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Marcel Dieudonné a bien voulu donner aux lecteurs de « La Grande Relève » la primeur du livre qu’il est en train d’écrire et nous extrayons ici une partie de l’avant-propos de cet ouvrage, qui remplacera pour cette fois le texte habituel : Qu’explique « La Grande Relève » ?
Les savants observent les faits, recherchent les rapports
qui les unissent, et formulent les lois qui régissent le monde
physique. La connaissance de ces lois permet à l’humanité
de maîtriser les forces et la matière, afin de les mettre
à son service.
Comme le font les chimistes et les physiciens dans leurs domaines respectifs,
les économistes devraient donc formuler les lois qui permettraient
aux hommes de maîtriser l’économie et de la mettre à
leur service, alors qu’ils en sont les victimes, puisqu’il y a tant
de chômage visible ou réfugié dans l’activité
inutile ou nuisible, tant de misère devant des excédents
dont on ne sait que faire, pour ne citer que ces deux anomalies.
On peut donc, affirmer a priori que quelque chose ne tourne pas rond
dans les sciences économiques. C’est pour mieux définir
les tares de l’économie, leurs causes et les remèdes à
y apporter, que cet ouvrage a pris naissance, avec énormément
de prétention de la part de son auteur... Mais il faut bien tenter
l’aventure, qui sera ce qu’elle sera. Le lecteur jugera.
Afin d’éclairer d’emblée le lecteur sur le contenu de
l’ouvrage, nous lui signalons que cet avantpropos en constitue l’essentiel.
Il peut sembler que certaines affirmations soient gratuites, car affirmer
n’est pas prouver, mais elles sont le fait d’observations consignées
dans le corps de l’ouvrage. Sans autre commentaire entrons au coeur
du sujet.
Actuellement, des engins et des machines de elus en plus automatiques,
construits bar les machines, elles-mêmes de plus en plus automatiques,
suppriment infiniment plus d’emplois qu’il n’en faut pour les fabriquer.
Le progrès technique supprime donc de l’emploi, et comme il ne
s’arrêtera jamais, il le condamne à disparaître.
Autrement dit. l’économie du pain est incompatible avec le progrès
technique qui supprime l’emploi. et le salaire qu’il procure. puis,
en chaîne, le bénéfice, les honoraires et tous les
autres gains.
Effrayante constatation par ses conséquences !
De gré ou de force, il nous faudra quitter d’une façon
ou d’une autre notre économie. dont le fondement est le pain,
condamné à mort par le progrès.
La clé qui ouvre l’économie oui soit adaptée au
progrès, c’est le revenu social. L’économie nouvelle est
l’économie distributive, ainsi nommée parce qu’on y distribue
un revenu social à tous les individus en remplacement de tous
les gains, condamnés par le progrès.
- Utopie ?
- Alors, l’utopie se réalise présentement, sous nos yeux
mêmes. L’ancienne économie enfante la nouvelle. En vérité,
nous interprétons l’évolution économique avec bien
peu de perspicacité et d’intuition. Nous ne savons pas dégager
ce qui est essentiel de la masse des faits. Essayons d’extraire l’or
de sa gangue.
En 1848, au cours de l’une des crises cycliques provoquées par
la machine à vapeur, on fait creuser et reboucher des trous par
les chômeurs, dans des terrains vagues appelés Ateliers
Nationaux. Le salaire procuré par ce travail inutile, qui n’apporte
rien en contrepartie à la société, est un don déguisé,
un revenu social camouflé dans le travail inutile. Les prémices
de la nécessité de l’économie distributive apparaissent
déjà.
De nos jours, le progrès technique permet une abondance telle
que le pouvoir d’achat distribué à l’immense majorité
des consommateurs est insuffisant pour absorber la production, bien
qu’elle soit volontairement réduite à ce qu’on espère
vendre. Dans le quadruple but d’assurer l’activité économique
maximale, de réduire ainsi autant que l’on peut la croissance
du chômage, d’écouler les marchandises qui stagnent dans
tous les magasins, tout en améliorant le sort des personnes les
plus défavorisées, le gouvernement a créé,
et continue à créer, depuis plus d’un demi-siècle,
un nombre impressionnant d’indemnités, d’allocations et de primes,
qui sont de véritables revenus sociaux, puisqu’ils sont distribués,
sans aucune contrepartie de travail, à des millions d’handicapés,
de personnes âgées, de chômeurs, de familles, etc.
La nécessité, l’utilité et les bienfaits de la
distribution, disons de l’économie distributive, commencent à
se manifester sérieusement. Elle n’est pas encore née
dans sa forme parfaite, mais elle vit, dans sa forme embryonnaire.
Au cours d’une émission de télévision faite en
février 1964 au sujet d’un conflit social à Saint-Nazaire,
le ministre des Finances déclara que les subventions accordées
par l’Etat aux entreprises navales se montaient à la valeur de
tous les salaires distribués par ces entreprises.
En somme, les travailleurs reçoivent en don un revenu social
de l’Etat. Mais comme il leur est remis par l’intermédiaire de
l’entreprise, ils ont l’illusion de continuer à recevoir leurs
salaires. En réalité, ils reçoivent un revenu social,
invisible parce que travesti en salaire.
Le travail n’est plus rétribué par l’entreprise. Il est
devenu une prestation professionnelle, également invisible sous
la défroque d’emploi rémunéré.
Il s’agit bien, ici, de la naissance de l’économie distributive,
ou plutôt de son avortement illicite, car l’entreprise, qui ne
verse plus de salaires, continue à encaisser le fruit du travail
rémunéré en don par la société. On
vole à la société un bien plus précieux
que tout l’or et tous les diamants de l’univers, à savoir les
prodigieux bienfaits d’une société qui soit adaptée
au progrès technique.
En toute raison et honnêteté,, l’entreprise subventionnée
doit être GEREE pour le compte, exclusif de la société.
Son statut juridique est donc la GERANCE sociale.
L’économie DISTRIBUTIVE est une nécessité.
Nous y sommes conduits naturellement, nous venons de le voir, par la
DISTRIBUTION de subventions à la production.
L’ancienne société accouche de la nouvelle. La tête
(le revenu social) et le corps (la prestation professionnelle) ont franchi
le seuil, mais les jambes (la gérance sociale) ne suivent pas,
parce que nous ne tendons par les bras pour aider et accueillir le Monde
Nouveau qui veut naître et s’épanouir. La Grande Espérance,
radieuse, sereine, souriante, s’offre à nous pour que prenne
chair notre rêve d’amour. Nous lui claquons la porte au nez. Elle
est, n’est-ce pas, une utopie... pour les travailleurs de Saint-Nazaire
qui offrent gracieusement à l’entreprise capitaliste le fruit
de leur travail rémunéré en don par la société.
Les travailleurs de Saint-Nazaire, c’est le prolétariat, c’est
nous tous, du moins en esprit, c’est l’humanité.
(A suivre)
(Extrait de l’avant-propos d’un ouvrage en préparation).