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   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles N° 783 - novembre 1980 > Et tré...passons la monnaie !

 

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CHRONIQUE DE L’ELYSÉE-PALACE...

Confidences recueillies par Jacques VEAU (ex Bonhomme) Français Moyen et rapportées par E.R. BORREDON.

Et tré...passons la monnaie !

par E.R. BORREDON
novembre 1980

Nos prédécesseurs disaient, sans malice : « Monnoye fait tout. » Aujourd’hui, je dirais plutôt « Monnoye défait tout. »

Mais quelle réalité se cache, dans les temps qui sont les nôtres, derrière le vocable « monnaie » ?

Nous sommes bien loin des espèces sonnantes et trébuchantes dont on ne retrouve plus trace que dans les bas de laine de nos compatriotes avisés ou chez les collectionneurs numismates ! Leur caractéristique essentielle était et est toujours d’avoir une valeur propre proportionnelle à celle de la quantité de métal fin qu’elles renferment.

En fait, les billets et les chèques bancaires ont pris largement la relève. La monnaie actuelle proprement dite, c’est-à-dire les pièces et les billets mis en circulation par la Banque de France, n’ont en eux-mêmes aucune valeur. Ils sont d’ailleurs de moins en moins utilisés dans les règlements de quelque importance qui sont l’objet de simples écritures comptables.

A tel point que j’ai dû faire comprendre au défenseur de l’étalon- or, notre distingué financier Ruef, que ses propositions pour un retour dans ce sens n’étaient plus de mise et qu’il était préférable d’y mettre un terme.

J’ai dû d’ailleurs également intervenir auprès de notre Institut National d’Emission pour lui faire observer que te montant attribué à la masse monétaire en circulation inscrit à son bilan ne tenait compte iii de la fausse monnaie dont l’importance est certaine, mais difficile à évaluer, ni de l’incidence des règlements scripturaux et comptables sur cette masse. Ce qui nous a conduit à mettre en place des dispositifs de recensement aussi précis et complets que possible de 7 ces règlements auprès des organismes très divers qui en sont les supports.

Reste cependant ce que l’on peut appeler le signe monétaire, propre à chaque pays, mais dont la valeur d’échange est très aléatoire et dépend avant tout des circonstances et des décisions ’x es gouvernements.

Un exemple récent nous a été donné par les variations de parité de la peseta espagnole et de notre franc.

Devant la panique provoquée chez les touristes de l’hexagone habitués aux vacances en Espagne par les menaces des commandos de l’ETA, vous avez pu constater fin juin, début juillet, en quelques jours un recul du prix de la peseta qui est passé de 6,30 centimes à 5,70 centimes, recul décidé en parfait accord entre gouvernants et banques des deux pays intéressés, rien de sérieux ne pouvant justifier par ailleurs une telle décote.

Il en est de même évidemment des cours du dollar et des variations à l’intérieur du serpent monétaire européen obligé très souvent de se mordre la queue pour survivre.

Il n’y a donc plus pratiquement de véritable monnaie, ni sur le marché intérieur à chaque Etat, ni sur le marché international.

C’est ce que je voulais vous faire comprendre ce soir.

A lors, me direz-vous, pourquoi maintenir pour la majorité des Français, à l’intérieur de l’hexagone, cette stricte rigueur monétaire qui se révèle en fait n’être qu’une apparence ?

Je sais. Un nombre de plus en plus élevé de nos compatriotes se rendent compte du manque de fiabilité de cet équilibre et de la nécessité qu’il y aurait à mettre en place des structures nouvelles propres à éviter la catastrophe dont ils sentent de plus en plus l’inéluctable imminence.

Mais n’est-il pas déjà trop tard ?

Et le sauve-qui-peut n’a-t-il pas déjà joué, permettant à beaucoup de gens en place de prévenir le cataclysme ?

Car, et je suis bien placé pour vous le dire, si demain il n’y a plus de monnaie du tout, ni moi-même, ni les miens, ni mon premier ministre, ni les membres du gouvernement, ni les hauts-fonctionnaires, ne seront pris de court.

A Saint-Jean-Cap-Ferrat ou ailleurs, nos positions de repli sont solidement établies.

Le crédit a assuré tous les privilégiés et les grands de ce monde, les banques, les multinationales et autres grandes entreprises, contre la catastrophe économique et sociale imminente.

Mais je n’oublie nullement, croyez-moi, dans ces perspectives peu encourageantes, le sort des millions de Français qui ont assuré, leur vie durant, et continuent à assurer, par leur travail ou leur activité sociale, la pérennité de ce système maintenu en place par l’odieuse prévarication et la stupidité des classes dirigeantes.

Depuis que vous m’avez élu à la magistrature suprême en.1974, je n’ai cessé, dans les allocutions que je vous ai régulièrement adressées en vous faisant espérer à chaque fois un avenir meilleur, de vous dire le souci que j’avais pour vous de cet avenir.

Je demeure très sensible au sort des petits et moyens salariés, des retraités, des chômeurs et des assistés sociaux, des artisans, des petites et moyennes entreprises, en un mot de tous ceux qui vivent de ces signes monétaires qui leur sont si strictement mesurés et qui tendent de plus en plus à n’être qu’une simple monnaie de singes. Lesquels, aussi savants qu’ils prétendent être, n’ont pu démontrer, au fil des ans de mon septennat, que leur incapacité dans tous les domaines et leur manque total de sens humain et social.

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