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   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
 
 
 
 
 
AED La Grande Relève Articles N° 1025 - octobre 2002 > L’avenir se décide aujourd’hui.

 

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Éditorial

L’avenir se décide aujourd’hui.

par M.-L. DUBOIN
octobre 2002

Si l’horreur des attentats du 11 septembre 2001 a pu faire espérer que ceux qui orientent l’avenir de la planète allaient enfin se demander comment, avec tant de moyens, notre monde avait pu en arriver là, on peut, hélas, constater un an après, qu’il n’en a toujours rien été. Et, stimulés par la position de G.W.Bush déclarant que ne pas soutenir inconditionnellement sa politique c’était cautionner le terrorisme d’Al-Qaïda, ceux qui jugent à l’emporte-pièce reprochent stupidement aux autres leur “anti-américanisme primaire”. Dans cet obscurantisme qui prévaut encore, on aurait peut-être pu déceler une pâle lueur d’esprit critique ou l’ombre d’un refus de totale soumission à “l’unilatéralisme” du Pentagone dans l’attitude de certains gouvernements européens à déclarer que l’ONU avait son mot à dire… Mais si c’est pour accepter ensuite de suivre, cette seule note d’optimisme que j’avais cru trouver dans l’actualité dont les grands médias nous informent, se révèlera n’être que poudre aux yeux. Car elle est sombre, l’actualité, en cette fin d’été où les “nations unies” ont échoué à définir à Johannesburg ce qu’on appelle un “développement durable”, c’est-à-dire comment s’assurer que notre culte de la croissance laisse aux générations futures les moyens de vivre. Cet échec est à la fois dramatique et très logique.

Dramatique parce qu’il est maintenant certain que la vie sur terre est sérieusement en danger. Le rapport publié par le programme des Nation Unies pour l’Environnement est très étayé et très clair : le monde est fragilisé, la dégradation de la qualité de l’air et des ressources en eau, si elle se prolonge, mettra en danger des millions d’êtres humains ; des milliers d’espèces de mammifères et d’oiseaux sont déjà directement menacées. Tout dépend donc des mesures qui seront prises dans les quelques années prochaines, et même si ces mesures sont importantes, leur effet ne sera qu’à très long terme. Alors qu’il faudrait agir vite et fort, aucune mesure sérieuse n’a pu être adoptée, car, et c’est le rapport qui conclut : « l’état de la planète se dégrade, mais, pour beaucoup, les affaires continuent comme à l’accoutumée. »

Mais qui pouvait croire au succès de ce sommet des nations ? Il est bon que se soit manifestée une certaine prise de conscience que les atteintes à l’environnement compromettent l’avenir. Mais une autre est maintenant nécessaire : celle que le problème tel qu’il reste posé est insoluble, pour la simple raison qu’il y a incompatibilité fondamentale entre économie capitaliste et “développement durable”. Comment donner la priorité au souci de sauvegarde des êtres humains, présents et à venir, de l’environnement, des ressources non renouvelables et de la diversité, puisque par définition, la priorité pour le capitalisme, c’est sa propre croissance ? Que sa logique est de tout soumettre à cette croissance-là ? Qu’ainsi la main d’œuvre, qui doit lui être soumise maléable et flexible, constitue, avec l’environnement et les autres ressources, des charges, des coûts qu’il lui faut minimiser ?

Le monde n’est pas conduit par des responsables politiques chargés de décider entre les différentes voies que pourrait prendre l’économie. Ils ont remis ce pouvoir aux mains de quelques décideurs à la tête de quelques centaines de grosses entreprises multinationales dont l’objectif est clairement défini et jamais remis en question puisqu’il fait partie de la logique du système : il s’agit d’assurer le “retour sur investissements” le plus élevé et le plus rapide possible. C’est la croissance aveugle et le court terme [1]. Il y a donc une totale incompatibilité entre ce double objectif très clair et les plus louables aspirations vers plus de respect pour les hommes et pour la nature. C’est même l’opposé de ce qui pourrait assurer un “développement durable”.

Ce sont les investisseurs internationaux qui orientent l’économie générale de la planète, donc, en fait, qui décident de son avenir. Leur objectif n’étant pas de sauver la planète mais de la soumettre à leurs profits financiers à court terme, à quoi bon débattre quelle orientation différente serait souhaitable ?

C’est le pouvoir d’orienter son économie que l’humanité doit maîtriser, directement, sans passer sous les fourches caudines de la Finance et sa croissance obligée. Et c’est bien là l’objectif que nous poursuivons en défendant une économie distributive et non plus financière.

Cette maîtrise est nécessaire à tous les niveaux. Au niveau mondial, on vient de le voir. Et ceci passe par les gouvernements des États, ou des groupes de nations démocratiques, où il faut d’abord que le pouvoir politique reprenne en main le pouvoir d’orienter l’économie en retrouvant le droit régalien sur la création de la monnaie légale. Enfin au niveau de l’individu, il importe de reconnaître à chacun ses droits économiques, sa part des richesses produites, en lui assurant à vie un revenu décent. C’est grâce à cette assurance que la motivation de ses activités pourra changer, et qu’il ou elle pourra décider de sa participation à la société sans avoir à se vendre. Maîtriser l’orientation de sa propre vie sans être obligé de l’asservir à la rentabilité marchande.

Alors seulement l’humanité se donnera les moyens d’arrêter les dégâts de sa folie actuelle.

S’il est encore temps…

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[1] Voici comment raisonnent les agences de notation, dont les notes qu’ils attribuent aux entreprises déterminent les choix des investisseurs : « Nous regardons l’endettement de l’entreprise, ses engagements sociaux ou environnementaux n’ont aucun impact sur notre évaluation. Théoriquement, cela pourrait même avoir un impact négatif car un investissement environnemental signifie un coût supplémentaire pour l’entreprise. » (interview auprès de l’Agence Moody’s réalisée par L.Belot pour Le Monde, 7/6/2002).

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