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   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles N° 1055 - juin 2005 > Trous d’air

 

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DUMPING SOCIAL DANS L’AIR

Trous d’air

par J.-P. MON
juin 2005

À BAS PRIX, … MAIS À QUEL COÛT ?

La compagnie aérienne Ryanair a décidé de réserver exclusivement aux travailleurs non syndiqués de l’entreprise l’augmentation de 3%, qu’elle a prévue [1]. Depuis sa création en 1985 ses dirigeants mènent en effet une guerre ouverte contre les organisations syndicales. Son directeur, Michael O’Leary, a même déclaré qu’il était « stupide de faire le choix de se syndiquer plutôt que celui d’être mieux payé ». La compagnie, qui emploie 2.600 personnes, toutes embauchées sur la base d’un contrat irlandais, ne reconnaît aucune organisation syndicale et a même porté plainte en Irlande contre le syndicat irlandais des pilotes de ligne pour « harcèlement et intimidation » de ses équipages. Selon M.O’Leary, la rémunération moyenne de ses salariés est en effet bien supérieure à celle des personnels de certaines grandes compagnies aériennes. On peut alors se demander pourquoi les salariés de Ryanair cherchent à se syndiquer. Toujours est-il que M.O’Leary veut empêcher la tenue d’un vote interne sur la création d’un syndicat, possible, selon la législation, si 50% des employés s’y déclarent favorables.

FUSION SALVATRICE

Aux États-Unis aussi les compagnies aériennes à bas coût sont dans le vent… C’est ainsi que tout récemment USAirways, septième compagnie du pays, mais sous la protection de la loi sur les faillites pour la seconde fois en trois ans [2], a annoncé son projet de fusion avec America West, huitième transporteur aérien états-unien. Sous le nom de USAirways, l’ensemble constituera la sixième compagnie du pays et emploiera 44.000 salariés. En réduisant sa flotte de 58 avions, son ambition est de devenir la première compagnie à bas coût opérant sur l’ensemble des États-Unis. Selon son futur PDG, elle sera rentable au coût actuel du pétrole et, même s’il peut y avoir quelques suppressions d’emplois, ni plan de licenciement massif ni fermeture de lignes importantes ne sont prévus. On apprend au passage qu’Airbus participera au montage financier (1,5 milliard de dollars), par un prêt de 250 millions de dollars pour permettre à la compagnie d’acheter le futur A350 dont elle sera le premier client en 2011… Les financiers sont d’incorrigibles optimistes : personne ne peut dire en effet quel sera le prix du baril de pétrole dans six ans ni si USAirways ne fera pas faillite une fois de plus. Il est vrai qu’à la différence de la Banque centrale européenne, la Réserve fédérale américaine sait mettre la main à la poche quand il le faut…

ELLES NE MOURAIENT PAS TOUTES…

Même les plus grandes compagnies aériennes américaines ont de grandes difficultés à survivre. On vient ainsi d’apprendre [3] que United Airlines, seconde compagnie américaine, venait d’être autorisée par un juge fédéral à ne pas payer les retraites de ses employés, pour échapper à la banqueroute. Cette décision ouvre la voie au plus important défaut de paiement de retraites de l’histoire américaine. En pratique, elle autorise le transfert de la responsabilité des régimes de retraite des employés, jusqu’ici à la charge de United Airlines, au fonds de retraite du gouvernement américain, le Pension Benefit Guaranty (PBGC). Ce jugement va permettre à United Airlines, à cours de liquidités, d’économiser 645 millions de dollars (plus de 501 millions d’euros) par an dans le cadre du plan d’économie de deux milliards de dollars (1,56 milliard d’euros) annuels que la compagnie a décidé afin de sortir de la banqueroute à l’automne.

Il sera en revanche douloureux pour les employés d’United Airlines, dont la majorité va perdre plusieurs milliers de dollars par an dans ce transfert de compétence. Au total, 120.000 salariés actuels ou retraités de United Airlines sont couverts par ces régimes de retraites, dont 62.000 employés actifs. Les régimes de retraites de United Airlines sont sous-financés à hauteur d’environ 9,8 milliards de dollars (7,62 milliards d’euros), somme sur laquelle le PBGC ne réglera qu’environ cinq milliards de dollars. La décision concernant United Airlines était très attendue par les autres compagnies aériennes américaines, confrontées à d’importantes pertes en raison notamment de l’augmentation du prix du pétrole. Elle pourrait ouvrir la voie à des actions similaires.

LA GUERRE BOEING /AIRBUS

Depuis 1992, des accords passés entre les États- Unis et l’Union européenne autorisent les aides accordées à l’industrie aéronautique : les Américains peuvent subventionner les programmes militaires tandis que les pays participant à la construction d’Airbus (France, Allemagne, Grande-Bretagne et Espagne) peuvent accorder des aides remboursables représentant le tiers du coût du programme de construction d’un avion. Mais depuis que les parts de marché d’Airbus dépassent celles de Boeing, et depuis qu’Airbus envisage de construire l’A350, futur concurrent du nouveau moyen courrier de Boeing, le gouvernement américain, à l’initiative de Boeing, veut remettre en cause ces accords [4]. En outre, la Chambre des représentants vient de préconiser de refuser la candidature d’EADS, maison-mère d’Airbus, à l’appel d’offre pour la construction de 100 ravitailleurs pour l’armée de l’air américaine.

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[1] Le Monde, 21/05/2005.

[2] USAirways s’était mise sous la protection de cette loi en 2002 et avait pu sortir de la faillite grâce à une garantie fédérale de prêts de 900 millions de dollars mais elle a, à nouveau, déposé son bilan en septembre 2004.

[3] Associated Press (Chicago), 11 mai 2005.

[4] Le Monde, 26/05/2005.

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