Éditorial
IL se fout de nous, et depuis longtemps. Avant d’être Président
de la République, il était Ministre des Finances. Il nous
disait tous les ans que l’inflation ne dépasserait pas tant pour
cent. A la fin de chaque année, c’est le double qu’on avait !
Devenu Président, grâce aux voix des Commores et de Mayotte,
il a continué à bourrer le crâne des Françaises-Français
: l’inflation dépasse les 13 % par an (les prix ont
doublé en 7 ans), le chômage a été multiplié
par 4, sous son septennat, les faillites se sont accumulées*,
le déficit du commerce extérieur s’accroit, le pouvoir
d’achat des salariés diminue. Et c’est le même homme qui
a l’impudence de se présenter comme un homme nouveau.
Dans sa déclaration du 2 mars 1981, il a dit : « Le
Président de la République continuera sa tâche jusqu’au
bout, comme c’est son devoir. Le candidat s’en distinguera entièrement.
Je ne serai pas un Président-candidat, mais un citoyen- candidat
». Or, moi, simple citoyen, je me suis présenté
à la Maison de la Radio et de la Télévision, Quai
Kennedy, pour faire une déclaration en tant que candidat à
la Présidence de la République, eh bien, on m’a foutu
dehors ! Encore heureux qu’on ne m’ait pas fait interner dans un
hôpital psychiatrique !
Giscard nous dit encore : « Le Président ne peut
être l’homme d’un parti ». D’un parti politique, peut-être
pas, mais du parti des banques et des grandes industries, certainement.
Il n’y a qu’à voir d’où père, frères cousins,
enfants tirent leurs revenus.
Nous aimerions aussi savoir d’où le citoyen-candidat Giscard
tire l’argent nécessaire à sa campagne électorale
? Et comment il dispose des fichiers électoraux et des
préfets eux-mêmes ?
- C’est cet homme nouveau, qui, comme le dit son comité de soutien
« s’engage à ce que la France demeure une terre de
liberté : la patrie des Droits de l’homme »,
MAIS la France de V.G.E. n’accepte pas toutes les conditions de la Convention
Européenne des Droits de l’homme. En particulier, un simple citoyen
Français ne peut pas présenter un recours quelconque devant
la Cour de Justice Européenne.
- C’est « celui qui, sans fausses promesses, poursuit l’effort
qui a permis à la France de créer en sept ans plus d’emplois
que n’importe quel autre pays européen », MAIS au
1er janvier 1981, le chômage frappait 5,1% de la population active
en Allemagne et 7,5 en France. Le Royaume-Uni en est, il est vrai, à
9,3 %... mais on fera mieux si on laisse Giscard en place pour
un second mandat.
- C’est « celui qui a su, malgré la tempête-économique,
faire progresser notre pouvoir d’achat » : 23% pour
les Français, contre 16% pour les Allemands, 15% pour les Américains
et 13 % pour les Anglais, MAIS, comme le montre le deuxième
rapport du Centre d’Etudes des Revenus et des Coûts (1979), pour
payer leurs biens de consommation courante, les Allemands ont moins
à travailler que les Français et, d’une manière
générale, les salariés français ont un pouvoir
d’achat moins élevé que celui des Allemands.
- C’est « celui qui défend inlassablement la paix »
MAIS la France est devenue le troisième exportateur mondial d’armements,
le premier par tête d’habitant.
- C’est « celui qui n’oublie pas les pays les plus pauvres »,
MAIS la France ne consacre que 0,59% de son produit intérieur
brut à l’aide aux pays sous-développés et la plus
grande partie de cette aide (40 %) va aux Territoires et Départements
Français d’Outre - Mer clientèle électorale oblige
!
C’est encore V.G.E. qui se targue d’avoir réduit les inégalités.
En fait, le fossé entre les plus riches et les plus pauvres n’a
cessé de s’agrandir et l’inégalité des patrimoines
est encore plus considérable que celle des revenus : en
1977, 10 % des plus fortunés détenaient la moitié
du patrimoine national**.
Il a au moins défendu le Franc, dit-on. Même pas. De 1975
à 1980, le cours du Mark allemand a monté de 36 %
et la Livre anglaise de 23 %.
En un mot, Giscard a échoué sur toute la ligne. Il n’y
a guère que l’U.R.S.S. et les banques pour soutenir le contraire.
Alors n’hésitons pas ; renvoyons-le dans ses châteaux.
Ça fera un chômeur de plus, mais rassurez-vous, il n’est
pas dans le besoin.
Il pourra vivre sans travailler et ne pourra donc pas dire que l’économie
distributive est une utopie !
* De 1977 à 1980 le nombre des faillites d’entreprises industrielles
en France a augmenté de 70 %.
** Dans « Economie et Statistiques », n°98
de mars 1978.
LA jeunesse est actuellement plus désemparée que jamais.
Ce que l’on s’obstine encore à appeler la « crise »
économique lui laisse peu d’espoir en l’avenir ; sinon de
s’insérer dans la file des deux millions de chômeurs prévus
pour 1981.
Depuis longtemps, les Partis politiques ne prétendent plus remplacer
la société capitaliste par d’autres structures adaptées
au progrès technique. Leurs programmes - s’ils en ont un - ne
s’attaquent pas aux causes de cette « crise ».
Ils se proposent seulement d’en aménager les effets, en réformant
certains de leurs aspects trop inhumains.
Quant aux syndicats, la crainte du chômage modère leurs
actions qui restent ponctuelles. Leur principale préoccupation
est de conserver des emplois et d’occuper, le cas échéant,
les lieux de travail que le patronat ferme, faute de commandes. «
Du travail avant tout » ! « Sauvegardons
nos emplois ! » tels sont les slogans qui dominent toutes
les professions.
Il ne vient à l’idée de personne de reprendre la phrase
maîtresse de Jacques Duboin : « Quand on ne peut
plus payer les gens faute de travail, il faut les payer pour qu’ils
consomment ».
C’est partout le règne du « fric », de
la combine, des spéculations malhonnêtes, des scandales
en tous genres. On en est écoeuré, mais on ne sait comment
s’en sortir.
*
Devant cette situation, à quoi peut bien se raccrocher un jeune
? Il ne croit plus à rien et condamne mollement ceux qui
dévient vers la délinquance. Et cependant, ne pourrait-il
s’enthousiasmer pour défendre les thèses que présente
l’Economie Distributive ?
Elles sont pourtant simples à comprendre - plus que les combinaisons
politiciennes et les études sophistiquées des Economistes
plus ou moins distingués.
De plus en plus, les machines remplacent l’homme. En conséquence
le travail pourra de moins en moins permettre de vivre dans une société
où les possibilités de pléthore sont immenses.
Voilà le fond du problème économique et social
de notre temps. En préconisant un Revenu Social pour tous, Jacques
Duboin avait été un précurseur puisque, par le
truchement des indemnités diverses, le « droit à
la vie » est accordé aux plus nécessiteux.
Militer pour un Revenu Social généralisé devrait
pouvoir mobiliser toute la jeunesse, puisque les moyens de production
le permettent dès à présent.
Certes, il lui faudrait lutter contre cette « civilisation
du gain », si bien dénoncée par Marcel Dieudonné
dans son ouvrage « Que faire ? ». Mais ne
serait-ce pas apporter une moralisation dans la jungle économique
où, peu ou prou, nous sommes obligés de combattre ?
Et qui, plus que la jeunesse, pourrait apporter ce souffle idéaliste
qui manque à notre société ?
Reste ce que Jacques Duboin a dénommé un « Service
Social ». En réalité, il ne constituerait que
des prestations professionnelles, encore indispensables pour faire marcher
les machines - et les concevoir - et, surtout, pour répartir
les marchandises au gré des consommateurs. Que ces prestations
professionnelles (dues par tous les citoyens valides, en contre-partie
du Revenu Social servi à tout le monde, enfants compris) soient
gratuites, est un gros obstacle à faire franchir à nos
concitoyens.
Habitués à travailler uniquement pour vivre, conditionnés
par la civilisation qui place le profit et le gain comme seul moyen
de subsister, travailler gratuitement est actuellement inconcevable
pour nos esprits.
Cependant, lorsque nous serons placés dans des structures sociales
et économique nouvelles, les mentalités changeront.
Au reste, dans une courte période transitoire d’adaptation, avant
que l’abondance généralisée permette ce que les
vieux anarchistes appelaient « la prise au tas »,
un revenu complémentaire d’émulation pourrait, à
la rigueur, récompenser les plus méritants.
Il n’y a pas encore si longtemps, les syndicats n’avaient-ils pas pour
but la suppression du salariat ?
Jacques Duboin, là encore, n’a fait que reprendre ce que les
syndicats, englués aujourd’hui dans le système capitaliste,
avaient préconisé dès leur fondation. Ce n’était
peut-être pas possible il y a 50 ans, mais à présent
c’est concevable.
*
L’ensemble de ces transformations constitue cette véritable
Révolution à laquelle tous les jeunes devraient aspirer.
Il ne s’agit pas là de replâtrages, d’à peu près
réformistes, mais vraiment d’une nouvelle société
adaptée au progrès mécanique mais, et surtout,
aussi plus humaine.
En fait, ce serait le véritable socialisme, tel que ses penseurs
l’avaient conçu. Il ne pouvait être instauré dans
la rareté, qui dominait encore le monde jusqu’à la crise
de 1930 - dont le capitalisme n’est pas encore sorti et ne peut sortir
- mais à présent nous n’avons plus le choix.
Si nous acceptons que l’abondance (susceptible d’être créée
par l’emploi non limité artificiellement des machines) soit la
cause du mal-être des hommes, nous courons à la catastrophe.
Comment accepter cela ?
Il appartient aux Jeunes de le comprendre et de lutter avec nous, pour
l’instauration de cette Economie Distributive (d’aucuns la dénomment
Répartitive) qui, seule, peut apporter à tous la joie
de vivre.
« La guerre est un crime contre l’homme, mais plus encore contre la femme. »
Femme ! Si tu veux, tu peux créer
Dans ce monde une révolution.
Une révolution de beauté
Par ton amour et ta raison.Tu peux tout, parce qu’au fond de toi
Règne constamment la non-violence.
Et que la douceur de ta voix
Peut beaucoup par ton éloquence.Parce que ton corps a enfanté
Tu as mieux compris la souffrance.
Parce que ton coeur a tout donné,
Tu as ressenti l’espérance.Certes, tu comprends l’homme mieux que lui
Car tu l’as conservé en toi.
Dans son embryon il apprit
Tout l’alphabet des premiers pas.Femme, tu peux certainement changer
Cet homme qui ne sort que de toi.
Inculque-lui la vérité
C’est ta vocation, c’est ton droit.Femme ! tu dois faire comprendre à l’homme
Qu’il ne peut répandre le sang ;
Car tout ce sang qu’il verse, en somme,
Vient de ta vie, de tes enfants.J’aimerais que tu fasses en sorte,
Que tout petit, l’homme soit guidé
Vers un idéal qui le porte
A ne jamais te faire pleurer.
DEPUIS plusieurs décennies,nous ne cessons de dénoncerles
contradictions inhérentesà notre système économique
actuelet qui, mathématiquement, s’opposent à toute tentative
de replâtrage. La plus spectaculaire de cescontradictions est
la destructionsystématique des biens de consommation soi-disant
excédentairesdans un monde où les besoins vitaux sont
bien loin d’être satisfaits.
Mais il en existe d’autres, beaucoup plus subtiles ; elles obligent
nos dirigeants à pratiquer une vertigineuse fuite en avant sur
une corde raide. Essayons d’en analyser ensemble quelques-unes, de comprendre
les mécanismes vainement utilisés pour résoudre
ces quadratures du cercle, et de comparer ces mécanismes avec
les solutions possibles en économie des Besoins.
CHOMAGE - PRODUCTIVITE
On peut comparer les échanges internationaux à ces jeux
dans lesquels le perdant accumule les cartes inutiles, en l’occurence
les déficits. Il faut donc rester dans le peloton-de tête
et être compétitif, sous peine de voir les investissements
de productivité engendrer la diminution de l’emploi. Malheureusement
tous les pays sont soumis à la même contrainte et certains
d’entre eux, pour des causes diverses, nous ont allègrement doublé.
Notons d’ailleurs au passage que même si notre classement était
meilleur, la persistance d’un système mondial basé sur
la condamnation impitoyable à la misère des moins bien
armés ne peut qu’accumuler les germes de conflits avec extensions
en chaîne.
Nous sommes donc actuellement dans une situation de compromis entre
la sauvegarde de l’emploi et la reconversion de la production. Equipements
plus performants et recherches de secteurs chargés de promesses
d’avenir ne nous empêchent pourtant pas d’avoir 1 million et demi
de demandeurs d’emploi, en attendant mieux de l’aveu du Plan lui-même...
Et les mesures en faveur des chômeurs, ou les aides aux reconversions,
pèsent sur les coûts et nourrissent l’inflation.
CROISSANCE INTERNE OU EXTERNE
Stimuler la consommation intérieure est l’un des remèdes
le plus souvent préconisé par les partis d’opposition.
Comment ne pas admettre pourtant que cet accroissement entraîne
une augmentation (environ deux fois plus forte) du déficit de
la balance commerciale ?
On essaye donc de trouver un compromis par l’intermédiaire du
marché des changes, en tentant de conserver une monnaie stable
vis- à-vis des monnaies les plus utilisées dans le commerce
international. On y parvient plus ou moins bien en manipulant savamment
les taux d’intérêt, la gestion du crédit et des
emprunts extérieurs, etc... Mais nous restons à la merci
des innombrables magouilles politico- financières qui, par le
biais de la haute spéculation, brouillent totalement les cartes.
Que, toutes choses égales par ailleurs, nous soyions obligés
de souffrir un peu plus devant la pompe à essence parce que Reagan
succédant à Carter, les capitaux flottants font grimper
le dollar, illustre l’absurdité et la fragilité du système.
Alors, bien sûr, il faut exporter. Mais lâcher le grand
mot ne résout rien, car, si un taux de change fort, réduit
le coût des paiements des importations indispensables, il renchérit
le prix de nos produits et nuit à notre compétitivité,
donc à l’accroissement de nos exportations. C’est pourquoi, sur
une période à moyen terme, nous voyons alterner les rigueurs
monétaires avec des dévaluations plus ou moins réussies,
ou des déficits budgétaires volontairement acceptés,
entraînant les uns et les autres leur cortège de privations
inutiles pour le plus grand nombre, et de profits éhontés
pour les initiés.
CONSOMMATION INVESTISSEMENT
En économie de libre entreprise, personne n’investit sans escompter
de débouchés. Et, d’autre part, les sommes investies sont
automatiquement prélevées au détriment de la consommation.
On ne peut donc plus guère parler de libre choix entre jouissance
immédiate et jouissance différée, mais bien plutôt
d’une obligation de choix déchirant entre les restrictions imposées
au marché interne et les impératifs de la compétitivité
externe.
Les entreprises françaises, dans leur grande majorité,
sont totalement empêtrées dans cette contradiction qui
décourage les investissements en dépit de la liberté
des prix et de l’application toute relative des consignes de modération
des hausses nominales de salaires. Là encore, le compromis difficile
n’aboutit qu’à une strangulation de l’appareil productif par
le système financier, et même si l’on considère
qu’il s’agit là d’un moindre mal, il faut bien convenir du piètre
résultat de tant d’efforts d’intelligence gaspillés en
vain. Il est également indispensable d’avoir ces vérités
contradictoires bien présentes à l’esprit au moment où,
à l’occasion des élections présidentielles, chacun
va vous promettre monts et merveilles. Mais personne ne vous expliquera
comment pourront être tenues ces promesses sans échouer
sur les écueils au milieu desquels naviguent dangereusement,
les yeux bandés, nos dirigeants actuels. D’un bord à l’autre
de l’échiquier politique ces prometteurs ne peuvent être
que des inconscients ou des menteurs.
POUR EN SORTIR
Il en irait tout autrement pour qui accepterait de briser le cercle
infernal et d’instaurer l’économie des Besoins.
Dans ce nouveau cadre, en effet, plus de contradiction entre chômage
et productivité, ni entre investissement et consommation puisque
la monnaie distributive gagée sur la capacité productive,
permet d’assurer le Revenu social sans peser sur les prix de revient.
Assurées de leurs débouchés internes, les entreprises
peuvent obéir sans réticence aux orientations données
par les consommateurs, et accroître au maximum les parts de gâteau
sans craindre d’excédents, même si ces gâteaux sont
confectionnés avec de moins en moins d’intervention humaine.
Les seules limitations concevables seront celles consécutives
à la consommation d’énergie, mais n’oublions pas la masse
de manoeuvre considérable dégagée par la suppression
des gaspillages et des fabrications inutiles.
De même, sur le plan du commerce extérieur, le pays qui
adoptera le premier une économie des Besoins prendra, par le
libre épanouissement de son appareil producteur, un tel avantage
sur ses concurrents que ces derniers n’auront d’autre solution que de
l’anéantir militairement dans les plus brefs délais (avec
tous les risques de riposte) ou, plus raisonnablement, d’adopter le
même système. Ce qui constitue d’ailleurs la seule chance
de réussite d’un début de désarmement mondial,
inconcevable dans l’actuel système.
Reste pourtant une interrogation, d’importance capitale. Dans quelle
mesure les hommes responsables de la production continueront-ils à
déployer d’incessants efforts d’études et de recherches
pour perfectionner leurs produits, pour en imaginer de nouveaux, pour
économiser l’énergie et la peine des hommes, s’ils ne
sont plus du jour au lendemain, stimulés par l’aiguillon du Profit
?
Aucun précédent, aucune expérience concrète
ne permettent actuellement de répondre à cette interrogation,
encore que les résultats obtenus par les quelques essais de société
égalitariste ébauchés ça et là n’incitent
guère à l’optimisme béat. Sans doute ces essais
ont-ils été tentés dans des pays n’ayant pas encore
atteint un niveau de développement suffisant pour en tirer des
conclusions définitives. Mais c’est incontestablement dans ce
domaine qu’une étude approfondie, objective, et sans passion,
d’éventuelles mesures de transition, prend toute son importance.
Pour suivre la proposition de J.-M., largement acceptée par nos lecteurs, de prendre leur plus belle plume et écrire aux candidats, voici ce mois-ci une proposition de
Comité National de soutien à la candidature de J Chirac, 7, rue de Tilsitt, Paris-17e.
« Impressionné par vos affiches, où, sous
votre visage énergique est proclamé : « Un
espoir pour les Français » j’ai pris connaissance
de votre programme qui figure sur de larges surfaces dans les quotidiens.
Hélas, je suis déçu. Renforcer et moderniser la
capacité de Défense. N’est-ce pas devoir augmenter la
fiscalité et pour se défendre contre qui ? Vous ne désignez
pas notre prochain ennemi héréditaire !
Il faut rétablir l’équilibre des Pouvoirs, Très
bien. C’est le principe de Montesquieu (L’esprit des lois). Le Législatif
fait la loi. L’exécutif l’applique. Le Judiciaire contrôle.
Mais n’est-ce pas celui dont vous vous réclamer (avec M. Debré),
le général de Gaulle, qui a ignoré le Sénat,
diminué la Chambre, abaissé la Magistrature (tribunaux
d’exception. etc.) ? Rétablir la séparation des Pouvoirs
serait renier le général.
Se libérer du corset bureaucratique. C’est un peu la tarte à
la crème des candidats. Mais, en ce qui vous concerne, c’est
assez inattendu, puisque pendant tout le temps où vous étiez
Premier Ministre, nous n’avons remarqué aucune amélioration
sur ce point.
La justice fiscale sera le premier atout de la réconciliation.
Diminuer les impôts des humbles, c’est augmenter ceux des possédants,
c’est-à-dire des puissants. Se laisseront-ils faire ? N’est-ce
pas votre Parti qui a refusé de voter l’impôt sur la fortune
?
Une vraie participation proposée à tous les travailleurs.
Cela intéresse de moins en moins d’individus, puisque de plus
en plus ils sont sans emploi ! Et vous ne proposez aucune participation
aux machines, aux robots, à l’informatique, à la bureaumatique
qui les remplacent à moindres frais ?
Le référendum a été abandonné. C’est
que le dernier avait laissé M. Pompidou assez amer. Il s’agissait
en réalité de plébiscite et non de referendum (comme
en Suisse). La preuve, le général de Gaulle au lieu de
renoncer à son projet réformant le Sénat et déconcentrant
les Provinces, a mis la clef sous la porte.
Le fléau du chômage s’étend. L’inflation rançonne
les familles. C’est exact. Votre solution ? Pourquoi nous la cacher.
N’en n’auriez-vous pas ? Prenez alors celle offerte par l’Economie
distributive, dont j’annexe la documentation à la présente.
Cette conception, à l’indéniable esprit novateur, est
loin des « répétions usées conservatrices
» (que vous dénoncez judicieusement). Elle créera
l’enthousiasme de la masse électorale, qui comprend, incontestablement,
plus de déshérités que de « nantis ».
Je vous prie de croire, monsieur, etc.
Le consommateur paiera
La loi Royer a été votée en 1974 pour rétablir,
selon son auteur, l’équilibre économique, fiscal, social
et même éducatif entre les petits commerçants et
les magasins à grande surface.
7 ans après, une enquête du « Matin »
révèle que des autorisations d’ouverture ont encore lieu
grâce à un trafic d’influences s’exerçant tant au
niveau local qu’au niveau national..., qui a pour effet d’augmenter
les prix de vente au consommateur !
-« o »-
COMPTES ET CONTES DU REGIME
L’industrie française à l’encan
(suite)
Construite il y a deux ans grâce à des emprunts souscrits
par la commune et garantis par le département du Morbihan, la
tréfilerie de Saint Armel, à Ploërmel, est fermée
depuis octobre 1980 (chômage technique de 60 employés).
Le groupe de Saint-Urbain (5 usines, plus de 1 000 personnes, 260 millions
de chiffre d’affaires) qui exploitait cette usine par l’intermédiaire
de son holding, la Sté Française de forge et de métallurgie,
mais qui menait le groupe à l’abîme après une dépense
de 25 milliards de francs, recherche un partenaire ou un acquéreur.
S’il se présente, ce dernier pourra certainement obtenir du «
libéralisme nucléaire » une subvention ou des
primes de décentralisation.
-« o »-
Le redéploiement industriel mondial
(suite)
L’hyper-centralisation du Pouvoir a permis à la Sté Française
MATRA et ses alliés d’obtenir début 1980 un contrat pour
l’équipement en automatismes de champs pétroliers à
ABOU DHABI avec des produits de la société américaine
HYDRILL, les services et la maintenance étant assurés
par la filiale locale de la société britannique PLESSEY.
La société MATRA prospère, s’étend et prend
des participations grâce aux armements et aux exportations d’armements
avec l’appui des « fonctionnaires vendeurs d’armes ».
(Déclaration d’un ancien haut fonctionnaire au journal «
Le Monde », 13 janvier 1981).
AU lendemain de son élection, un président de la République,
dont j’ai oublié le nom - mais ça va me revenir - à
peine installé faubourg St-Honoré et histoire de montrer
au bon peuple de France qu’il ne s’était pas fait élire
pour inaugurer des chrysanthèmes, s’avisa un beau matin, toutes
affaires cessantes, d’aller faire une virée dans les prisons
pour serrer la paluche des truands, leur demander si la soupe est bonne
et leur montrer ce que c’est que le libéralisme avancé.
J’ignore quel goût avait la soupe à l’époque, mais
ce geste spectaculaire, et d’autant plus gratuit que les taulards ne
votent pas, n’avait pas valu à l’illustre visiteur la reconnaissance
éternelle des intéressés. Au contraire. Cela avait
fait grincer les dents dans les Q.H.S. Et rigoler dans les chaumières.
Les gens sont ingrats.
Le président n’est jamais retourné dans les prisons. Il
a tant de choses à faire, cet homme. Résultat : je
ne sais pas si la soupe était bonne, mais ça ne s’est
pas amélioré. Et depuis que M. Alain Peyrefitte s’est
mêlé de mettre les truands au pas en appliquant la politique
de la main tendue, mais avec une matraque au bout, c’est la grogne.
Voilà que les pensionnaires de ces hôtels trois-étoiles,
dits Quartiers de Haute Sécurité, à Fresnes, entreprennent
la grève de la faim. Pourquoi ? Parce qu’ils voudraient
bien savoir au juste quelle est la politique du gouvernement en matière
de justice ; celle de la main tendue ou celle de la trique ?
Je comprends que le président soit indécis et même
cruellement déchiré comme lorsqu’il doit exercer son droit
de grâce, lui qui est enclin par nature à la clémence.
Seulement la clémence n’est pas une vertu politique, à
moins de s’appeler Auguste, et il faut regarder les choses en face.
Selon les dernières statistiques de la délinquance il
y a, en France, 40 000 personnes pour 20 000 places dans les prisons.
40 000 pensionnaires qui, même si la soupe est dégueulasse,
coûtent cher à nourrir. La clémence, alliée
au bon sens et à l’esprit d’économie, voudrait que l’on
libère le plus rapidement possible les détenus pour soulager
le budget de la justice. Erreur. A cette solution de facilité
un homme politique digne de ce nom doit préférer la rigueur.
Pas de pitié pour les truands. Pas de fausse sensibilité
Au trou ! Jusqu’à perpète...
De bonnes âmes vont m’objecter que les prisons étant déjà
pleines, voire surchargées, les fours crématoires, avec
la crise du pétrole, hors de prix, et la Sibérie un peu
loin, qu’allons-nous faire de tous ces pensionnaires encombrants ?
Où les mettre ?.. Où ? Mais... dans les nouvelles
prisons bien grillagées qu’il va falloir faire construire à
grand renfort de béton armé et de miradors ! Une
occasion inespérée pour faire démarrer le bâtiment
- quand le bâtiment va tout va -, relancer les affaires, juguler
l’inflation, créer des emplois et rendre le sourire à
nos économistes patentés.
Alors, qu’est-ce qu’on attend ? Qu’il y ait 3 millions de chômeurs,
ou que Raymond Barre ait pris sa retraite ?
Au début de son règne un président de la République,
dont j’ai oublié le nom, déclarait avec solennité
- c’était en 1974 - dans un bref moment de lucidité :
« Le monde est malheureux. Il est malheureux parce qu’il
ne sait pas où il va. Et parce qu’il devine que s’il le savait
ce serait pour découvrir qu’il va à la catastrophe. »
Il y a sept ans de cela... Mais ça me revient, je vous l’avais
dit, ce président, le même que le visiteur des prisonniers,
c’était Giscard. Je ne voudrais pas, à la veille, peut-être,
d’un second septennat, le décourager. Lui dire brutalement que
ça va encore plus mal aujourd’hui qu’en 1974 serait cruel. Il
nous reste quand même un dernier espoir. Et cet espoir, puisque
toutes les doctrines économiques - le libéralisme avancé,
devenu le libéralisme faisandé, y compris - ont fait faillite,
et en attendant le socialisme distributif auquel il faudra bien venir
un jour, c’est l’Homme providentiel qui le porte, celui que la France
sait toujours trouver aux heures les plus sombres de son histoire.
Celui qui, avec plusieurs lustres d’avance, a su exprimer dans un brillant
raccourci la pensée de Giscard d’Estaing par ces mots devenus
historiques : « On ne sait pas où on va mais
on y va », cet homme pourrait aujourd’hui remplacer avantageusement
Raymond Barre décidément un peu fatigué, et devenir
le Sauveur que la France attend.
Malheureusement il est mort.
Il s’appelait Pierre Dac.
Mourir de faim et de froid à cause du chômage, c’est pour la police une mort naturelle : licencié par Peugeot en juillet 1979, un jeune homme de 25 ans a été découvert mort de faim et de froid dans un hangar qui lui servait d’abri. Il ne pesait plus qu’une quarantaine de kilos. C’est un huissier qui a découvert son corps en venant lui notifier une citation à comparaître devant le tribunal. L’enquête de police a conclu « mort naturelle ».
*
A Blois, c’est un jeune père de famille de 25 ans qui s’est donné la mort en se tirant un coup de carabine en plein coeur. Il était au chômage depuis huit mois et, venant de perdre son indemnité, il n’avait plus aucune ressource.
*
Mais tout cela n’est que péripétie subalterne : Giscard s’occupe activement de résoudre le problème de l’emploi pour les jeunes. Après tout, ils n’avaient qu’à attendre un peu, non ?
*
La C.G.T. a organisé une grande manifestation pour défendre l’industrie automobile française. Entre autres arguments, elle soutient que le parc automobile français a six ans d’âge et doit donc être renouvelé. Ne vaudrait-il pas mieux construire des voitures qui durent plus longtemps ? Au même moment, G. Marchais déclarait qu’il faut s’attaquer avec rigueur à l’élimination de tous les gâchis du système actuel : gaspillage de matières premières, etc... La C.G.T. donne l’exemple.
*
Les Américains sont de plus en plus mécontents de la
politique japonaise d’exportations d’automobiles et de moyens de défense.
En effet, les divergences d’intérêt des deux pays restent
de taille et menacent même de dégénérer en
crise politique. Les pressions en faveur de mesures protectionnistes
s’accroissent et leur mise en place paraît inévitable.
(Les Japonais occupent près de 25 % du marché automobile
américain). En 1980, l’industrie américaine a licencié
plus de 200 000 ouvriers sur un total de 700 000 pendant que les Japonais
vendaient 2,4 millions de voitures et de camions aux U.S.A. Certains
hommes politiques et dirigeants syndicaux poussent le gouvernement à
adopter une législation limitant les importations de voitures
japonaises à un niveau acceptable. Le problème risque
d’être d’autant plus difficile, souligne le correspondant du «
Monde » à Tokyo, qu’au Japon, comme sur les marchés
européens, les fabricants sont confrontés à une
« saturation du marché intérieur »,
poussent leurs exportations et cherchent à retarder l’ouverture
de négociations qui les limiteraient.
Autre point de friction américano-japonais : l’effort de
défense du gouvernement japonais, qui n’a prévu que 7,61 %
d’augmentation des crédits correspondants, alors que les U.S.
considéraient qu’ils devaient au minimum en prévoir 9,7 %.
Le chef du gouvernement japonais, M. Susuki, affirme qu’il ne faut pas
s’attendre à voir le Japon assurer un rôle militaire dans
les relations internationales et qu’il reste très attaché
à sa politique antimilitariste et antinucléaire :
« J’ai l’intention de dire franchement au Président
Reagan que le Japon, nation pacifique, contribue à la promotion
de la paix internationale par des mesures d’aides économiques
et technologiques », vient-il de déclarer.
*
L’automobile aura pourtant une nouvelle jeunesse. Mais après
1990 et grâce à l’hydrogène. C’est ce que nous dit
la revue « Energies » du 16 janvier 1981 :
« Les progrès de la technologie permettant d’utiliser
l’hydrogène comme combustible pour les transports, laissent penser
que d’ici dix à quinze ans, les voitures pourront rouler à
l’hydrogène. Il est même probable que la première
génération sera commercialement disponible d’ici 1990.
Le problème le plus important est celui du stockage qui doit
être performant et sûr. Le principe dit « de
l’éponge » a été retenu : il consiste
à stocker l’hydrogène dans un métal éponge
qui puisse le restituer à volonté. Une des éponges
les plus intéressantes est constituée par un mélange
de magnésium et de 10 % de lanthane-nickel. Le stockage
de l’hydrogène à bord des véhicules pourrait se
faire en utilisant à la place du réservoir d’essence un
réservoir hermétique rempli de poudre métallique
absorbant l’hydrogène insufflé et le restituant au fur
et à mesure des
besoins.
*
En attendant, les pays arabes producteurs de pétrole ne savent pas quoi faire de leurs excédents de dollars. Alors ils en prêtent à tout le monde : l’agence monétaire de l’Arabie Saoudite prête discrètement des milliards de dollars à I.T.T., I.B.M., Dow Chemical... Les Kowétiens détiennent pratiquement 5 % du capital des vingt premières banques américaines, un pourcentage très important du capital d’Eastern Airlines et de très gros paquets d’actions de Exxon, Texaco, Getty Oil, Mobil... La Lybie possède 10 % du capital de Fiat ; les banques arabes ont de très grosses participations dans les industries de pointe japonaises. Les actifs de l’O.P.E.P., au total et en milliards de dollars, sont passés de 7 en 1963 à 100 en 1975, 160 en 1978, 343 en 1980. Les estimations prévoient 450 en 1981, 600 en 1982, ...plus de 1 000 en 1985. Autrement dit, les pays de l’O.P.E.P. sont en train de créer un nouveau système bancaire international qui leur facilitera la prise de contrôle des ressources financières mondiales d’ici à 1990.
EN septembre 1914, coup de tonnerre sur l’Europe en fièvre !
L’armée allemande, le 2 août, avait ouvert les hostilités,
avançant irrésistiblement sur Paris, bousculant toutes
les armées belges, luxembourgeoises, anglaises, françaises,
qui cherchaient à’ s’opposer à elle. Sur la Marne, cessant
de reculer, le Général Joffre faisait volte face et battait
les armées du Kaiser, leur faisant rebrousser chemin sur le quart
du territoire conquis.
Le 25 août 1976. Coup de tonnerre sur l’Europe. En pleine paix,
sans la moindre provocation étrangère, sans risque externe,
JOFFRE BIS est bombardé « Premier Ministre ».
Inconnu la veille, il a en poche sa carte de « Membre de
la Trilatérale » et ça suffit. On va voir
ce que l’on va voir.
Pour mesurer la victoire de Raymond, on va utiliser la métrologie
du système lui-même : les monnaies. Ainsi ne nous
accusera-t-on pas de tricherie.
Qu’observons-nous, capitaine ?
Le Général Raymond Joffre a grignoté de l’Italien,
de l’Espagnol, du Danois, du Suédois et même du Canadien.
Leurs devises respectives tombant, entre le 25 août 1976 et ce
jourd’hui (2-2-81), la Lire de 0,06 à 0,05 - la Peseta de 0,07
à 0,05 - la Couronne danoise de 0,80 à 0,75 - la Couronne
suédoise de 1,09 à 1,07 - le dollar canadien de 5 à
4,11. Tout ceci en francs français naturellement. Minces victoires
(sauf pour le dernier) mais positives quand même.
Hélas, rien ne va plus avec les grognards sérieux. Là,
Raymond Bourbaki prend la pâtée, avec des marges autrement
sensibles. Ça monte : Couronne norvégienne 0,87 à
0,97 - Franc belge 1,24 à 1,43 - Florin 1,78 à 2,12 -
Mark 1,91 à 2,30 (un malade bien portant) - Franc suisse 1,97
à 2,54 - Livre 8,76 à 11,25.
Match nul avec le Dollar US : 4,93 en 1976 et 4,93 en 1981.
Quant au Yen, à 2,41 F c’est une cible hors de portée
du pitaine qui, de dépit, n’en parle jamais.
On dira, les monnaies, ça va, ça vient. Un jour en haut,
un jour en
bas. D’accord. Mais ce n’est pas nous qui avons inventé le mètre-
caoutchouc pour mesurer la richesse ! Alors, prenons l’or pour
référence.
Toujours la même date, 1976, arrivée du célèbre
Pas Peur Camembert. La veille de son arrivée Or fin, kilo en
barre 19 200 F, ce jour 89 700 F. Le même en lingot 19 070 F,
actuellement 89 995 F. Le Napoléon avant : 226 F, après
899 F.
Et ce n’est pas fini. Les victoires de Babar ne se termineront qu’avec
son mandat (Merci, pour lui,’ il est grassouillet, comme son proprio).
Encore quelques victoires comme celles-là et on est foutu. Enfin,
ne soyons pas méchant et souhaitons que pour son coffre particulier,
le Général Babarre ait eu plus de perspicacité
que pour sa « Boulitique » économique et
qu’il ait su faire parvenir quelques kilos jaunes (en Raymond barre
ou en lingot) au Liechtenstein où il a ses aises.
« L’extinction d’une espèce peut avoir un effet direct sur notre vie quotidienne. Dans le monde entier, on consomme de plus en plus de produits alimentaires ou pharmaceutiques et l’industrie utilise de plus en plus de matières tirées des espèces animales et végétales des forêts tropicales. Les réserves que constituent ces espèces peuvent être rangées parmi les matières premières les plus précieuses pour la société. Toute réduction de la diversité de nos ressources limite notre capacité à réagir aux nouveaux problèmes qui se posent à nous. » (National Academy of Sciences, USA).
UN TRESOR DILAPIDE
Les forêts tropicales commencent à disparaître.
Du Zaïre au Brésil, de l’Indonésie au Guatemala,
les fragiles écosystèmes tropicaux qui font vivre peut-être
les deux tiers des 4,5 millions d’espèces animales et végétales
de la planète sont soumis au massacre. Au nom du progrès,
l’humanité passe au bulldozer, inonde, abat et brûle un
vaste trésor scientifique et technologique. Ce faisant, on est
peut-être en train de faire disparaître définitivement
les réponses aux problèmes mêmes qui poussent les
hommes à cette destruction sans précédent de l’environnement.
Le président de la Commission de biologie tropicale de la National
Academy of Sciences déclare : Plus de 20 hectares de forêt
tropicale sont défrichés chaque minute, ce qui fait environ
11 millions d’hectares par an... L’écharpe de forêts tropicales
qui autrefois ceignait la terre entre les tropiques du Cancer et du
Capricorne a été ramenée de 41 millions de kilomètres
carrés à 23 millions. Sous la poussée formidable
des humains en quête de nourriture et d’énergie, dont le
nombre va doubler d’ici l’an 2000, la destruction de ce qui reste sera
pratiquement achevée dans 50 ans. »
LA FIN DES ESPECES
Les espèces s’éteignent rapidement. Selon un écologiste
du Kenya, le monde perd une espèce par jour et, d’ici la fin
du siècle, la population du globe sera peut-être bien réduite
au rythme quotidien de cent espèces. Les espèces animales
et végétales disparues sont d’ailleurs souvent remplacées
par des espèces intelligentes et opportunistes telles que les
mauvaises herbes, les rats, la mouche domestique et les moineaux jugés
inutiles.
Près de la moitié des forêts tropicales d’Afrique
a été consommée. En Inde, au Sri Lanka et en Birmanie,
la proportion atteint les deux-tiers Selon certains experts il n’y aura
plus de forêts à Madagascar, aux Philippines et en Malaisie
dans 10 ou 20 ans.
Les responsables de ce pillage ne sont pas seulement les exploitants
en quête de bois, de terres cultiver ou de pâturages mais,
en proportion égale, les populations pauvres et mal nourries
qui cherchent désespérément les terrains qui vont
leur fournir de quoi se nourrir, faire chauffer leurs aliments et se
procurer un peu d’argent. Venus des grands centres surpeuplés,
ignorant les techniques agricoles, ces nouveaux arrivants adoptent des
méthodes intensives qui épuisent le soi et ne permettent
pas à la forêt de se régénérer.
En agissant ainsi, ces populations ne résolvent leurs problèmes
qu’à très court terme et sont lancées dans une
espèce de fuite en avant. Le malheur est grand aussi pour la
planète entière car les espèces végétales
de la forêt tropicale recèlent, selon les experts, des
trésors de substances utiles comme les gommes, le latex, les
résines, les huiles. Certaines sont utilisées par les
Indiens comme contraceptifs, d’autres ont la vertu de repousser les
insectes. Quant aux possibilités offertes à l’industrie
pharmaceutique elles sont très prometteuses. C’est ainsi que
la pervenche de Madagascar a déjà donné des résultats
dans le traitement de la leucémie.
L’ESPOIR
Une toute autre attitude à l’égard de la forêt
doit être possible puisque les anciens Mayas du Yucatan faisaient
vivre peut-être trois millions de personnes dans une forêt
tropicale aujourd’hui dépeuplée. Le tout est de savoir
tirer parti des énormes ressources qu’offre la forêt en
elle-même. Les protéines du fruit de l’arbre à pain
sont supérieures à celles du maïs ou du manioc et
la récolte peut atteindre sept tonnes à l’hectare. Les
Indiens de l’Etat de Chiapas au Mexique tirent de la forêt 80
variétés de plantes alimentaires ainsi que du poisson.
C’est donc vers les aborigènes qu’il faut se tourner pour apprendre
un domaine que les autres populations ignorent et saccagent.
Sans doute, il y a là de quoi stimuler l’ingéniosité
(et l’humilité) des gouvernements. Puissent-ils se pencher rapidement
sur ces graves problèmes.
CETTE fois le jeu est bien lancé, le départ pour la course
présidentielle est donné. Et les électeurs n’ont
aucune illusion à se faire. Se retrouveront en tête après
le premier tour nos quatre grands et sans doute dans l’ordre numérique
des voix obtenues : Giscard, Mitterand, Marchais, Chirac. De toute
façon, l’ordre importe peu et au second tour ce sera le match
au sommet, selon toute vraisemblance, entre Giscard et Mitterand.
A moins que...
Car s’il ne fait aucun doute de voir Mitterand représenter ce
qu’il est convenu d’appeler « la gauche », par
contre, de l’autre côté, rien n’est encore joué.
En fait, la situation intérieure et extérieure est telle
dans les domaines sociaux, financiers et économiques, que l’on
peut penser à juste titre que l’enjeu de la partie est une belle
gamelle à ramasser et qu’elle ne peut être que celle que
l’on souhaiterait voir prendre à son pire ennemi.
Considérée en elle-même, cette élection présidentielle
française n’a pas dans le contexte international actuel une importance
primordiale. Les ficelles de l’économie et des finances du monde
sont tirées, depuis belle lurette, par un symposium de têtes
choisies pour lesquelles les nations, en tant que telles, n’existent
déjà plus. Et l’on ne peut que considérer avec
une ironique dérision les contorsions auxquelles se croient obligés
de se livrer nos candidats pour essayer de rendre encore plus crédible
et payant le mythe de l’indépendance de la France.
Car les têtes citées plus avant ont réussi à
instaurer, dans l’ensemble des relations internationales, un tel désordre,
que ce soit en matière d’échanges commerciaux, techniques
ou culturels, ou en matière de monnaie et de rapports financiers,
que ce désordre interfère dramatiquement dans la vie intérieure
de tous les pays.
Ah ! comme il est beau Michel Debré lorsqu’il prétend
que notre pays a les moyens de se faire respecter tous azimuts. Comme
il nous prend aux tripes le fier Chirac quand il en rajoute sur son
compère dans le même sujet. Comme il sait nous toucher
du côté du coeur avec son projet de suppression de l’impôt
sur le revenu et de la taxe professionnelle ! (en se gardant bien
toutefois de nous préciser comment il assurerait, dans ces conditions,
l’équilibre budgétaire national).
Mais, par contre, comme il nous prend bien pour ces animaux chers au
seul grand général de notre histoire contemporaine, lorsqu’il
envisage, en accord avec l’ineffable Rueff, et ce, pour donner à
la monnaie une valeur stable et significative, de rattacher cette dernière
à l’étalon-or ! Au moment même où l’exemple
du pétrole démontre tous les jours les dangers présentés
par une matière de base dont tous les pays n’ont pas la même
disposition, la France aurait bonne mine face à l’Afrique du
Sud et à l’URSS, malgré les réserves de la Banque
de France et des bas de laine des Français !
Mais c’est surtout le non-sens, sinon l’absurdité, d’une telle
opération qui frappe les esprits réfléchis, alors
que la monnaie, bien au contraire, devrait s’adapter’ à la révolution
économique et sociale en cours, pour ne plus être que l’élément
facilitant la répartition des produits, des biens et des services
entre les consommateurs. Lui rendre un rôle restrictif et sélectif,
rôle qu’elle a dû abandonner depuis longtemps par la force
des choses, constituerait une régression invraisemblable et insupportable.
Du côté de la gauche, le « suspense »
est moindre, car les jeux, de toute évidence, y sont faits depuis
longtemps.
Mitterand est, par la volonté de Moscou, le candidat du 2e tour.
Il n’a pas le choix et Marchais joue sur le velours, car il gagne, quelque
soit le résultat, et Moscou avec lui.
Si Mitterand est élu, la gamelle qui lui écherra sera
non seulement celle que la situation économique et financière
internationale lui réserve, mais, sur le plan intérieur,
ces problèmes seront aggravés par l’attitude non coopérative
de ses pseudo-alliés du P.C.F. qui n’auront de cesse de susciter
revendications, grèves et mouvements divers propres à
lui rendre la situation impossible et à démontrer par
cela même son incapacité à occuper le poste auquel
l’aura porté une élection démocratique.
Alors, amis lecteurs et électeurs, que conclure ?
Qu’il serait temps de prendre conscience de la chance inouïe donnée
par les progrès techniques à l’humanité et d’aider
tous ceux qui, comme les amis de J. Duboin, se battent depuis un demi-siècle
pour lui permettre de la saisir.
« Ce qui est techniquement possible doit l’être
financièrement. »
Jacques DUBOIN
Un grand hebdomadaire (1) se livre à quelques réflexions sur différents sujets cueillis à diverses sources concernant les questions agricoles, les possibilités énergétiques, les inégalités économiques.
*
LA TERRE EST ASSEZ GRANDE
Roger Revelle, de l’Université Harvard, a calculé que
la superficie totale des terres arables dans le monde (les surfaces
des terres donnant plusieurs récoltes par an étant affectées
d’un coefficient) était environ de 4,1 milliards d’hectares.
Or, actuellement, moins de la moitié de cette superficie est
utilisée chaque année. Les terres disponibles pour l’agriculture
sont donc abondantes, sous réserve de disposer des capitaux nécessaires
à leur mise en valeur (2).
Donc, sans capitaux, les terres susceptibles d’être exploitées
pour le bien de l’humanité, resteront en friche. Dans le système
économique actuel, tout doit être rentable. Il est illusoire
et même honteusement hypocrite de vouloir supprimer la faim dans
le monde alors que la nécessité de rentabilité
ne le permet point et c’est bien là, le frein ! Il faut
donc sortir de ce système qui transforme les possibilités
d’abondance en ce que nous appelons la rareté, laquelle maintient
la misère et non la satisfaction des besoins élémentaires,
pour beaucoup d’humains dans le monde entier.
*
ENERGIES RENOUVELABLES
La conférence des Nations Unies sur les sources nouvelles et
renouvelables de l’énergie aura lieu à Nairobi en août
1981. Parmi les énergies étudiées : l’énergie
solaire, géothermique, éolienne ; l’énergie
des marées, du bois, du charbon, de l’eau...
Mais une fois encore, la question de rentabilité limitera les
ardeurs des différents groupes d’experts chargés de confronter
leurs conclusions.
*
LA POLITIQUE DES FAIBLES
Le dialogue Nord-Sud et la réduction des inégalités
(3) est un ensemble d’études et de recherches entreprises par
le Council on Foreign Relations. Cet ouvrage se compose de deux essais
complémentaires portant l’un et l’autre sur le problème
posé par l’accroissement de l’extrême pauvreté dans
les pays en développement.
La première étude de Howard Wrigging, plus politique,
analyse les stratégies que les pays en voie de développement
utilisent généralement pour retirer des avantages politiques
et économiques de leurs négociations avec les pays développés.
C’est la politique des faibles... Toutes les approches nouvelles que
propose Howard Wrigging donnent une priorité absolue à
la satisfaction des besoins élémentaires.
La deuxième étude, plus économique, est de Gunnar
Adler Karlson... L’auteur souligne avec force qu’accroître les
dimensions du « gâteau » économique
sans éliminer les inégalités politiques et socio-économiques
est un leurre.
*
Nous n’avons jamais dit le contraire !
(1) « Le Monde Dimanche » 14-12-80.
(2) C’est nous qui soulignons.
(3) Nous pensons : suppression des inégalités.
A l’exploitation de l’homme par l’homme, l’esclavagisme japonais préfère
« l’esclave machine ». Au Japon l’utopie d’hier,
l’usine sans ouvrier, devient la réalité d’aujourd’hui,
a constaté Poniatowski, au cours de sa récente enquête,
où il relate avoir vu une usine d’automobiles entièrement
automatisée, sans aucun ouvrier*. Ton esclavage prend fin, travailleur,
mais de Toyota, plus un maravédis tu n’auras.
Sous la poussée technique le Monde change de bases, il devient
crucial d’accoucher de bases résolument sociales.
Soit, le Japon est aux antipodes, mais ses voitures son mobiles et roulent
sur nos routes. Fiat automatise, Général Motors automatise
; que demain, l’industrie automobile française, acculée
par la concurrence, se modernise par l’automatisation et nous voilà
non plus avec deux millions de chômeurs, mais avec quatre, huit,
seize !
La solution réside cependant dans sa contradiction même.
Un sauveur nous est arrivé en la personne de l’économiste
Alfred Sauvy. Celui-ci professe que les profits réalisés
par l’économie de main-d’oeuvre peuvent être réutilisés
par l’embauche d’un domestique supplémentaire. C’est donc très
simple : transformons nos x millions de métallos conscients
et organisés, atteints du virus de la paresse, en x millions
de « supplémentaires » à gilet rayé,
que nous doterons d’une brosse à reluire pure soie de porc, made
in « Hermès », à la place de leur
clef à molette !
Alfred Sauvy aura alors bien mérité de l’altière
classe ouvrière, tandis que les Japonais, barbares à l’imagination
fertile, pourront à l’aide d’aménagements financiers,
se constituer un Revenu Social et regarder leur outillage travailler
à leur place.
* Voir G.R. n° 786.
« LA guerre économique, ouverte verte au nom du libéralisme,
n’éventre pas les maisons comme les obus de la guerre militaire,
mais elle broie également des êtres de chair et de sang.
Ils défilent en criant « ASSASSINS » et « DU
TRAVAIL ». Les travailleurs en appellent de la sentence qui
leur est infligée. Sommes-nous du bétail pour être
condamnés à la transhumance, afin de trouver une maigre
pâture ? interroge le maire d’une commune de la région
de Denain, dans « F.O. magazine ».
Des gens titrés, compétents, haut placés, ne perdent
aucune occasion de rappeler que nous sommes en état de guerre
économique appelée à s’exacerber.
Vouloir créer des emplois, alors qu’à l’aube du micro-processeur,
les techniciens et les ingénieurs par leurs innovations technologiques,
s’acharnent à en réduire le nombre, conduit à une
politique de fuite en avant et représente une monumentale contradiction
qui devrait être unanimement perçue.
Le droit au travail est, dans ce contexte, devenu une exigence périmée
en raison de la raréfaction croissante du travail. Pourquoi continuer
à revendiquer l’exercice de ce droit, dans un système
dont la nature des moyens mis en oeuvre pour en assurer l’existence
et la pérennité vise, au contraire, à la faire
disparaître ? Il n’est que de regarder, d’écouter
et de réfléchir. Grâce à un ensemble de mécanismes
coercitifs, puissamment et savamment établi, entretenu et développé,
le mouvement syndical, divisé, déprimé et «
concurrencé » est de moins en moins en mesure de le
maîtriser et de le contenir. Il devrait plutôt nous inciter
à en tirer des conséquences originales Ainsi le chômage
ne serait pas le fruit amer des caprices d’un hasard fantaisiste ou
malintentionné.
A l’évidence et de plus en plus, les uns travaillent trop, les
autres pas assez. Une diminution progressive et une meilleure répartition
du temps d’occupation s’imposent chaque jour davantage. Une solution
satisfaisante ne saurait être trouvée - si elle existait
vraiment, elle le serait déjà - qui ne prendrait pas en
compte cette vérité qui relève de la simple logique,
mais dont notre régime, pour des impératifs bien connus,
ne peut fondamentalement s’accommoder.
D’où la nécessité de le transformer, en levant
ce blocage et cette contradiction. Et de développer des attitudes
nouvelles à l’égard de l’emploi, et, par corollaire, en
faveur du travail, qu’il devient urgent de désacraliser pour
le confort moral des chômeurs.
Cela requiert, bien évidemment, dans nos pays développés,
un mode de répartition des ressources et des richesses produites,
différent de celui résultant de l’application des règles
économiques et financières traditionnelles. Un mode qui
ne soit plus soumis obligatoirement à la dure loi du rapport
TRAVAIL-ARGENT, bien atténuée, il est vrai depuis la naissance
lointaine de l’antique formule « qui ne travaille pas ne
mange pas ».
D’où une dissociation nécessaire entre travail et salaire,
par l’instauration d’une économie distributive, seule capable
de nous conduire vers une solution logique et rationnelle de nos problèmes.
Elle ne serait pas le moins du monde incompatible - bien au contraire
- avec les nécessités impérieuses d’économies
généralisées et de croissance ralentie qui, pour
la sécurité des générations à venir,
se profilent à l’horizon des prochaines décennies. Elle
permettrait, en outre, de se soustraire aux exigences insupportables
de notre économie concurrentielle prônée par les
puissants, libres de détruire en toute légalité,
l’entreprise du voisin et de priver d’emploi ses salariés, redoutée
par les humbles qui voudraient bien pouvoir s’affranchir ; honnie
par les victimes de la lutte impitoyable que se livrent les nations
en mal d’énergies mais tenaillées par la croissance et
obsédées par les coûts.
Et le progrès technique serait enfin mis au service de l’homme
et non l’inverse !
UTOPIE ! pensera-t-on. « C’est par les portes de l’UTOPIE
qu’on entre dans les réalités bienfaisantes »*.
Lorsqu’on se trouve engagé dans une mauvaise voie, plus on avance,
dit-on, plus on s’égare. Sans doute est-ce la raison pour laquelle
le tunnel est en train de se muer en
labyrinthe, à l’intérieur duquel existent mille et une
manières de tourner en rond et de marcher de travers ?
Le chômage, phénomène angoissant, inéluctable
tant que les causes qui le favorisent progressent, est donc destiné
à s’accroître inexorablement, avec les innombrables conséquences
graves qui en découlent ?
Vouloir soigner nos maux en accélérant la cadence, par
l’intensification et le durcissement des moyens qui les engendrent,
si cela permet, provisoirement, le report d’inévitables décisions,
ne pourra, en aucune façon, constituer le remède, quelles
que puissent être la compétence et l’habileté du
praticien chargé de l’administrer.
Thérapeutique étonnante et paradoxale ! Qui pourrait
ne pas en convenir ?
* André GIDE.