emplois », il faut conserver ceux qui existent, c’est la priorité absolue des politiciens et des économistes « distingués ». Vision à court terme, qui occulte la perception des mutations profondes qu’impliquera la révolution mécaniste et informatique. On voit maintenant, exemple entre mille, une usine (Fiat) où le montage est entièrement automatisé (plus d’ouvriers s’abrutissant sur la chaîne) . C’est bien là le contraire de l’esclavage de l’homme par la machine.
S’il faut chercher l’esclavage, ne serait-ce pas dans les rouages du système économique perpétué par les Etats, tant capitalistes que socialistes, système basé sur la valeur marchande, donc sur le profit ?
LE VERITABLE ESCLAVAGE
La quête du profit est basée sur la nécessité de vendre. « Exporter ou mourir », clamait Hitler avant de mener l’Allemagne et le monde à un abîme. La vente à tout prix, libre ou sous pression, des biens de consommation, utiles ou non. La vente forcée, celle des armements. Il faut pour s’en convaincre lire ce qu’en dit John Kenneth Galbraith (1) :
La commission chargée d’étudier les effets de la paix américaine conclut à son « indésirabilité « . Entre autres arguments, parce que « la guerre et elle seule résout le problème des stocks ». Et, Plus précisément : « le gaspillage militaire a une utilité sociale manifeste, du fait que la production de guerre s’accomplit complètement en. dehors des cadres de l’économie de l’offre et de la demande et qu’il soit le seul secteur de l’économie globale sujet à un contrôle complet et discrétionnaire de la part de l’autorité centrale ». Pour finir, an autre exemple bien ,concret confirme l’effet que des « menaces de paix » peuvent avoir sur la Bourse : « Wall Street a été secouée hier par la nouvelle qu’un ballon d’essai en vue d’obtenir la paix avait été lancé par le Vietnam, mais le marché a rapidement recouvré son sang-froid. »
Cela démontre bien notre esclavage... du système salaire-prix-profit ; il mène à l’absurde de la guerre, nucléaire même. Nous l’avons encore évité de justesse le 11 novembre dernier, lorsqu’une fausse manoeuvre avait fait décoller des avions américains et canadiens anti-missiles en riposte à une attaque soviétique, heureusement fausse.
La véritable libération de l’homme repose sur un système économique fondé sur les besoins réels de la société et non plus sur le profit éhonté de quelques-uns, et ce système devrait abolir le salariat (revenu en contrepartie d’un travail de plus en plus aléatoire). Cette « Economie distributive », de moins en moins considérée comme utopique, permettait à Michel Bosquet de titrer le numéro 734 du « Nouvel Observateur » : « Quand les chômeurs seront heureux »...
LE TEMOIGNAGE D’EINSTEIN...
A ceux qui se demandent encore si la révolution informatique va créer autant d’emplois qu’elle en supprime, nous soumettons cette réflexion d’Albert Einstein (2) :
Le progrès de la technique exige de l’individu, pour satisfaire aux besoins de la collectivité, de moins en moins de travail. Une répartition méthodique du travail devient de plus en plu. ; une nécessité impérieuse, et cette répartition conduira à une sécurité matérielle des individus. Mais cette sécurité, avec le temps libre et lu force qui resteront disponibles pour l’individu. peut être favorable au développement (le la personnalité. (...) Nous voulons espérer que les historiens futurs interpréteront les manifestations sociales maladives de notre temps comme des maladies infantiles d’une humanité plus élevée, occasionnées par une trop rapide allure de la marche de la civilisation.
Il me semble qu’il appartient aux éducateurs de suivre cette marche et même de la précéder, si nous voulons préparer des hommes et des femmes de demain : ceux qui, possédant l’inclination et l’intellect nécessaires, verront au développement harmonieux de la technique et les autres qui, développant leur personnalité, s’épanouiront dans l’immense domaine des relations humaines.
Le programme est d’envergure : il suppose une véritable révolution des mentalités. D’abord, il s’agit de transformer notre sacro-sainte « morale » du travail, inscrite au plus profond de notre conditionnement par des siècles de tradition. J. Duboin (3) écrivait en 1958 (4) :
Il ne s’agit pas de « déshonorer » le travail, mais de distinguer le travail obligatoire, auquel nous condamne la lutte pour la vie, et le travail volontaire, qui consiste à travailler à ce qui plaît... le premier deviendra une sorte de servitude temporaire pour permettre le second. celui de l’homme « libre » pour se perfectionner et s’accomplir.
...ET CELUI DE H. LABORIT
...Avant de prendre comme objectifs à l’éducation le perfectionnement et l’accomplissement de la personnalité, on peut se demander si cela est compatible avec le déterminisme biologique. ’ e biologiste Henri Laborit (5) en conclut que :
Les règles morales, les lois, le travail, la propriété ne résultent que de l’inconscience de l’homme ayant abouti à des structures socio-économiques imparfaites, où les dominances ont besoin de la Police, de l’Armée et de l’Etat pour se maintenir en place.
Poursuivant sa réflexion, Laborit affirme qu’un avenir optimiste de l’humanité demeure possible,
à partir du moment où l’évolution économique. c’est-à-dire la façon dont la technique de l’homme, fruit de son imagination et de son expérience. accumulée au cours des générations. lui permet une utilisation extrêmement efficace de la matière et de l’énergie de telle façon que les besoins fondamentaux de tous les hommes puissent être assouvis, si la répartition en est correctement faite... tout n’étant qu’apprentissage. il suffit donc d’apprendre autre chose.
Et puisque la biologie ne semble pas faire obstacle, nous pourrions, nous éducateurs, moins axer nos efforts sur la préparation des jeunes au « marché » du travail, mais plutôt viser le développement de l’imagination créatrice, faisant appel au prodigieux héritage de « l’expérience accumulée au cours des générations », rendu accessible à tous par la « Révolution Informatique ».
(1) J. K. Galbraith : « Report from Iron Mountain on the possibility and desirability of peace. » Chez Leonard C. Lewin, 1967. La traduction de ce livre, publiée en 1968 chez Calman Lévy, porte le titre « La paix indésirable ? »
(2) Dans « La Conquête de l’Avenir », éditions Martinsart. Collection l’Humanité en Marche.
(3) Poincarré disait de Duboin : « C’est la tête la plus solide du Parlement ».
(4) Dans « la Grande Relève » du 19 avril 1958, cité par M. Bosquet.
(5) Dans « la Nouvelle Grille », Henri Laborit, chez Robert Laffont, 1978.
Soit dit en passant
C’est, du moins je le présume, après la traditionnelle cérémonie des adieux venant mettre fin à une brillante carrière dans l’Administration, cérémonie suivie, comme il se doit, des discours et libations qui accompagnent d’ordinaire ce genre d’événement, que notre camarade Hilarius, nouveau retraité et tout fier de l’être, sourire en coin et médaille du Travail en sautoir, muni en outre de sa carte de Retraité enfin récupérée avec toutes ses estampilles au fond d’un tiroir - ouf ! -, que notre camarade Hilarius, dis-je, se permettait de rigoler, et nous avec lui, dans le numéro de janvier de la Grande Relève en brocardant l’Administration et ses méthodes courtelinesques.
Peut-être, ce qui n’est pas une excuse, avait-il un peu forcé sur le Beaujolais nouveau durant la cérémonie. Mais je crains fort que l’hilarité d’Hilarius ne soit de courte durée.
Maintenant que la fête est finie et que les vapeurs du Beaujolais sont dissipées, du moins j’ose l’espérer, je serais curieux de voir la tête de notre camarade à la pensée du sort qui va être le sien ainsi que celui de tous les autres retraités de la Société Libérale Avancée en route pour l’an 2 000. Au cas où il lui serait resté quelques illusions, vrais ça m’étonnerait, une lecture attentive de la Grande Relève, qu’il illustre si bien de sa plume, le ramènerait bien vite aux réalités. Et tout par. ticulièrement, dans le numéro en question, ce renvoi en bas de page, de l’intéressant article de Félix Lévy .
« Simon Nora l’a démontré dans son rapport sur l’informatique aux Etats-Unis, Richard Bellmann, de l’Université de Californie, précise que 2% de la population suffiraient à produire tout ce qu’elle consomme aujourd’hui. »
C’est de l’Amérique qu’il s’agit, mais cela nous pend au nez à nous autres aussi, Hexagonaux. comme à tous les pays modernement équipés, déjà encombrés de retraités et de chômeurs, lorsque toutes les ressources de la science et des techniques nouvelles, avec l’entrée en force de la télématique, seront mises en oeuvre et jetées dans la grande bataille économique de cette fin de siècle.
Alors, quand il ne restera plus que 2 % de la population pour faire le boulot, je vous le demande, qui c’est qui va payer les 98% qui restent à rien foutre ? ça va pas faire bezef la pension de retraite. Finies les cérémonies d’adieux arrosées au Beaujolais. Et le trou de la Sécu ne sera plus un trou mais un cratère. Un cratère dans lequel notre Joffre de l’Economie risque de sombrer avec son plan de redressement, avant de sombrer lui-même dans le ridicule.
On va dire que le professeur Barre ne se laisse pas impressionner pour si peu. Et qu’il ne se dégonfle pas. Sa dernière trouvaille, du reste, une idée géniale, comme l’on sait, qui revient en somme à faire payer par les vieux le déficit des caisses de retraites, même si elle n’a pas encore fait ses preuves - faut le temps - peut encore servir. Et pour le cas où cette mesure se révèlerait insuffisante, l’imagination des princes qui nous gouvernent n’étant jarnais prise en défaut, on peut envisager d’autres moyens tout aussi géniaux pour faire cracher au bassinet les contribuables rétifs. Pourquoi, par exemple, les seuls automobilistes seraient-ils invités à payer la vignette ? Et pas les vieux qui en sont les bénéficiaires ? C’est pas juste.
Ce n’est qu’une simple suggestion, mais tous les espoirs sont autorisés dans ce monde à l’envers. Verrons-nous un jour prochain des vieux retraités verbalisés sur le trottoir pour n’avoir pas leur vignette ? Mais où pourraient-ils bien se la mettre pour qu’elle soit visible ?
Si cette solution était adoptée, c’est du coup que la carte de retraité comme celle qu’Hilarius a eu tant de mal à récupérer après une randonnée de 25 kilomètres à travers les services de son administration, à la vitesse de 20 m 78 à l’heure (record homologué), sortirait comme par enchantement de son tiroir.
Cette idée, dont je me refuse, par pure modestie, à assumer la paternité - je la laisse à feu Paul Ramadier - vaut ce qu’elle vaut. c’est-à-dire pas cher, mais si vous en connaissez une meilleure adressez-vous à Matignon. On est preneurs en ce moment.
En attendant le Revenu Social qui, seul, dans notre monde moderne, de plus en plus déboussolé, est capable de réaliser l’égalité économique et d’assurer à tous une existence décente, nos vieux - ils sont 2 300 000 qui subsistent grâce à l’aumône du Fonds National de Solidarité - s’efforcent de survivre au milieu de l’abondance, assistant au spectacle effarant de la destruction des richesses que l’homme du XXe siècle peut si bien produire mais qu’il ne réussit plus à vendre.
Ils sont fin prêts pour accueillir dans leurs rangs les 98 % de veinards qui vont venir peut-être un jour grossir leurs rangs et réduire leurs rations de rutabagas. Un buffet campagnard est prévu à cette occasion. On pourra danser.
CHRONIQUE DE L’ÉLYSÉE-PALACE...
FRANÇAISES, Français, c’est en toute simplicité que je vais désormais m’entretenir régulièrement avec vous en vue de dresser un bilan sincère de mon action au cours des années passées de ce septennat qui s’achève.
Il y aura bientôt six ans que vous m’avez élu premier personnage de notre République. Fort de l’apprentissage positif effectué à la tête des Finances de notre pays, je pensais alors être apte à remplir de nouvelles responsabilités au mieux de l’intérêt général de toutes les Françaises, de tous les Français.
Puisque je m’y étais engagé lors de ma campagne électorale, vous m’avez fait confiance.
Depuis six ans, en effet, et encore mieux depuis que le premier économiste de France m’a secondé à la tête du gouvernement il y a bientôt quatre ans, vous avez eu tout loisir et bien des raisons de vous demander si vous aviez choisi le premier des veaux chers au grand Charles, ou, mieux, le veau d’or devenu depuis quelques semaines, le veau de diamant !
Vous voudrez bien m’excuser de ce mauvais jeu de mots, mais il vous mettra dans l’ambiance des vérités que je vais maintenant vous dire.
La Haute Politique, qui ne pouvait être que la mienne, est en réalité construite de bien misérables et sordides astuces, comme les plus gras câbles sont constitués par les plus petits filins.
Cette vérité, je l’ai appliquée, comme vous allez le comprendre, aussi bien dans mon comportement de chef de l’exécutif sur le plan intérieur, que dans les attitudes que j’ai été amené à adopter dans les relations internationales.
Au début de mon septennat, je vous avais laissé escompter une amélioration générale de la situation économique et sociale dans les six mois, puis ensuite et successivement dans les deux ou trois ans à venir et enfin jusqu’à ce jour, avec l’aide assurée de monsieur Barre, dès que ce dernier a bien voulu prendre le relais.
Je dois reconnaître qu’il a bien joué son rôle, au point qu’il m’est maintenant possible de reporter sur ses épaules le poids des échecs subis.
La résorption du chômage corrélative de l’amélioration de l’emploi n’est évidemment pas possible dans une évolution économique dont les techniques tendent au contraire à réduire dans des proportions considérables la participation du travail humain.
Accordez-moi l’intelligence de n’avoir jamais eu personnellement aucun doute à ce sujet.
Si je vous ai dit et répété le contraire, c’est qu’il était plus facile de continuer à subir les règles d’un système périmé, que d’aborder vraiment des changements de structures sociales et économiques révolutionnaires. Et c’est pourquoi, je le répète, j’ai eu l’astuce de me faire aider par un économiste aussi traditionnel que distingué.
Certes, maintenant qu’il commence à comprendre le jeu subtil dont il a été le jouet, nos rapports deviennent difficiles. Mais il se trouve bien piégé et il est possible d’ailleurs que, faisant contre mauaise fortune bon coeur, il affecte de prendre goût au jeu.
Après tout, ce sont les risques du métier, qui assure en contrepartie pas mal d’avantages, étant donné au surplus que les veaux ne sont sans doute pas encore prêts à devenir des vaches enragées !
(Confidences recueillies par Jacques VEAU (ex Bonhomme), Français Moyen, et rapportées par E. R. Borredon).
VOTRE frère est charcutier, votre soeur est chez les Bénédictines, vos cousins germains sont réformés et titulaires du Mérite National, vous êtes quelqu’un de bien. Mais notre Président de la Cinquième est-il digne de vous ? Passons en revue sa parentèle, voir s’il y a du répondant.
Edmond (son père) : Ancien Président Assurances Phénix. Depuis 50 ans administrateur de grandies firmes, de Sociétés coloniales, de la Sté Tunnel Mont-Blanc, Kléber-Colombes, Carbone-Lorraine, vingt Conseil en tout, avec le Crédit Foncier, Bergougnan, Air-France, la Sté Financière « . France et pays d’Outre-Mer », etc. (2)
Olivier (frère cadet) : Conseiller de Multinationales, I.B.M., etc., Administrateur de Sodico Mc Cann Erikson, de Trailor, ex PDG de Gibbs-Hill France, Directeur Institut européen d’administration, Vice-Président mondial de « Jeune Chambre Internationale » (2).
Isabelle (soeur) : Comtesse Foulques de Lasteyrie du Seillant, par son mariage avec le Président de New Hampshire Insurance (3).
Jacques (cousin germain) : Ancien directeur financier Commissariat Energie Atomique, Directeur Institut d’émission des D.O.M. & T.O.M., Caisse de coopération économique, Administrateur de - sociétés du secteur nucléaire du Trust Schneider TechniAtome, Société Etude Recherches Uranium (SERU) Intercontrôle, Sté France-Iran enrichissement de l’uranium, NovAtome- Industrie, filiale de Creusot-Loire, FramAtome, tous fournisseurs du C.E.A. (2).
Philippe (autre cousin germain) : Nommé le même jour Administrateur Sté Fse Téléphone Ericson. de L.M.T. et le lendemain Vice-Président Directeur Général (3). PDG de L.T.T. et de Thomson-CSF, six autres Conseils d’administration. Fournisseur de l’Etat en matériel de Télécommunications. Nommé récemment Administrateur des Chargeurs Réunis (2).
François (3e cousin germain) : Président Banque Centrale Etats Afrique Equatoriale & Cameroun, PDG Banque Fse commerce extérieur, Administrateur Nadella S.A., de Gaz de France, Assurances Générales de France, Conseiller surveillance Entreprise Jean Lefèvre, etc. (2).
Anne (épouse) : de la famille Schneider (2) .
Ne faisons pas mention des mandats parlementaires détenus, puisqu’il y a incompatibilité légale entre mandat électif et la qualité de fournisseurs de l’Etat. Mais à ce niveau on s’affranchit des règles du commun. Ce n’est pas le général de Bénouville ou Marcel Dassault qui contrediront.
Sur le plan de l’anecdote, on a pu vous conter que sa petite soeur Isabelle a acheté un château en Corrèze pour une tasse de thé et l’a fait classer monument historique un an après (1971), ce qui vous a coûté 17 millions de centimes pour réfection de la façade. On a pu ajouter que la soeur aînée, Sylvie, comtesse de Las Cases, fait de même entretenir son château de Marvejols par le contribuable. C’est vrai. Mais depuis 1976 seulement (3). N’oublions pas que notre argent est souvent plus mal utilisé par l’Etat.
Eh bien nous voici rassurés. M. Valéry Giscard dit d’Estaing est de bonne famille. Le moment venu de lui renouveler notre confiance, nous pourrons l’envoyer, sans remords, se faire inscrire au chômage. Il n’y restera pas longtemps, son honorable famille lui trouvera vite un petit job.
(*) Vers de MARMONTEL dans Lucile.
(2) Les 200 Familles au pouvoir, Henri Coston.
(3) Le Contribuable Français, 24, rue Aumale, Paris-9e.
(4) Le Monde, du 18 juin 1976.
LA monnaie ne permet plus l’échange différé sans perte ; perte d’autant plus sévère que persévère l’épargnant. Ce n’est pas là une révélation pour nos lecteurs bien sûr ; des couches grandissantes de la population comprennent confusément ce vice rédhibitoire de notre monnaie, et s’adonnent allègrement au crédit que leur consentent les marchands d’argent et les vendeurs en mal de vente.
Le problème est si bien brouillé par ceux « qu’intéresse l’argent des autres », que restent très nombreux ceux qui lui confèrent sa vertu d’antan de garder sa valeur, de pouvoir être conservé pour faire, demain, l’acquisition convoitée. Cette notion enracinée depuis l’apparition de la monnaie-marchandise est si bien passée dans les viscères que même ceux qui doutent, gardent le secret espoir de sa réincarnation en monnaie précieuse. Aujourd’hui, c’est l’âge d’or de la banque. Aussi convient- il par tous les moyens d’anesthésier la compréhension, de donner le change sur le rôle et la structure de la monnaie.
Par la méthode des miettes semées et des os à ronger, la mainmise de ceux qui sont dans le secret des dieux est assurée sur tout ce qui est rentable dans le sillage de la consommation. L’ère des banques est florissante ; industrie, commerce, propriété passent dans leurs mains d’experts. M. Gogo opine du bonnet, leur accorde sa confiance, des fois qu’un chuchotement lucratif lui parvienne à l’oreille ; l’or tinte, brille, ses yeux restent braqués sur la cote mirage : 45 000 anciens francs le Louis ces jours derniers.
Qui menace la monnaie ? Celui qui tente de se parer contre ses dévaluations ? Il l’aime trop ! Le « révolutionnaire » ? Il répond encore avec trop de conviction à l’appel que lui lance « l’Ecureuil » Epargne ! En constituant ton patrimoine tu augmentes le patrimoine de tous ! (15 millions de livrets de Caisse d’Epargne à ce jour...) .
Non ! La monnaie ne court de risque que celui de sa mise hors d’utilisation par sa pléthore même ; elle s’y engage vivement et sûrement, la hausse des prix en donne la mesure : 50 % de hausse dans les six premiers mois de 1979 en Israël, 100 % prévu pour la fin de l’année. Dans les Amériques ? Suivons les dollars. En Occident industrialisé ? Suivons la balle de tennis... dont le prix s’inscrit pour le calcul du S.M.I.G.
L’abondance tue la valeur, la valeur de la monnaie marchandise comme celle des autres biens. Attendrons-nous de faire le marché avec une brouette de billets de banque ?
Espérons que l’incommodité de la pratique inspirera, comme les risques de la circulation de l’or aux temps des forêts de Bondy, la mutation de notre fondant moyen d’échange en un module de paiement plus fiable et moins onéreux. Murmurons son nom : la monnaie de consommation. L’heure de la structuration de l’Economie Distributive avec son Revenu Social et son Service Social de Travail sera alors sonnée.
Réponses aux objections
EN « réponse aux objections », j’ai publié un article intitulé « Pouvoir d’achat sans travail » (n° 755 d’avril 1978) où j’énumérais les principaux moyens suivant lesquels, par le truchement de secours, prestations et allocations diverses, il était possible, en France et actuellement, de percevoir du pouvoir d’achat sans fournir une contrepartie de travail.
Ces moyens avoisinaient le chiffre de 3000. Ils paraissaient incroyables !
Au retour de longs voyages, en classant mes documents, je retrouve un article du « Matin » du 19 octobre 1979, intitulé « Le revenu des Français : 55 % vient de leurs salaires et 45 % des aides de la collectivité ». Il conforte ce que j’écrivais alors.
L’auteur de l’article, Jean-Gabriel Frédot, y analyse le second rapport du « Centre d’Etude des Revenus et des Coûts (C.E.R.C.). On y lit : « En 1978, le revenu brut des ménages français était constitué, pour les deux tiers environ, de revenus économiques, impôts non déduits et pour plus d’un bon tiers de revenus d’origine sociale. Rapport 55/45.
Au début des années 60, les revenus alloués selon les critères sociaux ne représentaient globalement que 37% du revenu des ménages. L’évolution est de taille. C’est celle du progrès !
Certes, cette répartition n’empêche pas la persistance de nombreuses inégalités. Par exemple, entre le Languedoc-Roussillon et la région parisienne, les revenus moyens varient quasiment du simple au double. Mais, dans l’ensemble depuis 1960, nos compatriotes vivent mieux. »
Les auteurs de l’étude du C.E.R.C. ajoutent : « Une société dont la moitié des revenus provient non plus de ressources exclusives du travail mais de prestations collectives, qui ne prennent pas toujours la forme de versements d’argent, est-elle encore une société dans laquelle capital et travail s’affrontent ? »
A notre avis, cette question est probablement prématurée. Il faut se méfier des chiffres globaux et les deux millions « d’économiquement faibles » ne sont pas tous assistés (en particulier dans les milieux ruraux et parmi les marginaux). De plus, les allocations servies aux chômeurs sont limitées dans le temps.
Ce qui importe surtout pour nous, dans ce rapport du C.E.R.C., c’est que, globalement, le revenu des Français n’est plus entièrement réductible au salaire. Jacques Duboin pensait que, petit à petit, une économie distributive s’instaurerait d’elle- même ; faute de quoi le progrès mécanique, dans une société basée sur le profit, serait générateur de conflits sociaux qui iraient en s’exacerbant.
Il faut noter que la dépression économique a ralenti le processus normal de distribution. Actuellement, le capitalisme dans tous les pays est miné par sa plus grande contradiction interne : la machine remplace l’homme. Malgré les gaspillages et les dépenses improductives (dues principalement aux armements démentiels) les marchandises produites en grand nombre ont du mal à se vendre. Alors, on fausse les principes de base sur lesquels repose tout le système : la confiance dans la monnaie et le crédit. Pour se sortir de cette crise, on pratique l’inflation et, sur cette spoliation des petits épargnants, le capitalisme remet à plus tard sa condamnation. Certes, il s’adapte, mais jusqu’à quand et vers quelles catastrophes nous conduit- il ?
Il n’en reste pas moins vrai que, déjà, l’économie distributive entre dans les esprits. Près de la moitié des Français considère déjà comme normal de recevoir du pouvoir d’achat sans travailler. Il ne nous reste plus à nous autres militants, que de leur faire comprendre que, grâce aux machines, de nouvelles bases économiques et sociales peuvent être instaurées.
L’évolution du capitalisme et du progrès facilitent notre tâche.