Recherche
Plan du site
   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles > N° 892 - août-septembre 1990

 

Le site est passé à sa troisième version.

N'hésitez-pas à nous transmettre vos commentaires !
Merci de mettre à jour vos liens.

Si vous n'êtes pas transferé automatiquement dans 7 secondes, svp cliquez ici

 

 

< N° Précédent | | N° Suivant >

N° 892 - août-septembre 1990

La leçon de l’Anschluss   (Afficher article seul)

Amalgames   (Afficher article seul)

Au fil des jours   (Afficher article seul)

Lu, vu, entendu   (Afficher article seul)

Des Chiffres   (Afficher article seul)

Rencontres Européennes et Mondialistes   (Afficher article seul)

Proudhon   (Afficher article seul)

Les joies de l’économie des ressources   (Afficher article seul)

^


Editorial

La leçon de l’Anschluss

par M.-L. DUBOIN
août 1990

Les commentateurs de l’actualité tombent d’accord pour dire que "l’union économique, monétaire et sociale" de la RFA et de la RDA est un évènement historique sans précédent, parce que jamais un ac-cord de cette ampleur n’a été réalisé aussi vite et en temps de paix.
En fait, c’est à Panschluss" de la RDA par la RFA.qu’on vient d’assister. Notre ministre de l’Industrie vient de l’apprendre brutalement. II est allé à Berlin, avec une trentaine d’industriels français , espérant pouvoir conclure quelques contrats intéressants. Quelle innocence ! Rien à faire. Les firmes et les banques allemandes de l’Ouest entendent bien faire seules mainbasse sur tout ce qui peut s’avérer rentable à l’Est. Trois grandes compagnies électriques de la RFA ont déjà acheté en catimini, fin juin, toute la distribution d’électricité. Le Parlement de la RDA ayant dénoncé l’affaire, on va maintenant essayer de faire intervenir la CEE sur un autre rachat, tout aussi rapide et suspect, celui de la distribution du gaz. Mais le seul assureur d’Allemagne de l’Est a déjà été racheté par un groupe d’assurances OuestAllemand. Quant aux huit mille autres"combinats" et entreprises (80% de l’économie Est-Allemande et quatre millions d’emplois), jusque là "proprités du peuple", ils ont été confiés à un "trust" avec pour mission de "réorganiser et privatiser’’ l’ensemble. II est évident que ce ne sera pas au bénéfice des firmes ouestallemandes de faible importance ni de groupes étrangers, les observateurs commencent (seulement !) à s’en apercevoir.
Cette main-mise financière de tout un pays par quelques grosses firmes et les banques qui les soutiennent n’a rien de surprenant. Elle est dans la logique même du capitalisme, comme elle est l’aboutissement logique de l’échec des économies qui se disaient communistes mais prétendaient faire le bonheur des gens sans leur demander leur avis.
On a amplement décrit l’immense braderie en RDA, le samedi 30 juin, et la fête monstre organisée dans la banlieue de Berlin pour célébrer la mort du mark-Est, car, explique le Monde : "L’avènement du deutschmark est avant tout l’accomplissement d’un vieux rêve, quand on venait lécher les vitrines des Intershop, pour voir les produits de l’Ouest disponibles seulement contre les précieuses devises." Henri de Bresson a raison d’attirer l’attention sur l’arme utilisée par les affairistes de l’Ouest quand ils préparaient le terrain. Ce rôle central assigné à la monnaie , "cet équivalent allemand de la force de frappe française" , selon l’expression du secrétaire général de l’Elysée est une première leçon à tirer de cette annexion. "La population de RDA attendait le Deutschmark comme la manne dans le désert" rapporte un témoin. Pourtant l’idée d’offrir le Deutschmark aux "frères" de l’Est comme cadeau d’entrée dans la communauté des nations libérées de la dictature poststalinienne, ne vient ni du Chancelier Kohl, ni d’un membre de son gouvernement, mais d’un député, I.Matthaus-Mayer, qui l’a lancée dans l’hebdomadaire die Welt ... en janvier dernier !
II est une autre leçon qu’il ne faut pas manquer de noter. C’est la possibilité pratique, en s’appuyant ainsi sur un changement de monnaie, de tout changer en seulement quelques mois, pouvu qu’une volonté forte en ait décidé ainsi. Quelques mois de préparation, car l’opération s’est faite concrètement en une semaine.
Tout citoyen de RDA s’étant fait ouvrir un compte en banque, le 2 juillet, la Bundesbank a transféré 25 milliards de DM à ses nouvelles antennes de RDA, pour qu’ils soient répartis vers les banques, les centres de paiement, les municipalités. II a suffi d’une semaine pour que le changement de monnaie soit opéré sur tous les comptes des particuliers et sur ceux des entreprises. De même qu’en une seule semaine, les rues des grandes villes avaient complètement changé d’aspect. On a vu surgir brusquement, par camions entiers, des productions de l’Allemagne de l’Ouest qui ont été déversées sur les rayons des magasins,et des représentants viennent tenter de placer leurs produits. Bref, il n’y a aucun problème de production pour faire face à la demande des nouveaux consommateurs, qu’on avait au préalable solvabilisés : tous les Allemands de l’Est pouvaient retirer, à leur banque, dès le 1er juillet, deux mille deutschmarks en liquide.
Pas de problème non plus pour trouver l’argent afin que les sociétés puissent verser les premiers salaires dans la nouvelle monnaie. Les sommes prévues se montent, selon le ministre Est-Allemand des finances, et pour les trois premiers mois à venir, à un milliard de DM pour les artisans et petits entrepreneurs et à dix milliards pour les grandes entreprises. Et la CEE prévoit qu’elle va consacrer en aide régionale et sociale 7 milliards de francs par an pendant trois ans pour que la RDA s’adapte à la règlementation communautaire. Quand il y a la volonté politique, les moyens de production et les moyens financiers suivent.

Reste aux Allemands de l’ESt à découvrir les autres aspects de leur annexion. Leur ministre des finances a déjà remarqué : "Nous avons acquis notre souveraineté le 9 octobre dernier, nous en redonnons déjà une partie le 1 er juillet"..Aux dernières nouvelles, les agriculteurs ont manifesté leur colère le 10 juillet à Leipzig en menaçant de déverser 10000 tonnes de lait invendues...

^


Actualités

Amalgames

par F. LÉVY
août 1990

Tous les pays de l’Est se sont dits socialistes et ont cru appliquer un système d’économie communiste. A l’Ouest, des gouvernements se disent socialistes et appliquent un système d’économie capitaliste. L’Histoire précisera peut-être un jour le sens du mot "socialiste".
L’opposition entre les régimes des blocs de l’Est et de l’Ouest a conduit à un état de guerre nécessitant les armées du Pacte de Varsovie et celles de l’OTAN. Le Pacte s’étant pratiquement dissous, l’OTAN reste l’objet de discussion pour les deux Allemagnes. Une bonne solution serait de proposer l’entrée dans l’OTAN des deux Allemagnes, de l’URSS et de tous les pays de l’Est. La paix serait alors immédiatement et pour toujours assurée. Mais il ne faut pas oublier que si les Etats-Unis nourrissent depuis longtemps de leur blé l’URSS, c’est dans le double but de satisfaire leurs agriculteurs et d’assurer la survie de leur ennemi potentiel.
Cet ennemi est en effet nécessaire à la pérennité des industries d’armement et des armées : réalise-t-on le désastre économique et social que provoquerait un total désarmement, pour les Etats-Unis comme pour les pays de l’Ouest en économie de marché, le nombre de chômeurs, la faillite des usines et des commerces liés à la guerre, le déséquilibre (pour la France en particulier) de la balance des paiements ? C’est ce spectre qui a conduit à la stérilité de 45 ans de "conférences de désarmement", qui a fait passer sous silence presque total l’offre de désarmement et de démobilisation simultanés faite par Gorbatchev en deux demi-pages conjointes (soit une page entière) de "publicité" dans Le Monde du 6 février 86, qui permet de discuter sur la production d’armes chimiques et bactériologiques, depuis toujours interdites, qui perpétue l’étude de nouveaux chars, avions, hélicoptères, qui permet à la France, dans un horizon de paix inespéré et alors que sa puissance de feu est plus que suffisante, "d’améliorer" son parc nucléaire par un nouvel "essai" à Mururoa...

Le pire est en vue : l’économie de marché, seule solution follement proposée à l’Est, provoque déjà toute le presse le confirme - chômage et inquiétudes financières. Ces pays "libérés" vont revivre 1929, crise mondiale joliment maitrisée par la guerre de 39, mais provisoirement, car la crise est revenue : le chômage comme la misère sont exponentiels dans les pays nantis. Et le Japon, parvenu au sommet, craint la chute parce que tombe le yen ! Quant au TiersMonde...

^


Actualités

Au fil des jours

par A. PRIME
août 1990

France : ping-pong social
Après neuf années de pouvoir élyséen "de gauche", il aura fallu une nouvelle baisse marquante de la cote de Mitterrand pour que reprenne le petit jeu de ping-pong du Président avec son Premier Ministre sur les thèmes : "plus de justice sociale, meilleur partage de la croissance".
Les deux se renvoient la balle, mais rien de concret, de positif ne sort de leurs discours qui se révèlent, au fil des années depuis 1981, une escroquerie verbale envers leurs électeurs et les militants socialistes, les deux étant, par voie de conséquence, en perte de vitesse.
Rocard a emprunté à Mitterrand son "truc" : "donner du temps au temps" : En 1988, souvenez-vous, il demandait 15 à 18 mois pour "réduire les inégalités sociales" ; deux ans après, il demande trois nouvelles années, alors que la croissance avoisine 4 % (taux des trente glorieuses). De qui se moque-t-il ?
A peine Mitterrand a-t-il dénoncé ( ?) "l’argent gagné en dormant" que le Palais Brongniart tousse. Immédiatement Rocard proclame que la bonne santé de la Bourse est nécessaire à l’économie des démocraties libérales, et tout rentre dans l’ordre.
En attendant tout le monde, tous les instituts, reconnaissent que le fossé ne cesse de se creuser entre les riches et les pauvres (1) ; 500 personnnes, soit le quart des effectifs, vont perdre leur emploi à la SFP ; Michelin prévoit un "nouveau plan social de restructuration" (admirez au passage l’expression), soit, plus prosaïquement 2.600 licenciements. Or, la production de Michelin ne diminue pas ; il mécanise, robotise et on continuera à prétendre que l’investissement productif crée des emplois.
Oui, les socialistes au gouvernement ont totalement trahi leurs promesses. Quels résultats attendent-ils de leur politique ? Que Le Pen qui, ne l’oublions pas, pique autant de voix, sinon plus, à gauche qu’à droite atteigne le quart des suffrages, voire davantage (cf Villeurbanne) ? C’est le sens de l’entente tactique RPR-UDF pour présenter un candidat unique au premier tour des présidentielles.

En effet, l’éventualité à cinq ans d’un score Le Pen 20%, RPR 15%, UDF 15% est tout à fait envisageable au train où vont les choses. Ainsi Le Pen pourrait-il le plus légalement du monde devenir le candidat de la droite (voir Hitler).
Le PS fourrier du fascisme en France ! On aurait tout vu.

***

Elections à l’Est : deux poids, deux mesures
Suivant l’exemple de la Pologne, les élections libres en RDA, Hongrie et Tchécoslovaquie se sont traduites par une nette victoire de la droite : environ 45% des voix au parti ou à la coalition dominants.
Par contre en Roumanie et en Bulgarie, les résultats ont été exactement inverses. Les partis continuateurs des communistes, rebaptisés socialistes, ont obtenu la majorité dans des élections régulières selon le constat des observateurs étrangers eux-mêmes. Seraitce la troisième voie possible que nous souhaitions aux pays de l’Est opérant leur "révolution"  : un socialisme réel à visage humain ?
Quoiqu’il en soit, les résultats n’allant pas, dans ces deux pays, dans le sens souhaité par les pays capitalistes - économie de marché sans réserve, libéralisme intégral on continue à fomenter des troubles. Au Nicaragua, Noriega avait joué le jeu : parfait, rien à redire. En Roumanie, les mêmes élections sont dénoncées : PC déguisé, ombre de Ceaucescu. Un commentateur de télé en France parle de "répit" pour les communistes en Bulgarie et Roumanie. De quel droit - démocratique - établir deux poids, deux mesures ? Les urnes n’ayant pas répondu à leur désir, les Occidentaux admettent et même défendent le fait que la contestation, les troubles continuent sur la place publique. Et de dénoncer, non sans esprit type Timisoara, qu’un gouvernement veuille faire respecter la loi. Les Français, c’est bien connu, ont la mémoire courte ; ont-ils oublié mai 68 ?
Par contre, qu’on prévoie deux millions de chômeurs en RDA, que 53% des personnes craignent de perdre leur emploi n’émeut pas nos censeurs : c’est le prix à payer, commentent-ils, pour la liberté et les beautés de l’économie de marché.

***

Elections en Algérie : un XXIe siècle religieux ?
On s’en souvient, Malraux prophétisait : "Le XXIe siècle sera religieux ou il ne sera pas". La victoire sans appel des Intégristes, ou FIS, (plus de 60% des suffrages, contrôle de la plupart des grandes villes) est inquiétante, mais elle est sûrement le fruit de l’incurie des dirigeants FLN confortablement installés au pouvoir, incapables de résoudre les problèmes économiques, alors qu’ils avaient montré, dans leur longue guerre de libération coloniale, tant de courage, tant de savoir.
L’Iran, les républiques soviétiques musulmanes, l’Algérie, la Tunisie et le Maroc touchés, c’est le retour en force du fanatisme religieux avec ses conceptions d’un autre âge
assujétissement de la femme, démographie incontrôlée.
Sans qu’heureusement leur influence soit aussi pernicieuse que dans les pays musulmans, il ne faut pas oublier que les "révolutions" des pays de l’Est ont eu pour support les églises, qu’elles soient catholiques comme en Pologne, ou protestantes comme en RDA.
Le moins que l’on puisse en dire en "cette fin de siècle obscure", pour reprendre le titre du dernier livre de Max Gallo, c’est que la raison ne domine pas. Où est le "siècle des lumières" ? Et cependant, les "lumières" isolées ne manquent pas nous pouvons dire sans fausse modestie que les distributistes après Jacques Duboin sont l’une d’elles.

***

URSS : étrange Gorbatchev
Toutes les craintes que nous avons exprimées depuis des mois dans la Grande Relève apparaissent de plus en plus fondées au fur et à mesure que le temps passe.
On pouvait lire dans le Monde du 16 juin cette incroyable dépêche de l’AFP reproduite sans commentaires : "URSS - Etats Unis : M.  Sununu attendu à Moscou pour conseiller M. Gorbatchev sur l’organisation de la présidence - Le secrétaire général de la Maison Blanche, M. John Sununu, le plus conservateur des principaux collaborateurs de M. Bush, se rendra à Moscou pour conseiller M. Mikhaïl Gorbatchev sur l’organisation et le fonctionnement de sa présidence, a-ton annoncé jeudi 14 juin de source officielle américaine".
On savait déjà que, depuis janvier dernier, fonctionnait une commission mixte franco-soviétique Stoléru étant responsable pour la France - pour rechercher les meilleurs voies possibles pour passer à l’économie de marché. Ombres de Marx et de Lénine, quel spectacle pour vous !
Gorbatchev, il y a peu encore homme adulé dans le monde capitaliste, ainsi que ses politiques et ses économistes, dans un pays de 2.800.000 âmes, seraient-ils indigents au point d’avoir de tels recours ?
Triste, décevant, inquiétant, à peine imaginable. II est vrai qu’après cinq années de pérestroïka (restructuration), les magasins sont de plus en plus vides.
Boris Eltsine ("Eltsine, c’est Pierre Poujade", dit Alain Minc), ennemi juré de Gorbatchev depuis que ce dernier l’avait mis à l’écart, rénovateur ultra, vraisemblablement homme de paille ou roue de secours de l’Occident, qui a produit un livre sans consistance mais au titre évocateur : `Jusqu’au bouf’ a réussi à se faire élire président du Parlement de Russie. La Russie n’est théoriquement qu’une des quinze républiques d’URSS, mais elle représente 50 % de son territoire et de ses habitants.
Peu de temps après par contre, un conservateur s’est fait élire responsable du PC de la même république. Les "Conservateurs" reviennent en force au Congrès du PC : ils accusent Gorbatchev de trahir Marx et Lénine. L’armée est sûre ment discrètement derrière eux. A l’heure où nous écrivons - le Congrès vient de s’ouvrir -, on ne peut rien dire de plus.
Nous conclurons seulement, avec Hélène Carrère d’Encausse (Radio Monte Carlo le 2 juillet 1990) : "Gorbatchev a perdu le pouvoir réel, il lui reste le pouvoir apparent". A suivre.

(1) Le rapport du CERC, pour 1989, vient une nouvelle fois confirmer : "Les revenus de travail ont moins progressé que ceux du patrimoine et de l’épargne" ?le Monde 4.7.90). Le pouvoir d’achat des smicards (1.700.000) a encore baissé de 0,7 % après moins 0,5 en 1988. L’augmentation de la cotisation assurance-vieillesse de 1 % au premier janvier 1990 (toujours les mêmes qui paient) a réduit et l’INSEE, avec le CERC, confirme - le gain de pouvoir d’achat dans le secteur privé à 0,1 %.
Par contre, les revenus des professions libérales e commerciales continuent à être en forte hausse. Le revenu agricole a augmenté de 10,8 % en moyenne (là aussi il faut distinguer entre les gros et les petits : de + 67 à - 12) : et le CERC précise que cette augmentation est due essentiellement à "l’assainissement des marchés". Les distributistes traduiront cette monstruosité, quand des millions d’êtres humains meurent de faim.

^


Actualités

Lu, vu, entendu

août 1990

Les crimes du FMI
Davison Budhoo a démissionné, il y a deux ans, d’un poste de responsabilité au Fonds Monétaire International, pour protester contre les politiques de génocide de cette institution supranationale. II a annoncé la publication prochaine d’un livre (1) dans lequel il accuse le F.M.I. de faire couler "des rivières du sang des millions de gens pauvres et affamés" et de se livrer à des "fraudes statistiques" pour obliger les pays concernés à adopter des politiques d’austérité. Au cours de la conférence de presse tenue au mois de Mai dernier à Washington,M. Budhoo a donné quelques apercus du contenu de son livre : "A aucune période antérieure de l’histoire de la civilisation humaine, une institution n’avait eu autant d’influence sur la vie de tant de gens que le FMA. n’en a aujourd’hui. Toute l’humanité, ou presque, est touchée par ses décisions. II est d’autant plus important de dévoiler les pratiques criminellesdu FMI. que les pays d’Europe de l’Est cherchent en ce moment à en devenir membre. "
M.Budhoo n’est pas seul à dénoncer la perversité du F.M.I. ou de la Banque Mondiale : M. Irwin, directeur du personnel de la Banque Mondiale, vient de démissionner en expliquant qu’il ne pouvait plus supporter que " les employés de la haute bureaucratie bouffite et surpayée, touchent entre 600.000 et 750.000 francs par an, soient exemptés d’impôts, se livrent au gaspillage, gèrent mal et soient d’une arrogance injustifiée"(2).
M. D Knox, ancien directeur de la Banque Mondiale pour l’Amérique Latine et les Caraïbes, déclare que les nations débitrices "n’ont d’autres alternatives que de se déclarer en défaut de paiement".
M. D Abdulah, dirigeant du Syndicat des Travailleurs du Pétrole de Trinité, dit qu’il est temps de mettre fin au mythe que les Etats-Unis et d’autres importants actionnaires du F.M.I. fournissent une aide aux nations pauvres sousdéveloppées : " l’an dernier, 32 milliards de dollars nets passèrent du Tiers Monde aux riches nations industrialiséesdu Nord, comme les Etats-Unis. Si les citoyens américains étaient soumis aux conditions du FMI, ils comprendraient mieux ce que leur gouvernement impose à d’autres pays par l’intermédiaire du FM. I. et de la Banque mondiale et ils inciteraient alors à un changement."

(dans Nouvelles Solidarités du 20.05.90, transmis par D. B., Genève)

(1) "Trop,c’est trop, cher Monsieur Camdessus", New-York horizons press
(2) article du Wall Street Journal du 30 mars

***

Les nouveaux serviteurs
"Le problème de fond auquel nous sommes confrontés est celui d’un audelà de l’économie et, ce qui revient au même, d’un au-delà du travail rémunéré La rationalisation économique libère du temps, elle continuera d’en libérer, et il n’est plus possible, par conséquent, de faire dépendre le revenu des citoyens de la quantité de travail dont l’économie a besoin".

(A.Gorz, Le Monde Diplomatique, juin 1990, transmis par P. H., St Mandrier)

Dans cet article, où il reprend les idées qu’il a développées dans son livre "les Métamorphose s du travail" et que nous avons analysé dans notre N°872 sous le titre "Les Nouveaux serviteurs", André Gorz montre à nouveau combien sa pensée rejoint celle des distributistes.

***

Désarroi public
Eric Le Boucher se plaint "du désarroi des pouvoirs publics", de la "désorganisation croissante" dont le gouvernement fait preuve et des "maladresses de l’exécutif’. II souligne la divergence qui sépare, en ce qui concerne l’économie mixte, les conceptions de François Mitterrand et de Michel Rocard : "Le premier (encore influencé par le marxisme ?) oppose le public (le bien commun) et le privé (l’argent sale). Le second (keynésien) les marie dans des nationalisations à 51 °/ ou des opérations à 50/50 comme dans le cas de Framatome". Et "aujourd’hui que les socialistes cherchent, dans le désordre, des idées neuves qui puissent apparaitre "de gauche", (cette divergence profonde) explose à tout propos, s’appuie sur les divergences des ministères et les renforce".

(Le Monde du 17 juin, Transmis par P. H. St-Mandrier)

***

Progrès de l’économie de marché
A l’Est, progrès de l’économie de marché ou l’économie de marché estelle un progrès ?
Dans Le Monde du 7 juin, on trouve ces deux titres chocs :

Les chocs de l’économie de marché. Chômer en Pologne

En Janvier 1990, on recensait en Pologne 6.000 chômeurs... Début juin : 450.000 (soit 50.000 de plus par quinzaine)... Au Ministère du Travail, on s’attend à un million de sans emploi pour la fin de l’année. II faut ajouter les restrictions que le gouvernement Mazowiecki, issu de Solidarité, a imposé sur le pouvoir d’achat : le revenu réel a baissé de 30 °/ depuis le début de l’année.

Tchécoslovaquie. Vague de délinquance et d’érotisme sur Prague

L’austérité morale imposée par le régime policier ne laissait aucune place aux phénomènes caractéristiques des métropoles modernes. Les statistiques de la police de Prague enregistrent une augmentation de 200 °/ des délits concernant essentiellement les vols à la tire. La cible principale des petits voleurs est constituée par les très nombreux touristes à qui on conseille maintenant de surveiller leurs poches ou leur sac à main.
Vive le libéralisme !

(transmis par A. P, L’Escalet)

^


Des Chiffres

août 1990

Les ministres de l’Industrie et de l’Environnement français viennent d’autoriser la construction, à Marcoule, de l’usine Melox. Cette unité fabriquera du Mox, combustible nucléaire à base d’uranium, auquel sera incorporé un tiers de plutonium. Ne faut-il pas, en effet, utiliser le plutonium extrait à grands frais et à grands risques des combustibles irradiés retraités à l’usine de la Hague ? Ce plutonium dont le stockage coûte 12.000 F. le kilo par an et dont la dose léthale est de un microgramme, n’a plus d’exutoire depuis que la filière à neutrons rapides (surgénérateur) se condamne ellemême à l’échec. C’est donc pour sauver l’usine de la Hague que le Mox a été inventé.
Production de Mox prévue : 100 à 120 tonnes par an. Coût de l’usineplus de 1,5 milliard de F. La réalisation de cette unité de production, assez contestée par les associations de défense de l’environnement, devrait prendre quatre ans. Le coût de cette usine nous laisse rêveurs ... 1,5 milliard ... N’est-ce pas en France qu’il y eut récemment un téléthon pour gratter des sous afin que l’on puisse faire des recherches sur le cancer et le sida (commentaire du Monde).
Savez-vous que la France consacre chaque année depuis quinze ans, cent milliards de francs pour perfectionner la superarme au laser  ? Calculez combien cela représente d’hôpitaux ou d’universités.

(d’après Tam-Tam, n°2O2)

PIB par habitant dans les pays de l’OCDE,
(à parité de pouvoir d’achat)
en dollars (1989)

Allemagne 14.161
Australie 13.412
Autriche 12.506
Belgique 12.623
Canada 18.446
Danemark 13.555
Espagne 9.343
Etats-Unis 19.558
Finlande 13.792
France 13.603
Grèce 6.799
Irlande 8.146
Islande 16.068
Italie 12.985
Japon 14.288
Luxembourg 15.558
Norvège 16.322
Nelle-Zélande 11.028
Pays-Bas 12.382
Portugal 6.750
Royaume-Uni 13.428
Suède 14.772
Suisse 16.700
Turquie 4.353

^


Rencontres Européennes et Mondialistes

(2ème partie)
par R. MARLIN
août 1990

Congrès des peuples

Quarante ans après la réunion des quatre premiers "députés mondiaux" à Genève, en décembre 1950, la plupart des délégués élus au Congrès des Peuples et leurs suppléants se sont trouvés au même endroit du 12 au 16 ruai 1990. Rappelons qu’à la suite de l’ajournement de la tentative d’Assemblée Constituante des Peuples qui devait comprendre un député pour chaque million d’habitants, le Congrès des Peuples fut imaginé par Rodrigues Brent, en 1953. Avec Maurice Cosyn et Jacques Savary, il lança l’idée d’une Assemblée de délégués élus transnationnellement par tranches successives de 10.000 électeurs. Depuis huit élections ont eu lieu portant sur un corps électoral d’environ 80.000 personnes dans plus de 110 pays. 16 délégués et leurs 16 suppléants ont été élus.
Le principal sujet à l’ordre du jour était le soutien par le CDP d’une proposition tendant à la création, au sein des Nations Unies, d’une commission chargée d’étudier la possiblité d’adjoindre une seconde chambre, celle des peuples, à l’Assemblée générale.
Les représentants des associations mondialistes dont les membres, en plus des citoyens du monde enregistrés, ont participé aux élections, ont donc présenté leurs observations ainsi que les délégués présents et certains observateurs.
Contrairement aux Assises de Tours, la réunion de Genève était plutôt une rencontre de spécialistes où une large part fut consacrée à des questions de droit international. Les professeurs Paul de la Pradelle et Tsuruji Kotani présentèrent donc, le lundi 14 mai, aux Nations Unies, Palais des Nations, des exposés fort documentés sur l’aspect juridique du projet.
Le directeur du bureau de Jan Martenson, directeur général des Nations Unies, qui, pour la première fois, recevait le CDP, ne laissa guère d’espoir aux mondialistes. Un mouvement populaire serait pour lui irréaliste et une démarche classique, par l’intermédiaire de l’une des grandes commissions, se heurterait à un ordre du jour fort chargé pendant plusieurs années. Même en admettant que la proposition soit examinée, elle

serait repoussée à un moment ou à un autre par le droit de veto. Le représentant de l’ONU ne voit qu’une possiblité  : c’est que les délégations nationales s’adjoignent des représentations populaires, ce qui parut à ses interlocuteurs encore plus hors de portée que les autres revendications présentées...
Keith Best, ancien député britannique, et Muriel Saragoussi, président en exercice du CDP, défendirent l’idée que les changements ne pouvaient venir que du peuple. Hanna Newcombe, Canadienne, déléguée élue, fit part des travaux de l’Institut de Recherche sur la Paix de Toronto, relatifs aux nombreuses recherches sur la façon de pondérer les votes à une seconde assemblée. II s’avère, en effet, que le principe : une personne égale une voix qui parait le plus démocratique, avantagerait trop les contrées surpeuplées comme la Chine ou l’Inde et aurait, pour cela, grand mal à s’imposer. Entre les 25 auteurs de ces recherches, la préférence d’Hanna Newcombe va à une formule qui comprendrait la population peut-être atténuée par sa racine carrée et les dépenses d’éducation. Tout cela parait bien abstrait... et très respectueux des nationalismes.
Bhupendra Kishore, délégué élu indien, expliqua la raison d’une seconde chambre, afin qu’une véritable sécurité, une dignité et une identité soient garanties aux peuples du monde et il ajouta que le CDP ne tenait pas spécialement à être incorporé aux Nations Unies.

Bamba Fall, notaire sénégalais, délégué suppléant, s’interrogea aussi sur le mode de représentation  : direct ou indirect à adopter. Si, par exemple, la chambre populaire devait comprendre des représentants des parlements nationaux, si nous devions solliciter pour elle des pouvoirs réglementaires, ce qui nécessiterait un amendement de la Charte de l’ONU, ou, simplement, des délégations consultatives, plus faciles à obtenir.
Tsuruji Kotani avait des préoccupations du même type et se demanda si un modèle genre Organisation Internationale du Travail où sont représentés, à parité, les gouvernements, les employeurs et les salariés, ne pouvait pas être adopté.
Wladimir Zhirinovski, président du parti libéral démocratique d’Union soviétique, rendit ensuite hommage à Max Habicht, ancien président des fédéralistes mondiaux suisses, décédé en 1986, et à Jacques Muhlethaler, Genèvois, ancien président de l’Ecole Instrument de Paix qui a été à l’origine de la réception aux Nations Unies.
Le soir, une conférence de presse eut lieu en la bibliothèque des journalistes accrédités auprès des Nations Unies en présence de Mario Bettati, représentant de Bernard Kouchner, Secrétaire d’Etat Français à l’Action Humanitaire. II fut question du droit d’ingérence, justifié par la volonté de soulager la souffrance. M. Bettati raconta comment, en raison de l’urgence, 48 vols furent effectués par des appareils militaires français, transportant des soldats et autres militaires dont les pompiers en uniforme, vers l’Union Soviétique, lors du dernier tremblement de terre en Arménie. Tout cela avec l’accord tacite des officiels soviétiques, mais sans visa, ni passeports
L’enregistrement des Citoyens du Monde, le Congrès des Peuples, le Fonds Mondial d’action contre la faim, l’Institut d’Etudes mondialistes, l’Agence Mondialiste de Presse et l’Action d’urgence internationale furent présentés aux journalistes, soit deux représentants de radios suisses, une journaliste allemande et un Polonais.
Les autres réunions eurent lieu au Centre réformé John Knox. L’après midi du 14 mai fut consacrée à "la protection de la biosphère" dont nous avons parlé dans la première partie de ce compte-rendu, sur le plan européen.
Ralf Haegler, fédéraliste suisse, précisa que les mondialistes n’ont pas attendu la mode écologique pour s’inquiéter de la pollution des océans puisque, dès 1955, 107 députés et lords du groupe parlementaire britannique proposaient le projet Neptuno afin de placer les mers et les océans, hors les eaux territoriales, sous le contrôle de l’ONU. En 1956, ce fut le projet Etheruno de Guy Marchand pour mettre sous l’autorité de l’OACI (1) l’espace atmosphérique au dessus de dix kilomètres d’altitude. Puis ce furent des projets d’utilisation pacifique et de dénucléarisation des océans.
Muriel Saragoussi et Jerry Bourgesois rappelèrent, comme ils l’avaient fait lors de la conférence de presse, l’appel de La Haye signé par les chefs d’Etat ou de gouvernements, le 11 mars 1989, en vue de "créer une autorité mondiale dotée de vrais pouvoirs de décision et d’exécution pour sauver l’atmosphère..." les 24 pays signataires se déclarant "... prêts à déléguer une parcelle de leur souveraineté nationale pour le bien commun de l’humanité toute entiere". Ces termes, identiques à ceux employés par les mondialistes, sont significatifs de la prise de conscience de certains hommes d’Etat. J. Bourgeois annonça la création d’un groupement afin de suivre l’exécution de l’intention qu’ils ont ainsi exprimée.
Le mardi 15 mai, Marc Garcet, délégué élu belge, fit un remarquable exposé sur l’historique, ainsi que sur le présent et l’avenir du CDP. II constata que 25 ans après sa création c’était devenu une institution publique, d’un type particulier, à améliorer dans certains domaines. Ainsi son fonctionnement n’est pas facilité par la nécessité du travail par correspondance. Un certain nombre de suggestions furent émises, notamment celle de Michel Forestier consistant à faire voter par le CDP des prototypes de lois mondiales.
Enfin furent examinées un certain nombre de questions pratiques, comme le lieu de la prochaine réunion : New Delhi, Moscou furent cités et surtout le financement du fonctionnement du CDP et de la neuvième élection. Le difficile remplacement de Guy Marchand démissionnaire comme secrétaire général et pilier du CDP fut étudié mais non résolu.
Jacques Muhlethaler président et Bhupendra Kishore vice président furent élus pour deux ans . Bamba Fall présenta une synthèse des réunions.

Réflexions

Pour quelqu’un qui a moins travaillé pour le mondialisme depuis une quinzaine d’années et qui reprenait vraiment contact, ce qui était mon cas, rien ou presque rien n’avait changé. Les controverses étaient toujours les mêmes, les personnes aussi. Mais se pose maintenant le problème de la succession pour certains postes-clés. Le renouvellement des actifs se fait mal, il s’agit d’une difficulté générale pour tous les mouvements. La jeunesse est peu attirée par le militantisme. La plus grande diffusion de la culture fait que les jeunes ne désirent plus coller des affiches ou distribuer des tracts. Ils tiennent, comme dans la société civile, à accéder de suite aux postes de responsabilité. C’est ce qui explique que, ayant une ou des idées, ils ne cherchent pas à renforcer les groupes défendant des thèses analogues, mais qu’ils songent immédiatement à créer de nouvelles associations. D’où la prolifération des groupuscules et leur relative inefficacité. Ce fut particulièrement net à Tours, où certains participants ont découvert la mondialité des problèmes et le déjà long passé d’histoire, d’expérience, de travail et de résultats accumulés par les citoyens du monde. Ils l’ont dit eux-mêmes très franchement et très simplement sans en tirer les leçons...
L’incompréhension se manifeste quelquefois aussi entre les générations aussi bien qu’entre personnes de formations diverses : juridique, littéraire ou scientifique. Le racisme anti-jeunes ou anti-âgés fait place quelquefois à la démagogie projeunes qui se manifeste par une adhésion irréfléchie aux thèses réputées les attirer : tiers-mondismebusiness, ethnologie amérindienne dans la voie de Claude Lévi-Strauss, agriculture moyenâgeuse, écologie du catastrophisme derrière René Dumont, antinucléarisme primaire, énergétique artisanal, etc...
Par contre, un point positif se révèle être la présence de plusieurs représentants des pays de l’Est, aussi bien à Genève qu’à Tours. La création d’un centre d’enregistrement de citoyens du monde à Moscou est une bonne nouvelle. Le mondialisme manquait jusque là d’universalité. La présence de Bulgares, Polonais, Lituaniens, Roumains y remédie remarquablement. Nous en avons bien sûr profité pour parler d’économie distributive...
Mais l’autre écueil du mondialisme, c’est la candeur face aux problèmes immenses et complexes des pays en voie de développement. L’on se croirait revenu au temps du Genevois JeanJacques Rousseau à l’époque du "bon sauvage". Tout ce qui vient des pays excolonisateurs serait néfaste et les habitants des contrées ex-colonisées seraient tous victimes des ex et actuels dominateurs. La réalité est plus nuancée. Les exploiteurs sont partout et certains Africains ou Asiatiques n’ont guère gagné à échanger des Blancs cupides et vaniteux contre des autochtones corrompus et incompétents.Le problème de la dette se poserait en d’autres termes si les gouvernants et les décideurs du tiersmonde dénonçaient le cycle de l’accumulation capitalistique et décidaient de ne plus rembourser au lieu de se vautrer dans le confort de la complicité.
Jean-Paul II peu suspect d’extrêmisme renvoie ".. dos à dos le marxisme matérialiste et le capitalisme libéral qui n’ont pas été capables de répondre aux profondes aspirations de l’humanité... Les événements récents, a-t-il déclaré le 9 mai1990, à Durango (Mexique), faisant allusion aux bouleversements en Europe de l’Est, ont été interprêtés, parfois, de manière superficielle, comme le triomphe du système capitaliste libéral. Certains sont allés, ajoutaitil, jusqu’à présenter le système qu’ils considèrent vainqueur comme le seul chemin pour le monde ... évitant de porter le jugement critique nécessaire sur les effets produits par le capitalisme libéral sur les pays du tiersmonde. "
Si Garcia Suarez, le président de la confédération des Chambres de commerce, a reconnu que le Pape avait raison de dénoncer la concentration de la richesse qui crée la pauvreté, le président de la Bourse, José Madariaga, a exprimé la pensée de la majorité des grands financiers présents en disant : "Nous ne pouvons pas accepter que ceux qui travaillent plus aient la même chose que les autres... ".(2)
A ce moment donc les mondialistes délégués, élus ou suppléants, soutiennent le système, soit en le considérant comme une évidence pensant qu’on ne peut en sortir, soit en confondant libertés et libéralisme ou démocratie et capitalisme. D’autres font semblant de croire que le communisme ou le socialisme étaient instaurés à l’Est et se sont effondrés, alors qu’il s’agissait d’un capitalisme d’Etat totalitaire, bureaucratique et dirigiste. Cette erreur d’analyse les fait se rebeller contre la société de consommation qui, d’après eux, aurait tendance à s’instaurer partout. Ils dénoncent alors le productivisme au nom d’une austérité mythique et appellent à un changement du modèle de développement sans voir que c’est le profit qui génère cette tendance. II faudrait renoncer aux attraits du progrès technique ; jusqu’où et dans quels domaines ? Ils se gardent bien de l’indiquer. Sont-ils prêts euxmêmes à ne jamais utiliser avions, transatlantiques, automobiles, télévision, cinéma, etc... Sont-ils prêts à réduire de moitié ou plus leur propre consommation d’eau, de gaz, d’électricité, de carburants divers. Ils n’entrent pas dans ces détails sordides.
Mais nous ne chercherons pas à convaincre ceux qui ne tiennent pas à nous entendre. Au reste, le citoyen du monde comme le citoyen français est libre de ses options religieuses, philosophiques, syndicales ou économiques. Nous remarquerons plutôt que nombreux sont les distributistes qui sont en même temps des mondialistes convaincus. Les multiples contacts que nous avons eus dans les couloirs à Genève et à Tours nous l’ont confirmé. Nos thèses sont celles d’un grand nombre de personnes suffisamment ouvertes pour aspirer aussi à la citoyenneté mondiale. Un jour viendra peut-être où les abonnés à la Grande Relève en tant que tels pourront participer à une des futures élections au Congrès des Peuples, tout au moins ceux d’entre eux qui n’ont pas encore voté. Ce jourlà un ou deux représentants authentiques de notre courant de pensée pourront véritablement prendre part aux discussions, à l’élaboration des déclarations ou des futurs prototypes de lois mondiales et faire sortir cet organisme de la routine en matière d’économie. C’est évidemment plus difficile que les grandes envolées humanitaires, les leçons de charité et de morale ou d’antiracisme comme l’a d’ailleurs bien compris notre gouvernement dit socialiste.
Dans notre conception, le mondialisme n’est pas destiné à prendre en compte toutes les petites et grandes misères du monde. Si elles restent locales et n’ont donc pas une dimension transnationale, elles relèvent, si émouvantes ou passionnantes qu’elles soient, d’actions régionales. Faute de quoi, elles retirent de l’efficacité et nous font qualifier de doux rêveurs par les responsables politiques. Ces derniers prendront à leur charge les problèmes mondiaux dès que l’opinion s’y intéressera. Ils l’ont déjà commencé avec l’appel de La Haye. Ils le feront de plus en plus et bientôt les purs militants seront marginalisés au profit des professionnels de la politique spectacle.
Attention le gouvernement mondial que nous refusons, même les institutions mondiales d’arbitrage que nous désirons, peuvent tourner à la dictature et, dans la pire des hypothèses, à une tyrannie, sans recours extérieur, par définition. Des oligarchies financières, religieuses, mystiques, industrielles cherchent déjà à prendre le pouvoir mondial. Des banquiers et politiciens sans mandat exercent, audessus des Etats, une influence usurpée. Nous devons être vigilants et n’avancer vers la supranationalité que dans la mesure où elle reste démocratique. Toute souveraineté émane du peuple. C’est notre seule garantie. Soyons prêts à nous opposer à toute force qui n’irait pas dans ce sens, même si la marche vers le mondialisme parait en être retardée. La constitution pragmatique et progressive d’un Congrès des Peuples demeure une des meilleurs méthodes pour nous préserver d’une dangereuse aventure. Nous n’y parviendrons que si ces questions sont mises sur la place publique. Là, les grands médias doivent intervenir. II y faudrait une prise de conscience des responsables et des journalistes. Malgré leur présence dans ces réunions, il ne semble pas qu’ils y soient prêts. Agissons pour faire sauter l’obstacle...

(1) Organisation de l’aviation civile internationale.
(2) "Le Monde" du 15 mai 1990

^


En 1990, l’enseignement oublie :

Proudhon

juillet 1990

Citations extraites de "Philosophie de la misère ou système des contradictions économiques" publié en 1846 par PierreJoseph Proudhon :
"L’économie politique est l’organisation de la misère  ; et les apôtres du vol, les pourvoyeurs de la mort, ce sont les économistes.
La misère n’est-elle pas le résultat d’une fausse manoeuvre  ? Le travail ne manque pas puisque sur tous les points le besoin de subsister, par conséquent de travailler, se fait sentir. Le subsistances ne manquent pas non plus, puisque de toutes parts on se plaint de l’engorgement des produits, qui s’avilissent faute de débouchés, faute de gens qui les paient, faute de salaires.
Singulière économie que la nôtre, en vérité, où le dénuement résulte continuellement de l’abondance.
Depuis 50 ans, observe E. Buret, la richesse nationale en France a quintuplé, tandis que la population ne s’est pas accrue de moitié, d’où vient qu’au lieu de se réduire proportionnellement, la misère s’est accrue ?
Les économistes ont reconnu implicitement que la misère avait d’autres causes que la surproduction des enfants (surpopulation). Comment notre richesse ayant quintuplé, notre population ne s’étant accrue que de 50 °/, y a-t-il encore parmi nous des pauvres ? Que l’on me réponde, avant de chercher quel nombre d’habitants pourra tenir le globe !
Economistes, vous osez nous parler de misère ! et quand on vous démontre, à l’aide de vos propres théories, que si la population se double, la production se quadruple en conséquence le paupérisme ne peut venir que d’une perturbation de l’économie sociale, au lieu de répondre, vous accusez, ce qu’il est absurde d’appeler en cause l’excédent de population.

Quand nous développons en votre présence le mécanisme de l’usurpation propriétaire, de la fiction capitaliste et du vol mercantile, vous fermez vos yeux pour ne point voir, vos oreilles pour ne point entendre, vos coeurs pour ne pas céder à la conviction ; l’iniquité du siècle vous est plus précieuse que le droit du pauvre, et vos intérêts de coterie passent avant ceux de la science.
Nous avons démontré précisément ce que Malthus ne soupçonnait pas, savoir que, dans une société

organisée, la production de la richesse et des subsistances est en progression plus rapide que la population.
Economistes, vous n’êtes occupés que d’une conjoncture tout à fait hypothétique où la population
surabonderait sur le globe, et vous détournez sans cesse les yeux du mal réel.
La misère a pour cause immédiate, non pas le surcroit de population mais les prélèvements du monopole. La misère, sous un régime comme le nôtre, ne manquera jamais de se produire, soit que la population avance, soit qu’elle recule. La preuve de cette assertion se trouve à chaque page de ce livre.
Que l’activité individuelle succombe sous l’autorité sociale, l’organisation dégénère au communisme et aboutit au néant. Si, au contraire, l’initiative individuelle manque de contre-poids, la civilisation se traine sous un régime de castes, d’iniquité et de misère."

(envoyées par Etiradilos)

^


Dans nos numéros 881, 883, 885, 887 et 889 nous avons publié notre traduction d’une proposition de réformes qui nous vient du Royaume-Uni, tendant à substituer aux multiples taxes en vigueur une taxe unique basée sur l’énergie. Nous en donnons la fin dans ce numéro

Les joies de l’économie des ressources

(Suite)
par F. BRADBURY
août 1990

6.2.En agriculture, les méthodes intensives et chimiques ont un coût social qui donne quelques avantages à des exploitations agricoles plus petites, à la rotation naturelle des récoltes et à la culture organique. L’utilisation efficace des ressources, le recyclage et le développement de procédés alternatifs ne sont pas parmi les moins importantes des retombées positives de ce type d’agriculture. La viabilité économique de l’isolation thermique, des pompes à chaleur, des dispositifs éoliens et autres systèmes fournisseurs d’énergie devient évidente : on n’a plus besoin de stimuler artificiellement les investissements. Les systèmes de transports publics évolueront rapidement vers des services consommant moins d’énergie, infiniment plus agréables, plus pratiques et moins polluants. En effet, le besoin de voyager et d’échanger se modifiera avec l’élimination des bureaucraties pesantes et le passage d’activités à coût ajouté à des activités de loisir ou à valeur ajoutée plus concentrée.

6.3 II est donc facile de passer de l’économie classique à celle des ressources et ses premiers pas (en utilisant les droits de douane et les impôts indirects) n’exigent pas la création de nouveaux organismes gouvernementaux. Bien au contraire, cela réduit les gaspillages actuels. Ces premiers pas déclencheront le mécanisme de la mise en oeuvre de toute l’Economie des Ressources (l’Economie Dynamique). Ils conduiront à une trésorerie en équilibre et à une réduction importante des taux d’intérêts (avantage pour le Tiers Monde et pour l’industrie). Le contrôle direct de la consommation par les prix et de la fourniture d’argent par la perception d’une taxe met fin à l’inflation telle que nous la connaissons aujourd’hui. Le remplacement des taxes locales, des impôts sur le revenu, des impôts sur le capital et de toutes les autres taxes en découle naturellement. Sans avoir à recourir à une quelconque information couteuse, les gens apprendront à mesurer l’unité de valeur ajoutée, ce qui conduira à une réforme de la comptabilité et de la gestion commerciale qui s’accompagnera d’une heureuse simplification des réglementations restrictives actuelles.
Le marché réformé de l’énergie rendra plus équitable la distribution des ressources en Europe. Ce qui pourrait améliorer considérablement la proportion d’énergie "bonne pour l’environnement" et d’énergie "renouvelable" dans la dépense énergétique globale.

7 La distribution des revenus

Au fur et à mesure que le montant de la Taxe Unique augmentera en remplaçant de plus en plus de taxes inutiles ou incitant au gaspillage, il deviendra nécessaire de mettre en place un système de distribution des revenus. Le revenu de base non sélectif (pensions gouvernementales, crédit social ou salaire minimum) est la réponse évidente. Un revenu de base suffisant pour assurer une vie digne , "un droit" en quelque sorte, est le plus facile à gérer ; il est automatiquement pris en compte dans le marché du travail et est totalement financé par la taxe sur les ressources. C’est là que se trouve la solution au fiasco de la Politique Agricole Commune (il faut des revenus pour les fermiers et non des subvention pour des productions non souhaitées). Il permet aussi la réduction naturelle de la "semaine de travail" et l’élimination des "petits boulots", mal payés, et autres. II résout aussi le problème des artistes, des concepteurs, des droits d’auteurs sur les logiciels, des bourses pour les étudiants, des salaires pour les femmes au foyer, et de beaucoup d’autres cas sujets à disputes.
Naturellement ça marche aussi pour l’indemnisation "sans malus" des pertes d’origine accidentelle ou criminelle et une foule d’autres mésaventures que l’on peut rencontrer dans la vie de tous les jours... L’Economie Dynamique (Economie des Ressources) est chaque jour en équilibre.

8. L’adaptation à l’économie des ressources

8.1 Comme dans presque tous les systèmes dynamiques, il faut aussi prendre en compte la cinétique. II y a un effet d’inertie, et nous ne pouvons pas entrer d’un seul coup, en moins d’une génération, dans une économie des ressources fonctionnant à plein régime. Une génération, c’est le temps qu’il faut pour qu’évolue naturellement la conception des logements, des moteurs à combustion à haut rendement, des circuits de chaufage par quartiers, des systèmes de récupération des ordures ménagères, etc... II faut aussi du temps pour que les individus s’adaptent à un mode de vie dans lequel on paie les impôts quand on allume la lumièreou quand on jette un emballage en plastique. II faudra substituer dans le marché libre l’économie auto- régulée de l’oeuf pondu en liberté à celle de l’oeuf pondu en batterie.ll faudra aussi favoriser la rotation des cultureset l’utilisation de composts renouvelables à la place d’engrais artificiels. Même chose en ce qui concerne l’élevage intensif... Les premières étapes de la mise en place de l’Economie des Ressources conduiront à des changements extraordinaires dans la consommation de sorte qu’il faudra ajuster constamment les taux de la Taxe Unique jusqu’à ce qu’on atteigne le point d’équilibre. Ces ajustements tendront à concentrer la Taxe Unique, mais le coût n’augmente pas quand on consomme moins.
Notons, néanmoins, que le temps nécessaire pour abolir l’économie classique et pour installer l’économie des ressources est, malheureusement pour nous, à peu près le même que celui qui nous sépare de l’épuisement définifif des réserves de combustibles fossiles les plus accessibles...

8.2 C’est maintenant qu’il faut agir. La proposition d’instauration de l’Economie des Ressources présente assez d’avantages pour qu’elle soit la plus attrayante, du moins au sens populaire si ce n’est au sens des vieux partis politiques.

8.3 L’économie des ressources commence avec une Taxe Unique d’environ 25 écus par baril de pétrole (suivant le revenu européen souhaité et les allocations nationales) et une somme équivalente sur les autres énergies et sur les Contenus Légaux en Energie Primaires desproduits importés. La TVA est supprimée. Une fois qu’elle a été appliquée (et une fois seulement) la nouvelle taxe agit sur toute l’économie, graduellement diluée par les autres coûts (production, distribution) et profits
Le système fonctionne à peu près comme suit :
Le pétrole transportant la taxe unique attachée à son prix de marché va à la raffinerie. II est vendu comme une fourniture à l’industrie chimique, avec les coûts de raffinage en plus. II est à nouveau revendu comme matière première à un négociant puis à un fabricant. Le fabricant approvisionne un grossiste ou un distributeur et enfin un détaillant. Finalement, le consommateur achète une chemise en polyester, des bas, ou un tricot en acrylique contenant la Taxe Unique qui est maintenant diluée en moyenne à moins de 10% du prix, (c’est à dire moins que l’ancienne TVA.) Les procédures bureaucratiques coûteuses et les évasions fiscales encore plus coûteuses ont disparu.

9 Les joies de l’économie des ressources.

9.1 Ce qui nous enchante dans l’économie des ressources, c’est qu’elle est facile à mettre en oeuvre et à comprendre. Elle nous fait du bien. Nous sommes lentement en train de gagner le débat, c’est réellement une idée politiquement populaire, qui parait acceptable à beaucoup de gens de tous les milieux et représentant toutes les nuances de l’opinion politique. A l’exception des vieux économistes mais pour apprécier l’efficacité de l’économie conventionnelle, il suffit de regarder le monde avec sa désertification, ses forêts brulées, ses eaux empoisonnées, sa production intensive destructrice d’habitats, la fuite vers les cités, des millions d’affamés, la misère, les taux d’intérêts paralysants et les dettes, l’exploitation à discrétion de réserves de capitaux irremplaçables, le business de la City jouant avec les entreprises humaines, la corruption des cultures par le marketing propulsé par le profit, l’indifférence devant les coûts des matériels militaires, l’accaparement des sols, les économies souterraines, les paradis fiscaux et la valeur insensée des oeuvres d’art.

9.2 Le plaisir est autant dans la concrétisation d’une idée que dans le fait qu’elle apporte les améliorations qu’elle promet. Elle ne demande que très peu de réglementations et aucune nouvelle administration. C’est qu’en effet beaucoup de bureaucratie va disparaitre. Ceux qui travaillent dans les Douanes ou dans les services fiscaux confirment la facilité avec laquelle l’économie des ressources peut être mise en place. Les maux du système économique actuel, à bout de souffle, inapproprié et qui a largement fait faillite, seront corrigés, mais de façon évolutive et non de manière brutale ou partisane. Alors que beaucoup de choses vont changer avec le temps, il n’y aura pas de perdants, on a le temps d’ajuster le processus même pour ceux qui font fonctionner le système actuel dans leur seul intérêt. Mais il faut commencer bientôt parce que notre maison unique, la planète Terre, montre défia des signes d’endommagement. Et parce que l’Economie des Ressources utilise les mêmes deux facteurs (habituellement représentés par le capital et le travail), que l’économie classique mais en les inversant, on peut même affirmer qu’il n’y a pas d’autre alternative...

(FIN)

^

e-mail