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   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles N° 3 - 16 au 30 novembre 1935 > A propos d’une conférence de Jacques Duboin

 

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A propos d’une conférence de Jacques Duboin

par J. MARIANI
16 novembre 1935

Sous la signature de Me Ch. Cancellieri, la Gazette du Lundi, du 7 octobre, adresse quelques reproches à notre ami Jacques Duboin, au sujet de la conférence que celui fit à Bastia, le 22 septembre dernier, sur « La grande Révolution qui vient ».

Me Ch. Cancellieri lui fait grief en particulier, de ne pas avoir conclu et lui demande si c’est par pusillanimité.

Il y a là une erreur.

Notre cher compatriote nous permettra, tout d’abord, de lui faire remarquer que la révolution russe, dont il parle et à laquelle il importe de rendre le plus grand hommage, ne peut, en la circonstance, être citée en exemple, ainsi que l’a fort bien expliqué Jacques Duboin en réponse à des interpellateurs.

Car, malgré l’effort colossal fourni, la Russie n’est pas arrivée à son plein développement économique et il lui reste encore trop de choses à accomplir, pour la placer sur le même plan que ceux des pays super-industrialisés, dont nous sommes.

Si bien que l’évolution que nous vivons et la révolution éventuelle qui se produirait ici, ne pourraient, en aucune façon, être comparées à ce qui s’est passé là-bas.

Il convient d’ajouter, en outre, pour bien situer les faits, qu’il n’y a jamais eu, effectivement, dans le monde « surproduction de richesses ». Une surproduction impliquerait, au moins, en effet, la possibilité de donner, à tous les hommes de quoi vivre, plus un reliquat ; or, ceci n’a encore jamais existé, mais pourrait facilement exister, nous devons y arriver pour le plus grand bien de l’humanité.

A ce moment-là, nous n’aurons plus à nous préoccuper ni du chômage, ni de la diminution du pouvoir d’achat des masses.

Les destructions de richesses que nous connaissons, ne résultent pas d’une surproduction quelconque ; elles ont été effectuées dans l’unique but de raréfier ces richesses, en vue de maintenir les hauts prix de vente et partant le profit capitaliste.

Ceci dit, il est fort regrettable que Me Ch. Cancellieri n’ait pu assister en personne à cette conférence ; il se serait rendu compte, tout au contraire, que M. Jacques Duboin, dans un exposé des plus précis, avec une documentation statistique impressionnante, n’a rien négligé pour permettre aux plus aveugles d’entrevoir tous les événements, y compris les plus sanglants, qui guettent, inévitablement notre société actuelle.

Le règne des grands féodaux de la finance et des gros privilégiés des temps présents, a-t-il dit, n’est plus possible. Il leur faudra, a-t-il laissé entendre, tôt ou tard abdiquer, et ce, bon gré, mal gré, entre les mains de tous pour tous, « les actuels moyens de production et d’échange » qu’ils ne détiennent plus que par quelques artifices.

Donc, à moins de lui demander de préconiser ouvertement le recours à la force brutale, pour atteindre ce but, Me Ch. Cancellieri voudra bien convenir avec nous, que notre ami Jacques Duboin a parfaitement conclu.

Le distingué avocat paraît perdre de vue, en la circonstance, que cette abdication qui, nous le reconnaissons très volontiers, ne se fera pas de gaieté de coeur, se fera, néanmoins, inéluctablement, par le simple développement de la technique et de tous les moyens de production.

Ainsi, le seul accroissement des richesses à des cadences jusqu’ici inconnues, en ramenant «  le profit » capitaliste à zéro, détruira, mathématiquement, si l’on peut dire et très vite, la vieille société capitaliste.

Et ça, c’est véritablement la grande révolution qui vient.

Alors, pourquoi vouloir envisager une effusion de sang, comme l’unique moyen d’y parvenir.

Ce grand événement, qui amènera l’abondance certaine pour tout le monde, serait encore plus près de nous, si l’élite, précisément, abandonnant, enfin, son mol oreiller d’indifférence égoïste, voulait comprendre qu’il n’est plus possible que les uns aient trop de tout, pendant que les autres n’ont absolument rien.

Il y a là, pour ces derniers, une scandaleuse négation du droit à la vie, qu’il faut à tout prix faire cesser, sans pour cela déchaîner la guerre civile, encore beaucoup plus inhumaine que la guerre étrangère.

Certes, il est urgent d’agir car la faim et la misère sont mauvaises conseillères, mais tout en étant d’accord avec Me Ch. Cancellieri, sur les résultats à obtenir, dans le plus bref délai, Jacques Duboin entend, avant d’en arriver aux moyens violents, tout tenter et mettre en œuvre dans un cadre évolutif et révolutif, qui n’a rien à voir avec des formules sociales périmées.

Est-ce là de la pusillanimité ? Nous ne le pensons pas.

Si Me Charles Cancellieri avait réellement lu un seul des livres de notre ami, il n’aurait pas écrit ce qu’il écrit.

Dans tous les cas, qu’il sache bien que tout est prévu dans son esprit et que son seul souci pour les temps futurs, réside dans l’organisation des loisirs des hommes.

Pour lui, le chômage serait une récompense, autrement dit, le repos, justement mérité du travailleur.

En fait, le tout est de se comprendre.

(L’Echo de la Corse.)

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