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   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles N° 1088 - juin 2008 > Cet avenir... qu’on nous mijote

 

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Cet avenir... qu’on nous mijote

par G.-H. BRISSÉ
30 juin 2008

D’habiles “forts en gueule” nous encensent de propos ronflants et de promesses intenables. Sous le prétexte d’un torrent de réformes superficielles, ils endorment l’opinion publique, ne vont jamais au fond des choses et dissimulent mal une incohérence et une impuissance, pourtant fort inquiétantes !

Les grands épisodes de la Résistance sont évoqués, la jeunesse est exhortées à la repentance sur la colonisation, sur l’esclavage, ce qui surcharge des programmes scolaires déjà saturés. Si on remonte au-delà de la Nuit du 4 août, pourquoi pas à la Saint Barthélemy, à l’Édit de Nantes qui contraignirent à l’exil tant de protestants, voire à la « Sainte » Inquisition qui fit tant d’innocentes victimes ? Et dans le même temps on supprime plus de 11.000 postes au sein de l’Éducation Nationale et on reste sourd aux justes appréhensions des jeunes… !

Pour appeler nos compatriotes à faire encore plus de sacrifices et à travailler davantage on évoque avec volupté l’infime pourcentage de croissance qui va doper les profits des plus riches et diminuer encore le niveau de vie du plus grand nombre. « Il faut produire plus pour consommer plus ! » martèle-t-on en haut lieu !

Paris Match titrait récemment « Alerte au harcèlement textuel ! » et nous avertir que « les informations qui nous parviennent en continu sur nos petits écrans peuvent nuire à notre rendement, quand ce n’est pas la dépression qui guette ». « Éteindre son portable est aussi source de productivité » y lisait-on, à quoi j’ajouterais : si les blogs et autres informations ne sont pas agrémentés de virus, de courriels à l’eau de rose, de spams et autres spots publicitaires.

Ce salmigondis serait pourtant trop unilatéral, selon un suprême magistrat. Il lui reproche de ne pas diffuser suffisamment ses propositions (qui sont pourtant bien présentes dans les médias). Alors, à en croire une proposition ministérielle, les communiqués des formations politiques et des centrales syndicales devraient être diffusés désormais, in extenso, par une seule grande agence de presse.

Une telle initiative ministérielle devrait tourner court : une authentique démocratie suppose la libre diffusion de l’information. Par contre, les obscénités publiées par certains médias, dont la voie informatique, sont dangereuses, parce qu’elles révèlent chez les esprits faibles, ou insuffisamment avertis, des pulsions morbides, peu compatibles avec l’existence en société !

Information et démocratie

Mais la démocratie est mise à mal par bien d’autres moyens encore : chaque fois que vous utilisez un ordinateur, ou un téléphone portable, vous vous exposez à être mis sur écoute par “les grandes zoreilles“, des caméras de surveillance proliférent à chaque coin de rue et les informations enregistrées par les nouvelles cartes d’identité et les passeports numériques peuvent être croisées avec d’autres dossiers personnels. Or, jusqu’à présent, on a refusé, en haut lieu, de tenir compte des objurgations de la CNIL sur ces dangers. Où sont là-dedans les règles de base de l’habeas corpus si cher à nos voisins britanniques ? Au contraire, on se rapproche de plus en plus de l’univers inquiétant décrit par George Orwell.

Comme quoi l’utilisation des technologies nouvelles peut autant être une avancée qu’un recul social, tout dépend de l’objectif poursuivi. Notre système actuel, qui met chacun en rivalité permanente contre tous, impose un encadrement de plus en plus serré. Il faudrait créer un Haut Conseil des Droits de l’Homme, travaillant en relation étroite ave l’ONU, pour concilier en permanence l’évolution des techniques avec les libertés fondamentales. L’exemple de la junte qui dirige la Birmanie, et dont le comportement s’est révélé au monde quand une catastrophe naturelle a endeuillé le pays, montre la voie à ne pas suivre. Il montre aussi que l’ONU doit disposer d’une force d’intervention permanente pour pouvoir se positionner n’importe où sur la planète en cas de catastrophe : le souverainisme doit s’incliner devant les nécessités de l’urgence humanitaire.

À propos d’un scandale

Une cohorte de plus en plus compacte de retraités, et même de salariés modestes, fouillant les poubelles à la recherche d’un minimum de nourriture, est de plus en plus visible. De tels faits ne peuvent être dissimulés au regard de l’opinion. Dans un pays riche comme la France, c’est une honte. Dans une nation qui se présente encore comme l’une des principales puissances mondiales, et qui prétend donner des leçons d’humanisme et de justice sociale aux autres, l’indifférence des autorités en place au regard de ces réalités est effarante. Si les caisses sont vides où est passé l’argent des contribuables ?

Ni les bénéficiaires de confortables stocks-options, ni les spéculateurs en Bourse qui font partir en fumée des milliards de dollars, ni les spécialistes en services de contentieux qui font pression impunément sur de modestes citoyens pour leur extorquer des fonds, ni les familiers des paradis fiscaux ne s’en inquiètent : pour eux, l’avenir est assuré !

Mais pour les jeunes qui, s’interrogeant sur leur avenir, défilent par dizaines de milliers dans les rues, pour leurs enseignants, pour les salariés modestes qui contribuent à la richesse nationale mais qui ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts, pour tous les retraités qui sont condamnés à une existence médiocre, les lendemains s’annoncent sombres. Une atmosphère prérévolutionnaire se développe, mais de quoi l’avenir sera-t-il fait ?

Olivier Besancenot annonce la création prochaine d’un parti politique réellement anti-capitaliste. Soit ! Il déclare, avec un talent oratoire indéniable, qu’il est contre l’ordre ou plus exactement contre le désordre capitaliste ; il fustige l’économie de marché et le système néo-libéral. Mais il ne donne aucune indication sur l’organisation de la société qu’il préconise, en dehors de la stalinienne qu’il voue aux gémonies, et du néo-libéralisme qu’il déteste. S’il ne préconise que le trotskisme, cela me semble un peu court [1]…

De son côté, Mme Royal entend mettre la main sur le Parti Socialiste, une formation politique fort divisée par des courants de pensée divergents et surtout par des ambitions particulières. Elle aurait pu emporter la dernière Présidentielle si F.Bayrou lui avait tendu une main secourable ; comme il n’en fut rien, la victoire tomba dans l’escarcelle du plus entreprenant, qui n’avait pour programme que son ambition personnelle et un goût immodéré du pouvoir et de l’argent facile. L’équipe gouvernementale, divisée par plus de chapelles qu’elle n’a de croix à porter, a largement fait la démonstration qu’elle appartenait désormais au passé, par delà son souci de “rupture”.

Quant à l’opposition, elle demeurera dans les catacombes aussi longtemps qu’elle réagira en fonction d’ambitions personnelles et de préoccupations politicardes : elle se montre incapable de se rassembler autour d’un objectif cohérent et novateur, en symbiose avec les aspirations de la grande majorité de la population.

Je n’ai pour unique ambition que d’énoncer un message en fonction de mon expérience et de mes convictions, pour le faire partager par le plus grand nombre.

Mais à force d’entendre des formulations éculées, sempiternellement vouées à l’échec, on finit par céder au découragement !

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[1] NDLR. Signalons la réponse du parti d’Olivier Besancenot à ce reproche qui est parue sous le titre “Gauche radicale, chiche !“ dans Le Monde du 7/6/2008.

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