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   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles N° 744 - mars 1977 > Mon père spirituel

 

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Mon père spirituel

par J. CARLESSE
mars 1977

C’était mon père spirituel... Six mois avant sa disparition j’ai pu l’embrasser une dernière fois... « Plus très spirituel » m’a-t-il dit dans un sourire de ses yeux clairs. Toujours son esprit d’à propos.

« Une armée moderne, c’est une armée qui se reconnaît à l’odorat elle sent le pétrole et ne sent pas le crottin ».

C’était dans les années 20. Jeune député, il avait, bien avant de Gaulle, proposé la motorisation de notre armée.

« la misère dans l’abondance »
« les prix prennent l’ascenseur tandis que les salaires grimpent par l’escalier »
« la révolution mécanicienne »
« le pouvoir d’achat »

toutes ces expressions ont été depuis reprises sans référence à leur auteur.

Il habitait Saint-Cloud lorsque le M.F.A. avait son siège rue de Miromesnil. Tous les matins il y venait à pied en traversant le Bois. « Savez- vous, quel est le plus grand événement de l’Histoire » demanda-t-il un jour à un étudiant qui, sur un banc, révisait son cours... ( ?) ... « C’est l’avènement de l’abondance dans le monde ».

Nous sommes quelques milliers à qui il a ouvert avec simplicité les portes de la science économique, quelques milliers sachant désormais analyser la conjoncture et donner avec assurance un avis éclairé.

Ce nouveau Karl Marx ne pouvait pas être un homme révolté au sens où l’entendait Albert Camus, à qui je l’ai fait aimer, parce qu’il était non violent de nature et trop modeste pour se faire « mousser ». Son ambition : « débourrer les crânes », montrer comment on peut « reconstruire la gare sans perturber la marche des trains », bâtir une nouvelle société sur les ruines du capitalisme en « tuant les préjugés sans tuer les hommes ».

Comme tous ses disciples j’ai souvent senti le besoin de ruer dans les brancards devant l’incompréhension des prétendus révolutionnaires de notre temps. Chargé par lui de faire le compte rendu, pour « La Grande Relève », d’une réunion contradictoire avec un représentant du parti communiste, salle Wagram, il modéra mon ardeur par ces mots :

« Ce n’est pas en fouettant l’attelage qu’on le fait mieux avancer s’il ne voit pas le chemin ». Malgré la conspiration du silence bien entretenue par tous les chefs d’orchestre des partis, il entrera dans l’Histoire sans en avoir forcé les portes, car ses idées sont en marche inexorablement.

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