La Grande Relève
   Mensuel de réflexion socio-économique vers l’Économie Distributive
AED La Grande Relève ArticlesN° 794 - novembre 1981

< N° Précédent | | N° Suivant >

N° 794 - novembre 1981

Pourquoi il faut tout changer   (Afficher article seul)

Au fil des jours   (Afficher article seul)

Mourir idiots, c’est normal   (Afficher article seul)

La guerre au chômage est déclarée   (Afficher article seul)

Propos sur le chômage   (Afficher article seul)

La Patrie ?   (Afficher article seul)

À qui profite l’épargne ?   (Afficher article seul)

Le théorème de Schmidt   (Afficher article seul)

De l’or sous les roses   (Afficher article seul)

Tempête sur les monnaies   (Afficher article seul)

La vraie richesse et les parasites   (Afficher article seul)

De la responsabilité en économie distributive   (Afficher article seul)

Dialogue   (Afficher article seul)

Question de temps   (Afficher article seul)

Réussir ou disparaître   (Afficher article seul)

^


Pourquoi il faut tout changer

par M.-L. DUBOIN
novembre 1981

S’IL est une leçon à tirer des suites de notre passage télévisé à la « Tribune Libre » de FR3 du 29 septembre, c’est bien que nous avons raison de poursuivre notre combat pour faire connaître nos propositions. Que de lettres, que nous n’avons pas la place de publier, sont venues nous dire : «  enfin quelque chose de nouveau, enfin des idées constructives capables de mettre fin à la crise que personne, nulle part, n’ose aborder avec l’imagination nécessaire ». Certaines disaient « ce que vous avez exprimé, nous le sentions confusément, mais c’est une conviction claire, constructive ».
Alors, lecteurs de la Grande Relève, que ceci vous encourage  ! Nous sommes dans la bonne voie. Les faits nous donnent raison. Les esprits démarrent : à vous de faire les gros efforts nécessaires pour que s’ouvrent enfin tous les yeux !

DISTRIBUER LE TRAVAIL : OUI

En analysant bien les réactions rencontrées et les opinions exprimées dans les journaux les plus divers, il apparaît que l’idée de la nécessité de distribuer le travail, parce qu’il diminue de façon irréversible, est de plus en plus reconnue. De récentes émissions de télévision, (sur l’usine de Douai qui fabrique la Renault 9, par exemple), ont apporté une confirmation spectaculaire. La courbe que nous reproduisons en première page en est une autre, car outre leurs qualités techniques reconnues, les robots s’avèrent en détenir une autre, déterminante en régime capitaliste du marché : ils coûtent de moins en moins cher, au contraire de la main-d’oeuvre humaine !

MAIS DISTRIBUER LES REVENUS !

Par contre, la nécessité, pourtant parallèle, de distribuer aussi les revenus, n’est pas ressentie en même temps. On dit : « oui, il faut se partager le travail, mais sans abandonner le système du marché. On y tient parce que la compétitivité, et l’émulation qu’il entraîne furent source de tant d’inventions  ! ».
C’est donc sur ce second point qu’il faut concentrer nos efforts. Et c’est le plus dur, car on se heurte à des barrières du genre « je ne comprends rien à l’économie, je ne peux pas comprendre, c’est trop compliqué ». Ou bien «  ces lois du marché ont toujours existé... » (ce qui est faux) ... « donc c’est une utopie de vouloir en changer  ». On se heurte aussi à des professions de foi, et nos gouvernants en semblent les adeptes, du type :, « avec une gestion (toujours capitaliste) plus égalitaire, on va résoudre la crise... ».

OU EST LA NECESSITE ?

Si nous reconnaissons que le capitalisme fut le facteur principal du progrès, et nous somme prêts à lui élever une statue pour manifester cette reconnaissance, nous n’en constatons pas moins qu’il a fait son temps. Comme les chars à boeufs. Pourquoi  ? Parce que le degré de technicité et l’ampleur des moyens auxquels nous avons maintenant accès, font désormais que laisser l’initiative des actions humaines à l’aiguillon du profit non seulement n’est plus justifié par la nécessité d’une certaine croissance à poursuivre, mais en plus fait courir un risque énorme qui menace jusqu’à la survie de notre planète.
Pour bien faire comprendre pourquoi la loi du marché ne nous offre pas d’issue, il faut montrer dans quel sens elle nous entraîne. On peut le faire par un exemple chiffré. Supposons qu’on en soit arrivés au stade de notre évolution technologique où, pour produire tous les biens de consommation d’une population donnée, la nôtre .à l’heure actuelle par exemple, on ait de quoi employer le quart de la main-d’oeuvre qui y était nécessaire à l’époque de la semaine de 40 heures. Ajoutez un autre quart, employé à assurer tous les services, d’éducation, de santé, etc..., payé par la population active sous forme de traitements, salaires ou honoraires versés directement ou par l’intermédiaire de l’Etat.
De quoi peut vivre l’autre moitié de la population ?
De deux choses l’une. Ou bien tout le travail est distribué à toute la. population qui doit par conséquent, dans notre hypothèse, une moyenne de 20 heures de travail par semaine, et le pouvoir d’achat de la production réalisée est distribué aussi à toute la population. c’est l’économie distributive.
Ou bien on laisse faire la loi du marché. Où nous mène-t-elle  ? Bien entendu, la moitié de la population qui a pu conserver son emploi va continuer à travailler, en moyenne, 40 heures par semaine et produire tout ce qui est nécessaire à la population, en touchant des revenus corrects, bons, ou même très bons. Mais l’autre moitié ? Pour « gagner » son pouvoir d’achat, elle n’a pas d’autres possibilités que de le «  pomper » à la moitié que je qualifierai d’«  utile » de la population. Comment’ ? Mais par tous les moyens ! Au prix de n’importe quelles dégradations ! Et plus va croître la proportion de travail automatisé, plus la loi du marché va pousser de monde à vivre en parasites. Les plus « entreprenants  » vont chercher des créneaux, se lancer dans la fabrication de gadgets dont le besoin ne se faisait pas sentir. Pour vendre, ils vont faire travailler une horde de publicistes dont toute l’activité sera de chercher à convaincre les gens qui ont des revenus, qu’ils ne peuvent absolument pas se passer de ces gadgets, qu’on ne porte pas un manteau de l’an dernier, qu’on ne sort pas sans être maquillé, parfumé ou « aftershavé » ou qu’on ne peut pas vivre sans une chaîne très haute fidélité en quadriphonie. Ainsi l’industrie va tourner pour satisfaire ces besoins artificiels de toute sorte, à seule fin, en fait, de faire passer de l’argent d’une moitié à l’autre de la population, et tant pis pour les conséquences qu’en sont gâchis de matières premières et de cerveaux, pollutions ou risques variés. C’est bon, puisque ça donne du travail ! D’autres personnes, très douées, vont continuer à « gagner leur vie » avec deux téléphones. Avec celui qui est à portée de leur main droite, ils achètent une cargaison de n’importe quoi, disons de pommes de terre, en imposant un prix de misère au producteur, en lui expliquant que s’il n’est pas d’accord on s’adressera à un autre, qui saura saisir l’occasion, car la production est abondante. Puis de la main gauche, il téléphonera à un grossiste, ou à tel mandataire, à qui il revendra la même cargaison, sans l’avoir vue, et pour un prix fixé, après quelques marchandages, au double du prix précédent. Entre la main droite et la main gauche, le porte-feuilles de notre homme d’affaires se sera gonflé d’un revenu égal à celui gagné par le producteur. En échange de quoi ? D’un quart d’heure d’âpres palabres, preuves sans doute d’un talent certain, mais qui pourrait être mieux employé qu’à gonfler ainsi les prix de toutes les productions et à faire croître, inévitablement, l’inflation, fonction directe du nombre des intermédiaires. Qu’importe pour le système du marché, les intermédiaires font travailler un monde de secrétaires : il faut bien qu’elles gagnent leur vie !
J’ai pris l’exemple du commerce des pommes de terre. Il ne tue pas grand’monde. Mais que dire du commerce des armes ? Faut-il vraiment, pour faire tourner l’économie, qu’il y ait aussi des représentants en munitions qui gagnent leur vie en persuadant les peuples sous- informés que leurs voisins ont des moyens énormes et que, s’ils ne. font pas l’achat des armes magnifiques, dernier cri (sans humour noir) qu’on leur propose, ils seront exterminés dans les plus brefs délais  ? Et qui s’empressent d’aller tenir ensuite les mêmes propos aux dits voisins...
Toutes ces activités ne trouvent de « justification » que dans le régime du libéralisme économique parce qu’elles sont le seul moyen pour les « débrouillards », les « entreprenants », les « combinards » de faire transiter par leur poche les revenus des autres. Quant au reste de la population, à ceux qui ont l’honnêteté de reconnaître que la société, pour vivre, n’a plus besoin de leur travail, qu’ont-ils donc pour vivre, en économie libérale ? Les indemnités de chômage qui leur sont versées comme une aumône, prélevées par l’intermédiaire de l’Etat, sur les revenus que les autres croient avoir gagnés. Ces versements, dans ces conditions, donnent aux chômeurs une position d’assistés. Mais il y a pire. Il y a aussi tous ceux qui, ne figurant dans aucune de ces catégories, n’ont plus que la mendicité, le vol... ou le suicide.
Voilà pourquoi le libéralisme a atteint ses limites : la situation qu’il entraîne n’est plus humainement supportable.

^


Au fil des jours

par J.-P. MON
novembre 1981

L’échec des politiques monétaristes chères à Mrs Thatcher, Reagan et autres conservateurs, sans parler des nostalgiques de V.G.E. et du gros Raymond, est chaque jour plus évident : en Grande-Bretagne, le chiffre de trois millions de chômeurs est atteint ; aux EtatsUnis, tout laisse penser que l’économie va entrer véritablement en récession, et malgré les coupes sombres pratiquées dans les budgets sociaux, le déficit budgétaire reste élevé et le déficit de la balance commerciale pour la période allant de janvier à mai 1981 a dépassé seize milliards de dollars. Le gouvernement français a choisi une politique économique diamétralement opposée à la’ politique monétariste mais les résultats se font encore attendre.

*

A en croire les déclarations des divers ministres français, on devrait pourtant continuer à espérer. En effet : c’est le Premier ministre, M. Mauroy, qui déclarait le 8 juin dernier au Club de la Presse d’Europe N° 1 : « Nous sommes devant une troisième mutation technologique... La politique du gouvernement est de faire en sorte que l’homme soit maître de la machine...  ».
C’est M. Rocard qui, le 11 juin, disait au 57e Congrès des Coopératives de Consommateurs : « La vocation fondamentale qui est aux origines des activités coopératives et mutualistes est bien de reconnaître la primauté de l’individu sur l’argent, de l’adhérent en tant que partie prenante de l’activité économique et pas seulement dans son statut de salarié ou de client ». C’est M. Mexandeau qui disait dans une interview dans le « Monde Informatique » du 21 septembre : « Le combat pour l’emploi est le premier objectif du gouvernement. Mais il serait tout à fait vain de fonder la création d’emplois sur autre chose que la satisfaction de besoins sociaux ou économiques véritables  ». C’est encore P. Mauroy qui, à propos des nationalisations, déclarait à la radio-télévision autrichienne  : « Nous voulons la maîtrise de l’économie. Il faut nécessairement être présent aux endroits stratégiques de la vie économique. Comment voudriez-vous mobiliser la jeunesse, entretenir l’espoir, s’il n’y avait pas, à côté de l’économie de marché avec ses contraintes (...) un secteur de référence, une sorte d’oasis (...) , un secteur où il y aura de grandes performances sur le plan industriel (...) où il y aurait des expériences très poussées sur le partage des responsabilités entre ceux qui commandent et ceux qui subissent le commandement, un champ d’expérimentation où nous pourrons appliquer ce que nous appelons l’autogestion  ».

*

Le malheur, c’est que pour mettre en pratique toutes ces bonnes déclarations, il faut sortir pour de bon de l’économie de marché. Il faut cesser de proclamer que le retour au plein emploi s’obtiendra en relançant la demande et en investissant. Il faut avoir le courage de dire que tous les investissements qui seront faits supprimeront des emplois au lieu d’en créer. Bien sûr, il faut produire plus pour aider, gratuitement, le Tiers-Monde. Ce qui pourra un peu freiner la montée irréversible du chômage. Mais pour que tout cela soit possible, il faut changer totalement de système économique : il faut réduire énormément le temps de travail sans diminution de salaire ; et, pour que les entrepreneurs puissent le supporter, il faut une monnaie qui soit uniquement une monnaie à usage interne, une monnaie de consommation, les achats indispensables à l’extérieur étant réglés par des accords de troc.
De tels accords de troc n’ont rien d’extraordinaire et sont souvent pratiqués : un exemple récent vient d’être donné par l’Algérie qui a décidé de payer en pétrole brut (ça nous intéresse, non ?) ses gros contrats d’importation.
Il est vrai qu’officiellement on n’appelle pas ça des accords de troc mais des accords de « compensation ». Ça change tout !

*

C’est le seul moyen d’échapper a la tyrannie du dollar. Le dollar que les Américains manipulent à leur convenance. C’est ainsi que pour payer ses factures, le gouvernement américain vient de recevoir du Sénat l’autorisation d’effectuer une émission supplémentaire de Bons du Trésor. Ce qui porte la dette publique des Etats-Unis à 1 079 milliards de dollars, soit l’équivalent de 4 694 dollars par Américain. Pourquoi les Américains seraient-ils les seuls à jouer avec leur monnaie ?

*

Autre fléau de nos économies, l’inflation dont on ne sait plus très bien la définition. Alors, disons pour ce qui suit, hausse des prix. Eh bien, vous serez ravis d’apprendre que pour lutter contre les excédents de matières grasses végétales qui menacent l’Europe Occidentale avec l’entrée de l’Espagne et de la Grèce (sans jeu de mots) dans le marché commun, la Commission Economique Européenne envisage d’appliquer une taxe de 600 francs par tonne sur toutes les huiles produites ou importées dans la Communauté. Outre les 4 milliards de francs de recettes supplémentaires que cela rapportera à la Communauté, la Commission estime que « cela aura l’avantage d’augmenter les prix à la consommation de 4,6 % pour la margarine et de 8,5% pour les huiles. Afin d’aider les producteurs d’huile d’olive qui serait, elle aussi taxée, on accroîtra les aides de la Communauté.
C’est beau la technocratie !

^


Mourir idiots, c’est normal

par F. LÉVY
novembre 1981

LE Larousse de poche définit l’argent : « Métal blanc. Toute sorte de monnaie », et la monnaie : « Pièce de métal frappée pour servir aux échanges. Fig.  : moyen d’échange ». Moyen d’échange en tant que représentant la valeur des produits échangés. Donc « étalon » de valeur. Chaque pays dispose de sa monnaie propre et définit la valeur de ses richesses et services de tous ordres grâce à ladite monnaie. Mais n’importe quel pays, groupe ou individu, peut acheter » cette monnaie plus ou moins cher. Car cet « étalon de valeur » s’achète et se vend comme une marchandise, et personne, jamais, ne sait ce qu’il « vaudra » dans l’heure qui suit. La valeur des produits peut rester fixe, le « moyen » de leur échange ne l’est pas. La monnaie est le seul étalon « variable » connu. Il paraît que c’est normal.
La monnaie, a été et peut encore être basée sur l’or (métal utile seulement à la bijouterie, la prothèse dentaire et certains travaux de laboratoire. Mais la valeur de l’or varie à chaque heure. Il paraît que c’est normal.
Certains pays n’acceptent pas le règlement de leurs produits dans la monnaie du pays acheteur, mais exigent ce règlement en monnaie d’un autre pays, le dollar par exemple. Il paraît que c’est normal.
Les pays les plus riches du monde ont été précipités dans une crise épouvantable, en 1929, parce que des spéculateurs américains avaient perdu la tête. Les dits pays, possesseurs de richesses restées intactes après - comme avant - ce cataclysme, se sont retrouvés plus malheureux que les pays les plus démunis de tout. Il paraît que c’était normal.
Le monde est aujourd’hui au coeur d’une crise économique qui ne cesse de s’amplifier, et en particulier ces derniers jours parce que l’un des pays les plus riches se livre à des manipulations qui ont fini par rendre son dollar aussi dangereux que la dynamite. On peut se priver de dynamite, on ne peut pas se passer de dollars. Il paraît que c’est normal.
Tous les pays riches pourraient exploiter leurs richesses, les consommer, les exporter, acheter celles qui leur manquent, « vivre heureux et sans soucis ». Ce n’est pas possible parce que les systèmes économique et monétaire du monde les en empêchent. Il paraît que c’est normal.
Le système en vigueur, dit « économie de marché impose la « concurrence », qui nous a mis, aujourd’hui, en état de guerre économique ouverte (dixit M. CHEYSSON, après bien d’autres) , avec pour résultat cette crise que l’on déplore tout en refusant d’examiner les moyens, connus, pour en sortir. Il paraît que c’est normal.
Cette crise, caractérisée par l’inflation et le chômage, interdit l’arrêt de la fabrication d’armes, qui assure beaucoup d’emplois (et prépare la guerre) et leur exportation (qui la facilite chez les autres) mais permet l’indispensable « équilibre de la balance des paiements ». Elle impose aussi, à des pays qui ne savent pas quoi faire de leurs richesses, « l’austérité  », remède préconisé pour réduire l’inflation et défendre le franc.
Nous nous foutons du franc, nous refusons de crever pour le dollar, nous ne ferons pas la guerre pour l’argent. Parce qu’il n’est pas besoin d’argent pour vivre, ni de dollars, ni de francs, mais de biens de consommation. Nous en regorgeons - et nous les détruisons pour en sauvegarder la valeur... sans songer à les « donner » à ceux qui meurent de faim. Nous ne pouvons pas les donner parce que notre système économique interdit tout acte « gratuit  ». Toute activité doit être « rentable ». On voudrait bien aider le Tiers, et le Quart Monde, mais ils ne peuvent pas « payer ».
« ...Aucun signe tangible ne laisse prévoir un éventuel infléchissement du cours des choses, et le système détraqué reste fidèle à sa folle logique. La théorie économique en honneur était déjà frappée par la coexistence contradictoire de l’inflation et de la stagnation, et le mot «  stagflation » décrit ce qu’il n’explique pas... Et pourtant, prisonnier d’une théorie à laquelle les faits ne répondent plus, le système, coupé du réel, poursuit imper turbablement sur sa lancée schizophrène. L’Occident évolue en pleine économie-fiction ». Claude JULIEN, gérant du « Monde », écrivait ces lignes dans « le Monde Diplomatique » d’août 1978...
Alors finissons-en avec ce système dément. Réduisons les monnaies nationales à un usage strictement intérieur et déclarons le franc inconvertible, c’est-à-dire non coté sur les places extérieures, comme l’est le rouble. Dès lors la France sera vraiment indépendante parce que la Finance Internationale ne pourra plus descendre en flammes le franc, comme elle vient de le faire et ne manquera pas de le refaire si le nouveau gouvernement semble tenté par un socialisme vrai. Comme elle l’a fait pour l’escudéro d’ALLENDE. Quant au commerce extérieur, il se porte fort bien avec les pays de l’Est, sous la forme de «  compensation », élégante formule définissant le troc. Cette méthode peut s’appliquer avec tous les pays développés et la plupart des autres.
Monnaies stables à l’abri des attaques intérieures et extérieures :
- la sécurité et l’indépendance de chaque nation sont assurées ;
- le cours des changes n’est plus qu’un souvenir ;
- la dictature de telle ou telle monnaie et la puissance illimitée et redoutable qu’elle donne à ses possesseurs ne sont plus qu’un cauchemar dépassé ;
- la compensation permet le commerce extérieur sans aléas ni équilibre obligé à court terme.
D’autre part la concurrence n’est plus une guerre parce que le commerce n’est plus une obligation : on ne produit plus pour vendre, mais pour vivre, et faire vivre ceux qui manquent de tout, pour satisfaire les « besoins » des hommes, tant matériels qu’intellectuels, et non cette recherche lancinante du « profit », cet obscurantisme devenu but obligé, unique et dégradant de la plupart des hommes « civilisés ».
C’est cela, le socialisme, et c’est possible dès demain : le monde a su sortir de l’esclavage, de la féodalité, des monarchies absolues ; il doit sortir de l’économie marchande, qui l’a fait vivre depuis que l’homme est l’homme, et qui désormais les conduit à l’abîme, irrémédiablement. Il doit entrer dans l’économie des besoins.

^


La guerre au chômage est déclarée

par G. LAFONT
novembre 1981

DEPUIS longtemps déjà nos économistes patentés, d’abord pris de cours devant la grande dépression survenue après la première guerre mondiale dans les pays industrialisés, crise qu’aucun signe précurseur ne leur avait laissé prévoir  ; devant le marasme des affaires, les faillites en série, l’inflation galopante, le chômage grandissant et les troubles sociaux qui l’accompagnent, mais non sans avoir cherché l’explication de ce cataclysme dans les oeuvres poussiéreuses d’Adam Smith, Quesnay, J.-B. Say ou Ricardo, leurs plus illustres prédécesseurs  ; nos économistes patentés, dis-je, stoïques dans le désarroi général, avaient tenté de nous rassurer par cette affirmation optimiste érigée aussitôt en dogme universel : « La machine crée plus d’emplois qu’elle n’en supprime ».
Ces simples paroles, en mettant fin aux propos alarmistes de quelques économistes attardés, ouvraient de nouvelles perspectives aux tireurs de plans en détresse et autres doctrinaires du libéralisme plus ou moins avancé qui mirent aussitôt leur matière grise au travail pour sortir le monde civilisé de ce que l’on n’appelait pas encore le merdier, mais qui n’en était pas loin.
Ce travail d’experts, après les inévitables tâtonnements du début et l’échec provisoire de tous les redressements définitifs auxquels nous avons assisté, a tout de même, selon lesdits experts et n’en déplaise aux ricaneurs, donné des résultats qu’ils estiment « globalement positifs », comme dit l’autre. Et c’est compte tenu de cette expérience que le nouveau gouvernement s’est fixé comme objectif prioritaire la guerre au chômage par la création de nouveaux emplois.
Eh bien, allez donc comprendre quelque chose à la science économique et vous fier aux postulats les plus solidement établis, c’est raté. Contrairement aux pronostics de tous les spécialistes le nombre des chômeurs ne cesse de croître, comme le déficit budgétaire et le taux d’inflation, en même temps que s’élève la montagne des stocks excédentaires, et va bientôt atteindre les deux millions. Et ce n’est qu’un commencement.
Jusqu’ici le secteur tertiaire, après avoir accueilli le monde des campagnes chassé de ses terres par la monoculture, les engrais chimiques, les oestrogènes, les pesticides et les anabolisants, avait, tant bien que mal, réussi à absorber une partie des chômeurs venus de l’industrie et remplacés par les machines. C’est fini. La télématique, les ordinateurs, les caisses enregistreuses électroniques, remplacent déjà et remplaceront de plus en plus le personnel en surnombre des assurances, des banques, des grands magasins et de l’administration. Et l’on ne voit pas, dans l’état actuel des choses - même si c’est encore l’état de grâce - quelle corporation, mise à part l’industrie du casse-pipes, toujours florissante, merci, l’armée toujours fin prête, qu’on se le dise, ou les pompes funèbres, toujours à votre service, pourrait accueillir les deux millions de chômeurs provisoires chassés à leur tour par le progrès, et toujours en voie de recyclage.
Si vous avez une idée... Non Pas une ?.. Pourtant, et sans vantardise, on n’en manque pas, en France. Et c’en était même une de géniale pour le premier bipède qui l’a conçue, d’inventer une machine qui allait travailler à sa place, le libérant ainsi de sa condition d’esclave pour en faire un homme libre. Il n’avait pourtant pas prévu, le gros malin, qu’il allait passer sans transition du rang de travailleur exploité à celui de demandeur d’emploi devant qui les portes se referment en claquant sur ces mots : «  On vous écrira ».
Alors, « Créer de nouveaux emplois », vous dites  ? On veut bien, tu parles ! Et les deux millions de chômeurs secourus, sans compter les autres, les pas vernis qui n’ont jamais vu un. bulletin de paye, ne demandent pas mieux. Mais comment ? Pas facile, quand, grâce aux progrès des sciences et des techniques - pardon si on rabâche -. la production dépasse les besoins solvables et devient du coup excédentaire.
Mais si la machine produit plus qu’on ne peut vendre faute d’acheteurs, et si le chômeur ne consomme pas, ou si peu, pourquoi ne remplacerait-on pas les machines par des chômeurs ? C’est idiot... Oui, je sais, mais il n’y a pas d’autre choix dans notre monde à l’envers, en dehors du socialisme distributif.
Après le refus de M. Charles Hernu de réduire à six mois la durée du service militaire, comme promis, pour ne pas aggraver le chômage, il reste une dernière solution encore plus idiote : revenir au service de sept ans. Ça dressera la jeunesse. Et si cela ne suffit pas, décréter la mobilisation générale. Rompez ! En temps de guerre il n’y a plus de chômeurs.

^


Propos sur le chômage

par A. HUNEBELLE
novembre 1981

Le sort de la France n’est pas directement entre nos mains. Il dépend de ce que vont décider (ou non) nos élus dans les jours qui viennent... C’est donc spécialement à leur intention que je fais cet exposé qui insiste sur des choses dont les lecteurs, pour la plupart, doivent être convaincus depuis longtemps.

LE présent article n’est pas la suite directe de mes premiers « Propos sur le Chômage » dont le texte a paru dans le numéro de la « Grande Relève » de juillet dernier.
La conclusion de cet article exposait la nécessité d’une « Expérience de Transition » qui consistait à mettre au point le fonctionnement d’une petite « Economie Distributive limitée aux chômeurs et à leurs familles (c’est-à-dire à moins de 10 % de la population française).
Je voulais vous démontrer qu’en limitant ainsi nos ambitions, l’expérience est tout à fait possible dans un délai relativement court.
C’est certainement ce que vous attendiez que je vous expose aujourd’hui, mais depuis l’avènement au « Pouvoir Absolu » des Socialistes, si l’on ne peut pas se plaindre qu’ils soient restés inactifs (loin de là !), il me paraît beaucoup plus urgent d’essayer de « leur ouvrir les yeux » car ils ne semblent pas encore avoir compris « le vrai problème » auquel il est vital de donner une priorité absolue.
Leur activité a été courageuse et parfois efficace, mais elle a pris souvent des directions inattendues, et leur façon d’aborder le problème du Chômage est stérile.
Or il y a quelques « Mesures-de-Salut-Public » (le mot n’est pas trop fort !) que le gouvernement doit prendre sans délai, s’il veut éviter, à très brève échéance, les pires désordres et une catastrophe irréversible.

IL FAUT PENSER, EN PRIORITE, AU CHOMAGE ! MAIS EN SE GARDANTD’Y PENSER AVEC DES IDEES FAUSSES

Depuis quatre mois, notre très sympathique Président, notre très sympathique Premier Ministre ainsi-que les très sympathiques Ministres et Secrétaires d’Etat, clament sur-tous les tons que leur première préoccupation est le Chômage...
Parfait !..
Et pourtant, si aujourd’hui une personne « curieuse et bien intentionnée  » demande à l’un de ces « très sympathiques personnages » comment le gouvernement compte maîtriser ce mal endémique - dont il est facile de prédire qu’il fera « crever », à très brève échéance, tous les pays occidentaux à régime économique «  échangiste »
il répondra que toutes les mesures qui ont été prises et que prend actuellement le gouvernement sont inspirées par cette constante et permanente préoccupation de « résorber le chômage ».
Vous avez bien lu : Ils espèrent résorber le chômage.
Et voilà, exprimée avec la plus naïve candeur, la plus monumentale « Idée Fausse » !
Car, il est tout à fait vain de penser à « résorber le chômage » et il est tout à fait absurde d’espérer qu’on pourra l’empêcher de se produire à l’avenir et de se développer. C’est aussi absurde que de s’imaginer qu’on pourra, demain, empêcher la pluie de tomber !
Le chômage est une conséquence des applications grandissantes du « Progrès Technique » exactement comme la pluie est la conséquence de la condensation de la vapeur d’eau contenue dans les nuages.
On ne peut empêcher ces phénomènes de se produire quand existent les conditions qui les provoquent.
Dans le numéro de la « Grande Relève » de juillet dernier, André DUMAS a très judicieusement cité des passages qui sont essentiels dans l’oeuvre du grand savant et philosophe évolutionniste Pierre TEILHART DE CHARDIN, membre de l’Académie des sciences depuis 1950 et reconnu unanimement comme l’un -des plus éminents penseurs contemporains.
Dans « La place de l’homme dans la nature » (Seuil 1949) il écrivait : « ,Rien n’est plus injuste ni plus vain que de protester contre le chômage grandissant auquel nous conduit inexorablement la machine » et DUMAS extrait d’une autre de ses oeuvres « L’activation de l’énergie » (Seuil, 1947)  : « Je pense au phénomène du chômage qui inquiète tellement les économistes mais qui, pour un biologiste, est la chose la plus naturelle au monde ».
Comme on le voit ce « grand esprit contemporain » abonde dans le sens de Jacques DUBOIN qui a eu le mérite d’exprimer dans toute son oeuvre (avec toutes les preuves à l’appui) les mêmes thèses... mais avec au moins une décennie d’avance.
Nous avons tous ici adopté depuis toujours les conclusions de ces deux grands penseurs et nous sommes, comme eux, bien certains de cette « Vérité », de cette incontestable « Evidence » :
« Le progrès technique » - que rien ne pourra jamais endiguer - augmentant sans cesse « le coefficient de productivité  » de chaque travailleur sera, chaque jour davantage, générateur de chômage.
Et nous affirmons, comme une conséquence, que :
Aucune mesure, aucune décision gouvernementale, dans le Régime Economique Actuel, ne pourra jamais « résorber le chômage  » ni même l’empêcher d’augmenter.
Oui, c’est pour nous (et quelques rares économistes clairvoyants) une élémentaire « Evidence ».
Mais, nous vivons depuis bien longtemps dans une ère démente et paradoxale, instaurée par GISCARD D’ESTAING et BARRE :
L’ère des « Evidences Méconnues »
Ce qui m’inquiète le plus, me stupéfie et m’indigne est de voir se perpétuer cette ère depuis plus de quatre mois par M. Mauroy.
Et c’est très grave, car nous avons malheureusement pu constater à La « Grande Relève », que les Conseillers Economiques de nos dirigeants (et spécialement celui de notre Président) s’entêtent à méconnaître, avec un souverain mépris, les plus limpides de ces « Evidences  ». Comme incompréhension et aveuglément, ils pourraient « rendre des points » à M. BARRE.
N’ont-ils pas, gravées dans leur esprit depuis une récente émission de télévision, les images pourtant stupéfiantes de cette usine de sidérurgie japonaise entièrement automatisée qui, sous la surveillance de quelques dizaines d’ouvriers spécialisés, arrive à produire journellement une quantité d’acier utilisable pour l’industrie, supérieure à ce que produisaient un an plutôt des usines non automatisées où s’affairaient près d’un millier d’hommes ?
N’ont-il pas été convaincus en voyant plus récemment au journal télévisé, le reportage très court mais bien éloquent sur le fonctionnement d’une partie automatisée de la chaîne de montage de la nouvelle Renault 9 ?
C’était à n’en pas croire ses yeux.
La télévision devrait passer fréquemment ces deux reportages édifiants car il faut que le public tout entier - et, parmi ce public, tout spécialement les néfastes conseillers économiques de nos Grands Hommes Politiques qui n’ont pas encore compris la réalité du problème - il importe, dis-je, que tous les Français soient par cette répétition d’images incontestables, tout à fait convaincus avec nous que :
Aucune relance des affaires, aucun programme d’expansion ne peut aujourd’hui permettre de résorber le chômage, dans une proportion tant soit peu appréciable. Il se développera de plus en plus, quoi qu’on fasse, puisque le « Progrès Technique » ne peut cesser de faire progresser constamment le coefficient de productivité de chaque ouvrier...
En ce qui concerne l’utilisation des robots dans la grande industrie, l’article de P. SIMON nous confirme (dans la Grande Relève d’octobre) que l’industrie américaine qui en possède aujourd’hui 3 500 prévoit que son équipement arrivera en quelques années à atteindre le chiffre impressionnant de 14 000  ! Comment, après cela, ces « sourds-aveugles » dont je fais le procès, peuvent-ils encore prétendre que l’on peut trouver un moyen simple pour « Résorber le chômage  » ?
Etes-vous bien d’accord avec moi maintenant, quand j’affirmais plus haut que « vouloir Résorber le chômage » est une « idée fausse » ?

^


La Patrie ?

par A. CHANTRAINE
novembre 1981

Toutes les patries se ressemblent. La patrie est partagée en deux classes, la classe dominante et la classe dominée.
La classe dominante ne défend pas la patrie, elle défend l’argent. La classe dominée croit défendre la patrie, mais elle ne défend que l’argent de la classe dominante.
Le capitalisme n’a pas de patrie ; pourquoi le travailleur en aurait-il une ?

^


À qui profite l’épargne ?

par A. CHANTRAINE
novembre 1981

Les sociétés anonymes tuent la saine économie. En ’ effet, elles peuvent développer leurs affaires avec l’argent des autres sans aucun véritable contrôle. Une loi les y autorise.
Les épargnes des travailleurs sont ainsi à la disposition de quelques inconnus qui s’en servent pour faire n’importe quoi et vendre n’importe quoi à n’importe qui.
Cet argent fait grossir les profits au détriment des vrais producteurs.

^


Le théorème de Schmidt

par H. MULLER
novembre 1981

« Les profits d’aujourd’hui font les investissements de demain qui feront les emplois d’après demain ». Formule séduisante de nature à donner bonne conscience aux milieux patronaux et à laquelle se sont ralliés maints gouvernements libéraux.
La réalité est tout autre : les profits d’aujourd’hui font la grande bouffe immédiate. Ce qu’il en reste s’expatrie, s’investit dans la spéculation, dans les valeurs refuges et l’emploi fait tintin. Ce Schmidt est un farceur, seulement soucieux de justifier le profit et l’austérité imposée au plus grand nombre. Aussi les promesses visent-elles toujours le long terme. On cherche à faire prendre patience aux victimes d’une expansion sans fin appelant des investissements perpétuellement accrus, c’est-à-dire des privations quasi-éternelles, pendant que les nantis se remplissent la panse.

^


De l’or sous les roses

par P.-N. ARMAND
novembre 1981

LES vaincus du dernier Trafalgar électoral affirment que Mitterrand et ses équipiers seront impardonnables d’échouer, ayant en mains la totalité ces pouvoirs. Et d’énumérer  : Présidence de la République pour 7 ans ; majorité absolue à la Chambre ; puissance syndicale ouvrière à disposition ; en face, rien ou presque : leur simple opposition quasi symbolique.
Voyons de plus près. Le Président de la République n’a pas plus de pouvoirs que n’en disposait leur chef, de Gaulle. Plutôt moins, puisque Mitterrand ne se propose pas de violer la Constitution, comme le faisait de Gaulle sans se gêner, malgré les cris de « Forfaiture » lancés par un courageux Président de Sénat, Gaston Monnerville. Ce serait plutôt le contraire  : Mitterrand fait supprimer la « Cour de Sûreté de l’Etat », la meilleure trique contre les adversaires politiques (Canal, Bastien- Thierry, Salan, Zeller, Challe, autonomistes bretons, corses).
Majorité à l’Assemblée Nationale certes (pas au Sénat, mais tout autant que les Gaullistes d’antan. Ils y avaient conquis le glorieux titre de « Godillots du général  » pour voter, avec dextérité, le contraire de ce qu’ils avaient voté la veille. Il suffisait que leur Deux étoiles leur en donne l’ordre. Et, comme il était un spécialiste, de l’ordre et du contre-ordre, dans la même phrase, les godillots claquaient les talons en permanence.
On verra si les députés socialistes sont ces savates en votant cemain pour la réédification de la Cour de Sûreté de l’Etat, pour le maintien ces libérateurs soviétiques en Afghanistan, etc., à la requête de François.
Quant à la puissante syndicale ouvrière, elle est bien surfaite. Si l’on peut toujours faire éclater une grève (même par ces jaunes) la puissance du syndiqué (y compris celle d’un délégué) est bien pâlote face à celle de son patron ! Les patrons, en voilà une autre puissance ! Bien que minoritaires dans le pays, ils détiennent ces pouvoirs autrement persuasifs. Et de quel côté sont-ils, les patrons ?
Maladroitement, mais officiellement, le Patron ces Patrons, François Ceyrac (Administrateur chez Dreyfus, de Wendel, S.A. Fonderie de précision, Sidelor, Peugeot, etc.) est descendu dans l’arène pour prendre, au nom du Conseil National du Patronat, position en faveur de Valéry Giscard, dit d’Estaing.
Voici déjà ces opposants de marque. Mais ce n’est que la partie visible de l’iceberg. Il en est d’autres. Les « groupes de pression » existent : betteraviers, trusts industriels, alimentaires, de presse, de l’industrie lourde, du tourisme, ces alcools, pharmaceutiques, chimique, atomique, informatique, bancaires, etc. On en oublie et ces plus massifs. Il est prévu que quelques-uns perdront une part de leur liberté (sans pour autant perdre leur indemnisation). Peut-on soupçonner qu’ils se laisseront déposséder sans réagir ?
En surface, ils joueront la soumission. Dans l’ombre, ils ont déjà pris leurs dispositions, arrêté leur stratégie. La Trilatérale n’est pas faite de novices.
Car voilà bien où le pseudo raisonnement ces gaullistes et gaullo- giscardiens est mensonger. La gauche n’a pas TOUS les pouvoirs. Comme en 1936, elle a devant elle, invisible, insondable, mais tragiquement omniprésent, le « Mur d’argent ». Les « 200 familles » ne sont pas un mythe (1).
Ces gens de l’obscurité feutrée ont investi l’Etat dès avant de Gaulle, et ils l’ont conquis sous Giscard. Ils ont placé 10 000 employés, avec fonction de Conseillers d’Etat, Préfets, diplomates, officiers supérieurs, chefs ces grands services administratifs. On ne peut les reconnaître que lorsqu’ils partent à la retraite et ceviennent administrateurs, P.d.G. où directeurs chez Dassault, Borel, Trigano, Rothschild, Carrefour, BSN, Gervais-Danone, Pont-à-Mousson, Rhône-Poulenc, Hachette et autres bonnes compagnies.
Là est la toute puissance.
Comment expliquer autrement qu’un chef d’Etat étranger, tel Reagan, puisse se permettre de critiquer le choix de ministres français, désignés légalement par un Président français, régulièrement élu par les Français ? Ajoutant à ses propos déplacés ceux menaçants de ses adjoints ! Sachant que le sentimental n’a pas cours légal dans les relations inter nationales, force est d’admettre que ces menaces trouvent leur source dans les intérêts matériels froissés, dans notre pays, par l’expérience socialiste débutante.
Ces intérêts sont donc bien forts pour trouver audience, aussi vite, auprès du plus haut personnage de la première puissance de la planète. Cela démontre une solidarité efficace.
Cela démontre aussi la veulerie ces hommes écartés du Pouvoir. Ils se pavanent maintenant à la Télé, énonçant sentencieusement « Nous l’avions prévu, votre « Changement » ne plaît pas aux USA ». Eux, dont la litanie était de vouloir une politique nationale au seul service de la Nation, au premier coup de semonce, les voilà dans le camp de l’étranger. (Messmer, sincère ou habile, a condamné les propos américains).
Le Président de la République, l’Assemblée Nationale, le tiers du Sénat, les syndicats ouvriers et le Peuple Français peuvent se dresser quasi unanimement, contre le Bloc de l’or, ils n’ont pas gagné d’avance. L’Avenir est à la lutte.

(1) Lire « Les 200 familles au pouvoir » H. Coston 1977. Ed. DPF Chiré/Montreuil 86190 Vouillé.

^


Tempête sur les monnaies

par P. SIMON
novembre 1981

DEPUIS des mois, des remous considérables se produisent sur les marchés monétaires. Le phénomène le plus remarqué a sans doute été l’ascension vertigineuse du dollar, à la grande consternation des autres pays. On le sait, les échanges internationaux se règlent essentiellement en dollars et, si la valeur du billet vert monte, les factures s’alourdissent. Nous l’avons tous constaté plus d’une fois en passant chez le pompiste.
Pourquoi le dollar, si faible en janvier et en juillet 1980, où il ne valait guère que quatre de nos francs, s’est-il soudain redressé ? Le mérite, si mérite il y a, en revient à la politique monétaire des présidents Carter puis Reagan, le second ne faisant que renforcer considérablement les dispositifs mis en place par son prédécesseur. On en connaît le principe. Afin de freiner la création de monnaie par les banques, l’Etat impose des taux d’intérêts exorbitants qui atteignent et dépassent 20 %. L’entreprise ou le particulier qui a besoin d’argent pour quelques jours ou plus, paient des remboursements dissuasifs. On emprunte donc moins pour financer la production et les achats, donc l’économie se ralentit et le chômage se développe.
Ce qui fait le malheur des uns fait le bonheur des autres, c’est-àdire des spéculateurs à la recherche de bonnes affaires. Il y a de par le monde des capitaux flottants qui se déplacent rapidement d’un marché financier à un autre selon qu’il est plus avantageux d’acheter du dollar ou du mark, par exemple. Il est impossible d’en chiffrer le montant, mais les sommes qu’ils représentent sont colossales. On sait, par exemple, que le Koweit a confié plus de 7 milliards de dollars à des banques américaines pour qu’elles les fassent fructifier.
Les taux d’intérêt élevés pratiqués aux Etats-Unis constituaient donc une aubaine pour ces capitaux flottants rassurés par les déclarations du Président et de son équipe, promettant de ne pas modifier leur politique monétaire. Il y a quelques semaines, cependant, un reflux s’est produit. Devant le spectre d’une authentique récession s’installant aux Etats-Unis, les parlementaires ont manifesté leurs inquiétudes. On les comprend, leur réélection intervient en 1982 et l’électeur américain ne fait pas de cadeau. De plus, il y a de moins en moins de gens qui croient que le Président Reagan va ramener la prospérité dans le pays. D’où le désenchantement qui a poussé le gouvernement à lâcher un peu de lest et à laisser les taux d’intérêt baisser quelque peu. Il n’en a pas fallu davantage pour que les capitaux flottants se détournent du dollar et servent à acheter du mark ou de l’or dont les cours ont d’ailleurs monté. Si bien qu’en quelques jours le dollar a perdu près de 12 % de sa valeur.
Les investisseurs sont volages. Leur pactole s’en ira là où il peut le mieux se valoriser. En toute logique on ne peut leur reprocher d’agir ainsi. Qui regarderait sans réagir ses avoirs fondre au soleil de l’inflation ? Mais comment peut- on espérer construire des échanges internationaux sains si des soubresauts aussi terribles affectent les moyens de paiement ? Pourquoi placer tout son capital dans des entreprises qui produisent et donnent du travail, si on gagne plus et plus vite en jouant les monnaies les unes contre les autres  ?
Tant que les pays n’auront pas mis sur pied une politique monétaire raisonnable qui interdit une spéculation effrénée, l’économie mondiale sera malade, même très malade comme elle l’est actuellement. Pour financer l’expansion économique, on a créé partout des capitaux en quantités colossales qui doivent se placer quelque part sous peine de disparaître. Il semble peu probable qu’on les maîtrise par les moyens classiques. Le retour à l’équilibre n’est pas pour demain.

^


La vraie richesse et les parasites

par H. MULLER
novembre 1981

L’important est de produire pour consommer, pour équiper, pour entretenir l’outil de production et les infrastructures, assurer l’éducation et la culture. En conférant au, profit un rôle prépondérant en matière d’agencement de l’emploi et d’utilisation des moyens, en plaçant la production au service du profit, prioritairement, la règle du jeu capitaliste a conduit aux gaspillages, au malthusianisme, à la stérilisation de maintes virtualités en matière de recherches, à négliger la qualité, à combattre l’abondance.
On a donné à la richesse une interprétation pour le moins aberrante. Elle n’est synonyme ni de quantités ni, souvent, d’utilité. Transmutée en abstraction comptable, elle se mesure en droits à consommer que se disputent différentes parties prenantes exclusivement préoccupées de leur courir après et y consacrant la majorité de leurs activités.
Des nuées de parasites vivent ainsi du travail productif accompli par autrui, se bornant à manipuler l’argent. Deux tiers des personnes actives sont ainsi mobilisées au service de la circulation monétaire, leur agitation n’ayant d’autre finalité que de former revenus et profits en gaspillant emplois, énergie, matériaux et ressources naturelles.
S’enflamment pour justifier un pareil système, ceux-là auxquels une série de conventions portant sur les droits du capital accordent d’exorbitants privilèges, celui notamment de s’auto-rémunérer à travers les prix à des taux souvent abracadabrants, eu égard au temps passé et à la nature’’ ou à la qualification du service rendu.

^


Réponses (suite) à G. Krassovsky

De la responsabilité en économie distributive

par R. CARPENTIER
novembre 1981

...Comme G. Krassovsky, j’ai lu la brochure de Marcel Dieudonné  ; mais j’ai lu aussi tous les ouvrages de Jacques Duboin ; ce que ne semble pas avoir fait notre disert penseur. Car s’il l’eut fait, il n’eut certainement pas passé à côté de la merveilleuse théorie de l’Economie Distributive Il ne l’a pas comprise...
Il n’y a pas de raison pour qu’un individu soit vorace, insatiable dans le profit, et plus exigeant, dans une société d’Abondance. Ce malade-là serait l’exception et relèverait d’une anomalie mentale qu’il conviendrait de traiter afin qu’il ne fasse pas le mal autour de lui. Dans la société distributive - qui ne comportera plus de « goulags » psychiatriques, mûs par le profit - ses semblables s’efforceront d’expliquer à cet anormal l’inutilité de sa conduite égoïste. (Somme toute, la meilleure thérapeutique serait de le laisser tout seul percevoir sa part - son revenu social - ce qui le dissuaderait à la longue de ses exigences maladives, puisqu’il verrait qu’il ne manque de rien et qu’il pourrait satisfaire ses besoins à l’égal de tout le monde et même au-delà).
Grâce à la machine - la technologie - l’abondance des produits de consommation est possible. Donc la vie économique des individus n’est pas la ration, mais la suffisance de tous les besoins. Peut-on comprendre, dans ce cas, que l’humanité ne peut avoir que deux façons de se comporter : celle qui existe aujourd’hui et qui est l’inévitable appât du gain ; donc l’irresponsabilité. Et celle que la société distributive imprègnera d’elle-même aux humains dans la solidarité, la fraternité, parce que l’assurance des besoins satisfaits le déterminera.
Il est donc normal qu’en échange de la satisfaction des besoins, les hommes acceptent un Service Social pour assurer la pérennité de l’abondance, donc du bien être. Rien n’est changé dans l’activité créatrice des hommes, si ce n’est l’absence de profit, moteur de toutes les inégalités du régime capitaliste. La société distributive n’est pas la pagaille ni le désordre que d’aucuns supposent. L’existence même d’une société confirme une organisation. Il n’y a donc pas de motif pour qu’une personne, sous prétexte qu’elle est libre, ait des attitudes irréfléchies. Mais cette organisation, du fait même de l’égalité économique qu’impose l’abondance, ne sera plus hiérarchique comme aujourd’hui, mais décentralisée par des usages fédératifs, à la manière fonctionnelle du syndicalisme authentique... par exemple. Mais, M. Krassovsky a-t-il une idée sur la valeur de ces termes ? Il se place dans la conjoncture capitaliste pour raisonner et ne peut voir dans l’agissement des êtres que leur déterminisme en régime marchand. Il ne peut pas s’en libérer, ni se placer par la pensée dans le cadre d’une Société NON capitaliste. C’est le sentiment de l’injustice - et de plus maintenant, ce qui renforce mon idéal, la venue de la technologie - qui me fait sentir, rêver, désirer ardemment une société égalitaire, fraternelle, parce que réalisable ! La voit-il cette Justice ? Sent-il cette égalité entre les hommes  ? J’en doute car les arguments conservateurs qu’il avance et les exemples mésséants qu’il cite. Il ne peut se détacher des visions de possession ou d’avidité parce qu’imprégné de l’habitude de pensée de la culture capitaliste.
En résumé, je n’ai rien contre l’homme que j’estime pour avoir abordé ce sujet. Mais je suis résolument contre les déductions qu’il propulse, qu’il croit devoir soutenir qui font voir l’homme comme incapable de se conduire en responsable. Et cette RESPONSABILITE, qui ne peut exister en régime marchand, sera automatiquement la résultante de la société distributive parce que dans cette société différente le profit n’existe plus !

^


Dialogue

novembre 1981

M. Lucien Bigoureau, de Lyon, nous dit qu’à 81 ans il passé une merveilleuse retraite grâce à « l’économie distributive » qui lui procure une occupation morale idéale. Il répond à M. Krassovsky qui estime que si une économie distributive distribuait tout gratuitement, personne ne voudrait plus travailler. Il lui recommande la lecture de « Cent ans après  » d’E. Bellamy (1880) (lequel, entre autres avait prévu la carte de crédit) . C’est un dialogue entre deux personnages dons l’un est du XIXe siècle, l’autre du XXe.

- « Quelques hommes font, vous le savez bien, deux fois plus d’ouvrage que d’autres. Eh bien, ces ouvriers plus habiles sont-ils contents de rester au même niveau que les paresseux ?
- Comme nous exigeons absolument le même service de chacun, nul ne peut se plaindre d’injustice, répondit le docteur.
- Mais cela n’est pas possible, comment égaliser ainsi le travail quand il n’y a pas deux hommes avant exactement la même force  ?
- Rien de plus simple, il est convenu que chacun doit travailler de son mieux.
- Eh bien, si chacun travaille de son mieux le travail de certains dépasse de beaucoup le travail de certains autres.
- C’est vrai, dit le docteur, mais la quantité produite n’a rien à voir avec la question de mérite. Bien mériter... voilà la question morale ; or la quantité produite n’est que matérielle. Ce serait une logique bien extraordinaire que celle„ qui voudrait déterminer la question morale par la question matérielle. Faire son possible selon ses forces, selon ses moyens, c’est tout ce que le gouvernement demande ».

M. Bigoureau ne veut pas recopier tout l’ouvrage mais souhaite qu’après ce bref extrait, M. Krassovsky s’empressera d’acheter ce livre.

^


Question de temps

par J. MAILLOT
novembre 1981

RASSUREZ-VOUS, mon propos n’est pas de vous entraîner dans des considérations physiques ou métaphysiques sur les vastes problèmes que pose la Relativité même restreinte, mais plus prosaïquement sur le temps dont disposent ceux de nos camarades qui assurent la fabrication de notre mensuel.
Pour l’essentiel, il est rédigé et administré par un tout petit nombre qui y consacrent des heures prises non seulement sur le temps de repos, mais qui plus est, de sommeil !
C’est dire qu’il est de notre devoir de les aider et non d’alourdir leur besogne. C’est pourquoi je regrette que le « Courrier des lecteurs » fort intéressant en général, et qui constitue une preuve de vitalité, soit quelquefois abusivement utilisé par des correspondants enfonçant laborieusement des portes largement ouvertes depuis bien longtemps telles que «  ils ne travailleront plus » des bénéficiaires de l’esclavage et ensuite du servage ou encore « sans l’aiguillon du profit rien à espérer », fruit des conceptions mercantiles dont sont, hélas, depuis des siècles, imprégnés et pervertis les cerveaux des hommes.
C’est à une tout autre conception de la vie sociale que nous convie Jacques Duboin. Il faut le lire et le relire, et pour le moins avoir présents à l’esprit les points essentiels rappelés à chaque parution aux pages 2 et 4 de notre couverture. Faute de quoi les réponses à vos lettres ne pourront répéter le B.A. BA des prémisses de nos thèses.
Ne mettez pas nos rédacteurs dans cette bien pénible obligation qui n’est pas sans similitude avec le supplice quotidien et stérile d’un Sisyphe remontant inlassablement son rocher ou à celui des Danaïdes tentant consciencieusement de remplir un tonneau sans fond !
Cet exercice d’hydraulique appliquée me conduit tout naturellement à en évoquer un autre choisi par Georges Krassovski : une fuite d’eau dans une salle de bains, faute de pouvoir trouver un plombier, se transforme en une cataracte entraînant dans son déferlement le corps social tout entier ! Ce camarade devrait orienter son imagination débordante vers un sujet plus sérieux. Celui par exemple de la formation des prix, des mécanismes de détermination des besoins en économie distributive, études qui lui permettraient de fixer ses idées aussi bien que celles de nombreux lecteurs.
Notre ami Henri Muller qui s’est avec talent longuement penché sur ces questions et qui possède une documentation hors pair pourrait sans aucun doute, dans une correspondance particulière, lui en faire saisir les arcanes. Le condensé de ces échanges épistolaires pourrait alors fournir la matière à une belle série d’articles à paraître dans la Grande Relève.
Amis connus et inconnus, une fois encore, lisez et relisez Jacques Duboin. Lisez « Cent ans après » d’Ed. Bellamy qui il y a près d’un siècle réduisit déjà à néant les objections qui nous sont faites aujourd’hui. Et pour être au niveau des possibilités immenses que nous offrent sciences et techniques, faites de la « Troisième Vague  » de Topfler votre livre de chevet et pour l’amour de Dieu épargnez nous les poncifs éculés !
Et puisque j’invoque le Tout- Puissant, il convient également de convaincre les croyants de toutes religions, que la malédiction divine : « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front  » n’est plus de mise aujourd’hui ; encore que trop tôt, des petits malins aient biseauté les cartes pour en faire, en substituant un possessif à un autre, le « Tu gagneras MON pain à la sueur de TON front ».
Un autre très fidèle et très qualifié ami ne demanderait pas mieux, j’en suis certain, de faire sur ce plan le même effort que celui d’Henri Muller et de dégager de ces discussions sur le plan moral une synthèse à paraître dans nos colonnes, je pense à Marcel Dieudonné.
Le « Courrier des lecteurs » deviendra alors une fructueuse source d’enrichissement et d’approfondissement de notre doctrine. Redoublons d’efforts, les temps présents seront bientôt révolus. Amen.

P.S.- Nous devons nous faire entendre également par les divers groupements d’écologistes parce qu’ils comprennent enfin que leurs objectifs louables (frein à une croissance continue, diminution des pollutions de tous ordres, arrêt des gaspillages insensés de toutes industries conduisant à l’épuisement du sous-sol, au saccage des forêts et à la mort des océans) ne peuvent absolument pas être pris en considération dans le régime des « Prix-Salaires-Profits ».

^


Réussir ou disparaître

novembre 1981

« Le Groupe de Salariés pour l’E.D. inter-syndicalistes professionnels » de Marseille, sous la signature de Gérard LAFFORGUE, adresse une « Lettre ouverte » à F. MITTERRAND dont nous donnons ci-après de larges extraits :

« Dans l’ombre, pendant ces tristes années, des Français se sont réunis et ont travaillé. Ils ont réfléchi sur le rôle des dominants, de la hiérarchie sclérosante et étouffante et ont lutté dans des comités voulant abolir les pouvoirs qui servent à la répression et qui empêchent la recherche à la base, l’innovation et l’imagination féconde. Ils ont réfléchi sur l’ECONOMIE DE MARCHE qui ne laisse que deux voies : le capitalisme anti-égalitaire orienté vers le profit au détriment du plus grand nombre ou un pseudo-socialisme qui s’essouffle à vouloir gagner la gageure, s’il ne dissocie pas le revenu du travail, de faire du social sans moyens, à moins que ce ne soit dans la violence et la répression. LES THEORIES DE JACQUES DUBOIN ET DE L’ECONOMIE DISTRIBUTIVE, qui ont prévu et décrit depuis cinquante ans la crise générale du capitalisme moderne dont nous mesurons aujourd’hui les méfaits grandissants : montée incessante et parallèle du chômage et de l’inflation, conséquences inéluctables du développement de la science et des techniques, sont connues de la plupart de ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir, mais ont été occultées jusqu’à maintenant. Elles pourraient cependant ouvrir un champ nouveau et intéressant d’investigations. Ils ont aussi réfléchi sur le rôle de l’armée. Si l’on avait écouté Jaurès et les socialistes de 1914, on aurait probablement fait l’économie de deux guerres car une solution négociée avec les socialistes allemands aurait évité la guerre de 1914 et, sur fond de revanche du traité de Versailles et de crise économique qui amène la guerre comme la nuée amène l’orage, la montée du fascisme et du nazisme. Ils ont travaillé sur le nucléaire mal dominé et dangereux dans ses suites, sur la nécessité d’un progrès qui serve l’humanité au lieu de lui nuire.
Ils ont enfin travaillé sur le rôle à donner aux femmes, sur l’école et sur l’information.
Monsieur le Président, nous ne demandons qu’à participer à un véritable renouveau. Si nous ne sortons pas des sentiers battus, nous serons amenés à disparaître alors que nous recherchons un vrai changement de société. Alors, le 10 mai 1981 sera enfin ce « magnifique rêve » et le « rendez-vous de l’histoire ».

G.S.E.D.
11, rue St-Vincent de Paul
13004 MARSEILLE